Devoir de Philosophie

Canada

Publié le 11/04/2013

Extrait du document

canada
1 PRÉSENTATION

Canada, pays d’Amérique du Nord. Sa capitale est Ottawa. Le Canada est membre du Commonwealth.

Le Canada est limité au nord par l’océan Arctique, au nord-est par la baie de Baffin et le détroit de Davis qui le séparent du Groenland, à l’est par l’océan Atlantique, au sud par les États-Unis et à l’ouest par l’océan Pacifique et l’Alaska. Il comprend de nombreuses îles, notamment l’archipel Arctique canadien, dans l’océan Arctique. Les plus grandes de ces îles, qui couvrent en tout 1 424 500 km2 sont, par ordre décroissant, la terre de Baffin, la terre Victoria, l’île d’Ellesmere, l’île Banks, l’île Devon, l’île Axel Heiberg et l’île Melville.

 

2 MILIEU NATUREL

Le Canada est le deuxième pays au monde par sa superficie (9 984 670 km²), derrière la Russie. Il s’étend sur 6 500 km d’est en ouest, du 52e au 141e degré de longitude, et sur 5 000 km du nord au sud, du 84e degré de latitude (cap Columbia, île d’Ellesmere) au 42e (Ontario).

2.1 Relief
2.1.1 Régions naturelles

Si l’on excepte l’archipel Arctique, on distingue, au Canada, cinq grandes régions naturelles : le Bouclier canadien, les Appalaches, les plaines des Grands Lacs et du Saint-Laurent, les plaines intérieures (ou Prairie) et la Cordillère.

La plus vaste de ces régions, le Bouclier canadien, s’étend de la péninsule du Labrador au Grand Lac de l’Ours, de l’océan Arctique à l’archipel des Mille-Îles dans le Saint-Laurent et, aux États-Unis, à l’ouest du lac Supérieur et au nord de l’État de New York. Cette région, formée de roches anciennes granitiques (datant du précambrien), dénudée et fortement érodée par les glaces, est une pénéplaine composée de collines. Elle englobe le Labrador (dont la partie orientale constitue, avec l’île de Terre-Neuve, la province de Terre-Neuve-et-Labrador), la plus grande partie du Québec, le nord de l’Ontario, le Manitoba et la majorité des Territoires du Nord-Ouest, avec la baie d’Hudson, une mer intérieure couvrant environ 730 380 km2. C’est une des plus vieilles terres du monde. Le Bouclier est recouvert de forêts boréales, de lacs et de marais ; il se relève au sud et à l’est vers les hautes terres canadiennes.

L’est du Canada est à la fois le domaine de la région appalachienne, des plaines des Grands Lacs et du Saint-Laurent. La région appalachienne englobe l’île de Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard, ainsi que la Gaspésie, au Québec. C’est une extension du système montagneux des Appalaches, situé aux États-Unis, et de la plaine côtière atlantique. Les plaines des Grands Lacs et du Saint-Laurent, qui couvrent une superficie de près de 100 000 km2 dans le sud du Québec et de l’Ontario, constituent la plus grande étendue de terres cultivables de l’est et du centre du Canada ; la plupart des industries manufacturières du pays y sont implantées.

Bordant à l’ouest le Bouclier canadien, les plaines intérieures (la Prairie canadienne) sont une extension des Grandes Plaines des États-Unis. S’étendant sur une largeur de 1 300 km à la frontière américaine, elles se réduisent à 320 km environ à l’ouest du Grand Lac de l’Ours pour s’élargir à nouveau à l’embouchure du fleuve Mackenzie et atteindre 480 km environ sur la côte arctique. Les plaines intérieures englobent le nord-est de la Colombie-Britannique, la plus grande partie de l’Alberta, la moitié sud de la Saskatchewan et le tiers méridional du Manitoba. Cette région possède les terres les plus fertiles du Canada, utilisées essentiellement pour la céréaliculture.

À l’ouest des plaines intérieures se situe une zone montagneuse qui est une portion de la Cordillère, gigantesque chaîne qui s’étend de la pointe méridionale de l’Amérique du Sud jusqu’à l’extrémité de l’Alaska. Au Canada, la Cordillère a une largeur moyenne d’environ 800 km. Elle englobe l’ouest de l’Alberta, la plus grande partie de la Colombie-Britannique et la quasi-totalité du Yukon. Elle se compose des montagnes Rocheuses et des formations apparentées, dont les monts Mackenzie, Franklin et Richardson. Le mont Robson (3 954 m) est le plus haut sommet des Rocheuses canadiennes et une dizaine d’autres pics s’élèvent à plus de 3 500 m.

À l’ouest des Rocheuses canadiennes se trouvent d’autres formations montagneuses, dont les monts Caribou, Stikine et Selkirk, et une vaste région de plateaux. Cette dernière zone est sillonnée de profondes vallées et possède de vastes étendues de terres cultivables, en particulier en Colombie-Britannique. À l’ouest de cette bande centrale, et presque parallèlement à l’océan Pacifique, se dresse un autre grand système montagneux parsemé de glaciers, qui englobe la chaîne Côtière, prolongement de la chaîne des Cascades aux États-Unis ainsi que divers chaînons côtiers. Les sommets les plus remarquables de la Cordillère occidentale canadienne sont le mont Logan (5 959 m, point culminant du Canada et deuxième sommet d’Amérique du Nord, après le mont McKinley), le mont Saint Elias (5 489 m), le mont Lucania (5 226 m) et le King Peak (5 173 m), tous situés dans la chaîne Saint Elias.

2.1.2 Côtes et îles

La côte continentale du Canada, qui mesure quelque 58 500 km de long, est extrêmement accidentée et irrégulière, alternant baies et vastes péninsules. Outre l’archipel Arctique, le Canada compte aussi de nombreuses îles, qui totalisent 185 290 km de côtes. Au large des côtes orientales, les plus grandes îles sont Terre-Neuve, l’île du Cap-Breton, l’Île-du-Prince-Édouard et l’île d’Anticosti. La côte ouest, avec sa dentelle de fjords, est bordée par l’île de Vancouver et les îles de la Reine-Charlotte. L’île Southampton et de nombreux îlots se trouvent dans la baie d’Hudson, large mer intérieure au centre-est du Canada.

2.2 Hydrographie

Le Canada comprend davantage de lacs et d’eaux intérieures que tout autre pays au monde (250 000 lacs, soit une superficie de 755 180 km2 représentant 7,5 p. 100 du territoire) ; ils constituent l’une des principales sources de richesse sur le plan énergétique et en tant que voies de communication. Outre les Grands Lacs situés à la frontière avec les États-Unis — et qui, à l’exception du Michigan, se situent tous pour partie en territoire canadien —, le pays compte une trentaine de lacs de plus de 1 300 km2. Les plus grands de ces lacs sont le Grand Lac de l’Ours, le Grand Lac de l’Esclave, tous deux situés dans les Territoires du Nord-Ouest, le lac Athabasca (sur la frontière entre l’Alberta et la Saskatchewan) et le lac Winnipeg au Manitoba.

Le Saint-Laurent constitue une artère fluviale primordiale pour le pays ; c’est l’exutoire des Grands Lacs et il se déverse dans le golfe du Saint-Laurent. Les autres cours d’eau du Canada sont la rivière des Outaouais et le Saguenay, principaux affluents du Saint-Laurent ; le fleuve Saint-Jean, qui se déverse dans la baie de Fundy, entre la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick ; la Saskatchewan, qui se jette dans le lac Winnipeg ; le fleuve Nelson, qui coule du lac Winnipeg vers la baie d’Hudson. Le système formé par l’Athabasca, la rivière de la Paix, la rivière des Esclaves et le Mackenzie se jette dans l’océan Arctique. Le cours supérieur du Yukon traverse l’Alaska pour se jeter dans la mer de Béring. Enfin, le fleuve Fraser et le cours supérieur de la Columbia se jettent dans l’océan Pacifique.

2.3 Climat

En raison de son étendue et de sa localisation, le pays offre un climat varié. Une partie du Canada continental et la majorité de l’archipel Arctique se situent dans la zone polaire ; le reste du pays se trouve dans le nord de la zone tempérée. Aussi, les conditions climatiques générales varient-elles du froid extrême, caractéristique des régions arctiques, jusqu’aux températures modérées des régions plus méridionales. Mais la majeure partie du pays subit un enneigement supérieur à cinq mois.

Le climat canadien est marqué par de fortes disparités régionales. Dans les Provinces maritimes (Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse et Île-du-Prince-Édouard), le froid hivernal et la chaleur estivale sont atténués par les courants océaniques, qui provoquent également d’épais brouillards et de fortes précipitations. Le long de la côte ouest, zone influencée par des courants chauds maritimes et des vents chargés d’humidité, le climat se caractérise par des étés et des hivers doux, une humidité élevée et d’abondantes précipitations. Dans la Cordillère, les versants occidentaux de certaines chaînes élevées, en particulier les monts Selkirk et les Rocheuses, subissent d’assez fortes précipitations de pluie et de neige, tandis que les versants orientaux et le plateau central sont extrêmement arides.

Au sein de la Cordillère souffle le chinook (voir Fœhn), un vent d’ouest sec et chaud qui adoucit sensiblement les conditions hivernales sur les contreforts des Rocheuses et les plaines adjacentes, provoquant de brusques variations de température en l’espace d’une journée. Le blizzard est également caractéristique du climat canadien.

L’amplitude thermique peut être très élevée d’une province à l’autre : à Victoria (Colombie-Britannique), les températures varient entre 4 °C en janvier et 15 °C en juillet ; dans la Prairie, elles peuvent descendre jusqu’à - 17 °C et monter jusqu’à 40 °C à Saskatoon (Saskatchewan). Dans le Grand Nord, situé dans la zone subarctique, les hivers sont longs et rigoureux. Enfin, autour de la péninsule du Labrador, la mer est souvent prise par les glaces, constituant une banquise.

2.4 Végétation et faune
2.4.1 Végétation

Aux différentes aires climatiques correspondent des zones biogéographiques qui se succèdent du nord au sud. La flore de la partie septentrionale du Canada s’inscrit dans les zones arctique et subarctique. C’est le domaine de la toundra ou barren grounds. Le sol y est toujours gelé (pergélisol ou permafrost) ; les mousses, les lichens, les saxifrages et les potentilles sont les seules espèces végétales qui peuvent survivre. Plus au sud, une zone intermédiaire de tourbières, le muskeg, assure la transition avec la forêt boréale.

En effet, une bonne partie des Provinces maritimes est couverte par des forêts boréales alliant espèces à bois dur et espèces à bois tendre, épinettes blanches et noires, sapins, mélèzes, pins, thuyas, trembles, bouleaux et peupliers. Du Manitoba à la Nouvelle-Écosse, une forêt tempérée s’est développée : la forêt Laurentienne (s’étendant des Laurentides jusqu’au Québec), composée d’érables (l’emblème du pays), de hêtres, de bouleaux, de pruches et de sapins. Les arbres à feuilles caduques dominent entièrement les érablières laurentiennes. Plus au sud, dans l’Ontario, on rencontre des espèces méridionales : châtaigniers, noyers, tulipiers. La Prairie canadienne, qui était à l’origine une vaste steppe, est couverte d’herbages.

Les versants secs et les vallées des Rocheuses sont couverts de forêts clairsemées — de pins principalement —, mais celles-ci gagnent en densité et en hauteur vers les régions plus arrosées de l’ouest. Sur les chaînes côtières, en particulier sur leurs versants occidentaux, poussent de denses forêts d’arbres à feuilles persistantes. Les principales espèces y sont l’épicéa, le tsuga (ou hemlock), le sapin de Douglas, le sapin baumier, le pin de Banks (ou d’Hudson), le pin vrillé, le cèdre et le thuya.

2.4.2 Faune

La faune canadienne est très semblable à celle des pays du nord de l’Europe et de l’Asie. Parmi les carnivores sont représentées plusieurs espèces de mustélidés, telles que l’hermine, la zibeline, la martre et le vison. Les autres carnivores vivant au Canada sont l’ours noir (ou baribal), le grizzly, le lynx, le loup, le coyote, le renard et la moufette. L’ours polaire habite les zones arctiques ; le puma se trouve en Colombie-Britannique. Le castor est le plus caractéristique des rongeurs canadiens. Le porc-épic, le rat musqué et nombre de petits rongeurs sont fréquents, ainsi que le lièvre.

Plusieurs cervidés vivent dans le sud du Canada et dans certaines parties de la région des Plaines, principalement le cerf d’Amérique du Nord (ou wapiti), le caribou des forêts et l’orignal (ou élan du Canada). On trouve le bœuf musqué dans les régions septentrionales arctiques. L’élan et le bison peuplent diverses contrées de l’ouest. Les montagnes de Colombie-Britannique sont peuplées de mouflons et de chèvres des Rocheuses. Les oiseaux sont nombreux et variés et les poissons abondent dans les eaux intérieures et le long des côtes. Les reptiles sont rares, sauf dans l’extrême sud, de même que les insectes (à l’exception des moustiques, que l’on trouve en grand nombre dans la partie continentale des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, durant la brève saison d’été).

2.5 Ressources et contraintes du milieu naturel

Le Canada est richement doté en ressources naturelles, mais le froid et l’immensité des distances ralentissent leur exploitation. Le relief montagneux (dans les Appalaches et dans les Rocheuses) rend le peuplement difficile, et cette inégale répartition de l’habitat demeure une contrainte pour le pays.

Les terres fertiles occupent d’importantes superficies dans la Prairie canadienne (Alberta, Manitoba, Saskatchewan), ainsi que dans la région des Grands Lacs et des Basses Terres de la vallée du Saint-Laurent, dans le sud du Québec et de l’Ontario. Cette dernière région, qui couvre moins de 2 p. 100 du territoire canadien est la plus riche.

Les forêts occupent la moitié de la surface terrestre du pays ; elles représentent une des bases de l’économie. La pêche bénéficie de l’abondance et de la richesse des eaux maritimes et intérieures. Le Bouclier canadien regorge de minerais ; le pays est également riche en réserves de pétrole brut et de gaz naturel. Avec ses systèmes hydrographiques et sa topographie montagneuse, le Canada trouve dans l’hydroélectricité une ressource énergétique naturelle inépuisable.

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Démographie

En 2008, le Canada comptait 33,7 millions d'habitants. La majeure partie de la population occupe une bande de territoire relativement étroite le long de la frontière avec les États-Unis, les provinces du Québec et de l’Ontario, la Prairie, les Provinces atlantiques et l’intérieur de la Colombie-Britannique. Environ 60 p. 100 des habitants sont concentrés sur à peine 3 p. 100 du territoire. Partout ailleurs, que ce soit dans le Yukon ou dans les Territoires du Nord-Ouest ou le Nunavut, l’habitat est très clairsemé : la densité est de 4 habitants au km² en 2008. En 2005, environ 81 p. 100 des Canadiens vivaient dans les villes.

La croissance de la population a été de 4 p. 100 entre 1996 et 2001. En 2005, le taux de natalité s’élève à 10,7 p. 1 000 et le taux de mortalité à 7,9 p. 1 000. Les moins de 14 ans représentent 17,1 p. 100 de la population totale et les plus de 65 ans, 13,7 p. 100. Le taux de fécondité s’élève à 1,6 enfant par femme. En 2008, la mortalité infantile est faible : 4,60 p. 1 000 ; l’espérance de vie se situe dans la moyenne supérieure de celle des grands pays industrialisés, soit 80,5 années.

3.2 Découpage administratif et villes principales

Le Canada est subdivisé en dix provinces — Alberta, Colombie-Britannique, Manitoba, Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve-et-Labrador (le 6 décembre 2001, la province de Terre-Neuve devient Terre-Neuve-et-Labrador par proclamation constitutionnelle), Nouvelle-Écosse, Ontario, Île-du-Prince-Édouard, Québec et Saskatchewan — et en trois territoires — Territoires du Nord-Ouest, Yukon et Nunavut (créé en avril 1999, ce territoire situé dans le Grand Nord canadien et dont le nom esquimau signifie « notre terre « reconnaît l’autonomie territoriale des Inuit).

Les principales villes du Canada sont Toronto (Ontario, 640 000 habitants), ville portuaire et manufacturière ; Montréal (Québec, 1 015 000 habitants), port et important centre commercial ; Vancouver (Colombie-Britannique, 1 500 000 habitants), centre ferroviaire, port marchand et ville industrielle ; Ottawa (Ontario, 357 457 habitants), capitale fédérale du Canada et centre institutionnel ; Winnipeg (Manitoba, 652 354 habitants), important marché céréalier et nœud ferroviaire ; Edmonton (Alberta, 616 741 habitants), centre agricole et pétrolier ; Québec (Québec, 645 550 habitants), ville portuaire et industrielle, cité culturelle et touristique ; Hamilton (Ontario, 318 500 habitants), centre maritime et industriel ; Calgary (Alberta, 744 033 habitants), centre de transport, minier et agricole ; Saint Catharines (Ontario, 96 500 habitants), centre industriel et commercial ; Kitchener (Ontario, 110 950 habitants), ville manufacturière ; Halifax (Nouvelle-Écosse, 320 501 habitants), port maritime et ville industrielle.

3.3 Institutions et vie politique
3.3.1 Constitution de l’État fédéral

La loi constitutionnelle de 1982 octroie au Canada la pleine autorité sur sa Constitution. Auparavant, l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867, qui a fédéré le Canada au moment où il était encore une colonie de la Grande-Bretagne, réservait au Parlement britannique un certain contrôle sur cette Constitution. À l’occasion de ce « rapatriement «, le gouvernement fédéral de Pierre Elliott Trudeau demande et obtient de la Grande-Bretagne l’addition d’une Charte des droits et des libertés à la future Constitution canadienne, pour garantir aux citoyens un certain nombre de libertés fondamentales — telles que la liberté de conscience ou les droits démocratiques. Le Québec s’oppose fermement à cette démarche. Lors de la campagne référendaire de mai 1980, les chefs fédéralistes promettent de « renouveler « le régime si le « non « l’emporte — ce qui sera le cas. Du point de vue du Québec, non seulement la Charte contredit cet engagement, mais, axée sur la protection des droits individuels (par opposition aux droits collectifs), elle réduit les pouvoirs constitutionnels de la province sans le consentement de son Assemblée nationale, notamment en ce qui concerne la promotion de la langue française. Pour calmer les appréhensions de certaines provinces, dont le Québec, qui craignent l’avènement d’un « gouvernement des juges «, les autorités fédérales consentent à ce que la Charte renferme une disposition permettant au Parlement ou aux organes législatifs provinciaux de mettre une loi en vigueur, même si elle est en contradiction avec une clause de la Charte. Cependant, les autorités fédérales enlèvent de la portée de la disposition dérogatoire une grande partie de la politique linguistique québécoise qui, depuis 1977, favorisant ouvertement le français, déplaît à la minorité anglophone du Québec et aux autres Canadiens. L’attitude du gouvernement central à l’occasion du « rapatriement « et l’adhésion des provinces anglophones à cette attitude aggravent le malaise politique qui existe déjà entre le Québec et le reste du Canada.

Le Canada est une union fédérale, au sein de laquelle les pouvoirs sont répartis entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Des tensions persistent néanmoins entre ces deux instances quant à la juste répartition de ces pouvoirs. Parmi les attributions des gouvernements provinciaux figurent l’enseignement, la santé publique, les droits de propriété et les droits civils provinciaux, la taxation locale, les richesses naturelles, la réglementation du commerce local et l’emprunt. Dans certains domaines, tels que l’immigration et l’agriculture, les deux gouvernements exercent une juridiction conjointe. Enfin, une loi fédérale stipule que le gouvernement d’Ottawa appliquera le veto qu’il est désormais seul à détenir en vertu de la Constitution de 1982 aux amendements constitutionnels. Cette loi a été adoptée au début de 1996 en réaction à la crise provoquée par le résultat serré du référendum québécois d’octobre 1995.

3.3.2 Pouvoir exécutif

Le chef de l’État est le souverain britannique, représenté au Canada par un gouverneur général ; le chef du parti qui remporte les élections devient le Premier ministre, responsable devant le Parlement.

3.3.3 Pouvoir législatif

Le Parlement canadien se compose de deux Chambres : le Sénat (ou Chambre haute), qui compte 104 membres, nommés par le gouverneur général sur avis du Premier ministre, et la Chambre des communes (ou Chambre basse), qui compte 308 membres. Les sénateurs sont nommés à vie, tandis que les membres de la Chambre sont élus pour cinq ans au suffrage universel. Les lois doivent être approuvées par les deux Chambres et signées par le gouverneur général.

3.3.4 Pouvoir judiciaire

Le système judiciaire canadien est dérivé du droit coutumier anglais, hormis au Québec, où le système provincial de droit civil est fondé sur le Code Napoléon. Au niveau fédéral, le pouvoir judiciaire est aux mains de la Cour suprême du Canada, composée d’un président et de neuf juges, dont trois doivent provenir du Québec. Cette cour siège à Ottawa et constitue la juridiction d’appel finale pour toutes les affaires civiles, criminelles et constitutionnelles. Une autre juridiction, la Cour fédérale du Canada, se compose d’une chambre de première instance et d’une cour d’appel. Les provinces possèdent également leurs propres tribunaux.

3.3.5 Gouvernement local

Le souverain est représenté, dans chacune des dix provinces du Canada, par un lieutenant-gouverneur, nommé par le gouverneur général, sur avis du Premier ministre. Le chef du gouvernement de chaque province est le Premier ministre, qui est responsable devant le Parlement provincial, monocaméral. Le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest sont gouvernés par des commissaires, nommés par le gouvernement fédéral. Ils sont assistés, dans les Territoires du Nord-Ouest, par une Assemblée législative et, dans le Yukon, par un Conseil et un Parlement élus. Le Nunavut, créé en avril 1999, possède une Assemblée nationale élue au suffrage universel, un gouvernement qui en est issu ainsi qu’un Premier ministre.

3.3.6 Partis politiques

Depuis le xixe siècle, les partis politiques nationaux les plus puissants ont été traditionnellement le Parti libéral et le Parti conservateur (devenu en 1942 le Parti progressiste-conservateur, il a été rebaptisé Parti conservateur en 2004 après sa fusion avec l’Alliance canadienne), symbolisant le bipartisme canadien. Cependant, au début des années 1990, le paysage politique s’est transformé et de nouvelles formations se sont implantées. Ainsi, le Nouveau parti démocratique (New Democratic Party) a pris à son compte les valeurs de la démocratie sociale et les droits des organisations ouvrières ; il a trouvé son électorat dans l’Ontario et les provinces de l’Ouest. Le Parti réformiste (Reform Party), actif en Alberta, représente la tendance la plus conservatrice du Canada anglophone. Le Bloc québécois milite pour la souveraineté du Québec. Dans une certaine mesure, ce parti est le bras fédéral du Parti québécois, fondé par René Lévesque.

3.3.7 Défense nationale

Les origines de l’armée canadienne remontent au xviie siècle, à l’époque où les colons cherchaient à se protéger des incursions indiennes. Aujourd’hui, les forces armées canadiennes sont intégrées et placées sous le contrôle du chef d’état-major, qui dépend du ministre de la Défense nationale. En 1997, la marine comptait 9 400 hommes, l’aviation 14 600 et l’armée de terre 22 000 ; chiffres auxquels il faut ajouter 23 100 soldats répartis entre les services communs.

Le Canada est membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et lui fournit des troupes aériennes et terrestres, les Forces canadiennes en Europe. Le Canada contribue également aux forces de maintien de la paix des Nations unies. En 2003, 1,2 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) était consacré à la défense.

3.4 Langues et religions
3.4.1 Découpage ethno-linguistique

Le Canada étant traditionnellement un pays d’immigration, sa population est diversifiée. Environ 34 p. 100 des Canadiens sont d’origine britannique. La population d’origine française représente 28 p. 100 de l’ensemble. La majorité des Canadiens francophones vit au Québec, où ils représentent environ 80 p. 100 de la population ; ils sont également présents en grand nombre dans l’Ontario et au Nouveau-Brunswick (Acadiens) et, dans une moindre mesure, dans les autres provinces.

Depuis les années 1980, la proportion d’Asiatiques, immigrés principalement de Hong Kong, augmente au sein de la population canadienne. Le reste des habitants est originaire d’Allemagne, d’Italie, d’Ukraine, des Pays-Bas, de Pologne, de Hongrie et de Grèce.

Les peuples autochtones représentent près de 4 p. 100 de la population canadienne et sont essentiellement des Amérindiens (Algonquins, Iroquois, Salishans et Athabascans) et des Inuit, qui constituent 0,3 p. 100 de la population.

3.4.2 Langues

Le Canada possède deux langues officielles : l’anglais et le français. Une minorité d’Amérindiens utilise encore sa propre langue.

Depuis les années 1960, de nombreuses lois ont été votées au Québec sur le statut de la langue française. C’est, tout d’abord, la loi 63 en 1969, qui promeut l’usage du français, puis la loi 22 en 1974, qui proclame le français langue officielle du Québec — et qui mécontente francophones et anglophones. Cependant, en 1977, le gouvernement de René Lévesque va encore plus loin, en faisant voter la loi 101, affirmant la primauté du français dans tous les domaines. Cette loi sera contestée devant les tribunaux et la Cour suprême canadienne par les fédéralistes. Enfin, en 1993, sous le gouvernement libéral de Robert Bourassa, est votée la loi 86, permettant l’affichage extérieur et intérieur dans les deux langues, mais avec prépondérance du français.

3.4.3 Religions

La plus importante communauté religieuse du Canada est celle des catholiques, dont près de la moitié vit au Québec. En 1991, ils représentaient 45,2 p. 100 de la population. La principale communauté protestante est l’Église unifiée du Canada, suivie par l’Église anglicane du Canada, soit 36,2 p. 100. Les autres groupes religieux importants sont les presbytériens, les luthériens, les baptistes, les orthodoxes, les juifs et les pentecôtistes. Les autres appartenances religieuses, représentées en moindre nombre, comprennent les musulmans, les hindous et les sikhs.

3.5 Éducation

Le système éducatif canadien associe les traditions anglo-saxonnes (britanniques et américaines) et la tradition française, plus particulièrement au Québec (voir enseignement au Québec). La langue d’enseignement est l’anglais ou le français, certains établissements proposant des cours dans les deux langues. Chacune des dix provinces est responsable de la mise en œuvre et de la gestion de son propre système scolaire. En 2002, 5,20 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) est consacré à l’éducation.

Les premières grandes universités apparaissent au début du xixe siècle, tout d’abord McGill, à Montréal, en 1821, puis celles d’Ottawa en 1848 et de Toronto en 1850, auxquelles il faut ajouter l’université de Montréal et l’université Laval, à Québec. Depuis 1945, l’enseignement supérieur a connu une forte expansion. Le système universitaire est financé à la fois par le gouvernement fédéral et par les gouvernements provinciaux. Les universités restent les principaux centres d’enseignement supérieur, mais le nombre d’institutions postsecondaires non universitaires, en particulier les collèges confessionnels, a fortement augmenté ces dernières années.

3.6 Arts et vie culturelle

L’État fédéral encourage particulièrement les arts par le biais du Conseil des arts du Canada (Canada Council), fondé en 1957, qui octroie des bourses et des dons. Il favorise les politiques de décentralisation qui mettent les ressources culturelles à la portée des communautés les plus isolées. Depuis les années 1970, l’État observe une politique multiculturelle visant à l’expression des diverses influences qui composent le kaléidoscope de la vie culturelle au Canada, y compris les cultures amérindiennes et inuit. Cet héritage multiculturel se retrouve dans le musée canadien de la Civilisation situé à Hull, au Québec, ainsi qu’au Royal British Columbia Museum, à Victoria, où sont conservés de nombreux objets d’artisanat indien. L’Académie canadienne française, une société de gens de lettres et d’artistes, est chargée de promouvoir la culture et la littérature françaises au Québec.

En outre, l’institution du mouvement des Jeunesses musicales permet à tous les jeunes Canadiens de suivre une formation musicale. L’opéra occupe une place prédominante, avec la Canadian Opera Company et de nombreux festivals, tel le festival international de Vancouver. Enfin, les métropoles canadiennes accueillent souvent des orchestres tels que l’Orchestre symphonique de Toronto, institué en 1923, ou l’Orchestre symphonique de Montréal, créé en 1934.

La danse est également promue à travers les diverses troupes comme le National Ballet of Canada, à Toronto, le Royal Winnipeg Ballet et les Grands Ballets canadiens.

Voir aussi art canadien ; cinéma canadien ; littérature canadienne.

3.7 Médias

Au début des années 1990, l’entreprise publique Canadian Broadcasting Corporation (CBC) possède et administre 65 stations de radio ; le pays compte 695 chaînes de radio et 116 télévisions privées. Radio-Canada, créée en 1936, regroupe à la fois des chaînes de télévision et des stations de radio.

Le service téléphonique intérieur est essentiellement assuré par Telecom Canada, un consortium regroupant neuf entreprises de téléphone et englobant Telesat Canada, fondée en 1969, pour offrir des services de communications par satellite.

Plus d’une centaine de quotidiens paraissent au Canada. Les titres les plus lus sont le Calgary Herald, l’Edmonton Journal, la Province (Vancouver), le Vancouver Sun, le Winnipeg Free Press, le Globe and Mail (Toronto), le Toronto Star, le Toronto Sun et, à Montréal, le Journal de Montréal. La moitié de ces journaux appartiennent à deux grands groupes financiers : Thomson et Southam.

4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités

Jusqu’au début du xxe siècle, le Canada était essentiellement un pays agricole ; depuis, il est devenu l’un des pays les plus industrialisés au monde, avec, en 2003, un produit intérieur brut (PIB) de 1 271,6 milliards de dollars, soit 38 947,40 dollars par habitant. Pour la période 2006, le taux de croissance moyen s’établit à 2,80 p. 100. Dans une large mesure, les industries manufacturières sont approvisionnées en matières premières par les abondantes ressources naturelles du pays.

L’inflation a été maîtrisée (2,30 p. 100 pour la période 2006), mais deux grands problèmes demeurent : le poids de la dette publique (65 p. 100 du PIB) et le taux de chômage élevé (7 p. 100 de la population active en 2005). Ce taux moyen ne reflète pas les disparités régionales ; ainsi l’ouest est moins touché que l’est du Canada, où il atteint 18 p. 100 à Terre-Neuve-et-Labrador, depuis le récent effondrement de l’industrie de la pêche.

4.2 Agriculture, forêts, pêche

L’économie canadienne dépend fortement de l’agriculture, qui n’employait cependant que 2,7 p. 100de la population active en 2002 et ne représentait que 2,2 p. 100 du PIB en 2002. Il y a quasiment la même proportion d’exploitations agricoles qui se consacrent principalement aux cultures que d’exploitations où prédomine l’élevage.

4.2.1 Cultures et élevage

Une grande partie de l’agriculture du pays repose sur la monoculture du blé (15,5 millions de tonnes en 2002), essentiellement cultivé dans les provinces de la Prairie (Alberta, Manitoba et Saskatchewan). Ces provinces produisent également des céréales et des graines oléagineuses. Après le blé, les principales récoltes sont l’orge, le colza, les légumes, le maïs, les pommes de terre, les fruits, le tabac, l’avoine, le seigle, le lin, le tournesol et le soja. En 2002, le Canada était le 11e producteur mondial de blé et le 6e producteur mondial d’orge. Exportant la moitié de sa production, le Canada est le 3e exportateur mondial de céréales.

La majorité des produits à base d’érable proviennent du Québec, tandis que l’Ontario fournit la plus grande partie de la récolte de tabac du pays. La polyculture est en plein développement, en particulier dans les Provinces maritimes et dans le bassin du Saint-Laurent ; la culture des fruits se concentre dans l’Ontario, la Colombie-Britannique et le Québec ; ces provinces sont également spécialisées dans la culture de légumes.

L’élevage et ses produits dérivés jouent un rôle de moindre importance, mais sont néanmoins présents dans le secteur primaire. Le bétail est prédominant dans les provinces de l’ouest ; l’Ontario et le Québec sont les principaux fournisseurs de produits laitiers. En 2002, le cheptel bovin canadien s’élevait à 13,7 millions de têtes et le cheptel porcin représentait 14,4 millions de têtes.

Les activités liées à l’exploitation des fourrures ont joué un grand rôle dans l’histoire canadienne, puisque les premiers habitants du territoire étaient essentiellement des chasseurs et des trappeurs.

4.2.2 Sylviculture et pêche

L’industrie forestière est une source importante de richesses pour le Canada, les produits forestiers représentant annuellement près d’un quart de la valeur des exportations canadiennes. L’immense domaine forestier couvre 4,2 millions de km2, dont 90 p. 100 environ appartiennent à l’État. En 2006, la production de bois s’élevait à 205,9 millions de m³. De plus, la forêt alimente une industrie complexe et diversifiée (scierie, pulpe, papier) et elle est créatrice d’emplois.

Les ressources halieutiques du pays sont importantes dans le nord-est de l’Atlantique et le nord-ouest du Pacifique, ainsi que dans les zones d’eau douce, les plus étendues du monde. La plus grande partie de la production annuelle est exportée — le Canada est un des plus grands exportateurs de poissons au monde. Les prises (1 255 821 tonnes en 2005) comprennent essentiellement morues, harengs, saumons, soles, homards, coquilles Saint-Jacques, crabes et rougets.

4.3 Mines et industries
4.3.1 Richesses minières

L’exploitation minière est une source importante de richesse nationale ; au début des années 1990, le pays était la 7e puissance minière du monde. L’industrie minière canadienne est fortement orientée vers l’exportation.

La croissance de ce secteur est due, en particulier, à la découverte et à l’exploitation de gisements de pétrole et de gaz naturel (voir Gaz combustibles) dans l’ouest du Canada, de fer dans le Labrador et au Québec ; de nickel dans l’Ontario et le Manitoba (3e producteur mondial) ; d’uranium dans l’Ontario et la Saskatchewan (1er producteur) ; de potasse dans la Saskatchewan (2e producteur). Le Canada exploite également du soufre dans les provinces occidentales et possède de nombreuses richesses en cuivre, en plomb, en zinc, en or et en charbon. Le pays était le 4e producteur de zinc en 2000 et fait partie des plus grands producteurs de cobalt (4e producteur mondial en 1995), de cuivre (6e producteur en 2001), d’or (5e producteur en 2001), de gypse, de fer, de lignite, de plomb, de molybdène, de gaz naturel (3e producteur en 2001), de cadmium et d’argent (6e producteur en 2001).

4.3.2 Industrie

L’économie canadienne est largement dépendante de l’industrie, qui a connu une croissance remarquable depuis 1945 ; en 2005, elle employait 22 p. 100 de la population active et représentait 31,4 p. 100 du PIB annuel en 2002. Pourtant l’industrie canadienne demeure encore tributaire des États-Unis, en particulier en termes de capitaux et du point de vue technique.

La métallurgie est un secteur primordial dans le domaine industriel, mais le pays possède également des usines agroalimentaires, chimiques, textiles, automobiles et de matériel de transport. L’importance des forêts permet l’exploitation de bois, la production de produits dérivés et de papier. Le raffinage du pétrole, la fabrication de matériel électrique et électronique sont également des secteurs dynamiques.

Les provinces les plus actives dans le domaine industriel sont l’Ontario et le Québec. Les principales villes manufacturières sont Toronto, Montréal, Hamilton, Vancouver, Windsor, Winnipeg et Kitchener. Enfin, la haute technologie se développe autour des agglomérations de Toronto et de Vancouver. L’Ontario est le foyer industriel du Canada et Toronto en est le centre d’affaires et de finances. Le golfe du Saint-Laurent fait de Montréal le port le plus important, tandis que la Colombie-Britannique représente, pour le pays, une porte ouverte sur les marchés du Pacifique.

4.3.3 Hydroélectricité : un domaine de pointe

Le Canada est l’un des plus grands producteurs d’hydroélectricité au monde et le 1er producteur d’énergie hydraulique (voir production et distribution de l’électricité). La plus grande quantité de la puissance hydroélectrique du pays est générée au Québec — qui détient 25 p. 100 des ressources du Canada —, dans l’Ontario, à Terre-Neuve-et-Labrador et en Colombie-Britannique. En 1979 a été mise en service la première des neuf stations hydroélectriques prévues sur la Grande Rivière, tributaires de la baie James, au Québec ; achevées en 1996, ces neuf installations représentent sans doute l’un des plus grands complexes hydroélectriques d’Amérique du Nord.

La production annuelle d’électricité était de 566,3 milliards de kilowattheures en 2003. Le Canada exporte environ 10 p. 100 de sa production énergétique vers les États-Unis.

4.4 Secteur tertiaire
4.4.1 Généralités

En 2005, 75,3 p. 100 de la population active était employée dans le secteur des services, ce qui représentait 66,4 p. 100 du PIB en 2000.

Le développement du secteur tertiaire est lié à l’urbanisation du pays et à l’implantation de nouvelles technologies ; il se concentre principalement dans la vallée du Saint-Laurent, en Ontario et au Québec. L’évolution de la structure professionnelle canadienne permet de mesurer la croissance du secteur tertiaire ; ainsi le nombre d’emplois créés parmi les professions libérales, les cadres et les employés n’a cessé d’augmenter au détriment des emplois de l’agriculture et du secteur secondaire. La ville de Sudbury, située en Ontario, est un exemple flagrant d’une ville spécialisée dans les services ; sa croissance spectaculaire lui a valu le surnom de boom town.

Les services administratifs — provinciaux et fédéraux — constituent une part non négligeable du tertiaire. Ce sont les métropoles canadiennes qui concentrent les activités du secteur public concernant l’éducation (universités et centres de recherche), la santé et les services sociaux.

Comme les autres grands pays développés, le Canada possède également un secteur quaternaire fondé sur les innovations technologiques, l’information, les télécommunications et l’informatique.

4.4.2 Secteur financier

L’unité monétaire du Canada est le dollar canadien, qui se subdivise en 100 cents. La Banque du Canada, créée en 1934, est chargée de l’émission des billets et du contrôle de la politique monétaire élaborée par le gouvernement.

Pour rééquilibrer le budget, l’État fédéral s’est lancé dans une politique de réduction des déficits budgétaires.

Le secteur financier repose sur le dynamisme des banques, des bourses et des compagnies d’assurance. Les banques les plus anciennes ont été fondées au xixe siècle, comme la Banque de Montréal (1817) qui a financé de nombreux projets de développement des infrastructures de transport, ou la Banque de Québec (1818). Mais aujourd’hui, les deux centres qui regroupent les activités financières du pays sont Montréal et Toronto. Dans la capitale de l’Ontario, l’installation des sièges des grandes banques et des importants groupes financiers remonte au début du xxe siècle. Le quartier des affaires, situé aux alentours des rues King et Bay, abrite les imposants bâtiments du Commerce Court et du Toronto Dominion Center.

4.4.3 Transports

Les obstacles naturels que sont les nombreuses rivières et montagnes du Canada, la rigueur des conditions climatiques, l’immensité du territoire et la dispersion de la population exigent des systèmes de transport efficaces. Depuis les premières explorations du pays, le transport par eau s’est avéré indispensable. La voie maritime du Saint-Laurent s’étend sur 3 769 km entre le golfe du Saint-Laurent et le centre du continent. Elle a contribué grandement à l’essor industriel. Le pays abrite de nombreux ports de transit, tels Vancouver, Sept-Îles, Montréal, Port-Cartier, Québec, Halifax, Saint-Jean (Nouveau-Brunswick), Thunder Bay, Prince Rupert et Hamilton.

Le réseau de chemin de fer est également très développé : la Canadian National Railway, propriété de l’État, est la plus grande entreprise publique du Canada. Le système dessert les dix provinces et les Territoires du Nord-Ouest. La Canadian Pacific Railway, une entreprise privée, dessert tout le Canada, à l’exception de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Île-du-Prince-Édouard, du Yukon et du Nunavut. Elle a participé à la construction du pays, en permettant le déplacement des hommes et des marchandises. Le transport interne des passagers est assuré par VIA Rail Canada, fondée en 1977.

De plus, le Canada dispose d’un vaste réseau routier. L’autoroute transcanadienne, ou Transcanada Highway, inaugurée en 1962, s’étend de Saint John’s (Terre-Neuve-et-Labrador) à Victoria (Colombie-Britannique) sur 7 800 km.

Deux grandes compagnies aériennes, Air Canada et Canadian Airlines International, desservent un vaste réseau de lignes intérieures et internationales. Les aéroports internationaux de Lester B. Pearson (Toronto), Vancouver, Dorval et Mirabel, agrandi en 1997 (près de Montréal), et Calgary sont très actifs. Les provinces disposent également de compagnies régionales.

4.4.4 Tourisme

Le tourisme est devenu l’une des principales industries du Canada, en particulier grâce à ses somptueux paysages, qui attirent de nombreux visiteurs (18,3 millions en 2006). Outre ses sites naturels préservés comme parcs nationaux, le pays abrite des stations de sports d’hiver et de multiples infrastructures, accueillant des manifestations culturelles et artistiques. Les spectaculaires chutes du Niagara, situées à la limite de l’État de New York et de la province de l’Ontario, accueillent chaque année 12 millions de visiteurs. De nombreux hôtels, restaurants et des parcs d’attractions ont été construits aux alentours.

4.5 Commerce extérieur

Les États-Unis représentent le principal partenaire économique du Canada, à la fois dans le domaine des importations et dans celui des exportations. Le Japon, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France sont traditionnellement les autres grands partenaires commerciaux du pays. En 1992, le Canada et les États-Unis ont conclu un accord de libre-échange, élargi au Mexique et ratifié en 1993 : l’Alena, qui établit les bases du commerce et des échanges en Amérique du Nord.

En 2004, la balance commerciale était excédentaire : le total des importations représentait 273,4 milliards de dollars et les exportations 316,5 milliards de dollars. Les principaux produits exportés proviennent des riches ressources agricoles et minières, ainsi que des produits manufacturés. Les importations concernent essentiellement les produits énergétiques.

5 HISTOIRE
5.1 Les premiers peuples autochtones

À la fin de l’époque glaciaire, à la suite d’une série de mouvements migratoires, des populations mongoles venues d’Asie ont pénétré en Amérique du Nord, probablement en traversant le détroit de Béring, et se sont disséminées sur le continent nord-américain et jusqu’en Amérique du Sud. Elles vivaient de la chasse, de la pêche et de la cueillette ; dans les régions plus chaudes, elles pratiquaient également l’agriculture. Les groupes variaient de quelques familles à plusieurs centaines de personnes. Dans les zones plus fortement peuplées, ces groupes étaient organisés en tribus, voire en confédérations de tribus.

Le principal groupe d’Amérindiens était celui des Algonquins, constitué de tribus de chasseurs nomades, telles que les Crees et les Naskapis dans la région subarctique orientale, les Abnakis (ou Abénakis) et les Micmacs dans les régions boisées de la côte orientale. Par la suite, les Algonquins se dirigeaient vers l’ouest, où les Outaouais, les Ojibwés, les Pieds-Noirs, les Crees de la Plaine et d’autres tribus parcouraient les prairies à la recherche de bisons. Les tribus de langue iroquoise — les Hurons et les Iroquois — s’établissaient comme cultivateurs dans la vallée du Saint-Laurent et autour des lacs Ontario et Érié ; elles possédaient une organisation tribale hautement développée.

Les Salishans et les Athabascans occupaient des villages de pêcheurs, le long des rivières de l’actuelle Colombie-Britannique. Sur la côte du Pacifique, les tribus du groupe des Salishans, tels les Bellacoolas, les Tinglits, les Haïdas, et les tribus apparentées de langue wakashan — les Kwakiutls et les Nootkas — possédaient une riche culture, fondée sur la pêche au saumon, qui s’exprimait dans des totems de bois sculpté et de somptueux étalages de richesses. Dans la région subarctique occidentale, le groupe des Athabascans — Carriers, Dogribs et autres — menait une existence de chasseurs primitifs semblable à celle des Algonquins. De petits groupes isolés d’Inuit développaient une culture particulière, centrée sur la chasse au phoque et au caribou, qui leur permettait de survivre dans l’environnement rigoureux de l’Arctique.

5.2 L’arrivée des Européens
5.2.1 Les premières explorations

Les premiers Européens à atteindre l’Amérique du Nord sont probablement les colons islandais du Groenland. Selon les sagas islandaises, Leif Eriksson débarque dans le Vinland — quelque part le long de la côte atlantique nord — vers 1000 apr. J.-C. Des découvertes archéologiques tendent à prouver que ces peuples nordiques auraient alors établi des comptoirs à Terre-Neuve et dans le Labrador. Cependant, aucun élément matériel ne permet de corroborer la thèse selon laquelle ils auraient pénétré profondément à l’intérieur des terres.

5.2.2 Les découvertes du xve au xviie siècle

Une deuxième vague d’explorations européennes, entre 1480 et 1540, établit fermement l’existence d’un Nouveau Monde dans les esprits européens. La plupart des explorateurs, avec l’appui de leur gouvernement, cherchent un passage maritime au nord-ouest afin d’accéder aux richesses de l’Asie ; aussi considèrent-ils le continent canadien comme une découverte potentiellement utile, mais aussi comme un obstacle.

En 1497, le voyage à Terre-Neuve de Jean Cabot, un Vénitien au service du roi Henri VII d’Angleterre, inspire une nouvelle série d’explorations et sera à l’origine des prétentions anglaises sur le Canada. À la même époque, les Portugais établissent une colonie au Cap-Breton. Puis, en 1524, l’explorateur Giovanni da Verrazano dresse les premières cartes de la région, qu’il nomme Nouvelle-France.

Entre 1534 et 1542, le Français Jacques Cartier découvre le golfe du Saint-Laurent, accoste sur la péninsule de la Gaspésie, puis remonte le fleuve et prend possession du territoire, au nom de François Ier. Il ne parvient cependant pas à trouver le passage du Nord-Ouest, en direction de l’Asie. Jacques Cartier explore de nouveau la région jusqu’à Terre-Neuve et Hochelagas, le site de la future Montréal. La région, très poissonneuse, devient une source de richesse pour les flottes de pêche anglaises, françaises, espagnoles et portugaises, qui exploitent régulièrement le Grand Banc, au large de Terre-Neuve.

L’intérêt des Anglais et des Français pour le Canada se ravive à la fin du xvie siècle, essentiellement pour des raisons commerciales. Les explorateurs anglais sir Martin Frobisher dans les années 1570, et Henry Hudson en 1610 et 1611, continuent à chercher, en vain, un passage vers l’Asie. De plus, les intérêts des pêcheurs anglais, dans les années 1630, ont paralysé pratiquement les tentatives de colonisation de Terre-Neuve.

5.3 Les premiers comptoirs français
5.3.1 Le système des monopoles

Les Français ont plus de succès. En effet, le gouvernement, attiré par les nombreuses richesses naturelles que recèle le territoire, et motivé par la perspective de la construction d’un empire au sein du Nouveau Monde, décide d’agir par le biais de monopoles commerciaux qui, en contrepartie du contrôle du commerce des fourrures, encouragent la colonisation.

Un monopole octroyé à Pierre de Gua, sieur de Monts, en 1603, établit des comptoirs commerciaux en Acadie (correspondant aujourd’hui au Nouveau-Brunswick et à la Nouvelle-Écosse) et sur le Saint-Laurent. En 1608, Samuel de Champlain, un explorateur engagé par Pierre de Monts, fonde la ville de Québec ; il devient le principal organisateur de la colonisation française.

Champlain parvient à convaincre Richelieu, ministre de Louis XIII, de l’importance de l’Amérique du Nord pour l’établissement de la puissance française dans le monde et pour son développement économique. Ainsi, en 1627, Richelieu met sur pied la Compagnie de la Nouvelle-France ou des Cent-Associés, qui détient le monopole du commerce et dont l’objectif est de fonder un centre puissant de civilisation française au sein du Nouveau Monde.

5.3.2 Les relations avec les Amérindiens

Pendant deux siècles et demi, des facteurs géographiques cantonnent les colons européens à des régions assez limitées de l’actuel Canada, si bien que les relations entre les colons et les Amérindiens sont placées sous le signe du commerce (principalement celui des fourrures) plutôt que de la conquête. Cependant, de nombreuses tribus indiennes sont détruites au contact des colons. En effet, ces tribus subissent des épidémies (notamment de variole) et sont victimes de l’alcool, que les négociants en fourrures utilisent à la fois comme article de commerce et comme moyen de s’assurer leur soumission.

5.4 L’organisation de la Nouvelle-France
5.4.1 Le commerce et les explorations

Administrée par la Compagnie des Cent-Associés, puis par la Communauté des Habitants (1645-1663), en échange du monopole de la traite des fourrures, la nouvelle colonie française s’établit le long du Saint-Laurent et s’organise en seigneuries. L’émigration est encouragée, portant la population à environ 2 000 colons en 1666. Hardis, témoignant d’une grande capacité d’adaptation et tenaces, nombre d’entre eux se lancent dans le commerce lucratif des fourrures qui est centralisé. De nouvelles colonies sont fondées, notamment Trois-Rivières en 1634 par Champlain, et Ville-Marie (Montréal) en 1642 par Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve. L’exploration de terres intérieures se poursuit sous l’impulsion des trappeurs. Deux d’entre eux, Pierre Radisson et Médard Chouart, sieur des Groseilliers, parcourent, dans les années 1650, la région située à l’ouest du lac Supérieur.

La colonie s’organise progressivement ; ainsi, au Québec (région qui revient à la France en 1632, par le traité de Saint-Germain, après une courte période d’occupation anglaise), le Conseil de Québec, élu par ses habitants, s’occupe de la gestion, de l’administration et du commerce.

5.4.2 Le rôle de l’Église catholique

L’influence religieuse des Français se développe. Il est interdit aux protestants, déjà réprimés en France (révocation de l’Édit de Nantes, 1685), de s’installer dans la nouvelle colonie. L’Église catholique, en revanche, joue un rôle prédominant. Des ordres catholiques (tels que les récollets dès 1615, les jésuites, les ursulines et les sulpiciens) sont chargés de maintenir et de diffuser la foi. En 1659, un vicaire apostolique, l’évêque François de Laval-Montmorency, de formation jésuite, prend la direction des missions et entreprend la fondation de paroisses. L’Église devient ainsi de plus en plus influente dans le monde colonial. Sa mission est également de faire revenir sur le « droit chemin « des colons vivant selon les principes indiens (au moins les deux tiers de la colonie dans les années 1660).

5.4.3 Le conflit avec les Iroquois

La survie de la Nouvelle-France est cependant incertaine, en raison de la guerre quasi continuelle avec la confédération des Iroquois. Dès 1608, Champlain s’est allié aux Algonquins et aux Hurons, ouverts aux activités missionnaires et principaux fournisseurs de fourrures. Mais cette alliance irrite les Iroquois, rivaux traditionnels des Hurons et fournisseurs de fourrures pour les Néerlandais de la Nouvelle-Amsterdam (voir New York). Après avoir brutalement ravagé le territoire huron au nord du Saint-Laurent en 1648 et en 1649, les Iroquois se tournent contre la Nouvelle-France elle-même.

5.4.4 L’organisation de la colonie

En 1663, Colbert, ministre de Louis XIV, réorganise la Nouvelle-France en l’intégrant au domaine royal. L’administration est alors partagée entre un gouverneur, un évêque et un intendant qui gouverne avec l’aide d’un Conseil souverain. Sur le plan économique, le commerce canadien est octroyé à un nouveau monopole, la Compagnie française des Indes occidentales. La défense est améliorée par l’arrivée, en 1665, d’un régiment français — celui de Carignan-Salières —dont de nombreux soldats s’installent définitivement dans le pays. De plus, la menace iroquoise est levée, même si des attaques sporadiques se poursuivent tout au long du xviie siècle.

Le gouverneur du Canada, Louis de Buade, comte de Palluau et de Frontenac, encourage également la poursuite des expéditions. Celles de Louis Jolliet et du père Jacques Marquette conduisent à l’exploration du Mississippi (1673) et celles de Robert Cavelier de La Salle, à l’acquisition de la Louisiane (1682).

Jean Talon, intendant de Colbert entre 1665 et 1672, s’attache à faire de la Nouvelle-France une colonie prospère : il réorganise son administration et rivalise avec les colonies anglaises. Il fait venir de nouveaux colons, jusqu’à atteindre, en 1675, une population de près de 8 000 habitants. Il tente également de diversifier l’économie au-delà du commerce des fourrures et établit des relations commerciales avec l’Acadie, les Antilles et les Indes occidentales.

À l’époque de la colonisation française, l’occupation des terres s’étend jusqu’aux alentours du Saint-Laurent ; l’agriculture et le commerce des fourrures, organisé par les coureurs des bois, deviennent des activités économiques prépondérantes. Cependant, la situation se complique en 1670, avec la fondation de la Compagnie de la baie d’Hudson par les Anglais. Celle-ci, qui a obtenu les droits sur toutes les terres de la baie d’Hudson, joue un rôle crucial dans le maintien d’une présence britannique dans le nord et le centre du Canada au cours des deux siècles qui suivent.

5.5 Les rivalités anglo-françaises

À la fin du xviie et au début du xviiie siècle, la colonie est l’enjeu des rivalités coloniales entre l’Angleterre et la France ; tout comme l’Europe, l’Amérique du Nord se transforme en champ de bataille. Le Québec sera occupé par les Anglais entre 1629 et 1632 et l’Acadie, entre 1654 et 1667. Les colonies anglaises qui se développent le long de l’océan Atlantique sont donc cernées par l’Acadie et la Nouvelle-France au nord, et par l’expansion française dans la vallée du Mississippi. Dans le même temps, les Français se sentent menacés, entre la Compagnie de la baie d’Hudson qui domine le nord du Canada, et les colonies anglaises au sud.

Ainsi, pendant la majeure partie du xviie siècle, les terres canadiennes sont l’objet de conflits perpétuels entre Anglais et Français, qui culminent avec la guerre de la ligue d’Augsbourg, en Europe. Celle-ci oppose la France à l’Angleterre, l’Espagne, les Provinces-Unies, les principautés allemandes et la Suède ; elle s’achève par le traité de Ryswick, en 1697, qui porte un coup à la puissance française et à son impérialisme. Cependant, les hostilités reprennent et, en 1701, éclate la guerre de Succession d’Espagne. En 1710, les Britanniques reprennent l’Acadie, qui leur est cédée officiellement par le traité d’Utrecht (1713) ; les Français cèdent également Terre-Neuve et la région de la baie d’Hudson. À partir de 1713, la Nouvelle-France entre dans une période de prospérité.

En 1740, l’Europe est à nouveau déchirée par une guerre, celle de la Succession d’Autriche. La forteresse de Louisbourg tombe aux mains des Britanniques (avant d’être rendue à la France par le traité d’Aix-la-Chapelle, en 1748). Les intendants tentent, en vain, d’accentuer la colonisation, mais de 1700 à 1760, à peine 5 000 Français émigrent.

Parallèlement à ces conflits militaires, les autorités britanniques confisquent les biens des francophones d’Acadie et organisent leur déplacement forcé. Cette période est baptisée « le Grand Dérangement «.

Quand, en 1756, commence la guerre de Sept Ans, les forces en présence sont supérieures, en nombre, aux Britanniques. Le marquis de Montcalm engage la guerre avec succès, mais après une série de victoires (Fort Carillon, en 1758), il subit de graves défaites, dont celle de la bataille des plaines d’Abraham (1759) devant Québec, où il trouve la mort en même temps que son vainqueur, le général Wolfe.

Les efforts du successeur de Montcalm, le chevalier de Lévis, et du dernier gouverneur Vaudreuil ne peuvent éviter à Montréal de se rendre en 1760, date également de la capitulation de la Nouvelle-France. Tous ces gains territoriaux sont confirmés à l’Angleterre par le traité de Paris (1763) qui met un terme à la guerre de Sept Ans ; la Nouvelle-France passe sous administration britannique. La France perd donc toutes ses possessions en Amérique du Nord, excepté Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.6 L’établissement d’une colonie britannique
5.6.1 Les bases de l’organisation

En 1763, l’Amérique du Nord britannique compte quatre régions distinctes. Trois d’entre elles, longuement disputées à la France, ont été conquises en 1713. Terre-Neuve est considérée comme une succession de ports de pêche. La région de la baie d’Hudson est une région sauvage où les compagnies bataillent pour le commerce des fourrures. L’Acadie, rebaptisée Nouvelle-Écosse, est largement peuplée de migrants venus de Nouvelle-Angleterre pour remplacer les Français exilés. Enfin, l’Île-du-Prince-Édouard, annexée à la Nouvelle-Écosse, devient une colonie séparée en 1769.

En revanche, la conquête de la quatrième région, la Nouvelle-France, ou Québec, est plus difficile car elle est habitée par des colons français. Finalement, grâce à l’action de deux gouverneurs, James Murray et Guy Carleton, qui prônent une politique de tolérance, les Canadiens francophones obtiennent la garantie de la langue française, du droit civil (inspiré du droit français) et de la religion catholique. Cette décision est ensuite incorporée dans l’Acte de Québec, en 1774. Lors de la guerre de l’Indépendance américaine, des troupes américaines s’emparent de Montréal, en 1775. Échouant à prendre la ville de Québec, elles se retirent rapidement, avant d’être poursuivies et battues au lac Champlain.

À la fin de cette guerre, quelque 50 000 réfugiés loyalistes émigrent vers le territoire canadien et s’établissent en Nouvelle-Écosse et sur le cours supérieur du Saint-Laurent. Cette arrivée massive entraîne la création d’une nouvelle province, celle du Nouveau-Brunswick.

5.6.2 De l’Acte constitutionnel à l’Acte d’Union

En 1791, l’Acte constitutionnel du Canada est institué et divise le pays en deux parties : le Bas-Canada ou Québec (essentiellement français) et le Haut-Canada ou Ontario (majoritairement britannique). Les deux provinces sont dirigées par un lieutenant-gouverneur. Lors de la guerre anglo-américaine, entre 1812 et 1814, l’ensemble du Canada fait bloc autour de la Couronne britannique et le territoire subit les attaques américaines. La colonisation du Haut-Canada est prise en charge par la Compagnie du Canada, créée en 1825. Le début du xixe siècle se caractérise par un essor démographique, en raison d’un fort accroissement naturel.

En 1837, devant le refus persistant de Londres d’accorder au Canada un régime parlementaire et à la suite de tensions religieuses, culturelles et politiques, les deux provinces se révoltent. Lors de cette crise sociale, deux hommes se détachent : William Lyon Mackenzie (Haut-Canada) et Louis Papineau (Bas-Canada). Cependant, face aux revendications d’autonomie, la Grande-Bretagne refuse de céder et écrase la rébellion.

Finalement, en 1840, le Parlement britannique vote l’Acte d’Union des deux colonies au sein de la province du Canada-Uni et donne à chacune une représentation égale dans le cadre d’une législature centralisée. Un gouvernement responsable est mis en place en 1849, par des réformateurs modérés, après une période de forte agitation. Les Canadiens francophones détiennent un pouvoir politique suffisant pour conserver leur langue et leurs institutions.

5.6.3 Progrès et tensions

Les années 1840-1860 se caractérisent par un considérable développement commercial et industriel qu’élargit encore le traité de réciprocité (1854-1866) signé avec les États-Unis.

En dépit de ces progrès, les tensions entre les deux communautés refont surface, en particulier au Canada-Uni. Les Canadiens francophones, soucieux de maintenir leur identité culturelle, font rétablir le français comme langue officielle en 1848. Cependant, entre 1860 et 1870, une crise économique frappe le pays, entraînant une instabilité politique. De plus, la guerre de Sécession (1861-1865) bouleverse l’équilibre politique de l’Amérique du Nord. Les colons craignent qu’en cas de victoire les Nordistes, irrités par le soutien discrètement apporté aux Sudistes par les entreprises britanniques, ne ripostent en envahissant les colonies de la Couronne (quelques raids américano-irlandais auront lieu, en effet, mais sans succès).

5.7 La fédération canadienne

Ces conflits donnent naissance à un mouvement en faveur de l’unification des colonies anglaises d’Amérique du Nord demeurées fidèles à la Grande-Bretagne. Un gouvernement de coalition est constitué, en 1864, avec sir Georges Étienne Cartier et sir John Alexander Macdonald, et une conférence, réunie à Québec en octobre de la même année, élabore réellement la fédération. Le projet suscite l’objection de nombreux habitants des Provinces maritimes, mais la Grande-Bretagne, espérant renforcer son territoire face à la suprématie croissante des États-Unis, lui apporte son soutien. Les résolutions de Québec, légèrement modifiées, aboutissent à l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, adopté par le Parlement britannique en mars 1867 et proclamé au Canada le 1er juillet 1867. C’est la première fois qu’une colonie parvient à s’autogouverner sans quitter l’Empire.

Le dominion du Canada résulte de l’union, en une fédération, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, du Québec (Bas-Canada) et de l’Ontario (Haut-Canada). L’Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve refusent d’y adhérer. Le dominion reste soumis à la pleine autorité de la Couronne, qui délègue son pouvoir à un gouverneur. Les gouvernements provinciaux, sous la supervision du pouvoir fédéral, reçoivent des attributions pour développer leurs propres ressources et établir leurs propres institutions sociales. Les Canadiens de langue anglaise considèrent que le nouveau régime mène à l’émergence d’une nouvelle nationalité et les protège mieux contre les visées expansionnistes des Américains. Les Canadiens français, eux, le voient plutôt comme la garantie de l’autonomie de leur province dans l’orientation des domaines législatifs — recouvrés grâce à la cessation du gouvernement d’Union entre le Haut et le Bas-Canada (1840-1867). Ce malentendu sur la nature du fédéralisme contribuera pour beaucoup aux frictions et tensions qui, quelques années plus tard, commenceront à se manifester entre le Québec et le gouvernement central.

5.8 L’expansion territoriale et la « politique nationale « de Macdonald
5.8.1 Le premier mandat de Macdonald

Sir John Alexander Macdonald, conservateur élu Premier ministre en 1867, s’attache alors à la construction de la nation. Il étend le territoire canadien au nord et à l’ouest par l’achat de la terre de Rupert et des Territoires du Nord-Ouest, qui sont la propriété de la Compagnie de la baie d’Hudson (1870) ; l’exploration de l’archipel Arctique doit également permettre au Canada d’obtenir la souveraineté sur ces îles.

En 1869, les Amérindiens et les métis du Canada, soutenus par Louis David Riel, craignant de perdre leurs avantages, se révoltent contre l’expansion coloniale des Européens sur le territoire canadien et contre l’autorité fédérale. En 1884-1885, Riel prend la tête d’un second soulèvement. Ses troupes sont écrasées par l’armée fédérale, et il est pendu ; cette pendaison soulève un tollé au Québec, où Riel symbolise la cause catholique et française. Voir aussi rébellions du Nord-Ouest.

Cependant, l’expansion canadienne continue : Macdonald réunit le Manitoba (1870), la Colombie-Britannique (1871) et l’Île-du-Prince-Édouard (1873). Le Manitoba est exploré par des expéditions navales espagnoles et britanniques au xviiie siècle. Ouvert au commerce des fourrures, grâce aux efforts notamment de sir Alexander Mackenzie, il est submergé par le flux des chercheurs d’or européens et américains dans les années 1860. Macdonald promet le financement fédéral d’une liaison ferroviaire entre la Colombie-Britannique et l’est du territoire. Grâce à cette promesse, la Colombie-Britannique se joint à la Confédération canadienne. Ces liaisons sont, en effet, nécessaires pour cimenter la nation.

5.8.2 La révolution ferroviaire

Le gouvernement finance donc l’Intercolonial Railway to the Maritimes et engage sir Allan Hugh, un entrepreneur soutenu financièrement par les États-Unis, pour remplir la difficile et coûteuse mission de construire une ligne de chemin de fer à travers la Prairie et les Rocheuses jusqu’à la côte : c’est la ligne du Transcontinental. En 1873, il apparaît pourtant que les financiers américains ont prévu de construire la ligne partiellement aux États-Unis afin de rendre le commerce canadien dépendant des intérêts américains et de placer ces régions sous l’influence politique des États-Unis. En outre, le versement de pots-de-vin est découvert. Le scandale du Pacifique entraîne la chute du gouvernement Macdonald et sera sanctionné par une victoire libérale aux élections de 1874.

5.8.3 La « politique nationale «

Le triomphe libéral est cependant de courte durée. Le début d’une dépression économique, que les libéraux dirigés par Alexander Mackenzie ne peuvent juguler, entraîne le retour au pouvoir de Macdonald. Celui-ci est réélu en 1878, en promettant une « politique nationale « qui rendra le Canada autonome sur le plan économique. Il entreprend de constituer un marché reliant l’est et l’ouest avec un centre industriel au Québec et dans l’Ontario et une région agricole dans la Prairie. Il impose également des tarifs douaniers sur les importations, dans le cadre d’une politique protectionniste, afin de favoriser l’industrie, et il encourage le peuplement de la Prairie, dès l’achèvement du chemin de fer, en 1885.

Exploit technique, financier et politique de premier plan, le Canadian Pacific Railway est l’élément déterminant qui permet l’établissement et le maintien d’une nation transcontinentale. De plus, l’établissement de voies ferrées rend possible l’extension du peuplement, longtemps retardé par obstacles naturels.

Au cours de cette période, le dominion subit des changements sociaux considérables. Dans les vastes territoires de l’Ouest, les Amérindiens sont confinés dans des réserves à la suite de traités leur offrant de l’argent, des fournitures et une aide agricole en échange de leurs terres. Dans l’est du pays, les villes et les industries se développent rapidement, donnant naissance à une classe ouvrière urbaine. Dès lors, un nouveau tissu d’églises, d’écoles et de grands magasins se crée en réponse aux besoins de cette nouvelle population. Par le biais de la presse, la classe moyenne entreprend alors une croisade morale en vue de « victorianiser « la société, en luttant contre le trafic d’alcool, la prostitution et le jeu, en s’opposant à la littérature « impure « et en insistant sur l’enseignement de la morale dans les écoles.

5.9 Le gouvernement de Laurier
5.9.1 La croissance économique

Après la mort de Macdonald, en 1891, les élections de 1896 sont remportées par les libéraux, sous la conduite du Canadien francophone sir Wilfrid Laurier. Il s’ensuit une période de prospérité au cours de laquelle Laurier poursuit la politique nationale de Macdonald, en préservant l’autonomie du Canada, liée à une expansion industrielle accélérée.

Le pays attire quantité d’émigrants venus de Grande-Bretagne, d’Europe centrale et d’Europe de l’Est, ainsi que des États-Unis, où les terres disponibles commencent à se faire rares. La Prairie est finalement occupée et devient le grenier à blé du territoire canadien ; l’Alberta et la Saskatchewan acquièrent le statut de province en 1905. Deux nouvelles lignes ferroviaires transcontinentales sont construites pour desservir la région de la Prairie. De plus, des entrepreneurs privés, avec l’aide des provinces, étendent le chemin de fer vers le nord de l’Ontario et le Québec, où l’on a découvert de l’or, de l’argent et d’autres métaux.

5.9.2 Les conséquences

Cette rapide croissance économique et ses conséquences sur l’évolution de la société provoquent des réactions contrastées. Certains préconisent une modernisation de la vie politique et du système administratif, ainsi que de profondes réformes dans l’organisation de la santé publique et de la protection sociale. D’autres s’inquiètent de l’afflux des immigrés et de l’américanisation du pays.

5.9.3 Le poids des Canadiens francophones

Outre ces nouveaux sujets de discorde, les anciennes frictions entre communautés se ravivent une nouvelle fois. S’opposant à l’établissement d’un système scolaire anglais unique dans le Manitoba (1890) et dans les nouvelles provinces, ainsi qu’à un appui militaire — même limité — à la Grande-Bretagne lors de la guerre des Boers, les Canadiens francophones renouvellent leurs revendications d’autonomie. Laurier opte pour des solutions de compromis. Comme le Premier ministre négocie avec les États-Unis un nouvel accord de commerce bilatéral qui semble augmenter l’influence américaine, les Canadiens francophones et les milieux économiques le mettent en échec aux élections de 1911.

5.10 La Première Guerre mondiale
5.10.1 L’effort de guerre

Sir Robert Laird Borden, le nouveau Premier ministre conservateur, est ouvert aux demandes de réformes, mais l’attention de son gouvernement est bientôt accaparée par la Première Guerre mondiale. L’effort de guerre canadien est impressionnant. Le pays, alors composé de 8 millions d’habitants, envoie 600 000 Canadiens sur le front, d’abord sous commandement britannique puis, dès 1916, sous commandement canadien ; environ un dixième de ces hommes trouvent la mort outre-Atlantique et 150 000 sont blessés. L’autonomie du Canada dans les affaires extérieures trouve son expression dans sa participation indépendante à la conférence de paix de Paris, en 1919, conférence au cours de laquelle le traité de Versailles est négocié. Peu après, le Canada adhère à la Société des Nations (SDN).

5.10.2 La situation intérieure

Sur le plan intérieur, cependant, l’effort de guerre a miné l’unité nationale. En effet, les Canadiens francophones se sont farouchement opposés à la décision de Borden d’imposer une conscription de guerre ; pour contrecarrer cette opposition, le Premier ministre tente une fusion entre le Parti conservateur et le Parti libéral. Le gouvernement éclate finalement en deux factions : les unionistes (à majorité anglophone) et les libéraux francophones. Les premiers dominent les élections de 1917, remportant toutes les provinces, hormis le Québec.

Le gouvernement unioniste accorde le droit de vote aux femmes en 1918 et adopte, pendant une courte période, des mesures prohibitionnistes bannissant les boissons alcoolisées. Mais les finances de l’État ont été mises à mal par l’effort de guerre. L’inflation enregistrée pendant la guerre et la dépression qui s’ensuit ravivent les tensions entre les différentes classes sociales. Ainsi, en 1919, Winnipeg est frappée par une grève générale, et les fermiers de l’Ontario et des régions occidentales, pris en tenailles entre le coût élevé des produits manufacturés et la chute des cours du blé, se révoltent contre les partis établis. Ils forment un nouveau mouvement politique : le Parti progressiste national, qui conquiert les provinces de la Prairie, lors des élections de 1921. Les progressistes apportent alors un soutien limité aux libéraux, leur permettant de constituer un gouvernement de minorité.

5.11 Le gouvernement de Mackenzie King

Les années 1920 sont marquées par la prospérité, surtout dans les villes. Ces dernières attirent une jeunesse rurale qui veut échapper aux rudes conditions de la ferme et profiter du développement de l’industrialisation et de l’amélioration du niveau de vie.

Le nouveau Premier ministre libéral, originaire de l’Ontario, William Lyon Mackenzie King, profite du nouveau climat de confiance et de bien-être pour renforcer l’union de la nation. Il réclame le droit pour le Canada de déterminer sa propre politique, à l’égal du Royaume-Uni : ce droit est reconnu à la conférence impériale de 1926 — où il est déclaré que la Grande-Bretagne et les dominions sont des « collectivités autonomes de statut égal « — et confirmé, en 1931, par le statut de Westminster qui établit une association d’États indépendants : le Commonwealth. La défense de l’autonomie reçoit l’assentiment, tant des Canadiens francophones que des Canadiens de l’Ouest.

De plus, Mackenzie King donne partiellement satisfaction aux fermiers en réduisant modérément les tarifs douaniers ; il obtient également l’appui des milieux d’affaires grâce à la prudence de sa gestion financière ; il reçoit même les éloges des réformateurs pour l’adoption de l’Acte sur les pensions (1927). Les conservateurs ne représentent qu’une minorité et les progressistes sont en déclin.

5.12 La crise de 1929

À partir de 1929 et pendant quatre ans, la crise économique mondiale ébranle les fondements de la nation. Le produit national brut (PNB) chute de 6,1 milliards de dollars en 1929 à 3,5 milliards à peine en 1933. La valeur de la production industrielle se trouve réduite de moitié. En 1933, près du quart de la population active est sans emploi. Les provinces occidentales, déjà frappées par la sécheresse, voient le prix des céréales chuter et les exportations reculer. De nombreuses entreprises font faillite ; les salaires et les revenus dégringolent.

5.12.1 Le gouvernement de Bennett

Aux élections de 1930, les Canadiens choisissent le conservateur Richard Bedford Bennett, qui propose un programme de mesures d’urgence. Celui-ci augmente les dotations des provinces pour l’aide aux chômeurs. Il accroît sensiblement les tarifs douaniers afin de protéger l’industrie et d’obtenir des concessions des pays étrangers ; lors de la conférence économique impériale d’Ottawa, en 1932, il négocie des accords commerciaux privilégiés avec la Grande-Bretagne et avec les autres pays du Commonwealth. Bennett élargit la sphère d’intervention du gouvernement par la création de la chaîne canadienne Radio Broadcasting Commission (1932), de la Banque centralisée du Canada (1934) et d’un Conseil du blé (1935).

Cependant, l’économie ne se redressant toujours pas, le Premier ministre annonce, en 1935, un ensemble de réformes plus radicale semblable au New Deal américain : assurance chômage, assurance maladie, réduction du temps de travail, programmes d’emploi, salaire minimal, codes industriels et planification économique.

5.12.2 Le second mandat de Mackenzie King

La politique de Bennett n’est pas suffisante, et nombre d’électeurs se tournent alors vers de nouveaux partis, qui promettent des solutions à la dépression : le parti de la Reconstruction, une dissidence conservatrice, la CCF (Cooperative Commonwealth Federation), un groupe socialiste et le parti du Crédit social, un mouvement radical de droite installé dans l’Alberta. C’est pratiquement à défaut d’une autre solution que Mackenzie King et les libéraux remportent les élections de 1935.

Mackenzie King décide d’abandonner le New Deal de Bennett, qui est finalement déclaré inconstitutionnel, en 1937, par le Conseil privé britannique (qui était alors la cour d’appel finale). Il élabore, en revanche, un nouveau traité de réciprocité avec les États-Unis (1938), nationalise entièrement la Banque du Canada et, afin de régulariser le commerce agricole, institue la Commission canadienne du blé. Éludant les revendications des provinces qui demandent des moyens accrus pour les programmes d’aide sociale, il instaure la commission royale Rowell-Sirois (1937) qui enquête sur les relations entre le pouvoir fédéral et les provinces, et recommande la responsabilité fédérale pour nombre de services sociaux provinciaux et une répartition plus équitable des revenus.

5.13 La Seconde Guerre mondiale
5.13.1 La mobilisation

Le début de la Seconde Guerre mondiale entraîne une transformation de l’économie vers une économie de guerre. Bien que le Canada ait poursuivi une politique isolationniste dans les années 1930, le pays rejoint l’alliance contre les puissances de l’Axe une semaine après l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne, en 1939.

Dans un premier temps, le gouvernement concentre ses efforts sur une contribution économique en denrées alimentaires, matières premières et autres marchandises, évitant ainsi la conscription, à laquelle les Canadiens francophones s’opposent. Après l’invasion de la France par les Allemands en 1940, la population doit cependant accepter la réalité d’un engagement total dans la guerre. En 1942, par un référendum, elle adopte le principe de l’établissement de la conscription. À nouveau, l’effort de guerre est impressionnant : près de 1,5 million d’hommes et de femmes servent dans l’armée ; l’industrie et l’agriculture se mobilisent également pour soutenir cet effort.

5.13.2 Les réformes

Pendant le conflit, le gouvernement canadien s’attelle à la préparation d’un projet à l’image du plan Beveridge britannique, dans le but de garantir le bien-être de la population, une fois la paix revenue. Un des éléments clés de ce projet est un programme de protection sociale visant à établir un niveau de vie minimal et introduisant une assurance chômage (1940), des allocations familiales (1944), un programme d’indemnités de guerre, une amélioration des pensions de retraite, des aides au logement et divers plans en matière de santé. L’autre élément clé est un programme économique destiné à promouvoir le plein emploi avec une inflation minimale. Sur la scène internationale, le Canada joue dorénavant un rôle important et, en 1947, la citoyenneté canadienne est reconnue à ses habitants.

Après avoir servi vingt-deux ans comme Premier ministre, Mackenzie King se retire en 1948, laissant la place au Québécois Louis Stephen Saint-Laurent, du Parti libéral. En 1949, Terre-Neuve (Labrador inclus) devient la dixième province canadienne. Ainsi se trouve achevée la construction de la fédération.

5.14 L’après-guerre
5.14.1 La prospérité économique

Les libéraux bénéficient de la croissance économique de l’après-guerre. De nouveaux gisements de pétrole en Alberta, de fer dans la péninsule d’Ungava (dans le nord du Québec) et au Labrador sont découverts à la fin des années 1940. Au cours de la décennie suivante, des ressources d’uranium sont exploitées dans le nord de l’Ontario et de nombreuses centrales hydroélectriques sont construites. L’industrie de transformation se développe et se diversifie.

En outre, le gouvernement encourage la modernisation des réseaux de transport. La construction de la Transcanadienne débute en 1949, avec un cofinancement fédéral et provincial. Trans-Canada Airways, une entreprise de la Couronne fondée en 1938, se développe également. En 1956, la Trans-Canada Pipeline, une société privée, reçoit l’autorisation de transporter du pétrole et du gaz de l’Alberta vers les marchés canadien et américain. La construction de la voie maritime du Saint-Laurent, à partir de 1954, permet d’améliorer le transport fluvial et maritime.

Cette croissance économique est stimulée par l’arrivée de 1,5 million d’immigrants, qui constituent à la fois une main-d’œuvre peu coûteuse et un nouveau marché de consommation : le PNB canadien progresse. En 1956, les deux plus grands syndicats, le Canadian Congress of Labour et le Trades and Labour Congress, fusionnent pour former le Canadian Labour Congress, qui devient une force importante dans la vie sociale et économique. Cependant, cette expansion repose sur d’importants investissements américains dans les ressources naturelles du Canada et sur la prise de contrôle de nombreuses industries canadiennes par les États-Unis.

5.14.2 Une nouvelle orientation de la politique étrangère

Depuis que le Canada a obtenu que le gouverneur général soit de nationalité canadienne, à mesure que les liens avec le Royaume-Uni se distendent, le pays entre progressivement dans l’orbite politique des États-Unis.

Dès 1940, Mackenzie King et le président américain Franklin D. Roosevelt signent l’accord d’Ogdensburg, prévoyant une planification commune permanente de la défense de l’Amérique du Nord. Après la guerre, la politique étrangère du Canada est étroitement liée à la volonté américaine de contenir l’expansion du communisme. En 1949, le Canada approuve l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), garantissant la défense de l’Europe sous la conduite des États-Unis. De plus, le pays fournit des troupes aux forces des Nations unies (en grande partie américaines), déployées lors de la guerre de Corée (1950-1953).

En 1956, au moment de l’occupation du canal de Suez par les Britanniques et les Français, le Canada propose, avec l’approbation des États-Unis, l’intervention d’une force d’urgence des Nations unies afin de préserver une nouvelle trêve au Proche-Orient. Cette action contribue à forger l’indépendance du Canada par rapport à la Grande-Bretagne, car elle ne répond pas à la politique menée par cette dernière au Proche-Orient. Le Canada négocie également le NORAD (North American Air [ aujourd’hui Aerospace ] Defense Command, 1958), confirmant sa participation à la défense nord-américaine.

5.15 Les évolutions de la société dans les années 1950-1960
5.15.1 Le gouvernement de Diefenbaker

À partir de la fin des années 1950, une série de problèmes épineux vient menacer l’existence même du Canada. En effet, la prospérité et le libéralisme ont miné les fondements traditionnels de la nation, tels que les liens avec la Grande-Bretagne, le fédéralisme décentralisé, le compromis entre Canadiens francophones et anglophones, ainsi que le conservatisme social.

En 1957, le progressiste conservateur John George Diefenbaker est élu et met fin au gouvernement libéral d’Ottawa. L’année suivante, son gouvernement obtient une large majorité parlementaire. Le nouveau Premier ministre doit faire face à une situation économique difficile qui le pousse à dévaluer le dollar canadien.

Une montée de la contestation sociale, notamment chez les jeunes, défie l’autorité établie au cours des années 1960. L’ancienne Cooperative Commonwealth Federation (CCF), mouvement socialiste, refait surface en 1961, alors que le New Democratic Party (NDP) protravailliste milite pour l’établissement d’une démocratie sociale au Canada. Une vague d’anti-américanisme pousse de nombreux artistes et intellectuels du Canada anglophone à dénoncer tous les signes de la puissance économique et culturelle des États-Unis.

Le problème le plus complexe est la renaissance du nationalisme chez les Canadiens francophones. En effet, à partir de 1960, un nouveau gouvernement libéral élu au Québec, dirigé par Jean Lesage, promeut une « révolution tranquille «, dont l’objectif est de moderniser les institutions, de réclamer l’autonomie et de renforcer la présence des Canadiens francophones dans la vie économique.

Sur le plan intérieur, diverses réformes visent à améliorer les aides sociales ainsi que la situation de l’agriculture. En 1962, est votée une loi garantissant aux Canadiens leurs libertés individuelles et collectives.

5.15.2 L’administration de Pearson

Diefenbaker est battu aux élections fédérales de 1963 par une formation libérale revitalisée, sous la conduite de Lester Bowles Pearson, qui a obtenu le prix Nobel de la paix, en 1957, pour son action en faveur de la constitution d’organisations internationales de défense et de paix, ainsi que pour son rôle dans le règlement de la crise de Suez.

Le gouvernement minoritaire de Pearson unifie les forces armées sous un même commandement et pose les fondements d’une assurance maladie accessible à tous, qui entre en vigueur à partir de 1969. Sur le plan économique, les relations avec les États-Unis se développent, en particulier avec l’instauration du pacte de l’automobile, en 1965.

Concernant la question québécoise, le Premier ministre nomme une commission d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, la commission Laurendeau-Dunton. Le gouvernement applique également un « fédéralisme coopérateur « donnant davantage la parole au Québec et aux autres provinces dans les affaires nationales. Malgré tout, certains nationalistes se tournent vers de nouvelles organisations séparatistes, en particulier vers le Parti québécois (PQ) de René Lévesque, fondé en 1968.

Une réforme constitutionnelle est instituée en 1964, avec l’application de la « formule Fulton-Faureau « ; ainsi le pouvoir exclusif de modifier la Constitution du Canada revient entièrement aux autorités canadiennes. En outre, c’est à cette date que le pays se dote de son drapeau actuel (avec une feuille d’érable), signe de son autonomie.

5.16 L’ère Trudeau
5.16.1 Le programme de Pierre Trudeau

Aux élections de 1968, le programme et la personnalité de Pierre Elliott Trudeau, un Canadien d’origine québécoise et parfaitement bilingue, donnent aux libéraux un pouvoir majoritaire. Trudeau dirigera la politique nationale pendant quinze ans. Son gouvernement libéralise la politique d’immigration, attirant avec le temps davantage d’immigrants en provenance d’Asie, d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud. De plus, en partie pour relativiser l’importance que prend la question québécoise, il met en œuvre une politique multiculturelle. Il augmente sensiblement les aides aux personnes défavorisées, aux jeunes et aux plus âgés, afin de réaliser une démocratie sociale. Commandé sous le gouvernement Pearson, un rapport sur la condition féminine permet d’améliorer la législation à partir de 1970. La politique économique repose sur un contrôle des prix et le soutien du pouvoir d’achat.

Très attaché au maintien de l’unité canadienne, au fédéralisme et au bilinguisme, Trudeau fait adopter la loi sur les langues officielles (1969), mettant à égalité le français et l’anglais dans les organismes relevant du pouvoir central. Cependant, la situation se détériore dans la province québécoise, avec la radicalisation de certains mouvements séparatistes. En octobre 1970, Trudeau invoque la loi martiale, après que le Front de libération du Québec (FLQ), une organisation séparatiste dont le Parti québécois condamne l’action, a enlevé le ministre Pierre Laporte (retrouvé mort) et James Richard Cross, un attaché commercial britannique.

Le début des années 1970 se caractérise par la crise du pétrole, qui est à l’origine d’une période de récession avec une augmentation du taux de chômage et du taux d’inflation. C’est dans ce contexte que la société d’État Pétro-Canada est créée en 1975, afin de contrôler l’exploitation et le commerce du pétrole canadien.

5.16.2 L’intermède de Joseph Clark

En 1976, la victoire du Parti québécois prend par surprise le gouvernement fédéral qui accepte mal la loi québécoise 101, votée au Parlement québécois en 1977, laquelle instaure le français comme langue officielle de la province, contredisant la politique de bilinguisme officielle. Les libéraux perdent les élections fédérales de mai 1979, au profit des progressistes conservateurs, dirigés par Joseph Clark, qui tente de mettre en place une politique d’austérité économique.

5.16.3 La Constitution de 1982

Clark ne peut, cependant, obtenir une majorité stable au Parlement, aussi Trudeau revient-il au pouvoir en février 1980. En mai, le gouvernement fédéral triomphe lorsque, par référendum provincial, 59 p. 100 environ des électeurs du Québec rejettent la « souveraineté-association «, proposée par René Lévesque, c’est-à-dire une souveraineté politique et une association économique.

Trudeau parvient également à obtenir l’accord des provinces anglophones sur le rapatriement de la Constitution, loi britannique depuis 1867. La nouvelle constitution est ratifiée en mars 1982. Même si cette démarche n’est pas approuvée par le Québec — elle contredit, selon lui, les promesses qui lui ont été faites, lors du référendum, par les autorités fédérales soucieuses d’obtenir un « non « à la proposition souverainiste —, elle n’en demeure pas moins la consécration de l’indépendance totale du Canada. La nouvelle constitution contient aussi une nouvelle section, la Charte des droits et des libertés qui, fondée sur les droits individuels (par opposition aux droits collectifs) réduit unilatéralement les pouvoirs du Québec francophone en matière de politique linguistique.

Cependant, ces efforts de reconstitution du Canada rencontrent des difficultés croissantes. Outre l’opposition du Québec aux objectifs politiques du rapatriement, les gouvernements provinciaux, particulièrement dans l’ouest, supportent mal les ambitions centralisatrices d’Ottawa. Le monde des affaires critique amèrement la politique économique du gouvernement. Nombre de Canadiens anglophones sont opposés au bilinguisme et aux velléités d’indépendance québécoises. En outre, les dépenses du gouvernement occasionnent une série ininterrompue de déficits budgétaires, qui augmentent encore la dette nationale.

5.17 La politique conservatrice de Brian Mulroney
5.17.1 Les nouvelles orientations de la politique

Lorsque Trudeau se retire, en juin 1984, John Napier Turner lui succède à la tête du Parti libéral et devient Premier ministre. Puis, aux élections de septembre de la même année, les conservateurs, conduits par Brian Mulroney, l’emportent haut la main et s’orientent rapidement vers une politique très différente de celle de Trudeau.

Le gouvernement se lance dans une politique de réduction du déficit budgétaire, tente d’opérer des coupes dans les politiques sociales et culturelles, et favorise la libre-entreprise. Le changement de cap le plus radical se produit en 1988, lorsque Brian Mulroney et Ronald Reagan signent l’accord de libre-échange américano-canadien. Aux élections de 1988, Mulroney, avec le soutien des milieux financiers, réussit à l’emporter face aux adversaires du libre-échange. Cette politique a de lourdes conséquences liées à la surévaluation du dollar canadien, à la restructuration des entreprises, à une nouvelle taxe sur les biens et les services (1991) et à une grave récession, qui entraîne un déclin industriel et une perte massive d’emplois. En août 1992, le gouvernement canadien signe un autre accord avec les États-Unis et le Mexique pour la création d’une zone de libre-échange ; l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) est ratifié en 1993 et entre en vigueur le 1er janvier 1994.

5.17.2 Les particularismes provinciaux

Cependant, l’équilibre canadien demeure menacé. Pour corriger les effets négatifs sur le Québec du rapatriement de 1982, le gouvernement conservateur, qui a succédé aux libéraux en 1984, se lance dans un projet de réforme constitutionnelle. Lors d’une rencontre entre le Premier ministre fédéral Mulroney, originaire du Québec tout comme Trudeau, et ses homologues provinciaux, au lac Meech (Québec), en 1987, une série d’amendements à la Constitution est approuvée, en vue de satisfaire à l’exigence québécoise de sa reconnaissance comme « société distincte « au sein de la fédération canadienne. Bien que Mulroney déploie de gros efforts en vue de convaincre les provinces, les Canadiens anglophones s’opposent à l’accord du lac Meech, particulièrement le Manitoba et Terre-Neuve, qui refusent de le ratifier en 1990. Cet échec déclenche un important mouvement de renouveau souverainiste au Québec et conduit à une nouvelle série de rencontres en 1991 et en 1992. Ces négociations aboutissent à la rédaction de l’accord de Charlottetown, un document préparatoire à une ample modification de la Constitution, prévoyant, entre autres dispositions, un droit à l’autonomie pour les Amérindiens, et, comme dans l’accord précédent du Lac Meech, une reconnaissance du Québec comme « société distincte «, cette notion étant cependant assortie de dispositions qui en atténuent la portée. Bien que soutenu par la plupart des dirigeants politiques, par la presse et par le monde des affaires, cet accord est rejeté (y compris par les Québécois) à l’occasion d’un référendum pancanadien, en octobre 1992.

Un autre accord visant à créer un vaste territoire autogouverné pour les Inuit, dans les Territoires du Nord-Ouest, est approuvé par les Inuits en novembre 1992. Ce territoire prend le nom de Nunavut, qui signifie « notre terre « en inuktitut, la langue des Inuit.

5.18 L’ère Chrétien et la question de la souveraineté québécoise

En février 1993, alors que le Canada s’enlise dans la récession et la discorde, Brian Mulroney annonce sa démission. Kim Campbell le remplace à la tête du parti en juin, devenant la première femme Premier ministre du Canada. Quatre mois plus tard, cependant, les progressistes conservateurs accusent une défaite cuisante aux élections d’octobre. Le Parti libéral l’emporte et son leader, Jean Chrétien, devient Premier ministre. Le Bloc québécois de l’indépendantiste Lucien Bouchard arrive en deuxième position.

Sur le plan intérieur, le gouvernement de Jean Chrétien s’attelle à l’assainissement des finances publiques, alors que le budget fédéral est déficitaire depuis 1973. En politique étrangère, il ambitionne de donner au Canada un rôle à sa mesure sur la scène internationale et de contrebalancer le poids des États-Unis et de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena). Toutefois, le Premier ministre canadien doit surtout et d’abord faire face à la montée des aspirations indépendantistes au Québec, que cristallisent les succès électoraux du Bloc québécois au niveau fédéral.

Lors du scrutin législatif de septembre 1994 au Québec, le Parti québécois (PQ) de Jacques Parizeau obtient une majorité de sièges. Conformément à ses engagements électoraux, le nouveau Premier ministre du Québec organise un référendum sur l’accession du Québec à la souveraineté. La campagne pour le « oui « est surtout animée par le charismatique Lucien Bouchard. Le projet des souverainistes est d’affirmer, dans le cadre d’un État québécois, une identité culturelle propre, avec la langue française pour vecteur. Le Québec serait compétent pour voter des lois, lever des impôts, signer des traités. Mais le dollar canadien resterait la monnaie unique, et des institutions communes seraient mises en place pour les questions de défense et de commerce international.

Le référendum sur la souveraineté du Québec a lieu à l’automne 1995. Recueillant 50,6 p. 100 des suffrages, le « non « l’emporte par une très faible majorité qui frappe d’étonnement le gouvernement fédéral et le reste du Canada. Ce résultat est dû au soutien quasi unanime des anglophones et des allophones qui, ensemble, forment presque 20 p. 100 de la population du Québec. Environ 60 p. 100 des francophones ont en revanche répondu « oui «, proportion sensiblement plus élevée que celle observée lors du référendum de 1980. L’échec des indépendantistes provoque non seulement la démission de Jacques Parizeau (auquel succède Lucien Bouchard) mais accentue aussi les clivages entre francophones et anglophones.

La question de la souveraineté québécoise et les antagonismes régionaux dans le reste du Canada jouent un rôle déterminant dans le résultat des élections fédérales anticipées de juin 1997, qui ne donnent qu’une étroite majorité au Parti libéral de Jean Chrétien. Parmi les partis d’opposition, le Bloc québécois perd 10 sièges sur les 54 qu’il détient, tandis que le Parti réformiste, né en Alberta et opposé aux revendications québécoises ainsi qu’au bilinguisme institutionnel, obtient 60 sièges, ce qui lui vaut le statut d’opposition officielle.

Appelée par Jean Chrétien à se prononcer sur la sécession unilatérale du Québec du reste du Canada, la Cour suprême du Canada rend un avis important sur la question en août 1998. Sans reconnaître au Québec le droit à la proclamation unilatérale de l’indépendance, cet avis reconnaît la légitimité du projet de sécession dans l’hypothèse d’un référendum où le « oui « l’emporterait, à partir d’une question claire et avec une majorité décisive. Le cas échéant, l’avis de la Cour suprême établit la nécessité de négociations entre la province et le gouvernement fédéral. Elle laisse toutefois aux « acteurs politiques « la mise en œuvre de ce processus. À la suite de cet avis, le Parlement fédéral approuve en mars 2000 une loi qui reconnaît au Québec le droit de se séparer du reste de la Confédération par la voie du référendum, mais qui définit aussi une série d’obstacles institutionnels tels qu’ils rendent pratiquement impossible la sécession. Cette loi est mal accueillie aussi bien par les indépendantistes que par les représentants de la communauté anglophone, qui la jugent insatisfaisante et antidémocratique.

Lors des élections législatives québécoises de novembre 1998, le Parti québécois de Lucien Bouchard conserve la majorité. Toutefois le bon score obtenu par les fédéralistes limite sa marge de manœuvre dans son action visant à l’indépendance du Québec.

Le 1er avril 1999, le Canada redéfinit, pour la première fois depuis cinquante ans, ses frontières intérieures et crée un troisième Territoire, le Nunavut (né d’une subdivision des Territoires du Nord-Ouest), accordant ainsi aux Inuit l’autonomie administrative qu’ils revendiquent depuis longtemps.

Fort d’un bon bilan économique et d’une cote de popularité favorable, Jean Chrétien provoque des élections législatives anticipées en novembre 2000. Le scrutin est marqué par la victoire du Parti libéral : avec 41 p. 100 des voix, il remporte 12 sièges supplémentaires, totalisant 173 des 301 sièges de la Chambre des communes. Jean Chrétien est reconduit majoritairement pour une troisième fois consécutive. Le renforcement des libéraux au Québec entraîne en janvier 2001 la démission et le retrait de la vie politique de Lucien Bouchard. Invoquant des raisons personnelles, celui-ci met surtout en avant son incapacité à engager le Québec de manière décisive sur la voie de la souveraineté. Considérant qu’il n’a pas « réussi à raviver la flamme «, il préfère se retirer. Sa démission, accueillie avec consternation par les partisans de l’indépendance du Québec et avec soulagement par les fédéralistes, fait l’effet d’un électrochoc dans le pays. Bernard Landry lui succède au poste de Premier ministre du Québec.

Le succès de Jean Chrétien, confirmé par la bonne santé de l’économie canadienne, ne lui épargne cependant pas un isolement croissant au sein de son parti en raison notamment de la rivalité qui l’oppose à son ministre des Finances, Paul Martin. À l’approche du congrès du Parti libéral et conscient de la faiblesse de son leadership, le Premier ministre canadien annonce de manière anticipée son retrait de la vie politique en août 2002. Élu à la tête du Parti libéral, Paul Martin succède à Jean Chrétien au poste de Premier ministre en décembre 2003.

La dernière année du gouvernement de Jean Chrétien est marquée par la volonté d’imprimer sa marque dans l’orientation politique du pays. Sur le plan international, notamment, le Canada se dissocie considérablement des positions américaines. Cette distance se manifeste par exemple en matière d’environnement par la ratification du protocole de Kyoto sur les changements climatiques en 2002 et, surtout, par le refus du Canada, en 2003, de participer aux côtés des États-Unis à une guerre en Irak sans l’aval de l’ONU.

5.19 Le gouvernement de Paul Martin

Soucieux de gagner une légitimité que ne lui a pas apportée son arrivée au pouvoir, le Premier ministre Paul Martin demande la tenue d’élections législatives anticipées pour le mois de juin 2004. Usé par une décennie de pouvoir, le Parti libéral est en outre au cœur d’une affaire politico-financière (le « scandale des commandites «) concernant le versement de subventions destinées à une campagne de promotion du fédéralisme canadien au Québec et détournées au profit d’agences publicitaires proches des libéraux. Outre cette affaire, les principaux thèmes de la campagne portent sur les programmes sociaux et de santé publique, la fiscalité et le mariage homosexuel. Au terme d’une campagne marquée par la montée du Parti conservateur (formation de droite conduite par Stephen Harper et née en 2003 de la fusion de l’Alliance canadienne et du Parti progressiste-conservateur), le Parti libéral parvient à conserver une majorité relative à la Chambre des communes, avec 36,7 p. 100 des suffrages et 135 sièges. Le Parti conservateur recueille 29,6 p. 100 des voix (99 sièges), majoritairement dans son bastion des provinces de l’Ouest canadien. Le Bloc québécois de Gilles Duceppe remporte une victoire importante au Québec, avec 54 des 75 sièges dévolus à la province. Le nouveau gouvernement minoritaire mis en place par Paul Martin repose sur l’alliance du Parti libéral avec le Nouveau parti démocratique (NPD), formation de gauche conduite par Jack Layton (19 sièges). Mais il ne résiste pas aux suites du scandale des commandites (même si Paul Martin est lui-même blanchi), et est renversé par une motion de censure en novembre 2005.

5.20 Le gouvernement de Stephen Harper

Lors des élections législatives qui s’ensuivent, en janvier 2006, le Parti conservateur bénéficie du reflux des libéraux, ternis par les accusations de corruption en dépit d’un bon bilan économique, et obtient la majorité relative des sièges, avec 124 députés sur les 308 de la Chambre des Communes (contre seulement 103 sièges au Parti libéral). Son chef de file, Stephen Harper, prend la tête du nouveau gouvernement minoritaire de droite. Cet économiste de 46 ans, grand défenseur des valeurs familiales, s’est employé à adoucir son image de radical proche de la droite ultraconservatrice américaine et a axé sa campagne sur la baisse des impôts, la répression de la criminalité, la lutte contre la corruption et la gabegie, l’octroi de plus d’autonomie aux provinces, la remise en cause du mariage homosexuel (légalisé en 2005) et le rapprochement avec les États-Unis.

Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

Liens utiles