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commentaire composé de l'incipit de « un après-dîner (…) à je n'estime pas ces originaux-là » du Neveu de Rameau de Diderot.

Publié le 12/09/2006

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rameau

Introduction :    Le neveu de Rameau est un dialogue philosophique entre Moi, le narrateur et Lui, Jean-François Rameau, neveu du célèbre compositeur Jean-Philippe Rameau. Moi est à la fois celui par qui s’opère le dialogue et le narrateur qui relate l’entretien des deux hommes.  Notre extrait se situe au tout début du livre, il s’agit de l’incipit du roman. Le narrateur et personnage Moi, rencontre Lui, le neveu de Rameau, dans un café. Le narrateur essaye de dresser un portrait du neveu de Rameau qu’il vient de rencontrer en esquissant tout d’abord un portrait de sa personnalité puis en s’arrêtant sur le statut social de ce dernier. Ce qui le frappe avant tout, c’est l’ambiguïté du personnage : le narrateur va s’attarder à souligner ses contradictions. C’est pourquoi nous analyserons en premier lieu, les phénomènes d’ambivalences, puis dans un deuxième temps, nous analyserons les effets d’amplifications du passage.    I) L’ambiguïté du personnage marquée par les phénomènes d’ambivalences    Le personnage qu’est le neveu de Rameau, est difficile à saisir, le narrateur s’amuse donc à souligner ses contradictions par de différentes façons.    1. Un personnage antithétique et marqué par la duplicité.    De nombreux syntagmes s’opposent tout au long du texte et dévoilent l’ambigüité du personnage. A la ligne 3 ce sont les compléments du nom qui s’opposent radicalement : « c’est un composé de hauteur et de bassesse, de bon sens et de déraison « En effet, les substantifs « hauteur et bassesse « sont des antonymes sur un plan moral. Le substantif « hauteur « caractérisant une supériorité morale, intellectuelle et la bassesse a contrario désignant un caractère bas, vil. De même « de bon sens « et « de déraison « s’opposent complètement. Ces antonymes sont reliés à deux reprises par la conjonction de coordination « et « qui unit donc deux mots de sens opposé. Aussi, nous trouvons sans cesse un mot et son contraire pour montrer la contradiction, l’ambigüité du personnage. Ainsi à la ligne 4 le substantif « l’honnête « est coordonné à son contraire « déshonnête « : « il faut que les notions de l’honnête et du déshonnête soient bien étrangement brouillées dans sa tête. «  Le neveu de rameau est aussi un personnage marqué par la duplicité. Celle-ci est marquée par la structure en diptyque des mots. La duplicité du personnage s’étend aux substantifs, par exemple, nous venons de voir «  les notions de l’honnête et du déshonnête «, elle s’étend aussi aux adjectifs qualificatifs « gras et replet « ligne 12 « maigre et hâve « ligne 10, ici les adjectifs s’opposent sur le plan sémantique, ils reflètent la dualité du personnage, une fois il apparaît maigre, une autre fois gros. Le personnage est un être duplice, double donc le narrateur fait le choix stylistique de doubler les mots également pour mimer sa duplicité. Enfin la structure en diptyque touche également les propositions : par exemple, nous trouvons deux relatives substantives à la ligne 5 : «  car il montre ce que la nature lui a donné de bonnes qualités, sans ostentation, et ce qu’il en a reçu de mauvaises, sans pudeur. Ici la relative se dédouble ainsi que les compléments circonstanciels de manière, nous en comptons deux également : sans ostentation et sans pudeur, terminant à chaque reprise la relative.    2. Une syntaxe ambivalente    L’ambigüité du personnage transparait dans la syntaxe elle-même. Ainsi de nombreuses phrases se caractérisent par des effets de balancement : On peut dénombrer six occurrences de « ou «, conjonction de coordination qui permet ces effets de balancement « ou il regagne, a pied, un petit grenier qu’il habite (...) ou il se rabat dans une taverne du faubourg (..), «  on dirait qu’il a passé plusieurs jours sans manger, ou qu’il sort de la Trappe. « « Le mois suivant, il est gras et replet, comme s’il n’avait pas quitté la table d’un financier, ou qu’il eût été renfermé dans un couvent de Bernardins. « si vous le rencontrez jamais et que son originalité ne vous arrête pas ; ou vous mettrez vos doigts dans vos oreilles, ou vous vous enfuirez « etc. Ce phénomène est bien trop récurent pour ne pas y prêter attention, d’ailleurs il est également renforcé par « soit «, nouvelle conjonction qui rajoute une alternative supplémentaire : « quand il n’a pas six sols dans sa poche, ce qui lui arrive quelque fois, il a recours soit a un fiacre de ses amis, soit au cocher d’un grand seigneur (..) Ces répétitions de conjonctions créent du rythme, le texte devient cyclique.    3. Un personnage impossible à cerner    Le narrateur tente de saisir la personnalité du personnage. Celle-ci, étant ambiguë, toute la réalité du personnage est comme gommée. A la ligne 2 le narrateur se fait aborder par « l’un des plus bizarres personnages «, ce n’est donc pas un personnage à proprement parler mais un personnage impossible à cerner. A la ligne 3 il essaye de le définir mais cela reste sans succès, il emploie la tournure présentative « c’est un composé de (..) « le substantif composé insiste sur la bizarrerie du personnage fait de « mélange «. Aussi on voit bien par l’usage du présentatif que le personnage échappe à la désignation pure. Il utilise d’ailleurs de nombreux déictiques pour tenter de le nommer mais sa démarche reste vaine. Le narrateur joue avec son lecteur, puisqu’il n’arrive pas à le décrire, puisqu’il ne peut le transcrire avec des mots, il va en parler et en parler encore comme s’il pouvait parler du neveu de Rameau sans fin.  Enfin les adverbes de temps sont eux aussi imprécis  comme « quelque fois «, à l’instar, l’emploi de certains verbes au conditionnel sont vagues « on dirait que «, on « compterait «, ce qui renforce l’imprécision du personnage et son caractère insaisissable.    Le narrateur s’emploie donc à décrire un personnage pour lui totalement ambigu, le neveu de Rameau est marqué par la duplicité. Personnage ambivalent et insaisissable, ce que mime au plus haut point la syntaxe de l’extrait.    II) L’amplification pour tenter de saisir le personnage    2.1 Une logique accumulative    Puisqu’il n’arrive pas à le décrire d’un seul jet à cause de ses multiples contradictions, le narrateur va donc multiplier les descriptions selon une logique d’amplification. En effet tout au long du passage, les substantifs, les adjectifs, les propositions s’additionnent et se répètent. Par exemple, les compléments du nom se répètent : on trouve aux lignes 4-5 six compléments du nom : « hauteur et bassesse «, « de bon sens, et de déraison « complètent le nom « composé « et « l’honnête et du déshonnête « complètent le groupe nominal  « les notions «. Aussi à la ligne 6« au reste il est doué d’une organisation forte, d’une chaleur d’imagination singulière, et d’une vigueur de poumons peu commune « Le verbe fléchi «  est doué « reçoit des compléments qui ne cessent de se développer chacun d’eux. En effet, le groupe nominal «  une organisation « est étendu par l’adjectif « forte « puis le second groupe nominal «  une chaleur « reçoit lui aussi un nouveau complément du nom «  d’organisation « lui-même qualifié par un adjectif « singulière « Dans le 3è complément, l’adverbe « peu « viendra étendre à nouveau la proposition. Il en est de même pour les verbes qui se superposent, on peut citer à titre d’exemple, les participes présents de la première ligne « j’étais là, regardant beaucoup, parlant peu, et écoutant le moins que je pouvais «, ces répétitions de participes présents créent du rythme et des effets sonore par la figure de l’homéotéleute, c'est-à-dire la répétition en fin de mot du même phonème, ici la nasale « regardant, parlant, écoutant « Cette logique accumulative permet d’observer le personnage et de le décrypter en jouant de toutes les ressources du langage.    2.2 Le jeu temporel et spatial    A défaut, de pouvoir saisir le personnage, le narrateur décrit tous ses agissements et ses déplacements. Ainsi le texte regorge de nombreux adverbes de temps et de lieu comme « quelque fois «, « le mois suivant «, « aujourd’hui, « demain «, « la journée «, « la nuit «. On relève également des relatives de lieux : «son premier soin, le matin, quand il est levé ; est de savoir où il dînera, après dîner, il pense où il ira souper. Cette double relative de lieu souligne avec humour que le personnage n’est qu’un pique assiette. L’avant dernière ligne regorge de compléments de temps et de lieu «  il reparait avec le jour à la ville, habillé de la veille pour le lendemain, et du lendemain quelque fois pour le reste de la semaine. « On voit bien ici que le narrateur s’amuse à superposer dans cette avant dernière phrase de nombreux circonstanciels de temps et de lieu. La rencontre avec cet être bizarre qu’est le neveu de Rameau importe finalement moins que ce jeu de virtuosité auquel se prête Diderot.    2.3 L’amplification par l’hyperbole    A force de décrire le personnage, le narrateur fait de cet être une hyperbole ambulante. Par exemple, à la ligne 10: « il est maigre et hâve comme un malade au dernier degré de la consomption «. Par un ton comique et par l’hyperbole « au dernier degré de la consomption «, le narrateur le compare à un malade qui est sur le point de dépérir. C’est un original comme le souligne la dernière phrase. Le mot revient d’ailleurs deux fois : « son originalité « ligne 8 et « ces originaux-là « dernière ligne, qui clôture le texte. Ce dernier mot constitue une sorte de chute au texte : le narrateur semble enfin parvenir à saisir l’insaisissable.    Conclusion : Cet extrait qui se situe au tout début du roman constitue donc une pause descriptive, selon les termes de genette, une pause dans la narration où le narrateur et personnage nous dresse le portrait de celui qu’il vient de rencontrer. Portrait d’un original que Diderot va essayer de saisir par des effets d’ambivalences et d’amplifications. Par un ton drôle et plaisant, Diderot renouvèle le topos de la scène de rencontre, faisant de celle-ci une expérimentation narrative sur un « un des plus bizarres personnages de ce pays.«

Un après-dîner, j’étais là, regardant beaucoup, parlant peu, et écoutant le moins que je pouvais ; lorsque je fus abordé par un des plus bizarres personnages de ce pays où Dieu n’en a pas laissé manquer. C’est un composé de hauteur et de bassesse, de bon sens et de déraison. Il faut que les notions de l’honnête et du déshonnête soient bien étrangement brouillées dans sa tête ; car il montre ce que la nature lui a donné de bonnes qualités, sans ostentation, et ce qu’il en a reçu de mauvaises, sans pudeur. Au reste il est doué d’une organisation forte, d’une chaleur d’imagination singulière, et d’une vigueur de poumons peu commune. Si vous le rencontrez jamais et que son originalité ne vous arrête pas ; ou vous mettrez vos doigts dans vos oreilles, ou vous vous enfuirez. Dieux, quels terribles poumons. Rien ne dissemble plus de lui que lui-même. Quelquefois, il est maigre et hâve, comme un malade au dernier degré de la consomption ; on compterait ses dents à travers ses joues. On dirait qu’il a passé plusieurs jours sans manger, ou qu’il sort de la Trappe. Le mois suivant, il est gras et replet, comme s’il n’avait pas quitté la table d’un financier, ou qu’il eût été renfermé dans un couvent de Bernardins. Aujourd’hui, en linge sale, en culotte déchirée, couvert de lambeaux, presque sans souliers, il va la tête basse, il se dérobe, on serait tenté de l’appeler, pour lui donner l’aumône. Demain, poudré, chaussé, frisé, bien vêtu, il marche la tête haute, il se montre et vous le prendriez au peu prés pour un honnête homme. Il vit au jour la journée. Triste ou gai, selon les circonstances. Son premier soin, le matin, quand il est levé, est de savoir où il dînera ; après dîner, il pense où il ira souper. La nuit amène aussi son inquiétude. Ou il regagne, à pied, un petit grenier qu’il habite, à moins que l’hôtesse ennuyée d’attendre son loyer, ne lui en ait redemandé la clef ; ou il se rabat dans une taverne du faubourg où il attend le jour, entre un morceau de pain et un pot de bière. Quand il n’a pas six sols dans sa poche, ce qui lui arrive quelquefois, il a recours soit à un fiacre de ses amis, soit au cocher d’un grand seigneur qui lui donne un lit sur de la paille, à côté de ses chevaux. Le matin, il a encore une partie de son matelas dans ses cheveux. Si la saison est douce, il arpente toute la nuit, le Cours ou les Champs-Élysées. Il reparaît avec le jour, à la ville, habillé de la veille pour le lendemain, et du lendemain quelquefois pour le reste de la semaine. Je n’estime pas ces originaux-là.

rameau

« substantives à la ligne 5 : « car il montre ce que la nature lui a donné de bonnes qualités, sans ostentation, et ce qu'il en a reçu demauvaises, sans pudeur.

Ici la relative se dédouble ainsi que les compléments circonstanciels de manière, nous en comptons deuxégalement : sans ostentation et sans pudeur, terminant à chaque reprise la relative. 2.

Une syntaxe ambivalente L'ambigüité du personnage transparait dans la syntaxe elle-même.

Ainsi de nombreuses phrases se caractérisent par des effets debalancement : On peut dénombrer six occurrences de « ou », conjonction de coordination qui permet ces effets de balancement« ou il regagne, a pied, un petit grenier qu'il habite (...) ou il se rabat dans une taverne du faubourg (..), « on dirait qu'il a passéplusieurs jours sans manger, ou qu'il sort de la Trappe.

» « Le mois suivant, il est gras et replet, comme s'il n'avait pas quitté latable d'un financier, ou qu'il eût été renfermé dans un couvent de Bernardins.

« si vous le rencontrez jamais et que son originaliténe vous arrête pas ; ou vous mettrez vos doigts dans vos oreilles, ou vous vous enfuirez » etc.

Ce phénomène est bien troprécurent pour ne pas y prêter attention, d'ailleurs il est également renforcé par « soit », nouvelle conjonction qui rajoute unealternative supplémentaire : « quand il n'a pas six sols dans sa poche, ce qui lui arrive quelque fois, il a recours soit a un fiacre deses amis, soit au cocher d'un grand seigneur (..) Ces répétitions de conjonctions créent du rythme, le texte devient cyclique. 3.

Un personnage impossible à cerner Le narrateur tente de saisir la personnalité du personnage.

Celle-ci, étant ambiguë, toute la réalité du personnage est commegommée.

A la ligne 2 le narrateur se fait aborder par « l'un des plus bizarres personnages », ce n'est donc pas un personnage àproprement parler mais un personnage impossible à cerner.

A la ligne 3 il essaye de le définir mais cela reste sans succès, ilemploie la tournure présentative « c'est un composé de (..) » le substantif composé insiste sur la bizarrerie du personnage fait de« mélange ».

Aussi on voit bien par l'usage du présentatif que le personnage échappe à la désignation pure.

Il utilise d'ailleurs denombreux déictiques pour tenter de le nommer mais sa démarche reste vaine.

Le narrateur joue avec son lecteur, puisqu'il n'arrivepas à le décrire, puisqu'il ne peut le transcrire avec des mots, il va en parler et en parler encore comme s'il pouvait parler duneveu de Rameau sans fin.Enfin les adverbes de temps sont eux aussi imprécis comme « quelque fois », à l'instar, l'emploi de certains verbes auconditionnel sont vagues « on dirait que », on « compterait », ce qui renforce l'imprécision du personnage et son caractèreinsaisissable. Le narrateur s'emploie donc à décrire un personnage pour lui totalement ambigu, le neveu de Rameau est marqué par la duplicité.Personnage ambivalent et insaisissable, ce que mime au plus haut point la syntaxe de l'extrait. II) L'amplification pour tenter de saisir le personnage 2.1 Une logique accumulative Puisqu'il n'arrive pas à le décrire d'un seul jet à cause de ses multiples contradictions, le narrateur va donc multiplier lesdescriptions selon une logique d'amplification.

En effet tout au long du passage, les substantifs, les adjectifs, les propositionss'additionnent et se répètent.

Par exemple, les compléments du nom se répètent : on trouve aux lignes 4-5 six compléments dunom : « hauteur et bassesse », « de bon sens, et de déraison » complètent le nom « composé » et « l'honnête et du déshonnête »complètent le groupe nominal « les notions ».

Aussi à la ligne 6« au reste il est doué d'une organisation forte, d'une chaleurd'imagination singulière, et d'une vigueur de poumons peu commune » Le verbe fléchi « est doué » reçoit des compléments qui necessent de se développer chacun d'eux.

En effet, le groupe nominal « une organisation » est étendu par l'adjectif « forte » puis lesecond groupe nominal « une chaleur » reçoit lui aussi un nouveau complément du nom « d'organisation » lui-même qualifié parun adjectif « singulière » Dans le 3è complément, l'adverbe « peu » viendra étendre à nouveau la proposition.

Il en est de mêmepour les verbes qui se superposent, on peut citer à titre d'exemple, les participes présents de la première ligne « j'étais là,regardant beaucoup, parlant peu, et écoutant le moins que je pouvais », ces répétitions de participes présents créent du rythme etdes effets sonore par la figure de l'homéotéleute, c'est-à-dire la répétition en fin de mot du même phonème, ici la nasale« regardant, parlant, écoutant » Cette logique accumulative permet d'observer le personnage et de le décrypter en jouant detoutes les ressources du langage. 2.2 Le jeu temporel et spatial A défaut, de pouvoir saisir le personnage, le narrateur décrit tous ses agissements et ses déplacements.

Ainsi le texte regorge de. »

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