Devoir de Philosophie

Vous commenterez cette opinion ·de Montherlant: o Une pièce, de théâtre ne m'intéresse que si l'action extérieure réduite à la...

Extrait du document

« Vous commenterez cette opinion ·de Montherlant: o Une pièce, de théâtre ne m'intéresse que si l'action extérieure réduite à la plus grande simplicité n'est .qu'un prétexte à l'exploration de l'homme.

o Conseils. L'énoncé laisse une grande liber-té au candidat en l'invitant, sans plus de précision, à � commenter & la phrase de Montherlant. Cette liberté crée cependant phis de devoirs que de droits.

Il convient en effet d'.une part d'expliquer les notions abordées (action extérièure, simplicité, exploration de l'homme) et de repérer les différents types de dramaturgie auxquels elles renvoient; d'autre part de met_tre �n.Iumière les arguments qui permettent de préférer une conception plutôt qu'une âutre, en faisant appel à des raisons esthétiques générales plutôt qu'au goût individuel. Ce type �e sujet entraîne plus que d'autres au développement d'idées abstraites, qu'il fau! s'iflterdire absol:ument.

Certes il est plus que permis, nécessaire, de recoui'ir à l'exposé de grands principes; mais ce dernier ne devra jamais être fait sans l'aide d'exemples précis, choisis soigneusement et commentés. Lectures. MoNT,HERi.ANT�:ThëâJre (contient les Notesjie ihéâtre) Pléiade. Huoo : Préfaces de Cromwell {lt Ruy Blas.

"" STi,;:NDHAL : Rac_in,e et Shakespeare. ToucHARD = ])io!!J}sos,, L'amateu{ d,tlhéât_re (Seqil). BRECHT.: Petit otganon sur le' théâtie (l'Arclie). -Document. ,J!t·< Trois espèces dJ�:'�pectateurs.

cô_mposent ce« qµ'.on est convenu d'appeler le.

pub,ij_c,�.ptemiète�e.1,1t les fommes;� deuxi�mement les ·penseurs; troisièmement la fo.1�I� proprement,,diter.Ce que la foui� demandi: pr.esque exclusivement à Fœùvre d'ramàti_que, c'est de !'.action; ce que les femmes y :Veulent avant tout, .c'est de la passion;- ce•qù'y cherchent .plµs sj::iécialement _les pe_nseurs"c.e sont des car�ctères.

Si.

l'on étudie attentivement ces trois classes de spectateurs, voici ce que l'on remarque: la foule est tellement amoureuse de l'actiori qu'au besoin elle fait bon marché des cara�tères et des passions.

Les femmes, que l'action int.éresse d'ailleurs, sont si absorbées par les développements de la passion qu'elles se préoccupent peu du dessin des ·caractères; quant aux penseurs, ils ont un tel goût de voir des caractères, c'est-à-dire des hommes, vivre sur la scèn�, que, tout en accueillant volontiers la ' passion comme incident naturel dans l'œuvre dramatique, ils en viennent presque à être i�portunés par l'action; Cela tient à ce que la foule dem1;1nde surtout au théâtre des sensations; Ja femme, des émotions; lt: penseur, des méditations.

Tous veulent un plaisir; ceux-ci le plaisir des yeux; celles-là le -plaisir, du cœur; les derniers, le plaisir de l'esprit.

De là, sur notre scène, trois espèces d'œuvres bien distinctes: l'une vulgaire et inférieure, les deux autres illustres et supérieures, mais qui toutes les trois satisfont un besoin: le mélodrame pour la foule; pour les femmes, la ti:agéQ,ie .qui analyse la passion; pour les penseurs, la comédie qui peint l'humanité. HuGo, Préface de Ruy· Blas. SUJET DÉVELOPPÉ Introduction S'il faut en croire les traditions scolaires et universitaires, l'étude de l'homme et de ses mystères est la fin ultime - et suprême - de la littérature.

Les .écrivains sont enrôlés bon gré mal gré dans cette quête : il semble même que le critère essentiel permettant d'introduire un auteur dans le panthéon de la littérature soit le progrès qu'il a fait accomplir à la connaissance de l'homme.

Montaigne, Pascal, Balzac, sont à,,ranger, à 'ce titre parmi.Jes tout premiers.

C'est par ce biaîs.aussi1-qu'une critique la plupart du temps moralisante s'annexe ceux qu'elle voudrait rejèter, mâis que.

la faveur du public a classés parmi les grands écrivains : elle reconnaît que, malgré leur immoralité, ils ont fait mieux connaître telle ou telle partie de la nature humaine; Baudelaire, entre autres, a dù passer par là.

Mais le théâtre a sans doute eu plus à sm.iffrir que d'autres genres Œttéraires de cette prééminenèe de l'humanisme dans les valeurs universitaires : l'étude d'une pièce de théâtre ne se résume-t-ellëpas la plupart du temps à l'èfude minùtieuse de la o psychologie :des personnages o, négligeant à la fois la construction de l'intrigue, la valeµr scénique, et ce· qui fait l'intérêt réel de la pièce pour le spectateur qui la voit représentée au lieu de la lire.

Une telle, démarche semble trop partielle pour être adoptée par un dramaturge soucieux, lui, de faire représenter sa pièce et, selon' le mot de Molière, de plaire.

II paraît donc surprenant de lire sous la plume .d1Henry de- Montherlant: o Une pièce de théâtre· ne m'intéresse que si l'action extérieure réduite à la plus grande simplicité n'est qu'un prétexte à l'exploration de l'homme.» .Ce jugement, sans doute, se pr:ésente comme une simple préférence de Montherlant, sans valeur générale.

II est cependant permis de s'interroger sur la .conception théâtrale que recouvre ce goût un peu paradoxal; car ,loin d'.exprimer une opinion isolée, Montherlant apporte sa contribution, utile'puisqu'il est lui-même un- homme de théâtre, à la controverse soulevée par les Romantiques et qui, pour paraitre dépassée, n'influence pas moins le théâtre d'aujourd'hui.

Car il est intéressant d'examiner les solûtions adoptées, de propos délibéré, par certains dramaturges modernes, au moment précisément où l'abolition des contraintes qui !l'exiirçaient jadis sur les créateurs leur laisse toute liberté d'écrire· des pièces de théâtre selon leur cœur. Développement La citation de Montherlant demande d'abord à être éclairée quelque peu.

L'auteur y parle de a pièce de théâtre• sans référence à un genre particulier.

II ne s'agit pas là d'une concession à la coutume contemporaine qui est de ne pas caractériser d'emblée les œuvres dramatiques: Montherlant lui­ même appelle a drame• plusieurs de ses pièces, La Reine morte par exemple, et o comédie• Un incompris.

Sa volonté est donc de réunir dans le même jugement tous les genres dramatiques qu'il prétend apprécier selon les mêmes critères: l'o exploration de l'homme·• qui s'y accomplit.

Ce terme est suffisamment vague pour recouvrir à -la fois l'analyse d'un caractère ou d'un type (l'avare, l'atrabilaire amoureux) et l'étude psychologique- d'un individu (Rodrigue, Andromaque).

Enfin il faut expliquer « la simplicité de l'action extérieure• qui renvoie à la simplicité de l'intrigue telle qu'elle était définie au xvue siècle; mais, par ce mot imagé et expressif, Montherlant oppose apparemment l'exté­ rieur, c'est-à-dire l'aspect scénique et dramatique de la, pièce, aux ressorts purement humains du personnage.

On voit qu'il se veut par là résolument classique, faisant même référencEf.à l'homme.­ éternel sorti de son milieu et de son époque. Cette attitude, :nous l'avons dit, est paradoxale en ce qu'elle semble .élire pour modèle une époque très Isolée de notre littérature car le classicisme, dans l'histoire du théâtre, n'est qu'un bref intermède.

dans un courant ininterrompu où, pour paraphraser Stendhal, Shakespeare l'emporte nettement sur Racine.

Au xvue siècle même, le théâtre classique n'a jamais fait disparaitre des formes b_eaucoup plus populaires de spectacle où.

la psychologie des personnages est plus que sommaire : la pièce à machines et, surtout, la tragi-comédie; là triomphent les combats sur scène, les déguisements, les enlèvements, les ·quiproquos, les reconnaissances; en un mot, tout est dans l'intrigue ·et ni les bienséances ni la vraisemblance ne sont respectées.

Qu'on rem­ place la médi9crité de Mairet ou de Scudéry par le génie d'Hugo, et c'est le drame romantique qu'on· définit ainsi à peu de choses près.

Sans doute Hugo a-t-il d'autres prétentions lorsqu'il ·compose ses drames� les préfaces de Cromwel_l et de· Ruy· Blas manifestent une volonté de synthèse entre la comédie et la tragédie d'une part, entre l'action, le& caractères et les passions d'autre part.

Cependant, soit que l'auteur y ait été contraint par des.

nécessités dramatiqu·es, soit que son propre tempérament l'ait porté plus volontiers vers, l'action que vers l'exploration de l'homme, ces synthèses qui, en théorie du moins, devaient être équitables, se font aux dépens de la psychologie des personnages. Le-théâtre classique présente des héros certes-actifs, mais au- sein d'une- crise à laquelle ils qe peuvent en aucune façon imposer une issue parTaction; la pièce dépeint alors leurs hésitations qui sont d'autant plus tragiques que la durée des événements est limitée à vingt-quatre heures.

Le drame romantique, au contraire dépeint le héros dans l'action: ainsi HernQ[li pourrait facilel!lent être qualifié de pièce d'auentures; les ·cinq actes présentent le héros dans différente!!_ situations;,il y manifeste sa bravoure, son sens de l'honneur, son amour; mais ces traits· sont évidents des· la première scène et n'évoluent pas au cours de la pièce, pas plus q�e le héros ne se tro�ve confronté à un di�emme, -où s'approfondir�it la dimension humaine de son personnage: l'action est son se'ul moyen d'expression.

On voit donc que c'est la volonté même d'introduire l'action sur le théâtre qui diminue l'épaisseur psychologique des personnages, et par là même.

l'intérêt des spectateur§..soucieux avant tout de l' t exploration de I'h.omme ». La richesse romantique, richesse en couleurs; en décors, en costumes, en personnages (ce qui diminue d'àutant l'attention que l'auteur peut porter à chacun d'eux) se caractérise plus par le foisonnement que par la profondeur : elle trouve son apogée �veè le théâtre rle Rostand, remarquable agencement de scènes de genre, de reconstitutions historiques, de grands déploiements de foule, mais: dans.

lesquels la œnnais.sance· qu'a le Sj)ectate.ur de l'âme des personnages est �xtrêmement superiicie11e. Il reste que Montherlant formule un' goùt personnel, non un jugement général; peut-on aujourd'hui être intéressé par un théâtre qui repose uniquement sur l'a:cfion extérieure? Cette conception dramatique, semble-t-il; s'expliquait assez bien à une époque où le théâtre, qui ne subissait la concurrence d'aucun genre artistique, jouait, par force, le rôle de spectacle populaire. Aujourd'hui, ce rôle est dévolu à d'autres moyens de COf!Imunica­ tion, le cinéma et la télévision· en, particulier.

Ces derniers disposent de m(!yens bieri supérieurs -dans le domaine- du spectaculaire; scènes tournées,en (jXtérieur, scènes en mouvement,. _e{(e� spéciaux, figuration, cascade, ,co_stumes-.

On peut dire que les· films de cape et d'épée et les westerns ont remplacé de nos jours le théâtre d'acfü:inr .et.

c'est justice, car,.

si l'on cherche seulement à voir représenter.des faits, pourquoi ne pas préférer le moyen le plus fidèle de.reproduction de· ces faits?· II ne faut pas négliger cépendarit la fascination qu'exerce la scène sur le _pub1ic.

Saturés de cinéma, -dont ils connaissent les .facilités - u11-plarr peut 'être recommencé de nombreus�s fois et.

dont la réalisation définitive interdit l'êmofion du « direct » des spectateurs que le théâtre n'attirerait pas en d'autres circons­ tances sont ·impressionnés de voir évoluer.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓