( 319e) les p lus s avants e t l es p lus h abiles d e n os c oncitoyens n e p euvent c ommuniquer l eur v ertu 37 e t l eur h abileté a ux a utres. S ans a ller p lus loin, P ériclès a f ort b ien f ait d 'apprendre à ses d eux fils ici présents t out c e q ui d épend d es m aîtres; mais, p our c e q u'il sait, il n e l e l eur a pprend p oint, e t n e les envoie p as c hez d 'autres p our l 'apprendre ( 320a); s emblables à ces a nimaux c onsacrés a ux d ieux, à q ui o n laisse la l iberté d e p aître o ù ils v eulent, ils e rrent à d roite e t à g auche p our v oir si, d 'eux-mêmes, ils n e t omberont p oint p ar b onheur s ur l a v ertu. V eux-tu u n a utre e xemple? L e m ême P ériclès, c hargé d e l a tutelle d e C linias, f rère c adet d 'Alcibiade q ue voici, d e p eur q ue c e d ernier n e c orrompît s on j eune f rère, p rit le p arti d e l es s éparer; il m it C linias c hez A riphon 38 , e t p rit s oin l ui-même d e l 'élever e t d e l 'instruire. Mais q u' arriva-t-il? Clinias n e f ut p as l à six m ois ( 3 20b) q ue P ériclès, n e s achant q u'en f aire, le r endit à Alcibiade.Je p ourrais e n c iter q uantité d 'autres, qui, avec b eaucoup d e m érite, n 'ont j amais p u r endre m eilleurs n i l eurs p ropres e nfants n i les e nfants d 'autrui. Voilà les motifs q ui m e f ont c roire, P rotagoras, q ue l a v ertu n e p eut ê tre e nseignée; m ais aussi, q uand j e t 'entends d ire le c ontraire, j e suis é branlé, e t j e c ommence à c roire q ue t u dis vrai, p ersuadé q ue j e suis, q ue t u es h omme d 'une g rande e xpérience, a yant a ppris b eaucoup d e c hoses d es a utres, e t e n a yant t rouvé b eaucoup p ar t oi-même. Si t u p eux d onc n ous d émontrer c lairement (320c) q ue l a v ertu est d e n ature à ê tre e nseignée, n e n ous c ache p as u n si g rand trésor, e t fais-nous e n p art, j e t 'en c onjure. - Je n e te le refuserai pas, Socrate, r eprit Protagoras, m ais choisis : veux-tu q ue, c omme u n v ieillard q ui p arle à d es j eunes g ens, j e te fasse c ette d émonstration p ar l e moyen d 'un mythe, o u b ien q ue j 'emploie le détail d 'un d iscours r aisonné? À ces mots, la p lupart d e c eux q ui é taient l à assis se s ont é criés q ue c 'était à lui d e c hoisir c omme il l 'entendait. - Puisque c ela est, dit-il, j e crois q ue le mythe sera plus agréable. Il f ut u n t emps o ù les d ieux e xistaient, e t o ù il n 'y avait p oint e ncore d 'êtres m ortels. (320d) L orsque l e t emps d e l eur e xistence f ut d écidé p ar l e destin, les dieux les f ormèrent d ans le sein d e l a t erre, les c omposant d e t erre, d e feu, e t d es autres éléments q ui se m êlent avec le f eu e t l a terre. Q uand ils f urent s ur le p oint d e les faire p araître à l a lumière, ils chargèrent P rométhée e t É piméthée 39 d u s oin d e les o rner, e t d e y ourvoir c hacun d 'eux d es f acultés convenables. E piméthée c onjura s on f rère d e lui laisser f aire c ette d istribution. - Quand j e l 'aurai faite, dit-il, t u e xamineras si e lle est b onne. P rométhée y a yant consenti, il se m et à faire le p artage : (320e) il d onne a ux u ns l a f orce sans l a vitesse, c ompense l a faiblesse d es a utres p ar l 'agilité; a rme ceux-ci et, à ceux-là q u'il laisse sans d éfense, il r éserve q uelque a utre m oyen d 'assurer l eur s urvie; les petits reçoivent des ailes, o u u ne d emeure s outerraine; e t c eux q ui o nt l a g randeur e n p artage ( 32la), il les m et e n s ûreté p ar l eur g randeur m ême. Il suit le m ême p lan e t l a m ême é quité d ans l e reste d e l a d istribution, p our q u'aucune e spèce n e s oit d étruite. A près avoir pris les m esures n écessaires p our e mpêcher l eur destruction m utuelle, il s 'occupe d es moyens d e les faire vivre sous les diverses t empératures, e n les r evêtant d 'un p oil épais e t d 'une p eau f erme, q ui p ussent les d éfendre c ontre le froid e t l a chaleur, e t l eur t inssent l ieu à c hacun d e c ouvertures naturelles, q uand ils se r etireraient p our d ormir. D e plus, il l eur m et s ous les pieds, ( 32lb) a ux u ns u ne c orne, a ux a utres d es sabots e t d es p eaux très épaisses, d épourvues d e sang. Il l eur f ournit e nsuite d es a liments d e d ifférente e spèce, a ux u ns l 'herbe d e l a t erre, a ux a utres les fruits des arbres, à d 'autres d es racines. La n ourriture q u'il d estina à q uelques-uns f ut l a s ubstance m ême d es autres a nimaux. Mais il f it e n s orte q ue ces bêtes carnassières se multipliassent p eu, e t a ttacha la fécondité à c elles q ui d evaient l eur s ervir d e p âture, a fin q ue l eur e spèce se conservât. C ependant, c omme É piméthée n 'était p as f ort s age ( 321c), il n e s 'aperçut p as q u'il a vait é puisé t outes les facultés e n f aveur des êtres privés d e raison. L 'espèce h umaine r estait d onc d épourvue d e t out, e t il n e savait q uel p arti p rendre à s on é gard. Dans c et e mbarras, P rométhée s urvint p our j eter u n c oup d 'oeil s ur l a d istribution. Il trouva q ue les a utres a nimaux é taient p artagés avec b eaucoup d e sagesse, mais q ue l 'homme é tait n u, sans chaussures, sans vêtement, sans défense. C ependant le j our marqué a pprochait, o ù l 'homme devait sortir d e t erre e t p araître à l a l umière. P rométhée, f ort i ncertain d e l a manière d ont il p ourvoirait à la sûreté d e l 'homme ( 32ld), p rit le p arti d e d érober à H éphaïstos e t à A théna le savoir t echnique e t le f eu : c ar s ans le feu la connaissance des techniques serait impossible e t i nutile; il e n f it p résent à l 'homme. Ainsi n otre e spèce r eçut l e savoir nécessaire a u s outien d e s a vie; mais elle n 'eut p oint l a science p olitique, c ar e lle é tait c hez Zeus, e t il n 'était p as e ncore a u p ouvoir d e P rométhée d 'entrer d ans l a citadelle o ù s éjournait Zeus, e t d evant l aquelle v eillaient d es g ardes r edoutables. Il se glisse d onc e n c achette ( 32le) d ans l 'atelier o ù A théna e t H éphaïstos a imaient à t ravailler e n c ommun, d érobe l a technique d 'Héphaïstos, q ui s 'exerce p ar l e feu, ainsi q ue les a utres t echniques p ropres à A théna, e t les d onne à l 'homme : v oilà c omment l 'homme a, d epuis lors, les moyens d e subsister. P rométhée, à ce