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examen blanc

Publié le 05/12/2012

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Texte 1 : Jean Racine, Andromaque, Acte III, scène 7(1667) Les Grecs ont posé à leur allié, Pyrrhus, roi d'Epire, un ultimatum : il doit leur livrer Astyanax, fils de sa captive Andromaque et du défunt Hector. Or Pyrrhus est amoureux d'Andromaque et espère gagner ses faveurs en sauvant son fils. Mais devant sa froideur, il se montre menaçant. Pyrrhus, Andromaque, Céphise(confidente d'Andromaque). Pyrrhus continue : Madame, demeurez.On peut vous rendre encor ce fils que vous pleurez.Oui, je sens à regret qu'en excitant vos larmesJe ne fais contre moi que vous donner des armes.Je croyais apporter plus de haine en ces lieux.Mais, Madame, du moins tournez vers moi les yeux :Voyez si mes regards sont d'un juge sévère,S'ils sont d'un ennemi qui cherche à vous déplaire.Pourquoi me forcez-vous vous-même à vous trahir ?Au nom de votre fils, cessons de nous haïr.A le sauver enfin c'est moi qui vous convie.Faut-il que mes soupirs vous demandent sa vie ?Faut-il qu'en sa faveur j'embrasse vos genoux ?Pour la dernière fois, sauvez-le, sauvez-vous.Je sais de quels serments je romps pour vous les chaînes,Combien je vais sur moi faire éclater de haines.Je renvoie Hermione, et je mets sur son front,Au lieu de ma couronne, un éternel affront.Je vous conduis au temple où son hymen s'apprête,Je vous ceins du bandeau préparé pour sa tête.Mais ce n'est plus, Madame, une offre à dédaigner : Je vous le dis, il faut ou périr ou régner.Mon coeur, désespéré d'un an d'ingratitude,Ne peut plus de son sort souffrir l'incertitude.C'est craindre, menacer et gémir trop longtemps.Je meurs si je vous perds, mais je meurs si j'attends.Songez-y : je vous laisse ; et je viendrai vous prendrePour vous mener au temple, où ce fils doit m'attendre.Et là vous me verrez, soumis ou furieux,Vous couronner, Madame, ou le perdre à vos yeux. Notes : Hermione : sa fiancée Hymen : mariage Texte 2 : Marivaux, L'île des Esclaves, scène 8(1725) Les maîtres et les valets ayant été contraints d'échanger leur condition, Arlequin (un valet devenu maître) tient à Euphrosine (une maîtresse devenue servante) un discours de séduction. Arlequin, Euphrosine Arlequin arrive en saluant Cléanthis qui sort. Il va tirer Euphrosine par la manche. EUPHROSINE. Que me voulez-vous ?ARLEQUIN, riant. Eh !eh !eh ! ne vous a-t-on pas parlé de moi?EUPHROSINE. Laissez-moi, Je vous prie.EUPHROSINE. Eh là, là, regardez-moi dans l'oeil pour deviner ma pensée.EUPHROSINE. Eh !pensez ce qu'il vous plaira.ARLEQUIN. M'entendez-vous un peu ?EUPHROSINE. Non.ARLEQUIN. C'est que je n'ai encore rien dit.EUPHROSINE, lmpatiente. Ahi !ARLEQUIN. Ne mentez point ; on vous a communiqué les sentiments de mon âme, rien n'est plus obligeant pour vous.EUPHROSINE. Quel état ! ARLEQUIN. Vous me trouvez un peu nigaud, n'est-il pas vrai ?mais cela se passera ; c'est que je vous aime, et que je ne sais comment vous le dire.EUPHROSINE. Vous ?ARLEQUIN. Eh pardi oui ; qu'est-ce qu'on peut faire de mieux ? Vous êtes si belle, il faut bien vous donner son coeur, aussi bien vous le prendriez de vous-même.EUPHROSINE. Voici le comble de mon infortune.ARLEQUIN, lui regardant les mains. Quelles mains ravissantes !les jolis petits doigts !que je serais heureux avec cela !mon petit coeur en ferait bien son profit. Reine, je suis bien tendre, mais vous ne voyez rien ; si vous aviez la charité d'être tendre aussi, oh ! je deviendrais fou tout à fait.EUPHROSINE. Tu ne l'es déjà que trop.ARLEQUIN. Je ne le serai jamais tant que vous en êtes digne.EUPHROSINE. Je ne suis digne que de pitié, mon enfant.ARLEQUIN. Bon, bon, à qui est-ce que vous contez cela ? vous êtes digne de toutes les dignités imaginables : un empereur ne vous vaut pas, ni moi non plus : mais me voilà, moi, et un empereur n'y est pas et un rien qu'on voit vaut mieux que quelque chose qu'on ne voit pas. Qu'en dites-vous ?EUPHROSINE. Arlequin, il me semble que tu n'as point le coeur mauvais.ARLEQUIN. Oh ! il ne s'en fait plus de cette pâte-là, je suis un mouton.EUPHROSINE. Respecte donc le malheur que j'éprouve.ARLEQUIN. Hélas ! je me mettrais à genoux devant lui.EUPHROSINE. Ne persécute point une infortunée, parce que tu peux la persécuter impunément. Vois l'extrémité où je suis réduite ; et si tu n'as point d'égard au rang que je tenais dans le monde, à ma naissance, à mon éducation, du moins que mes disgrâces, que mon esclavage, que ma douleur t'attendrissent. Tu peux ici m'outrager autant que tu le voudras ; je suis sans asile et sans défense, je n'ai que mon désespoir pour tout secours, j'ai besoin de la compassion de tout le monde, de la tienne même, Arlequin ; voilà l'état où je suis, ne le trouves-tu pas assez misérable ? tu es devenu fibre et heureux, cela doit-il te rendre méchant ? Je n'ai pas la force de t'en dire davantage ; je ne t'ai jamais fait de mal, n'ajoute rien à celui que je souffre. ARLEQUIN, abattu, les bras abaissés, et comme immobile.J'ai perdu la parole. Note : Etat : situation Texte 3 : Alfred de Musset, Les Caprices de Marianne, acte II, scène 1(1833) Coelio, amoureux de Marianne, jeune femme mariée, se sert d'Octave pour lui faire sa cour. OCTAVE. - Belle Marianne, vous dormirez tranquillement. - Le coeur de Coelio est à une autre, et ce n'est plus sous vos fenêtres qu'il donnera ses sérénades.MARIANNE. - Quel dommage et quel grand malheur de n'avoir pu partager un amour comme celui-là !voyez comme le hasard me contrarie ! Moi qui allais l'aimer.OCTAVE. - En vérité !MARIANNE. - Oui, sur mon âme, ce soir ou demain matin, dimanche au plus tard, je lui appartenais. Qui pourrait ne pas réussir avec un ambassadeur tel que vous ? il faut croire que sa passion pour moi était quelque chose comme du chinois ou de l'arabe, puisqu'il lui fallait un interprète, et qu'elle ne pouvait s'expliquer tonte seule.OCTAVE. - Raillez, raillez, nous ne vous craignons plus.MARIANNE. - Ou peut-être que cet amour n'était encore qu'un pauvre enfant à la mamelle, et vous, comme une sage nourrice, en le menant à la lisière, vous l'aurez laissé tomber la tête la première en le promenant par la ville.OCTAVE. - La sage nourrice s'est contentée de lui faire boire d'un certain lait que la vôtre vous a versé sans doute, et généreusement ; vous en avez encore sur les lèvres une goutte qui se mêle à toutes vos paroles. MARIANNE. - Comment s'appelle ce lait merveilleux ?OCTAVE. - L'indifférence. Vous ne pouvez aimer ni haïr, et vous êtes comme les roses du Bengale, Marianne, sans épines et sans parfum.MARIANNE. - Bien dit. Aviez-vous préparé d'avance cette comparaison ? Si vous ne brûlez pas le brouillon de vos harangues, donnez-le-moi, de grâce, que je les apprenne à ma perruche.OCTAVE. - Qu'y trouvez-vous qui puisse vous blesser ? Une fleur sans parfum n'en est pas moins belle ; bien au contraire, ce sont les plus belles que Dieu a faites ainsi ; et le jour où, comme une Galatée d'une nouvelle espèce, vous deviendrez de marbre au fond de quelque église, ce sera une charmante statue que vous ferez et qui ne laissera pas que de trouver quelque niche respectable dans un confessionnal.MARIANNE. - Mon cher cousin, est-ce que vous ne plaignez pas le sort des femmes?voyez un peu ce qui m'arrive : il est décrété par le sort que Coelio m'aime, ou qu'il croit m'aimer, lequel Coelio le dit à ses amis, lesquels amis décrètent à leur tour que, sous peine de mort, je serai sa maîtresse. La jeunesse napolitaine daigne m'envoyer en votre personne un digne représentant chargé de me faire savoir que j'ai à aimer ledit seigneur Coelio d'ici à une huitaine de jours. Pesez cela, je vous en prie. Si je me rends, que dira-t-on de moi ? N'est-ce pas une femme bien abjecte que celle qui obéit à point nommé, à l'heure convenue, à une pareille proposition ? Ne va-t-on pas la déchirer à belles dents, la montrer au doigt et faire de son nom le refrain d'une chanson à boire?Si elle refuse, au contraire, est-il un monstre qui lui soit comparable ? Est-il une statue plus froide qu'elle, et l'homme qui lui parle, qui ose l'arrêter en place publique son livre de messe à la main, n'a-t-il pas le droit de lui dire : vous êtes une rose du Bengale fans épines et sans parfum ? Notes : Lisière : Cordons attachés à la robe d'un enfant pour le soutenir dans sa marche. Galatée : Divinité marine de la mythologie grecque. Son nom évoque la blancheur du marbre. Chanson à boire : Chanson vulgaire. BAC BLANC 1 OBJET D'ETUDE : le texte théâtral et sa représentation, du XVIIème siècle à nos jours I) Vous répondrez d'abord à la question suivante (4 points) : Comment l'écriture théâtrale de ces trois extraits incarne-t-elle l'affrontement ? II) Vous traiterez ensuite l'un de ces sujets (16 points) : Sujet 1 : Commentaire Vous proposerez un commentaire du texte de Racine (texte 1) Sujet 2 : Dissertation « J'ai perdu la parole «, constate Arlequin « abattu « (v.47-48). Vous montrerez comment l'art théâtral - qui ne se limite pas à la parole- permet au personnage de se dire et d'affronter autrui. Vous vous appuierez sur les textes du corpus, les connaissances acquises sur l'objet théâtral, et sur votre culture personnelle. Sujet 3 : Invention Deux metteurs en scène ont choisi de monter la scène de Musset. Ils ont chacun une vision différente de Marianne : le premier l'imagine troublée, le second indifférente. Ils mettent en avant leur parti pris de mise en scène dans un dialogue.

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