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commentaire composé ' crépuscule' Apollinaire

Publié le 17/05/2011

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apollinaire

II. Commentaire :

 

Écrit en 1909, « Crépuscule » est dédié à Marie Laurencin, artiste peintre avec qui Apollinaire a eu une liaison en 1907. « Crépuscule »  fait partie d’Alcools, placé entre «  Chantre » et « Annie », il est tout aussi mystérieux que le premier et chante l’amour impossible comme le second.

Constitué de cinq octosyllabes à rimes placés au hasard, qui transposent   une  fête foraine où évoluent des personnages fascinants et mystérieux ; des gens du voyage, dans un monde féerique des saltimbanques et des bateleurs ; monde cher à Apollinaire mais aussi à son ami Picasso qu’on retrouve comme thème récurrent dans sa période « bleue » (familles des saltimbanques).

D’ailleurs comme nous le verrons dans notre commentaire, cette scène de foire obéit aux lois d’une certaine composition picturale ; à travers ses personnages et le déroulement du spectacle, placés dans une atmosphère quelque peu mystérieuse et fantastique, Apollinaire charge sa poésie d’une rhétorique descriptive qui donne à penser, en effet, à une composition visuelle.

 

 

L’ensemble de lumière et d’ombre douces fondues s’appelle en peinture » clair-obscur), « Crépuscule » est imprégné de ce mariage des contraires et de ce que peut représenter cette notion.

En effet le ton est déjà donné avec le titre lui-même, « Crépuscule » ; l’un des moments où se retrouvent, se confrontent et se confondent le jour et la nuit, donnant ainsi comme un effet de toile de fond sombre,   il y a aussi l’aube mais le thème de la mort qui marque la poésie d’Apollinaire témoigne du choix de ce titre. La mort et la vie qui sont symbolisés ici à travers les confrontations ombres et lumières « frôlée par les ombres des morts », « ciel sans teinte », « le jour s’exténue »…. Qui plongent dans les ténèbres et «  l’aveugle qui berce un enfant », «  la biche qui passe avec ses enfants » signe de renouveau et de vie.

On note aussi le condensé de toutes les nuances et couleurs  qui se manifestent à travers la rhétorique descriptive tout au fil du poème ; la nature où évoluent les personnages : l’herbe qui évoque la couleur verte, l’étang donne une touche de bleue sombre, le ciel qui est « sans teinte » et « constellé » d’astres (qui sont pâles), mais aussi à travers l’arlequin et l’arlequine, qui par définition, représentent à eux seul toute une palette de couleur et une effusion de lumière.

 

La disposition des personnages vient donner un certain cadre et organise notre poème-tableau ; l’arlequine dans la 1ère strophe est présentée comme une Ophélia noyée dans l’étang où mire son corps, elle apparait comme en arrière-plan du tableau (de la fête elle-même ?) où l’arlequin décrochant une étoile occupe le premier plan ; à regarder de près , l’étoile qu’il décroche dépourvue de symbolique, ne présente qu’une étoile peinte sur un ciel sans teinte et sombre  lui aussi peint.

Autours de cet arlequin évoluent, comme dans une pièce de théâtre, des personnages féeriques mystérieux, d’air joyeux ou grave, occupés à faire des tours, comme l’acrobate, qui avec l’arlequin représente l’allégorie de la peinture figurative, ou restent simples spectateurs prenants des postures différentes et semblent jouer, pour chacun d’eux, un petit rôle dans cette pièce où le rôle principal est tenu par l’arlequin. Tout ce petit monde semble sans mouvement, leurs gestes sont figés, et leurs postures n’impliquent aucun mouvement comme le suggère les verbes de ce poèmes, employés au présent  à part « passer » :s’exténue, s’est mise, mire, vante, salue, regarde, …

 

Tout cela donnant l’impression ou l’illusion d’entrevoir une synthétisation d’un tableau mi réel mi fictif, infecté par la vision d’un univers troublant et inquiétant, et ce à travers les personnages des fées, enchanteurs, emprunté au monde surnaturel, et de nains et d’aveugles qu’on croirait juste sortis des tableaux de Bruegel ou Velazquez.

 

 

 

Ainsi, toutes ces couleurs et nuances et  à travers la description des personnages et de la nature ainsi que de leur disposition, donnant de la profondeur tout aussi optique que symbolique, participent à l’esquisse d’un tableau-poème où l’arlequin, métaphore de l’artiste créateur divulgue toute sa science.

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