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Illusion

Publié le 17/03/2011

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illusion

Plan de la dissertation : le théâtre est le monde de « l'illusion ».

 

Intro:

  • Expliquer la polysémie du titre: l'Illusion Comique. Cela mène à penser que Corneille définit le genre théâtral comme le monde de \"l'illusion\".
  • Problématique: Quels sont les différents aspects du théâtre qui sont ainsi mis en évidence?
  • Annonce des trois parties.

 

  1. Théâtre = miroir du réel.

1.1 [Des histoires auxquelles on croit ]

Le théâtre nous montre des êtres humains en chair et en os, vivants, proches de nous, vrais, qui vivent sous nos yeux des histoires qui pourraient être les nôtres. Ils nous font partager leurs sentiments, leurs rires, leurs colères, leurs déboires.=> il est facile, dans les meilleurs moments, d'oublier que ce n'est qu'un spectacle, et de s'identifier aux personnages.

  • On a le cœur serré lorsque Bérenger se retrouve seul être humain à la fin de Rhinocéros de Ionesco
  • on s'indigne avec Lise lorsqu'elle exprime sa rage d'être traitée comme un simple objet de plaisir par Clindor
  • on sursaute avec effroi lorsque Don Juan est frappé par la foudre du ciel
  • Ds L'Illusion comique, P., spectateur de la vie de son fils que lui montre A, souffre le martyre lorsqu'il le croit mort après le guet-apens d'Adraste (« Hélas, mon fils est mort ! » III, 12) et se réjouit lorsqu'il s'évade de prison (« A la fin je respire » IV, 10)

Ns avons oublié qui ns sommes et nos soucis; ns sommes les spectateurs fascinés de nos propres rêves et de nos propres fantasmes incarnés.

                        1.2. [La manipulation du spectateur par le théâtre dans le théâtre]

Ainsi placés dans cet état d'esprit, les spectateurs sont les victimes rêvées pour le metteur en scène désireux de s'amuser à leurs dépens, en utilisant la technique du « théâtre dans le théâtre ». Il est alors bien facile de les « mener en bateau » ! C'est aussi ce que va faire A à l'acte V : en montrant à P, sans l'informer préalablement du nouveau métier de comédien de son fils, Clindor et Rosine assassinés par Éraste, Isabelle enlevée au profit du prince Florilame. Le pauvre P est cette fois tout à fait persuadé qu'il a perdu son fils et pense à se suicider :

« Adieu, je vais mourir, puisque mon fils est mort ».

Pourtant quelques instants plus tard, il n'en revient pas de voir C vivant, de s'être laissé manipuler et duper comme un enfant :

« J'ai pris sa mort pour vraie, et ce n'était que feinte ! »

                        1.3. [Une tribune de dénonciation]

Miroir du réel, le théâtre va bien sûr pouvoir être porteur de toutes les critiques, de tous les messages :

  • Molière se sert du théâtre comme d'une tribune pour dénoncer tous les travers de ses contemporains (avarice, hypocrisie, préciosité, libertinage...) et se moquer de ses ennemis. Dans L'Impromptu de Versailles, il caricature le jeu grotesque de ses rivaux de l'hôtel de Bourgogne en se mettant lui-même en scène.
  • Ionesco dénonce la passivité avec laquelle on a laissé s'installer le nazisme (Rhinocéros)
  • Marivaux (dans L'île des Esclaves) montre les rapports maîtres / valets

 

=>le théâtre a le pouvoir de nous plonger dans un univers tellement vivant qu'il donne l'illusion du vrai.

 

  1. Théâtre = 1 pratique magique.

2.1. [Un art qui « commande à la nature »]

L'Illusion Comique présente le théâtre comme un « art divin », le pouvoir magique d'un vieux sage qui

 «... lit dans les pensées

Et connaît l'avenir et les choses passées » (I, 2)

Devant P médusé, il donne vie à « des spectres pareils à des corps animés » (I, 2) grâce à un art qui a tout de celui de l'illusionniste.

Il s'agit d'une métaphore du pouvoir d'évocation et d'illusion de la représentation théâtrale, de sa capacité à créer de l'illusion vraie.

                        2.2. [L'univers du travestissement]

le théâtre est par essence le monde du déguisement : les acteurs endossent des costumes qui leur donnent l'apparence des personnages qu'ils veulent incarner.

  • Au temps de la Commedia dell' Arte , on y ajoutait souvent un masque qui tout à la fois cachait et révélait la personnalité.
  • Le théâtre baroque, qui adore trompe-l'œil et faux-semblants, reprend souvent ce thème du déguisement.
  • Marivaux l'utilise aussi très fréquemment, notamment dans Le Jeu de l'amour et du hasard, où Sylvia et Dorante se travestissent pour mieux se connaître avant de s'épouser.

 

 

2.3. [Un monde où tout est possible]

Au théâtre, personne ne s'étonne de voir

  • des statues qui bougent et parlent (Dom Juan)
  • des hommes qui se transforment en bêtes (Rhinocéros)
  • des cadavres qui deviennent si énormes qu'ils envahissent tout l'appartement (Amédée ou comment s'en débarrasser, de Ionesco)

                        2.4. [la connivence avec le spectateur]

Le principe de l'ironie dramatique confère au spectateur une place privilégiée : il est souvent au courant de ce qui va se passer avant les autres personnages, et assiste, impuissant, ravi ou outré, à des situations dont il est le seul à savourer l'ironie :

  • comme Mario et M. Orgon, nous savons, dans Le Jeu de l'amour et du hasard, que Dorante a eu la même idée que Sylvia et que chacun, persuadé de tromper l'autre, est en fait lui-même trompé !

 

=>Le théâtre repose donc bien souvent sur le principe de la tromperie et de l'illusion.

 

  1. Théâtre = métaphore du monde.

3.1. [Monde de l'illusion / illusion du monde]

« All the world is a stage» (le monde entier est un théâtre) disait Shakespeare, rappelant ainsi que nous vivons dans un monde d'illusions :

n  illusion sur le monde qui nous entoure

n  illusion sur nos propres sentiments,

n   illusion sur les autres.

Le théâtre, monde de l'illusion, est donc aussi représentatif de l'illusion du monde.

                        3.2. [L'Illusion Comique : une pièce où tout le monde trompe tout le monde]

En 1660, Corneille supprime l'adjectif comique du titre, préférant intituler sa pièce « L'illusion », ce qui lui donne un sens plus général : tout y est illusion.

  • Cette pièce fourmille en effet de situations où un personnage en trompe plus ou moins cruellement un autre :
  • A ne se prive pas de « faire enrager » P (ironie des vers 1741 à 1746 :

«... Laissez-faire aux douleurs qui rongent aux entrailles,

Et, pour les redoubler, voyez ces funérailles. »

On tire rideau et on voit tous les comédiens qui partagent leur argent.)

  • Le geôlier fait croire à C en prison qu'il vient le chercher pour une exécution de nuit, alors qu'il le mène à la liberté...(IV, 8)
  • La différence entre l'être et le paraître est maintes fois illustrée :
  • le personnage de Matamore, qui cache sa lâcheté sous des rodomontades permanentes, est le type même de l'homme illusion, dont on ne sait plus, et qui ne sait plus lui-même, où commence et où finit la vérité.
  • Lise, Matamore, Clindor, révèlent par leurs monologues qu'ils ne sont pas qui on croyait.

3.3. [Mais l'illusion débouche souvent sur la vérité]

  • D'erreur en erreur, P finit par découvrir la vérité : son fils est comédien, et les préjugés qu'il avait sur ce métier s'effondrent. En se voyant sur scène, incarné par Géronte, il comprend aussi ses erreurs passées envers son fils.
  • C, en devenant acteur, a trouvé la vérité de son être, et peut laisser libre cours à son inconstance, à son désir de changement.
  • Dans Le Jeu de l'amour et du hasard, Dorante et Sylvia, victimes de leur propre stratagème, voient leur orgueil soumis à rude épreuve lorsqu'ils doivent s'avouer qu'ils sont tombés amoureux de quelqu'un qu'ils croient être un valet ou une servante. L'amour devra triompher des préjugés sociaux. Il a fallu ce jeu de masque pour qu'enfin tombent tous les masques !

 

Þ      Paradoxalement, derrière ces masques, ces travestissements, ces effets d'optique, ces illusions, c'est bien la vérité que vont découvrir tous ces personnages! Métaphore du monde, le théâtre permet de découvrir la vérité et la vie.

 

Conclusion:

Oui, le théâtre est bien le monde de l'illusion. Bien sûr, ce n'est pas la seule définition que l'on puisse en donner, et elle s'applique surtout au théâtre baroque, mieux qu'à tout autre.

Au XXe siècle elle sera fermement contestée par des auteurs comme Bertold Brecht, qui veulent faire un théâtre didactique et tentent sans cesse de rappeler qu'une \"dist

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