Devoir de Philosophie

Argentine

Publié le 11/04/2013

Extrait du document

argentine
1 PRÉSENTATION

Argentine, en espagnol Argentina, pays d’Amérique du Sud, qui s’étend dans la partie méridionale du sous-continent, des Andes à l’océan Atlantique. Sa capitale est Buenos Aires.

L’Argentine est limitée au nord par la Bolivie et le Paraguay, à l’est par le Brésil, l’Uruguay et l’océan Atlantique, et à l’ouest par le Chili. Son territoire inclut la Terre de Feu (Tierra del Fuego), qui comprend la moitié orientale de la Grande île de la Terre de Feu et plusieurs îles contiguës, dont l’île des États. Le pays revendique, par ailleurs, les îles Malouines et plusieurs îles de l’Atlantique Sud.

2 MILIEU NATUREL

L’Argentine occupe la majeure partie du sud du continent américain. Par sa superficie, 2 780 400 km², elle est le deuxième pays d’Amérique du Sud, après le Brésil. Sa forme rappelle celle d’un triangle, sa base étant située au nord et son sommet au cap Dungeness, l’extrémité sud-est du territoire continental. Le pays, qui s’étend sur 3 700 km du nord au sud, et sur plus de 1 300 km d’est en ouest, présente un relief très varié : aux grandes plaines de l’est s’opposent les chaînes montagneuses de l’ouest et les plateaux rocheux du sud.

2.1 Relief et hydrographie

La partie occidentale du pays est bordée, du nord au sud, par la cordillère des Andes. Les Andes patagoniennes, qui forment une frontière naturelle entre l’Argentine et le Chili, sont l’une des chaînes les plus basses de cette cordillère, avec des sommets qui dépassent rarement 3 600 m d’altitude. Depuis l’extrémité septentrionale de cette chaîne jusqu’à la frontière bolivienne, la partie occidentale de l’Argentine est occupée par la principale cordillère andine, qui compte plusieurs sommets importants, parmi lesquels l’Aconcagua, volcan qui culmine à 6 960 m (plus haut sommet du continent américain) et le Tupungato (6 635 m). Plusieurs chaînes et contreforts parallèles des Andes s’enfoncent profondément dans le nord-ouest de l’Argentine. Outre la cordillère des Andes, l’autre massif montagneux du pays est la sierra de Córdoba, au centre du pays ; son point culminant est le Champaquí (2 850 m).

À l’est des Andes, de la frontière du Paraguay au río Colorado, les plaines et les plateaux occupent l’essentiel du territoire argentin (1 000 000 de km2). Le nord de cette zone est constitué d’une steppe semi-aride : le Chaco. Au sud, la Pampa, une immense plaine herbeuse, couvre à elle seule 20 p. 100 de la superficie du pays. Réputée pour sa fertilité, elle abrite les régions agricoles les plus riches d’Argentine.

Au sud de la Pampa, la Patagonie s’étend sur 670 000 km² ; c’est une zone de bas plateaux, aride et caillouteuse.

Les principaux cours d’eau argentins sont le Paraná, qui traverse la région centre-nord du pays ; le río Uruguay, le río Paraguay, qui est le principal affluent du río Paraná ; et le río de la Plata, un grand estuaire formé par la confluence du Paraná et de l’Uruguay. Les autres grands cours d’eau sont le río Colorado, le Salado et le río Negro. Dans la zone située entre le Salado et le río Colorado, et dans la région du Chaco, certains cours d’eau se déversent dans des marais et marécages et s’enfouissent sous terre. Il existe aussi de nombreux lacs, notamment dans les avant monts des Andes patagoniennes. Les plus connus se trouvent aux environs de la station touristique de Bariloche.

2.2 Climat

À la variété du relief argentin répond une grande diversité climatique : climat tempéré dans la Pampa et sur la majeure partie du territoire (16 °C de température moyenne dans la région de Buenos Aires) ; froid et humide en Patagonie et dans la Terre de Feu (9 °C en été à Ushuaia) ; chaud et très pluvieux au nord (152 cm de précipitations annuelles dans la forêt de Misiones) ; enfin, chaud et sec, de type subtropical, dans le Chaco. Du nord-ouest au sud-est, l’Argentine est traversée par une vaste zone de sécheresse : moins de 20 mm de précipitations annuelles sur la côte de la Patagonie.

2.3 Faune et flore

De la végétation tropicale dans les forêts septentrionales, en passant par les broussailles de Patagonie, la végétation argentine varie beaucoup selon les régions. Dans la forêt de Misiones, la flore, de type tropical, est composée d’arbres tels que le palmier, le bois de rose, le gaïac, le jacaranda et le quebracho rouge (d’où l’on extrait le tanin). Au bas des versants orientaux des Andes et dans la Terre de Feu, on trouve de magnifiques forêts de conifères (sapins, cyprès, cèdres). Dans la Pampa, les arbres sont plus rares, même si les Argentins ont tenté d’importer des espèces résistant à la sécheresse, comme l’eucalyptus, le sycomore et l’acacia. En Patagonie, seuls des buissons et quelques graminées résistent à la rudesse du climat.

Dans le Nord, la faune est variée et abondante. Parmi les mammifères qui vivent dans cette région, on trouve diverses espèces de singes, des jaguars, des pumas, des ocelots, des fourmiliers, des tapirs, des pécaris et des ratons laveurs. Le flamant, le colibri (ou oiseau-mouche) et le perroquet sont également présents. La Pampa est peuplée de tatous, de renards, de martres, de chats sauvages, de lièvres, de cerfs, d’autruches d’Amérique ou de nandous, de faucons, de hérons et de pluviers. Certains de ces animaux vivent aussi en Patagonie. Les régions froides des Andes sont peuplées de lamas, de guanacos, de vigognes, d’alpagas et de condors. Les eaux côtières, les lacs et les cours d’eau sont très poissonneux.

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Caractéristiques démographiques

En 2008, la population argentine était estimée à 40 677 348 habitants, soit une densité de population d’environ 15 habitants au km², l’une des plus faibles au monde. Certaines zones du pays sont, cependant, très peuplées : ainsi, un Argentin sur trois habite Buenos Aires ou sa périphérie. 90,6 %de la population est urbaine.

Environ 85 % de la population est d’origine européenne. L’Argentine se distingue en effet des autres pays d’Amérique latine par la faible proportion de métis (issus du croisement d’Européens et d’Amérindiens) au sein de sa population. L’immigration européenne (Espagnols et Italiens, surtout), qui date, pour les premières vagues d’arrivants, du milieu du xixe siècle, continue d’être encouragée par le gouvernement.

3.2 Divisions administratives et villes principales

L’Argentine est composée de 23 provinces (la Terre de Feu, autrefois territoire national, est devenue une province en 1993) et du district fédéral autonome de Buenos Aires.

Les provinces sont regroupées en cinq régions principales : le Littoral (Buenos-Aires — à l’exclusion de la ville elle-même —, Chaco, Corrientes, Entre Ríos, Formosa, Misiones et Santa Fe), le Nord (Jujuy, Salta, Santiago del Estero et Tucumán), le Centre (Córdoba, la Pampa et San Luis), les Andes (Catamarca, La Rioja, Mendoza, Neuquén et San Juan) et la Patagonie (Chubut, Río Negro et Santa Cruz).

Outre la capitale, Buenos Aires (qui demeure, malgré le système fédéral, le centre de l’activité économique du pays), les autres grandes villes sont : Córdoba, un important pôle industriel et universitaire ; Rosario, un port fluvial installé sur la rive droite du Paraná ; La Plata, capitale de la province de Buenos Aires ; Mar del Plata, la plus grande station balnéaire du pays, à l’embouchure du río de la Plata ; San Miguel de Tucumán, une ville essentiellement industrielle ; Salta, réputée pour son architecture coloniale ; et Mendoza, sur le contrefort oriental des Andes, capitale d’une importante région agricole et vinicole.

3.3 Langues et religions

95 % des Argentins parlent l’espagnol, la langue officielle du pays. Une infime partie de la population utilise l’italien et plusieurs langues amérindiennes.

Les catholiques représentent plus de 90 % de la population et les protestants, 2 %. Le judaïsme (2 %) et plusieurs autres religions minoritaires sont également pratiqués. La liberté de culte est garantie, l’Église et l’État sont officiellement séparés.

3.4 Éducation

Avec un taux d’environ 97,2 % en (2005), l’Argentine possède l’un des taux d’alphabétisation les plus élevés de l’Amérique latine. L’école est gratuite et obligatoire de six à quatorze ans, mais même au-delà, le taux de scolarisation reste assez élevé.

L’Argentine dispose d’une vingtaine d’universités nationales (la plus importante, celle de Buenos Aires, date de 1821), et de nombreux établissements d’enseignement privé.

3.5 Institutions et vie politique
3.5.1 Pouvoir exécutif

L’Argentine est une république présidentielle, régie par la Constitution de 1853 (révisée en 1994) et reposant sur une organisation fédérale. Le président est élu au suffrage universel pour quatre ans, en même temps que le vice-président. Il est à la fois le chef de l’État et le chef du gouvernement. Son mandat est renouvelable une fois.

La Constitution de 1853 permet la suspension du régime parlementaire et des libertés civiles si le président considère qu’une catastrophe nationale nécessite un état de siège — disposition souvent appliquée au cours de l’histoire chaotique du pays.

3.5.2 Pouvoir législatif

Le pouvoir législatif appartient au Congrès ; celui-ci est divisé en deux assemblées, élues au suffrage universel direct : le Sénat compte 72 membres élus pour un mandat de six ans, le tiers des sièges étant renouvelable tous les deux ans ; la Chambre des députés compte 257 membres élus pour quatre ans, la moitié des sièges étant renouvelable tous les deux ans.

Les provinces argentines élisent leur propre gouverneur et leur corps législatif.

3.5.3 Pouvoir judiciaire

Le pouvoir judiciaire est réparti entre les tribunaux fédéraux, qui comprennent la Cour suprême — dont les membres sont nommés par le président, avec l’approbation du Sénat —, les cours d’appel et, au niveau local, des tribunaux de district et des tribunaux territoriaux.

3.5.4 Partis politiques

Marqué par un bipartisme relatif, l’échiquier politique argentin a été dominé depuis 1945 par les péronistes du Parti justicialiste (PJ) et par l’Union civique radicale (UCR), formation modérée de centre gauche. En 2005, le PJ se scinde en deux courants, le premier mené par l’ancien président Eduardo Duhalde et l’autre par le président alors en exercice Néstor Kirchner, qui crée le Front pour la victoire (Frente para la victoria, FV). Alors que l’UCR est très affaiblie au lendemain de l’élection présidentielle de 2003 (2,3 % des suffrages), la scène politique apparaît dominée par un péronisme en mutation, entouré de quelques partis satellites, dont, au centre droit, le Parti pour une République d’opportunités (PRO) et, à gauche, l’Affirmation pour une République égalitaire (ARI) et le Parti socialiste.

3.5.5 Défense nationale

L’armée argentine est l’une des plus modernes et des mieux équipées d’Amérique latine. Le service militaire, d’une durée maximale de quatorze mois, est obligatoire pour tous les hommes entre vingt et quarante-cinq ans. L’armée de terre dispose de 41 400hommes, la marine de 17 500et l’armée de l’air de 12 500hommes (2004).

4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités

L’économie argentine repose traditionnellement sur la production de produits agricoles et sur l’élevage du bétail, deux domaines dans lesquels l’Argentine se classait parmi les premiers producteurs mondiaux avant la Seconde Guerre mondiale déjà. Ayant commencé au début du xxe siècle, l’industrialisation de l’Argentine a été favorisée à partir de 1946 par le président Perón. L’Argentine reste aujourd’hui l’une des premières régions productrices de bovins et de céréales au monde ; le conditionnement de la viande et la minoterie constituent les principales industries du pays.

Dans les années 1990, le programme de privatisations du président Menem a entraîné une forte hausse du chômage. Enfoncée dans la récession à partir de 1998, l’Argentine s’est retrouvée en situation de faillite en 2001. Contre toute attente, grâce notamment à une dévaluation du peso, la croissance est rapidement revenue (8,7 % dès 2003), grâce à une politique économique résolument interventionniste. Un tiers de la population vit toutefois toujours sous le seuil de pauvreté à la fin des années 2000. En 2006, le produit intérieur brut (PIB) de l’Argentine s’élevait à 214 milliards de dollars, soit 5 474,50 dollars par habitant.

4.2 Agriculture

L’agriculture, traditionnellement très importante, employait 9 % des actifs et contribuait en 2006 à 8,4 % du PIB. Le secteur, de plus en plus diversifié, est suffisamment riche pour fournir les denrées nécessaires à la consommation intérieure et il assure les trois quarts de la valeur des exportations. Un dynamisme d’autant plus remarquable que 10,6 % seulement de la superficie du pays sont arables. L’essentiel de la production agricole (blé, maïs, soja, sorgho, tournesol, arachide) est fourni par la région très fertile de la Pampa. Les zones irriguées, depuis le río Negro jusqu’à la province de Jujuy, au nord, en passant par Mendoza, San Juan et Tucumán, sont de précieuses régions productrices de fruits, de légumes, de canne à sucre, de coton et de vignes. L’Argentine se place d’ailleurs au quatrième rang mondial pour la production de vins. Elle occupe également la troisième place pour la production de soja, le cinquième rang mondial pour le maïs, les bovins (l’élevage occupe une place prédominante dans le secteur agricole) et la production de laine (le cheptel ovin est élevé essentiellement en Patagonie). Après la crise du début des années 2000, le soja est devenu la première culture du pays, occupant la moitié des terres cultivées. 90 % de la production sont constitués par du soja transgénique.

L’Argentine, qui a été longtemps le premier exportateur mondial de viande crue, développe de plus en plus les exportations de viande cuite et de viande en boîte.

Les bois les plus exploités sont l’orme, le saule, pour la production de cellulose, le quebracho blanc, utilisé comme combustible, le quebracho rouge, qui fournit du tanin, et le cèdre, pour l’industrie du meuble. Cependant, les surfaces boisées (33 021 000 ha), situées dans des régions montagneuses, sont relativement inexploitées.

De même, le secteur de la pêche, au potentiel considérable, n’est pas encore exploité à plein régime, même si la production a augmenté régulièrement. Dans les eaux argentines, les prises de poissons ont représenté, en 2005, 933 902 t — principalement des merluches, des anchois, des maquereaux et des dorades.

4.3 Mines et industries

Le secteur secondaire occupait 23,5 % de la population active et contribuait à 35,6 % du PIB en 2006. L’exploitation minière joue un rôle assez peu important dans l’économie argentine, bien que le pays dispose d’importantes ressources en pétrole, en houille et en métaux. Le gaz naturel est également produit en quantité importante. À un degré moindre, l’or, l’argent, le cuivre, le plomb, le zinc, le fer, l’étain, le tungstène, le mica, l’uranium et la pierre à chaux sont aussi exploités.

L’industrie, très diversifiée, est concentrée autour de Buenos Aires et sur les rives du fleuve Paraná. L’industrie agroalimentaire est à la fois la plus ancienne et la plus importante du pays. Avec l’introduction du soja transgénique au début des années 2000, elle a trouvé un nouveau souffle, le pays devenant le premier exportateur mondial d’huile et de farine de soja. L’industrie textile se situe en seconde position. L’Argentine fabrique également des articles en caoutchouc, du ciment, des produits chimiques, du papier, du plastique et des dérivés du pétrole. La production d’acier se développe rapidement et les industries automobile et électronique s’implantent progressivement.

L’Argentine dispose d’importantes ressources hydroélectriques. Ainsi, dans les années 1970 et 1980, une politique de grands travaux a été mise en place pour construire des barrages (par exemple, celui de Yacireta, sur le fleuve Paraná). En 2003, 40,10 % de la production d’électricité était d’origine hydroélectrique, 8,44 % d’origine nucléaire, les 48,37 % restants étant produits dans des centrales thermiques.

4.4 Services

75,1 %des actifs argentins travaillent dans le secteur tertiaire (banques, administrations, enseignement), qui représentait 56 %du PIB en 2003.

4.5 Échanges

La monnaie argentine est le peso, subdivisé en 100 centavos. Les principaux partenaires commerciaux de l’Argentine sont le Brésil, les États-Unis, le Chili et la Chine.

Les réseaux de transport et de communication sont bien développés, mais depuis la décision du gouvernement en 1992 de privatiser une partie du réseau de chemin de fer, certaines régions ne sont pas suffisamment desservies. Cependant, plusieurs lignes de chemin de fer relient le pays à ses voisins : deux lignes ferroviaires traversent les Andes, reliant l’Argentine au Chili, et d’autres axes assurent la liaison entre l’Argentine, la Bolivie, le Paraguay, l’Uruguay et le Brésil. Un tunnel — construit à l’origine pour le train — a été construit pour traverser les Andes.

La compagnie aérienne nationale, Aerolíneas Argentinas, a été privatisée en 1990 et il existe plusieurs compagnies qui assurent les lignes aériennes intérieures. Les nombreux cours d’eau situés dans la région du Río de la Plata offrent environ 3 100 km de voies navigables.

5 HISTOIRE
5.1 Les origines

L’Argentine des origines est peuplée, avant l’arrivée des Espagnols, de quelques rares tribus indiennes, dont certaines, dans le Nord, font partie de l’Empire inca. La Conquista, entamée dès le xvie siècle, va durer plusieurs siècles, et les terres les plus reculées ne sont soumises au pouvoir central qu’à la fin du xixe siècle, après l’indépendance.

5.2 L’époque coloniale

C’est en février 1516 que le navigateur espagnol Juan Díaz de Solís, alors à la recherche d’un passage pour accéder aux Indes orientales par le sud-ouest, débarque, le premier, dans la région du Río de la Plata — ainsi baptisé en raison des grandes quantités d’argent (en espagnol, la plata) que Cabot parviendra à extorquer aux Indiens de la région. En 1526, Sébastien Cabot, un navigateur italien au service de l’Espagne, explore l’estuaire. À la recherche de nourriture, il remonte le fleuve (baptisé Paraná par la suite), jusqu’à l’emplacement de l’actuelle Rosario. L’explorateur et ses hommes y construisent un fort, avant de poursuivre leur exploration le long du fleuve et d’atteindre la région du Paraguay actuel.

La véritable colonisation ne commence qu’en février 1536, avec l’arrivée d’un gouverneur militaire espagnol pour l’ensemble de la région, Pedro de Mendoza. La même année est fondée la ville de Buenos Aires. Les Espagnols, déjà établis sur les territoires du Paraguay et du Pérou, commencent à peupler les terres situées entre les cours d’eau Paraná et Paraguay. Pendant ce temps, l’élevage de bétail, une pratique venue d’Espagne, se répand et gagne la Pampa, créant des conditions favorables à l’établissement d’une économie agricole stable.

En 1620, la région de la Plata est rattachée à la vice-royauté du Pérou. Buenos Aires, centre d’un commerce de contrebande florissant, se développe à un rythme soutenu : la ville compte près de 20 000 habitants au milieu du xviiie siècle. En 1776, le territoire occupé par l’Argentine, la Bolivie, le Paraguay et l’Uruguay est séparé du Pérou afin de constituer la vice-royauté du Río de la Plata, dont Buenos Aires devient la capitale.

5.3 L’indépendance (1816)

Au début du xixe siècle, comme leurs voisins d’Amérique du Sud, les Argentins cherchent à s’affranchir de la domination espagnole. L’attaque de Buenos Aires par les Britanniques, en juin 1806, joue un rôle déterminant : une armée de citoyens les expulse dès le mois d’août.

Au cours de la première étape de cette marche pour l’indépendance, en 1810, la population de Buenos Aires renverse le vice-roi. Par la suite, plusieurs victoires éclatantes sont remportées face aux armées d’invasion royalistes, notamment en 1812 et en 1813. Les régions libérées de la vice-royauté sont subdivisées en 14 provinces, en 1813. Après plusieurs années de combats, les troupes espagnoles sont définitivement battues par Belgrano et José de San Martín. L’indépendance des Provinces unies d’Amérique du Sud (qui vont devenir les Provinces unies du Río de la Plata) est proclamée le 9 juillet 1816. Le nouvel État, libéré du joug espagnol, va pourtant plonger dans une nouvelle lutte, fratricide cette fois, entre fédéralistes et partisans de l’unité nationale.

5.4 Porteños contre caudillos

Les habitants de Buenos Aires, les porteños, souhaitent l’instauration d’un gouvernement centralisé ; à l’opposé, les caudillos préfèrent un régime de type fédéral. Petit à petit, les heurts entre les deux factions s’amplifient pour finalement aboutir à une guerre civile, en 1819. La paix est rétablie en 1820, mais le problème central, à savoir la formation d’un gouvernement stable, demeure entier. Dans les années qui suivent, une situation d’anarchie, aggravée par la guerre contre le Brésil de 1825 à 1827, prédomine alors dans les Provinces unies.

En 1829, le général Juan Manuel de Rosas, un riche caudillo, s’impose comme gouverneur de la province de Buenos Aires. Fort du soutien populaire, il étend son autorité aux Provinces unies, qui sont baptisées Confédération argentine. Tout en prêchant le fédéralisme, il impose, jusqu’en 1852, un régime dictatorial.

Rosas est renversé, en 1852, par un groupe révolutionnaire conduit par le général Justo Urquiza, ancien gouverneur de la province d’Entre Ríos, avec l’aide de l’Uruguay et du Brésil. En 1853, une constitution fédérale (toujours en vigueur) est adoptée et Urquiza devient le premier président de la République argentine.

Cependant, la province de Buenos Aires refuse de souscrire à la nouvelle Constitution et proclame son indépendance en 1854 ; sept ans plus tard, elle est au premier rang de la rébellion contre le gouvernement central. Conduits par le général Bartolomé Mitre, les rebelles infligent une défaite à l’armée nationale, en septembre, et le président de la République donne sa démission, le 5 novembre. En mai de l’année suivante, une convention nationale élit Mitre à la présidence et désigne la ville de Buenos Aires comme capitale nationale. C’est ainsi que la province de Buenos Aires, la plus riche et la plus peuplée de l’union, acquiert le contrôle temporaire du reste de la nation. En 1880, la ville de Buenos Aires est séparée de la province et devient alors district fédéral et capitale nationale.

Sur le plan extérieur, l’Argentine participe à la guerre de la Triple-Alliance avec le Brésil et l’Uruguay, et doit faire face à des conflits de frontières avec ce dernier, de 1865 à 1870.

5.5 La prospérité (1880-1930)

L’unification du pays s’accompagne d’un renouveau de l’économie. De plus, le gouvernement se lance à la conquête des terres indiennes : de la Pampa jusqu’au río Negro, lors de la guerre du Désert (1879-1880), conduite par le général Julio Argentino Roca. Ce conflit permet au pays d’acquérir de nouvelles grandes étendues pour le pâturage et l’agriculture. Parallèlement, l’immigration est favorisée et l’arrivée de plusieurs millions d’immigrants, en majorité des Italiens, permet une meilleure exploitation des ressources agricoles de la Pampa. Le développement des chemins de fer, à la fin du xixe siècle, est également déterminant.

Au début du xxe siècle, l’Argentine s’impose comme l’une des principales nations d’Amérique du Sud. Elle commence à occuper une place prépondérante et, en 1914, contribue à trancher un sérieux différend entre les États-Unis et le Mexique.

Au début du xxe siècle, le pouvoir argentin est aux mains des militaires ; ainsi, en 1930, l’armée intervient pour chasser le président Hipolito Irigoyen, un radical, qui a voulu s’opposer à la toute puissance des propriétaires fonciers. C’est le prélude à une longue série de coups de force initiés par l’armée.

5.6 Les coups d’État militaires (1930-1983)

La crise économique mondiale qui débute en 1929 a de graves répercussions en Argentine. Le chômage et la hausse du coût de la vie suscitent un profond malaise social et politique. C’est à cette époque que commence l’exode rural, qui draine vers les villes des populations démunies.

À la veille de l’élection présidentielle de 1937, les organisations fascistes deviennent de plus en plus actives. En effet, dès le mois de mai 1936, suivant l’exemple de l’organisation de gauche du Front populaire, les partis de la droite argentine s’unissent pour former le Front national. Cette organisation plaide ouvertement en faveur de l’établissement d’une dictature et soutient, avec succès, le ministre des Finances et futur président, Roberto M. Ortiz. Cependant, contrairement aux attentes de ses partisans, Ortiz prend des mesures vigoureuses dans le but de renforcer la démocratie en Argentine.

La politique de l’Argentine durant la Seconde Guerre mondiale provoque indirectement le retour au pouvoir des militaires. Le gouvernement, qui affiche sa neutralité à l’égard des belligérants, participe cependant à l’approvisionnement des Alliés en denrées alimentaires. Et, en 1943, un groupe d’officiers nationalistes, dirigé par le général Arturo Rawson, s’empare du pouvoir. Parmi les meneurs de ce coup d’État militaire se trouve le colonel Juan Domingo Perón.

Perón, ministre du Travail dès 1943, s’impose sur le devant de la scène politique en 1944. Le 24 février, par crainte d’une guerre imminente contre l’Allemagne, il prend la tête d’une junte militaire pour renverser le président Ramírez. Officiellement acquis à la cause des Alliés, le gouvernement continue à bafouer la démocratie et offre l’asile à des agents allemands. Le 27 mars 1945, alors qu’en Europe la victoire ne peut plus échapper aux Alliés, l’Argentine déclare la guerre à l’Allemagne et au Japon. Le mois suivant, le gouvernement signe l’acte de Chapultepec, un accord entre les nations du continent américain qui prévoit une assistance mutuelle en cas d’agression. En juin, l’Argentine devient signataire de la charte de l’Organisation des Nations unies. Peu de temps après, des élections sont annoncées pour le début de l’année 1946.

5.6.1 L’ère Perón (1946-1955)

Perón, qui devient une figure symbolique de l’Argentine, fait campagne auprès de la classe ouvrière la plus défavorisée, les descamisados (« sans-chemise «) et promet le partage des terres, des salaires plus élevés et l’introduction d’une sécurité sociale. Il remporte largement l’élection du 24 février 1946, avec 56 % des voix.

Les premières années du régime péroniste bénéficient de l’enthousiasme populaire, entretenu par l’épouse du président, Eva Duarte, à qui Perón confie le ministère du Travail et celui des Affaires sociales.

La doctrine de Perón, le « justicialisme «, allie la répression, le populisme, l’attachement au catholicisme, le réformisme, le neutralisme et le nationalisme. Mais les partis et la presse d’opposition se montrent de plus en plus critiques à l’égard d’un gouvernement qui s’oriente de plus en plus vers un pouvoir totalitaire et répressif, à mesure que la situation économique se dégrade. De nombreux opposants au régime sont emprisonnés et la presse d’opposition est interdite.

En mars 1949, Perón promulgue une nouvelle Constitution qui autorise le président à briguer un deuxième mandat. Des restrictions sévères sont imposées aux partis anti-péronistes lors de la campagne précédant les élections nationales de novembre 1951. Le président Perón est réélu à une large majorité et les candidats péronistes remportent 135 des 149 sièges que compte la Chambre des députés.

En 1953, l’Argentine conclut des accords économiques et commerciaux avec plusieurs pays, dont notamment la Grande-Bretagne, l’Union soviétique et le Chili ; grâce à ses nouveaux échanges commerciaux, la balance commerciale est excédentaire pour la première fois depuis 1950. Perón doit, en revanche, affronter une opposition politique de plus en plus forte. À l’extérieur, les États-Unis désavouent son régime, à l’intérieur, l’armée et l’Église (qui n’apprécient guère la loi de 1954 sur le divorce) se retournent contre lui. Renversé par un putsch militaire en septembre 1955, Perón se réfugie au Paraguay, puis en Espagne. Voir péronisme

5.6.2 L’instabilité politique (1955-1973)

Le chef des insurgés, le général Eduardo Leonardi, ne reste pas président plus de deux mois malgré sa promesse d’instaurer un gouvernement démocratique. Il est à son tour renversé par un autre général, Pedro Eugenio Aramburu, qui annule la Constitution de 1949 et rétablit la charte libérale de 1853 ; celle-ci ne permet pas à un président de se succéder à lui-même. Une révolte péroniste est étouffée en juin 1956. Par la suite, plusieurs dizaines de personnes sont emprisonnées, accusées d’avoir monté un coup d’État contre le nouveau régime.

Les péronistes, dont le parti a été interdit, restent cependant assez populaires. Des élections visant à former une Assemblée constituante se déroulent en juillet. Le Parti radical, modéré, dirigé par Ricardo Balbín, remporte la majorité des suffrages, suivi de près par le Parti radical intransigeant d’Arturo Frondizi, de gauche modérée. Les péronistes reçoivent l’instruction d’opter pour le vote blanc. Également préconisés par d’autres mouvements, les bulletins blancs sont plus nombreux que les résultats de chacun des partis et constituent environ un quart du total des suffrages.

Lors des élections générales qui ont lieu en février 1958, Frondizi remporte la présidence, avec le soutien des péronistes et des communistes, et son Parti radical intransigeant remporte la majorité au Congrès.

En dépit de l’agitation ouvrière et de l’augmentation continue du coût de la vie, une certaine stabilité économique est atteinte au début de l’année 1959, grâce aux crédits accordés par l’étranger. L’adhésion de l’Argentine à l’Association latino-américaine de libre commerce, fondée en 1960, contribue à développer ses échanges avec les pays de la région, de 1960 à 1980.

La popularité de Frondizi s’effrite considérablement pendant l’année 1961. En mars 1962, les péronistes, à nouveau autorisés à participer aux élections, réunissent 35 % des voix ; ils réalisent également de bons scores aux élections de 1965 et de 1966. En juillet 1963, de nouvelles élections marquent la victoire d’un modéré du Parti radical du peuple, Arturo Illía. Le nouveau président annonce un plan de redressement national et de réglementation des investissements étrangers et s’efforce d’enrayer la hausse des prix, les pénuries et l’agitation ouvrière, ceci en fixant les prix et en instituant un salaire minimum.

5.6.3 Retour des militaires, retour de Perón

Les militaires, absents du pouvoir depuis 1958, le reprennent en 1966 à la faveur d’un nouveau coup d’État et nomment une série de présidents, dont le troisième, le général Alejandro Augustín Lanusse, entre en fonction en 1971.

Au cours des premiers mois de sa présidence, Lanusse amorce le retour à un gouvernement civil. Il annonce un programme économique destiné à enrayer la spirale inflationniste et fixe la date des élections nationales en mars 1973. Cependant, en 1972, le pays se trouve de plus en plus déchiré par la violence, avec des grèves, des émeutes étudiantes et des activités terroristes, l’opposition démocratique se manifestant alors avec vigueur. L’économie connaît également une nouvelle crise.

Lors de l’élection de 1973, Hector J. Cámpora, qui représente les péronistes, conduit le parti à une confortable victoire. Sous sa présidence, le terrorisme, d’extrême droite et d’extrême gauche, fait des ravages : enlèvements, demandes de rançons, meurtres. Des divisions entre les péronistes modérés et ceux de l’aile gauche contribuent également à répandre la violence. Le 20 juin 1973, date du retour de Perón à Buenos Aires, une émeute fait environ 380 victimes.

Cámpora donne sa démission un mois plus tard et Perón est réélu à la présidence en septembre, avec plus de 61 % des voix. Sa troisième femme, Isabel Perón, est élue vice-présidente. Cependant, Perón meurt le 1er juillet 1974 et sa femme lui succède, devenant ainsi la première femme président d’un État d’Amérique du Sud contemporain. Durant son mandat, la situation politique et économique se détériore rapidement. En 1975, 700 personnes meurent, victimes du terrorisme. Le coût de la vie augmente de 335 %, et les grèves ainsi que les manifestations en faveur de l’augmentation des salaires se multiplient. À la suite de crises ministérielles répétées et d’une rébellion avortée, en décembre 1975, une junte militaire, conduite par le général de corps d’armée Jorge Rafael Videla s’empare du pouvoir, le 24 mars 1976.

5.6.4 La dictature (1976-1983)

La junte prononce la dissolution du Congrès, impose la loi martiale et gouverne par décrets. Une répression très dure s’engage alors contre les mouvements d’opposition et se manifeste par des exécutions, la pratique de la torture et des disparitions. En 1977, la Commission argentine des droits de l’homme, à Genève, accuse le régime de 2 300 assassinats politiques, quelque 10 000 arrestations et la disparition de 20 000 à 30 000 personnes, dont un grand nombre sont assassinées par la junte militaire et enterrées sans sépulture.

L’économie demeure chaotique. Videla est remplacé à la présidence, en mars 1981, par le maréchal Roberto Viola, lui-même destitué, en décembre 1981, par le commandant en chef de l’armée, le général Leopoldo Galtieri. En 1982, celui-ci ordonne aux troupes argentines d’envahir les îles Malouines, une possession britannique (appelées Islas Malvinas, en espagnol), revendiquée depuis longtemps par l’Argentine. Mais le Royaume-Uni envoie une force militaire d’intervention dans l’océan Atlantique Sud qui, au bout de trois mois, bat l’armée argentine et reprend possession des îles (voir conflit des Malouines). Galtieri, alors discrédité, est remplacé par le général de division Reynaldo Bignone.

5.7 Le retour à la démocratie
5.7.1 La présidence de Raúl Alfonsín (1983-1989)

C’est dans un contexte économique très difficile, caractérisé par une dette extérieure sans précédent et une inflation supérieure à 900 %, que Raúl Alfonsín, le candidat radical, remporte l’élection présidentielle d’octobre 1983, la première organisée depuis dix ans. L’Argentine renoue alors avec la démocratie : les forces armées sont réorganisées tandis que les anciens chefs militaires et politiques sont accusés de violations des droits de l’homme et envoyés devant les tribunaux.

En 1985, le gouvernement lance un plan de rigueur budgétaire. La dette extérieure est restructurée ; des réformes économiques et fiscales (y compris une nouvelle monnaie) sont introduites. Cependant, l’inflation n’est pas contenue et, en mai 1989, à la fin d’un sexennat écourté de six mois, Raúl Alfonsín perd la présidence au profit du candidat péroniste, Carlos Menem.

5.7.2 La présidence de Carlos Menem (1989-1999)

Carlos Menem impose à son tour un plan d’austérité. Au début des années 1990, son gouvernement jugule l’inflation, équilibre le budget, nationalise une bonne partie des entreprises et rééchelonne la dette de la nation auprès des banques de dépôt. Mais sa politique se révèle, elle aussi, insuffisante. Avec 30 % de la population en dessous du seuil de pauvreté, elle contribue, en effet, à accentuer les inégalités sociales. Menem est également l’artisan de l’alliance économique avec le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, avec la signature du traité d’Asunción (26 mars 1991) qui institue le Mercosur le 1er janvier 1995.

En 1993, le président Menem fait voter une révision constitutionnelle, qui réduit le mandat présidentiel à quatre ans et lui permet de se porter candidat à sa propre succession. Il est réélu dès le premier tour, en mai 1995, avec presque 50 % des voix.

L’Argentine connaît alors une détérioration de sa situation économique et une importante crise sociale. Le pays est touché par une forte augmentation du chômage, de l’insécurité et de la criminalité, provoquant une crise de confiance. Cette crise, liée à la politique libérale et aux privatisations imposées par le FMI, provoque des vagues de licenciements, de fortes baisses de la masse salariale et un recul conséquent des acquis sociaux. Il s’ensuit de nombreuses tensions au sein du parti au pouvoir, où la succession à la présidence de l’État s’engage dès la réélection de Carlos Menem. Celui-ci obtient en février 1996 du Congrès des pouvoirs extraordinaires afin de pouvoir engager la seconde réforme de l’État visant à réduire les dépenses publiques, à augmenter les recettes fiscales et à renégocier un crédit auprès du FMI. Les réformes ultralibérales mises en œuvre par le gouvernement se heurtent à la forte mobilisation des syndicats suivis par le mécontentement de la grande majorité des Argentins. Les élections législatives partielles de 1997 se soldent par la victoire de l’Alliance (Union civique radicale et Front pour le pays solidaire), parti opposé aux Justicialistes au pouvoir. Le président Menem ne dispose plus dès lors de la majorité absolue au Congrès. Par ailleurs, Menem, après avoir instauré, en 1990, des lois graciant et amnistiant les généraux et les chefs des trois juntes, met en 1998 son veto aux éventuelles demandes d’abrogation de ces lois.

Cependant, entre juin 1998 et février 1999, huit anciens membres de la junte militaire, dont Jorge Rafael Videla, sont arrêtés et inculpés d’enlèvement et d’adoption illégale de bébés nés en captivité durant la dictature (seul chef d’inculpation non couvert par la loi d’amnistie).

Après l’échec du congrès national du Parti justicialiste en juillet 1998 et plusieurs démissions au sein de son gouvernement en mai 1999, le président Menem renonce à briguer un nouveau mandat. L’Alliance d’opposition, coalition réunissant le Parti radical et le centre gauche, désigne Fernando De la Rúa, de l’UCR, comme candidat. Celui-ci remporte en novembre 1998 les élections primaires puis, en octobre 1999, l’élection présidentielle.

5.7.3 La présidence de Fernando De la Rúa (1999-2001)

Au niveau international, le Royaume-Uni lève l’embargo, décrété en décembre 1998, sur les ventes d’armes à l’Argentine. Cependant, la situation économique et sociale, après les années de « miracle argentin « se dégrade sérieusement. L’Argentine est en effet sérieusement touchée par la crise financière internationale, notamment celle du Brésil, son premier partenaire commercial au sein du Mercosur, contraint de dévaluer sa monnaie. Un nouveau programme d’austérité est lancé en avril 1999 en accord avec le FMI.

Confronté à une aggravation de la crise financière malgré une aide massive de 40 milliards de dollars des organisations internationales dont le FMI, le gouvernement présente en janvier 2001 un plan d’austérité, qui, rejeté par les députés, entraîne la démission de plusieurs ministres et l’éclatement de la coalition au pouvoir. La valeur du peso étant calée sur celle du dollar par un système de parité fixe, la compétitivité de l’économie argentine s’affaiblit sans qu’il soit possible d’ajuster le taux de change pour rompre ce processus. La situation paraissant sans issue et le pouvoir étant extrêmement fragilisé, Fernando de la Rúa décide de nommer, en mars 2001, aux fonctions de ministre de l’Économie, l’instigateur de cette « loi de convertibilité « adoptée en 1991 pour mettre un frein à l’inflation, Domingo Cavallo. Lançant un plan de compétitivité, celui-ci envisage d’étendre la parité peso-dollar à l’euro, tout en réduisant les dépenses publiques, afin de rassurer les investisseurs sur la capacité de l’Argentine à rembourser sa dette extérieure très élevée. Mais l’Argentine, cinquième pays exportateur mondial de viande, est touchée en 2001 par l’épizootie de fièvre aphteuse, qui fragilise considérablement ce secteur important de l’économie du pays.

Dans un contexte économique toujours plus dégradé, la politique du « déficit fiscal zéro « du ministre de l’Économie suscite à partir du mois de juillet 2001 une vive opposition de la population. Elle s’exprime au mois d’octobre lors des élections législatives et sénatoriales. L’Alliance, la coalition de centre gauche au pouvoir, perd la majorité au Sénat et à l’Assemblée fédérale au profit du parti péroniste, le Parti justicialiste. En outre, le vote-sanction atteint une ampleur inédite. Dans un pays où le vote est obligatoire, les votes blancs ou nuls atteignent près de 21 %. Le président Fernando De la Rúa affirme toutefois qu’il entend maintenir le cap des réformes économiques, mais il doit désormais gouverner dans le cadre d’une cohabitation avec les péronistes.

5.8 Un pays en faillite
5.8.1 Une crise économique et sociale

Les dirigeants politiques qui se sont succédé depuis le milieu des années 1980 en Argentine apparaissent aux yeux de la population comme les responsables de la gestion catastrophique, aggravée par la corruption, qui a conduit le pays à la faillite. L’Argentine s’est enfoncée dans la récession depuis juillet 1998 et la dette atteint 141 milliards de dollars. Près de la moitié de la population est affectée par la pauvreté (14 millions de démunis sur 36 millions d’habitants fin 2001) tandis que le taux de chômage atteint officiellement 18,3 % (octobre 2001).

Dans ce contexte, le FMI n’entend pas continuer à cautionner une politique économique qu’il juge inadaptée. Au début du mois de décembre 2001, il refuse d’accorder un nouveau prêt à l’Argentine de 1,3 milliard de dollars, destiné à payer les intérêts de la dette. Cela entraîne l’annonce d’une baisse du budget de 20 %. Venant après de nombreuses mesures de restriction, cette décision provoque l’exaspération de la population, notamment des classes moyennes, peu enclines jusqu’alors à manifester mais touchées en masse par la paupérisation.

5.8.2 Une crise de la représentation politique

Après s’être traduit par le vote, le mécontentement de la population s’exprime dans la rue, par des émeutes, des pillages et des « concerts de casseroles « (cacerolazos) au cours desquels les manifestants conspuent les dirigeants politiques. Les affrontements avec la police font trente morts tandis que cinq présidents se succèdent à la tête de l’État en quelques jours.

Le ministre de l’Économie, Domingo Cavallo, est le premier à démissionner, bientôt suivi par le président Fernando De la Rúa le 20 décembre. Le président du Sénat, qui assure l’intérim, remet sa démission au bout de quarante-huit heures. Adolfo Rodríguez Saá annonce la suspension du paiement de la dette et la création d’une nouvelle monnaie, mais il renonce à son tour au bout d’une semaine. Il est remplacé par le président de l’Assemblée nationale, avant qu’Eduardo Duhalde soit finalement investi à la présidence de la République le 2 janvier 2002.

Eduardo Duhalde, professeur de droit public, candidat malheureux à la présidentielle de 1999, forme un gouvernement dominé par les péronistes. Dès son arrivée au pouvoir, il promulgue une loi d’urgence économique qui entraîne la dévaluation du peso, la fin de la parité peso-dollar et la mise en place de mesures protectionnistes afin de restructurer l’économie du pays. Un double de taux de change est instauré, l’un officiel à 1,40 peso pour 1 dollar et l’autre libre.

Alors que le chômage atteint des niveaux dramatiques (24 % selon les chiffres officiels en mars 2002) et que plus de la moitié des Argentins (52 %) vit sous le seuil de pauvreté, la malnutrition frappe plusieurs régions du pays. Cette catastrophe économique et sociale alimente un très fort mécontentement à travers tout le pays, mais fait naître aussi des formes originales de mobilisation sociale et de solidarité : mouvements de chômeurs (surnommés les piqueteros) capables de paralyser les transports et la circulation de marchandises, associations de quartier à l’origine de « clubs de troc « permettant d’échanger des biens et des services, etc.

Sur le plan politique, la population argentine exprime un rejet et un dégoût à l’égard de tous les partis, considérés comme responsables en bloc de la grave crise que traverse le pays en raison de leur incapacité à gouverner et de leur corruption. La classe politique, quant à elle, profondément divisée, apparaît surtout attachée à conserver ses parcelles de pouvoir.

5.8.3 La présidence de Néstor Kirchner (2003-2007)

L’élection présidentielle de mai 2003 donne lieu à une bataille politique dont le principal protagoniste est le Parti justicialiste (péroniste). Elle est marquée par le retour sur le devant de la scène politique argentine de l’ancien président Carlos Menem. Parvenu en tête au premier tour du scrutin avec un quart des suffrages, il décide de se retirer de la compétition électorale alors que les sondages lui prédisent une défaite cuisante. Conformément à la Constitution argentine, la présidence de la République échoit alors par défaut au candidat arrivé en seconde position, Néstor Kirchner, également péroniste. Cette élection est marquée par le taux d’abstention le plus élevé de l’histoire argentine et par l’anéantissement du deuxième parti du pays, l’Union civique radicale (UCR, centre-gauche), dont le candidat recueille moins de 3 % des suffrages.

Déterminé à rompre avec la politique des années 1990, le président Kirchner lance une série de mesures visant à redonner du crédit aux institutions politiques. Parmi ses mesures figure la destitution de personnalités impliquées dans l’ancienne dictature militaire ou dans les scandales de corruption. Faisant des droits de l’homme l’une de ses priorités, Néstor Kirchner fait annuler les lois amnistiant les anciens tortionnaires de la dictature. En politique étrangère, il se détache des États-Unis pour se rapprocher des pays du Mercosur (en particulier le Brésil). En septembre 2003, il parvient à un accord avantageux avec le FMI sur le report du remboursement d’une partie de la dette argentine et sur la concession d’un nouveau prêt. Fort de sa popularité et du redressement économique que connaît le pays, il parvient à consolider son pouvoir lors des élections législatives et sénatoriales partielles d’octobre 2005, présentées comme un plébiscite sur sa gestion du pays et marquées par une scission au sein des péronistes. Le Front pour la victoire (Frente para la victoria, FV), créé par Néstor Kirchner, remporte les deux scrutins, tandis que ses principaux rivaux au sein du péronisme, dont l’ancien président Duhalde, sont défaits.

5.8.4 La présidence de Cristina Kircher

En 2007, Cristina Kirchner, sénatrice et femme du président sortant, remporte l’élection présidentielle dès le premier tour de scrutin, à la tête du Front pour la victoire rassemblant péronistes, radicaux et socialistes dissidents. La formation présidentielle obtient parallèlement le contrôle du Congrès et conserve la majorité au Sénat.

Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

Liens utiles