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Bosnie-Herzégovine

Publié le 11/04/2013

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1 PRÉSENTATION

Bosnie-Herzégovine, en serbo-croate Bosna i Hercegovina, pays d’Europe orientale, situé dans la péninsule balkanique. Sa capitale est Sarajevo.

La Bosnie-Herzégovine (parfois simplement appelée Bosnie) est bordée au nord et à l’ouest par la Croatie, à l’est par la Serbie, au sud par le Monténégro et à l’ouest par la mer Adriatique.

Ancienne république constituante de la République socialiste fédérative de Yougoslavie, la Bosnie-Herzégovine a déclaré unilatéralement son indépendance en mars 1992 ; une guerre civile, opposant Serbes, Croates et Musulmans, a alors éclaté dans le pays. Le conflit a pris fin en novembre 1995, lors de la signature des accords de Dayton, qui ont entériné la partition du pays en deux entités confédérées, la Fédération croato-musulmane, rebaptisée en 2001 Fédération de Bosnie et Herzégovine, et la République serbe de Bosnie (Republika Srpska).

2 MILIEU NATUREL
2.1 Relief et hydrographie

La Bosnie-Herzégovine s’étend sur 51 129 km². C’est un pays essentiellement montagneux. Au sud, en Herzégovine, région faiblement arrosée, s’étend un plateau calcaire dénudé : le karst dans lequel s’inscrivent de vastes dépressions, les poljés. Les reliefs montagneux situés dans le sud-ouest culminent aux monts Čvrsnica et Prenj. Les Alpes Dinariques, qui forment la frontière occidentale avec la Croatie, s’étirent, du nord au sud, jusqu’à la dépression de Mostar. Le point culminant du pays, le mont Maglic (2 387 m), est situé au sud-est, à la frontière avec le Monténégro.

Dans le Nord, la Bosnie est la seule région qui possède des plaines, situées dans les vallées des affluents de la Save (l’Una, le Vrbas, la Bosna, la Drina), fleuve frontalier de la Serbie et de la Slovénie. La Neretva arrose les vallées méridionales aux terres fertiles sur lesquelles sont pratiquées des cultures méditerranéennes. Le pays possède environ 20 km de côtes sur la mer Adriatique ; le commerce maritime transite par le port de Metković.

2.2 Climat

La Bosnie-Herzégovine a un climat semi-continental, caractérisé par des étés chauds et des hivers froids ; en altitude, il se rapproche des climats alpins avec des étés froids et courts, des hivers rigoureux et un enneigement parfois très important. Le climat de la façade adriatique est de type méditerranéen, avec des étés chauds et des hivers pluvieux.

2.3 Végétation et faune

La Bosnie-Herzégovine présente une végétation caractérisée par des arbres à feuilles caduques (hêtres, chênes) en plaine et en basse montagne, et des conifères à partir de 1 700 m d’altitude. Le pays possède une faune relativement préservée et l’on y rencontre des espèces en voie d’extinction en Europe occidentale, comme le lynx, l’ours gris ou le loup, ainsi que des rapaces (faucons, aigles, vautours).

2.4 Ressources et contraintes du milieu naturel

La Bosnie-Herzégovine est un pays aux possibilités agricoles limitées par un relief accidenté, malgré des plaines fluviales et des bassins fertiles. Située dans une zone de forte activité sismique, elle est sujette à de fréquents tremblements de terre. Les forêts, très étendues, fournissent du bois de construction et le sous-sol recèle de précieux gisements de sel, de manganèse, d’argent, de plomb, de cuivre, de minerai de fer, de chrome et de charbon. L’industrialisation intensive de la seconde moitié du XXe siècle a contribué à polluer l’atmosphère, tandis que les ressources en eau sont limitées.

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Démographie

Lors du recensement de 1991, la Bosnie-Herzégovine comptait 4,3 millions d’habitants. Les données chiffrées concernant le pays sont à considérer avec une extrême prudence. Les mouvements de population et le bilan des quatre années de guerre restent mal connus. En 2005, la population de la Bosnie-Herzégovine était estimée à 4,025 millions d’habitants. Le taux de croissance annuelle de la population était de 0,5 p. 100 en 2005, avec un indice de fécondité de 1,71 enfant par femme. L’espérance moyenne de vie était de 72,8 ans. Les Musulmans, Slaves islamisés durant l’occupation ottomane, appartenant principalement à la branche sunnite, constituent le groupe le plus important, avec 48 p. 100 de la population totale. Les Serbes représentent environ 37 p. 100 de la population et les Croates, 14,3 p. 100 (estimations de 2000).

En raison du conflit yougoslave, une large part de la population a été déplacée – environ 300 000 Bosniaques se sont ainsi réfugiés en Croatie, en Macédoine (FYROM) et en Serbie, entre 1991 et 1994. À partir de l’été 1995, des milliers de Serbes de Bosnie-Herzégovine se sont installés en Serbie ; la fin du conflit a provoqué le retour des réfugiés.

3.2 Langues et religions

Le serbo-croate est la langue la plus répandue dans le pays ; les Musulmans et les Croates utilisent l’alphabet romain (forme croate) alors que les Serbes se servent de l’alphabet cyrillique (forme serbe).

Les principales religions sont l’islam, la religion orthodoxe et le catholicisme romain.

3.3 Éducation

L’instruction est obligatoire et gratuite pour les enfants de sept à quinze ans. Plus de 85 p. 100 des plus de neuf ans savent lire et écrire. Avant la guerre, la majeure partie des enfants poursuivait un enseignement secondaire. La Bosnie-Herzégovine possède des universités à Sarajevo, Banja Luka, Mostar et Tuzla.

3.4 Divisions administratives et villes principales

La Bosnie-Herzégovine est constituée de deux entités, la Fédération de Bosnie et Herzégovine (51 p. 100 de la superficie et 70 p. 100 de la population) et la République serbe de Bosnie (49 p. 100 de la superficie et 25 p. 100 de la population). Le district de Brčko, principal port de Bosnie-Herzégovine, enjeu entre les deux entités du pays, est un district supervisé internationalement. La capitale de la Bosnie-Herzégovine est Sarajevo (401 696 habitants en 2003). Les autres villes importantes sont Banja Luka (189 700 habitants), Zenica (140 000 habitants), Tuzla (119 200 habitants) et Mostar (90 800 habitants).

3.5 Institutions et vie politique

Les accords de Dayton (novembre 1995) ont formalisé la partition de la Bosnie-Herzégovine en deux entités confédérées, la Fédération croato-musulmane, rebaptisée en 2001 Fédération de Bosnie et Herzégovine, et la République serbe de Bosnie. Elles disposent d’institutions confédérales — présidence, gouvernement, Parlement, Cour constitutionnelle — et de leurs institutions particulières. Les trois peuples y sont représentés à égalité. La Bosnie-Herzégovine est sous la tutelle du Haut représentant de la communauté internationale et émissaire de l’Union européenne.

3.5.1 Organisation des pouvoirs
3.5.1.1 Institutions fédérales

Le pouvoir exécutif de la République de Bosnie-Herzégovine relève d’une présidence collégiale de trois membres élus au suffrage universel pour quatre ans, un Bosniaque, un Serbe et un Croate, qui alternent à la direction de la présidence tous les huit mois. La présidence nomme le président du Conseil des ministres ; elle représente le pays sur la scène internationale.

Le pouvoir législatif appartient à un Parlement bicaméral constitué de la Chambre des représentants et de la Chambre des peuples. La Chambre des représentants est composée de 42 membres élus au scrutin proportionnel pour un mandat de deux ans, 28 étant élus par la Fédération de Bosnie et Herzégovine et 14 par la République serbe de Bosnie. Les membres de la Chambre des peuples, composée de 5 Bosniaques, 5 Croates et 5 Serbes, dont le mandat est également de quatre ans, sont désignés par la Chambre des représentants de la Fédération de Bosnie et Herzégovine et par l’Assemblée nationale de la République serbe.

3.5.1.2 Institutions de la Fédération de Bosnie et Herzégovine

La Fédération de Bosnie et Herzégovine possède un président de la République (croate) et deux vice-présidents (un Musulman et un Croate), élus par le Parlement. Le Parlement comprend deux chambres : la Chambre des représentants, qui comporte 98 membres élus au scrutin proportionnel, et la Chambre des peuples, composée de 60 élus (30 Musulmans et 30 Croates), nommés pas les dix assemblées cantonales de la Fédération. La République serbe de Bosnie est pour sa part dirigée par un président élu au suffrage universel direct tandis que le Parlement est monocaméral et ne comprend que l’Assemblée nationale, dont les 83 membres sont élus au scrutin proportionnel.

3.5.1.3 Institutions de la République serbe de Bosnie
3.5.2 Partis politiques

Le paysage politique de la Bosnie-Herzégovine a été dominé de la fin de la guerre en 1995 jusqu’aux élections de 2006 par des partis politiques nationalistes comme le Parti d’action démocratique (SDA), musulman, de l’ancien président Alija Izetbegovi&cacute, le Parti démocratique serbe (SDS), créé par Radovan Karad¸ić, et la Communauté démocratique croate (HDZ), qui défendent chacun les intérêts de leur communauté. Lors des élections de 2006 ont émergé des partis se présentant comme plus modérés, à l’image du Parti pour la Bosnie-Herzégovine (SBIH) dans le collège musulman, du Parti social-démocrate (SDP) dans le collège croate et du Parti des sociaux-démocrates indépendants (SNSD) dans le collège serbe.

3.5.3 Défense nationale

En 2001, les effectifs totaux de l’armée bosniaque étaient estimés à 20 000 hommes, les dépenses de défense représentant 2,2 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) en 2003.

Après la signature des accords de Dayton, une force multinationale de 60 000 hommes, l’IFOR, dirigée par l’OTAN a été envoyée sur le terrain. Elle a été remplacée en décembre 2004 par une force de 6 300 hommes issus d’une trentaine de pays européens appartenant à l’Eufor, force militaire de l’Union européenne, pour une mission appelée Althéa. En novembre 2006, la Bosnie-Herzégovine a été invitée par l’OTAN à rejoindre le « Partenariat pour la paix «.

4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités

La Bosnie-Herzégovine est, avec la république de Macédoine, l’une des républiques les plus pauvres de l’ancienne Yougoslavie. Le conflit yougoslave a en effet eu des conséquences dramatiques pour l’économie de l’ensemble des républiques, et plus particulièrement pour celle de la Bosnie-Herzégovine, lieu des combats les plus violents. Pendant la guerre (1992-1995), l’économie a été anéantie et 200 000 personnes ont trouvé la mort.

À partir de 1996, la Bosnie-Herzégovine a commencé à se reconstruire à la suite d’accords passés avec le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) grâce à une aide internationale qui s’est élevée à plus de 5 milliards de dollars. Le PIB a depuis été multiplié par trois – il s’élevait en 2003 à 6,97 milliards de dollars, avec un taux de croissance de 5 à 6 p. 100 par an au milieu des années 2000 – et les exportations par dix. Mais la situation économique reste fragile, le chômage très élevé (près de 45 p. 100 officiellement en 2005) tandis que 18 p. 100 de la population vit sous le seuil de pauvreté au milieu des années 2000.

4.2 Agriculture, forêts, pêche

En 2003, l’agriculture représentait 14,9 p. 100 du PIB contre 13,3 p. 100 avant la guerre. Ce sont les plaines situées sur la rive droite de la Save qui sont les plus productives. Le secteur est axé essentiellement sur la production de céréales : blé, maïs, orge, ainsi que sur les cultures de haricots, de choux, de pommes de terre, de betteraves à sucre et de fruits. L’élevage ovin est prédominant, il représentait 670 000 têtes en 2004. L’exploitation des forêts est également importante, les bois et forêts représentant 44,6 p. 100 de la superficie totale en 2000.

4.3 Mines et industries

Le secteur secondaire représentait 32,1 p. 100 du PIB en 2003 contre 50,4 p. 100 du PIB avant la guerre, notamment grâce aux abondantes ressources du sous-sol : charbon à Kajank Kreka et Banovici, minerai de fer à Vareš et à Ljubija, lignite, sel gemme, plomb, manganèse, zinc et bauxite.

Les activités industrielles étaient dynamiques avant la guerre : complexe sidérurgique de Zenica, ingénierie à Sarajevo, usine d’aluminium de Mostar, industrie chimique à Tuzla. La majeure partie de ces centres industriels était située dans les régions occupées par les Serbes et près de 80 p. 100 des structures de production ont été détruites durant le conflit. Dix ans après la fin de la guerre, la production industrielle n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant-guerre.

4.4 Secteur tertiaire

La monnaie de la Bosnie-Herzégovine est le mark convertible (KM).

En 2003, le secteur des services représentait 53 p. 100 du PIB contre 36,3 p. 100 du PIB avant la guerre. À l’image de l’ensemble de l’économie, c’est un domaine en pleine reconstruction. La balance commerciale de la Bosnie-Herzégovine est fortement déficitaire. En 2005, les produits importés par le pays représentaient 7,5 milliards de dollars tandis que les exportations représentaient 2,6 milliards de dollars. Les principaux partenaires commerciaux de la Bosnie-Herzégovine sont les pays des Balkans et ceux de l’Union européenne.

5 HISTOIRE
5.1 Des origines à la Yougoslavie
5.1.1 L’Antiquité et le Moyen Âge

La Bosnie, connue comme la Bosante dans l’Antiquité, doit son nom à la Bosna, un affluent de la Save, qui coule au nord du pays. Conquis par les Romains au Ier siècle av. J.-C., le territoire de l’actuelle Bosnie-Herzégovine faisait partie de la province de l’Illyrie. Après l’effondrement de l’Empire romain, les Goths et les Byzantins règnent successivement sur la région jusqu’à l’arrivée des Slaves (VIe-VIIe siècles).

Les princes slaves organisent à partir du Xe siècle un premier embryon d’État, mais leur territoire, en raison de sa localisation stratégique, suscite la convoitise des puissances voisines. Les Bulgares annexent la frontière orientale en 927, tandis que les Serbes établissent au même moment, avec l’aide des Byzantins, leur suzeraineté sur le reste du territoire. Étienne Ier intègre la région à l’État croate au milieu du XIe siècle ; les Byzantins réapparaissent brièvement entre 1165 et 1180, mais ce sont les Hongrois qui dominent durablement les Bosniaques entre le XIIe et le XVe siècle. À cette époque, les Bogomiles, issus d’un mouvement hérétique, quittent la Bulgarie et la Serbie pour s’installer en Bosnie et y propager leur religion.

Vassal de la Hongrie, le banat (province) de Bosnie, placé sous le contrôle d’un ban (chef), jouit cependant d’une grande autonomie. Le ban Étienne II Kotomanić (1322-1353) unifie le territoire et étend l’autorité hongroise à la principauté de Hum (ou Zahumlje), la future Herzégovine. Son neveu et successeur, Tvrtko Ier (1353-1391), fait encore reculer les limites territoriales du banat et, en 1377, se fait couronner roi de Serbie et de Bosnie. Mais le royaume commence à se désintégrer après sa mort. En effet, les seigneurs féodaux, proches de l’Église bosniaque qui reconnaît l’hérésie bogomile, se dressent contre le roi catholique. Le pape va même jusqu’à prêcher la croisade contre l’Église bosniaque.

5.1.2 La domination ottomane

Affaiblis par les dissensions politiques et religieuses, les Bosniaques ne peuvent résister à l’avancée des Turcs qui prennent possession de leur territoire en 1463. La région de Hum, constituée en duché en 1435 et rebaptisée Herzégovine (« Duché indépendant «) par Étienne Vukčić, un noble bosniaque, est conquise à son tour en 1482. Les deux territoires demeurent des provinces de l’Empire ottoman pendant les quatre siècles suivants, malgré plusieurs tentatives de soulèvements.

La position des Turcs, qui commence à s’affaiblir dans les Balkans à partir du XVIIIe siècle, se révèle de plus en plus délicate au XIXe siècle. En Bosnie, la noblesse, jusqu’alors préservée, se sent menacée dans ses privilèges, tandis que les paysans, accablés par des charges très lourdes, organisent de fréquentes révoltes. En 1875, une émeute de la faim éclate en Herzégovine ; elle gagne rapidement la Bosnie, provoquant l’entrée en guerre de la Serbie et du Monténégro, appuyés par la Russie.

5.1.3 La domination austro-hongroise

Vaincus, les Ottomans doivent composer : la Bosnie-Herzégovine est placée sous l’administration de l’Autriche-Hongrie par le congrès de Berlin (1878), tout en demeurant sous la suzeraineté du sultan ottoman. En 1882, un gouvernement civil est installé, dirigé par le Hongrois Kállay. Le 5 octobre 1908, la Bosnie-Herzégovine est annexée par les Habsbourg. À cette époque, elle compte déjà une population hétérogène : Croates catholiques romains, Serbes orthodoxes et Musulmans (des Slaves convertis à l’islam pendant l’occupation ottomane) cohabitent plus ou moins harmonieusement. L’autorité austro-hongroise ne réussit pas à calmer les tensions ethniques existantes, et les revendications nationalistes, liées à l’indépendance politique et à l’autonomie culturelle, ne cessent de s’affirmer. En outre, les nations européennes constituent des systèmes d’alliances : l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne s’opposent au nationalisme serbe, le plus virulent en raison de l’existence d’une Serbie indépendante depuis le congrès de Berlin (1878) et de l’appui du Royaume-Uni mais surtout de la Russie, fidèle à son soutien pour ses « frères orthodoxes «, et plus encore à une politique d’alliance qui lui donne des débouchés vers le sud.

Le 28 juin 1914, l’héritier au trône d’Autriche-Hongrie, l’archiduc François-Ferdinand, et son épouse sont assassinés à Sarajevo par Gavrilo Princip, un jeune nationaliste serbe de Bosnie (voir attentat de Sarajevo). Par le jeu des systèmes d’alliance, le continent européen s’engage rapidement dans la Première Guerre mondiale.

Les contacts noués entre tous les nationalistes slaves du Sud se renforcent et se concrétisent bientôt : en 1917, la déclaration de Corfou, qui pose les bases d’un État réunissant tous les Slaves du Sud, est signée par des représentants du gouvernement serbe en exil en Grèce, des nationalistes croates, slovènes et monténégrins, et, le 1er décembre 1918, la Bosnie-Herzégovine intègre le nouveau royaume indépendant des Serbes, des Croates et des Slovènes.

5.2 La Yougoslavie
5.2.1 Le royaume de Yougoslavie

Gouverné par les monarques serbes de la dynastie Karageorgévitch, le nouvel État, rebaptisé Yougoslavie (« pays des Slaves du Sud «) en 1929, fait apparaître dès ses débuts un antagonisme entre le centralisme unificateur des Serbes et les tendances à l’autonomie des autres nations. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les puissances des pays de l’Axe envahissent et démantèlent la Yougoslavie. La Bosnie devient une province intégrée à l’État fasciste oustachi croate, créé par Ante Pavelić, soutenu par l’Allemagne et l’Italie, tandis que la résistance s’organise autour du communiste Tito. C’est à Bihać que le chef des partisans crée l’Armée nationale de libération.

5.2.2 La République fédérale de Yougoslavie

Figure-clé de la réconciliation des Yougoslaves, en 1945, Tito est à l’origine de la création d’une République socialiste fédérative de Yougoslavie regroupant six républiques ; la Bosnie-Herzégovine devient l’une des six républiques constituantes, malgré les protestations serbes pour qui elle ne devrait former qu’une province, à l’image de la Voïvodine et du Kosovo.

Dans le but de mettre sur un pied d’égalité toutes les populations de la fédération, les Musulmans se voient accorder le droit, en 1968, de constituer une nation : à l’instar des nationalités croate, serbe, macédonienne, slovène et monténégrine, il existe désormais une nationalité musulmane ; le fait de posséder la nationalité musulmane ne signifie pas systématiquement l’appartenance à l’islam.

Dans les années 1970, une présidence collégiale est instaurée dans la république de Bosnie-Herzégovine ; regroupant des représentants des nationalités musulmane, serbe et croate, elle est destinée à limiter les tensions ethniques au sein de cette république composite. En 1980, la mort du maréchal Tito amorce un tournant dans l’histoire de la fédération ; les disparités économiques entre les différentes républiques — la Bosnie-Herzégovine figure parmi les plus pauvres — et la faiblesse des instances fédérales à gouverner deviennent des problèmes criants.

5.2.3 La désintégration de la Fédération yougoslave

En janvier 1990, le XIVe congrès de la Ligue communiste abolit le rôle dirigeant du parti en Yougoslavie et permet la tenue d’élections multipartites, les premières organisées dans le pays depuis 1945. Une multitude de nouveaux partis politiques, généralement représentatifs des intérêts des différentes minorités nationales, voit le jour dans chaque république. En Bosnie-Herzégovine, les élections législatives de novembre-décembre 1990 voient le Parti d’Action démocratique (SDA, musulman) remporter 86 sièges ; le Parti démocratique serbe (SDS), 72 sièges et la Communauté démocratique croate (HDZ), 44 sièges. Les trois partis remportent les 7 sièges de la présidence collégiale et Alija Izetbegović (SDA) est élu président du nouveau gouvernement de coalition. Chaque groupe possède ses propres revendications : les Musulmans souhaitent la constitution d’un État indépendant, les Serbes, regroupés autour de Radovan Karad¸ić, veulent rester au sein de la Fédération yougoslave, tandis que les Croates souhaitent la quitter.

La déclaration unilatérale d’indépendance de la Croatie et de la Slovénie, en juin 1991, fragilise la situation. La Serbie, voulant à tout prix préserver l’existence de la fédération, se pose comme l’héritière des institutions fédérales et les nombreux Serbes vivant dans les autres républiques commencent à proclamer leur allégeance à la Yougoslavie sous autorité serbe. En Bosnie-Herzégovine, comme en Croatie, ils forment des régions autonomes serbes (RAS) que les autorités locales refusent de reconnaître. Un conflit armé éclate alors, aggravé par la déclaration d’indépendance de la Macédoine en septembre 1991. L’armée fédérale yougoslave, dominée par les Serbes, signifie son opposition à la scission de ces trois républiques en s’emparant de Mostar, dans le sud-ouest de la Bosnie-Herzégovine, et en assiégeant la station balnéaire croate de Dubrovnik.

La détérioration de la situation nationale a des retombées sur le gouvernement bosniaque : le Parti démocratique serbe rejette les propositions de la présidence de la République et du SDA en faveur de l’indépendance. Les négociations entre les différents partis aboutissent à une impasse. Les Serbes marquent leur opposition en formant une Assemblée de la nation serbe au sein de la République serbe de Bosnie-Herzégovine et en organisant un référendum demandant aux membres de leur nation s’ils souhaitent demeurer au sein de la fédération ; la grande majorité des votants se prononce dans ce sens. Un référendum similaire, ouvert cette fois à tous les groupes ethniques mais boycotté par de nombreux Serbes, a lieu en février 1992 : il exprime une volonté de sécession revendiquée par 62 p. 100 des suffrages. En mars 1992, la Bosnie-Herzégovine déclare donc son indépendance et les Serbes reprennent les armes.

5.3 La Bosnie-Herzégovine indépendante
5.3.1 Le conflit yougoslave (1992-1995)

L’indépendance de la Bosnie-Herzégovine est reconnue par les États-Unis en avril 1992, puis par l’Organisation des Nations unies, en mai 1992, ce qui n’empêche pas le conflit de s’étendre.

La guerre débute par le siège de Sarajevo en avril 1992, toutes les nationalités y prennent part. L’horreur des massacres liés au « nettoyage ethnique « pratiqué par les Serbes (et dans une moindre mesure par les Croates et les Musulmans) provoque un exode massif de la population et 200 000 victimes. L’intervention internationale est longue et difficile à mettre en place. (voir Yougoslave, conflit)

5.3.2 Les accords de Dayton et la partition communautaire

Les accords de Dayton, signés le 21 novembre 1995 et ratifiés un mois plus tard à Paris, permettent de mettre un terme au conflit yougoslave. Ils formalisent la partition de la Bosnie-Herzégovine en deux entités confédérées, la Fédération croato-musulmane et la République serbe, qui disposent d’institutions centrales ; Sarajevo est la capitale de l’État bosniaque. Cependant, tous les problèmes, notamment ceux suscités par les déplacements de population, ne sont pas résolus et le pays semble s’être divisé selon des lignes de fractures ethniques, aucune communauté ne faisant confiance aux autres.

La République serbe de Bosnie, isolée sur le plan politique sans le soutien de la Serbie, est mise en accusation par le Tribunal pénal international (TPI) de La Haye qui a pour mission de juger les crimes de guerre commis au cours du conflit. Ainsi, l’ancien président des Serbes de Bosnie, Radovan Karad¸ić et son chef militaire, le général Mladič, sont tous deux inculpés par le TPI et accusés de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. De son côté, la Fédération croato-musulmane semble avoir du mal à trouver un mode de fonctionnement : deux armées sans commandement unique coexistent ; on y trouve des plaques minéralogiques différentes, etc. Mostar, la ville principale, en est l’exemple le plus frappant, avec une partie occidentale croate, et une autre partie orientale musulmane, gravement touchée par les combats.

La première élection présidentielle de la présidence tripartite, organisée en septembre 1996 et supervisée par l’Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE), est remportée par le Musulman Alija Izetbegović (SDA). Lors du même scrutin, Momčilo Krajisnik (SDS) devient le président serbe de la Bosnie-Herzégovine, et Krešimir Zubak (HDZ) son président croate.

Malgré la mise en place des institutions centrales, la nouvelle architecture politique de la Bosnie-Herzégovine demeure précaire et inachevée. La plupart des problèmes restent irrésolus : la reconstruction économique n’est qu’à peine entamée ; le sort de la ville de Brčko, qui commande le passage entre les deux parties de la République serbe mais est revendiquée par les Musulmans, n’est toujours pas décidé et l’OTAN prévoit de maintenir une force multinationale de 30 000 hommes au-delà de la date prévue pour son départ (juin 1998). De même, les rapports au sein de la Fédération croato-musulmane demeurent tendus entre le HDZ croate et le SDA musulman. Cependant, des signes certains d’amélioration se font jour au cours de l’année 1997. La décision prise en mars 1998 d’adopter des plaques d’immatriculation identiques pour les trois communautés, et sans signes distinctifs, est symbolique de ce lent cheminement vers la réintégration. Surtout, l’OTAN tente de prouver sa détermination à faire appliquer les accords de Dayton. À partir de juillet 1997, elle se lance dans des opérations militaires ponctuelles visant à arrêter les criminels de guerre recherchés par le TPI quelle que soit leur origine, serbe, croate ou musulmane. Les changements politiques intervenus en République serbe favorisent également la mise en application progressive des accords de Dayton. En effet, la présidente Biljana Plavsic, longtemps proche de Karad¸ić, s’oppose à ce dernier et, soutenue par les Occidentaux, tente de mettre en place un pouvoir plus modéré. Elle dissout ainsi le Parlement serbe de Pale en juillet 1997 et fait transférer le siège de la présidence et du gouvernement à Banja Luka, tandis que Radovan Karad¸ić se trouve de plus en plus isolé politiquement. À l’issue des élections générales de septembre 1998, la présidence collégiale tripartite de Bosnie-Herzégovine revient à ´ivko Radisić, élu de la communauté serbe, à Alija Izetbegović, réélu par la communauté musulmane avec 87 p. 100 des voix, et au Croate Ante Jelavić, nouveau président de la Communauté démocratique croate (HDZ). Le Parti d’action démocratique (SDA) d’Alija Izetbegović conserve la majorité au Parlement de la Fédération croato-musulmane, mais perd la majorité absolue. En République serbe de Bosnie, les électeurs élisent Nikola Poplasen (Parti radical, extrême droite), en remplacement de Biljana Plavsic. Cependant, la coalition Sloga, dite modérée, de Biljana Plavsic, de l’ancien Premier ministre Milorad Dodik et de ´ivko Radisić remporte une majorité relative à la Chambre des représentants du gouvernement fédéral. En mars 1999, par un arbitrage international, la ville de Brčko au nord de la Bosnie, qui commande le passage entre les deux parties de la République serbe de Bosnie, devient un district neutre qui échappe ainsi au contrôle exclusif de la Republika Srpska ou de la Fédération croato-musulmane.

Les élections générales de novembre 2000 donnent à nouveau la majorité aux partis nationalistes dans les deux entités qui forment la Bosnie-Herzégovine. En République serbe, c’est le Parti démocratique serbe (SDS) qui remporte la victoire tandis que son candidat, Mirko Sarovic, est élu à la présidence de l’entité serbe au premier tour de scrutin avec 50,2 p. 100 des voix. Dans la Fédération croato-musulmane, ce sont les nationalistes musulmans du Parti d’action démocratique (SDA) qui remportent le plus de sièges, alors que les nationalistes croates de la Communauté démocratique croate (HDZ) réalisent également un score élevé. Au Parlement fédéral toutefois, bien qu’ayant obtenu des résultats importants, les nationalistes perdent la majorité et, le 22 février 2001, pour la première fois depuis les accords de Dayton, un gouvernement non nationaliste est formé. La majorité des six membres du cabinet et le Premier ministre, Bozidar Matic, sont issus de l’Alliance pour le changement, une coalition réformiste et multiethnique de dix partis formée à la mi-janvier autour du Parti social-démocrate (SDP) de Bozidar Matic. La formation d’un gouvernement réformiste est saluée par la communauté internationale, tandis que la Fédération croato-musulmane est rebaptisée Fédération de Bosnie et Herzégovine.

En avril 2002, l’entrée de la Bosnie-Herzégovine au sein du Conseil de l’Europe consacre cette évolution démocratique. Au mois de juillet, les membres de la présidence tripartite de Bosnie-Herzégovine ainsi que les présidents croate et serbe se réunissent pour la première fois depuis les accords de Dayton en 1995 et se prononcent en faveur de rapports de « bon voisinage «. Mais les élections d’octobre 2002 sont à nouveau marquées par la victoire des partis nationalistes. Le Bosniaque Sulejman Tihic (SDA), le Serbe Mirko Sarovic (SDS) et le Croate Dragan Covic (HDZ) sont élus à la présidence collégiale. Mirko Sarovic, démissionnaire à la suite d’un scandale, est remplacé par Borislav Paravan en avril 2003.

5.3.3 La transition européenne

En décembre 2004, l’Union européenne prend le relais de l’OTAN en Bosnie-Herzégovine, avec une force de 6 300 soldats réunis au sein de l’Eufor (Force de l’Union européenne) et issus d’une trentaine de pays européens. La mission Althéa reprend toutes les missions de l’OTAN en ce qui concerne le maintien de la paix, mais l’UE continue de partager avec l’OTAN la traque des criminels de guerre recherchés par le TPIY, notamment Radovan Karad¸ić et Ratko Mladic. Les sanctions adoptées au même moment par le haut représentant de la communauté internationale en Bosnie, le Britannique Paddy Ashdawn, contre le gouvernement pour manque de coopération avec le TPIY (limogeage de responsables de la police et de l’administration) entraînent la démission du Premier ministre serbe bosniaque, Dragan Mikerevic, et de presque toute la représentation serbe du gouvernement central de Bosnie. Cette crise institutionnelle prend fin en février 2005 avec la constitution d’un nouveau gouvernement de la République serbe de Bosnie dirigé par Pero Bukejlevic (SDS) et le retour des ministres serbes au sein du gouvernement central. Au mois de novembre 2005, à l’occasion du dixième anniversaire des accords de paix de Dayton, les dirigeants bosniaques réunis à Washington acceptent d’envisager le principe d’une révision du traité dans la direction notamment d’une présidence unique et non plus une présidence tournante tripartite afin de renforcer l’État bosniaque et de mettre fin à la perpétuation d’un système de division communautaire. En octobre 2006, pour la première fois depuis la fin de la guerre, les élections générales ne sont pas remportées par les partis nationalistes, SDA, SDS et HDZ, au niveau fédéral comme au niveau des Parlements bosniaque et serbe : pour l’élection de la Chambre des représentants de la République de Bosnie-Herzégovine, comme pour les élections de la Chambre des représentants de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et de l’Assemblée nationale de la République serbe, les vainqueurs sont le SDA, qui arrive en tête mais n’est pas en mesure de former un gouvernement et le Parti pour la Bosnie-Herzégovine (SBIH) dans le collège musulman, le Parti social-démocrate (SDP) dans le collège croate et le Parti des sociaux-démocrates indépendants (SNDS) du côté serbe, formation du Premier ministre Milorad Dodik, qui devance le SDS. Les vainqueurs pour l’élection de la présidence collégiale sont Haris Silajdzic (SBIH, musulman), Zeljko Komsic (SDP, croate) et Nebojsa Radmanovic (SNSD, serbe). Au sein de l’entité serbe, Milan Jelic (SNSD) remporte l’élection présidentielle. Alors qu’en juin 2006, le Conseil de mise en œuvre des accords de Dayton a décidé de mettre un terme à la fonction de Haut Représentant de la communauté internationale le 3 juin 2007, ces élections et la victoire de partis apparemment plus modérés apparaissent déterminantes pour l’avenir d’une Bosnie-Herzégovine en passe de ne plus être sous tutelle internationale. Dans ce contexte, l’invitation faite à la Bosnie-Herzégovine par l’OTAN en novembre 2006 à rejoindre le « Partenariat pour la paix « apparaît également comme un pari sur l’avenir, les partisans de cette décision escomptant que cette perspective renforcera les forces progressistes bosniaques.

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