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Ionesco

Publié le 19/05/2013

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Le Théâtre de l’Absurde est un courant littéraire né dans les années 1950, et dont l’objectif est la déconstruction du langage, la représentation de la solitude de l’homme et celle de l’insignifiance de l’existence. Ainsi de petites salles de théâtre deviennent territoires d’expérimentation pour de nombreux auteurs tels que Beckett ou Ionesco. Eugène Ionescu, dramaturge du Théâtre de l’Absurde, est né en Roumanie en 1909 et est mort en 1994 à Paris. Il est partagé entre la France, son pays d’accueil, et la Roumanie, son pays d’origine, c’est pourquoi il éprouve le sentiment d’être seul et différent. Il est l’auteur de célèbres pièces de théâtre qui mêle tragique et comique : La Cantatrice Chauve (1950), La leçon (1951) ou encore Rhinocéros (1959) d’où est tiré ce passage. Dans cette œuvre, les personnages doivent affronter les diverses apparitions soudaines de rhinocéros qui s’opèrent dans la ville. L’extrait se situe à l’ouverture de la pièce, elle constitue ainsi la scène d’exposition. Quelle est l’originalité de cette scène d’exposition ? Nous répondrons à cette question en en deux mouvements : dans un premier temps, nous étudierons une scène d’exposition, et enfin nous verrons la parole et l’action remis en question.       Tout d’abord, la scène d’exposition présentée dans cet extrait apparaît classique car elle respecte trois critères d’une scène d’exposition traditionnelle. En effet, le cadre spatial est indiqué et posé dès le début par les didascalies, « une place dans une petite ville de province « (l.1), et beaucoup d’indicateurs spatiaux sont présents : « au fond « (l.1), « au rez-de-chaussée « (l.2), « au-dessus « (l.6), « au premier étage « (l.4), « devant « (l.9), « par la droite « (l.20) ou encore « par la gauche « (l.20). D’autre part, ce cadre spatial paraît tel un univers banal et quotidien. Des éléments réalistes composent le décors : « une épicerie « (l.2), « le clocher d’une église « (l.7), « un café « (l.8), « un arbre « (l.10). En outre, tous ces éléments sont désignés par les déterminants indéfinis « un « ou « une « qui souligne l’aspect commun et global du décor. En outre, l’Epicière apparaît selon sa qualité, « l’Epicière ouvre la porte « (l.16), et Jean est un prénom commun. L’entrée des personnages renforce le caractère familier du quotidien : « une femme portant sous un bras un panier à provisions vide « (l.15), « l’Epicière ouvre la porte de la boutique « (l.16) et la rencontre entre deux amis.  L’espace est ouvert avec « la perspective d’une petite rue « (l.7-8) qui créé un contraste avec l’espace clos et renfermé de l’ensemble de la pièce. Nous pouvons remarquer également la présence mystérieuse d’ « un arbre poussiéreux « (l.10) qui pourrait rappeler la présence latente de la rhinocérite avec la poussière envahissant la scène au moment de l’apparition des rhinocéros. Le cadre spatial est donc présent dans cette scène d’exposition même si l’univers apparaît global, commun. Des éléments dans l’extrait présentent le cadre temporel. En effet, la didascalie initiale, intitulée « Décor «, fournit des indications temporelles au lecteur : « c’est un dimanche, pas loin de midi, en été « (l.11). Cependant, le déterminant indéfini « un « est présent ici également, on ne connaît ni l’année, ni le mois. En revanche, nous pouvons déduire que la scène se déroule pendant une époque contemporaine, qui apparaît évidente pour le lecteur grâce à des indices présents dans le texte : le café, l’épicerie, le langage courant des personnages « vous m’attendez depuis longtemps ? « (l.29), les vêtements « costume marron, cravate rouge, faux col amidonné, chapeau marron « (l.21) ou encore la montre-bracelet « il regarde sa montre-bracelet « (l.27). Une phrase dans l’ensemble des didascalies souligne l’importance de la bande sonore dans la pièce : « Avant le lever du rideau, on entend carillonner « (l.14). Ce carillon a une portée symbolique dans la mesure où il substitue les trois coups traditionnels qui signalent le début de la pièce. Cette scène d’exposition est donc composée d’une description du cadre temporel. Ce début de pièce permet une présentation des personnages. En effet, les personnages figurants sont présentés suivis des deux personnages principaux qui s’avèrent être Jean et Bérenger. L’identité des premiers personnages n’est pas connue ou du moins ils sont désignés par leur fonction. En outre, le premier personnage à faire son entrée n’a pas d’identité : « une femme, portant sous un bras un panier à provisions vide, et sous l’autre un chat, traverse en silence la scène, de droite à gauche « (l.14-15). Ensuite, l’Epicière entre sur scène et est le premier personnage à parler : « Ah ! celle-là ! Ah ! celle-là, elle est fière. Elle ne veut plus acheter chez nous. « (l.17-18). Puis Jean et Bérenger apparaissent sur scène, « apparaît Jean « (l.20, « apparaît Bérenger « (l.20), et semble mener une relation amicale : « Toujours en retard, évidemment ! « (l.27) avec l’adverbe « toujours « qui précise que ce n’est pas la première rencontre entre les deux protagonistes. Au-delà des personnages principaux et figurants, l’épicier est un personnage invisible puisque son épouse s’adresse à lui sans que le spectateur ne l’aperçoivent : « à son mari qui est dans la boutique « (l.18). De plus, la rencontre entre Bérenger et Jean est retardée et mise en valeur par le moment où la scène est vide, « L’Epicière disparaît, plateau vide quelques secondes « (l.19). Cette scène d’exposition est donc traditionnelle car le cadre spatio-temporel est indiqué et les personnages sont présentés, malgré quelques limites telles que l’identité de certains personnages ou encore une présentation qui amène à croire au lecteur-spectateur qu’il s’apprête à lire ou à voir une pièce réaliste.     Cependant, cette scène d’exposition remet en cause la place de la parole et l’importance de l’action. Tout d’abord, un système d’opposition est créé entre les personnages. En effet, deux couples opposés sont présentés : l’Epicière et la Ménagère ainsi que Jean et Bérenger. La relation entre l’Epicière et la Ménagère suggère une situation latente de conflit. La première réplique de l’Epicière montre le caractère méprisant de cette dernière : « Ah ! Celle-là ! « (l.17). En outre, il y a une absence de communication entre ces deux personnages féminins étant donné que la Ménagère « traverse en silence la scène « (l.15) et que l’Epicière ne s’adresse pas à la Ménagère mais « à son mari qui est dans la boutique « (l.17). Les deux personnages principaux, Jean et Bérenger, sont présentés tels des personnages antithétiques. Leur apparition révèle d’entrée cette opposition puisqu’elle se fait par les côtés opposés de la scène : « Par la droite, apparaît Jean ; en même temps, par la gauche, apparaît Bérenger « (l.20). Puis, un contraste entre les personnages est créé par leur tenue vestimentaire et leur physique. Jean est un homme qui apporte un soin visible par son costume : « Jean est très soigneusement vêtu : costume marron, cravate rouge, faux col amidonné, chapeau marron « (l.20-21), les adverbes mélioratifs « très « et « soigneusement « sont accolés et accentuent l’homme présentable que semble être Jean. En revanche, la tenue vestimentaire indique l’insouciance et la négligence de Bérenger : « Bérenger n’est pas rasé, il est tête nue, les cheveux mal peignés, les vêtements chiffonnés « (l.22-23). Une forme de conclusion suit sa description afin de rappeler cette idée d’insouciance, « tout exprime chez lui la négligence « (l.23-24). Ces deux protagonistes s’opposent également par leur caractère qui s’affirme grâce au décalage de la conversation qu’ils entretiennent. Jean est sûr de lui, il représente une forme d’autorité et peut donc apparaître méprisant : l’omniprésence du pronom « je « et même du pronom « moi « en début de réplique, « Moi, c’est pas pareil « (l.33), et la ponctuation forte par les points d’exclamation « Toujours en retard, évidemment ! « (l.27) expriment l’assurance de Jean. Bérenger, quant à lui, peine à s’affirmer et exprime sa culpabilité. En effet, le ton hésitant, les points de suspension, « C’est juste… c’est juste, pourtant… « (l.36), ainsi que les répétitions (l.36) montrent son manque de confiance en soi. Les personnages sont antithétiques grâce à plusieurs formes d’opposition utilisées où l’aspect visuel s’affirme. L’aspect visuel de la scène prend une place importante dans l’extrait. A première vue, le lecteur remarque immédiatement l’abondance des indications scéniques par la présence de didascalies qui occupent plus de la moitié du passage, notamment celle du début intitulée « Décor «. Dans un premier temps, ce sont les didascalies qui permettent d’informer au lecteur une opposition entre les personnages dès leur apparition : « par la gauche « et « par la droite « (l. 20). Puis, ces indications prévoient les places futures des personnages sur scène : « Jean et Bérenger iront s’asseoir à une table de la terrasse « est suivie après le dialogue entre les protagonistes par « ils vont s’asseoir à une des tables de la terrasse du café « (l.31) et « Jean et Bérenger se sont assis « (l.39). Le lecteur visualise la scène grâce à la précision du décor, « Au-dessus de la devanture est écrit en caractère très visible le mot : « EPICERIE « « (l.3), mais aussi grâce à la précision de la scénographie, « une femme, (…), traverse en silence la scène, de droite à gauche « et « l’Epicière ouvre la porte de la boutique et la regarde passer « (l.14-16). Celle-ci permet également de préciser la présence d’un personnage transparent, « A son mari qui est dans la boutique « (l.17). En outre, les gestes sont banals, cependant ceux-ci prennent sens notamment lors de l’entrée de la ménagère qui entraîne la réplique de l’Epicière. Les gestes aide le lecteur dans la compréhension de la psychologie des personnages, par exemple ils décrivent la nonchalance de Bérenger, « de temps à autre, il bâille « (l.24), ainsi que l’autorité de Jean qui n’accepte pas le retard de son ami, « il regarde sa montre-bracelet « (l.27). Ainsi, l’aspect visuel prend une place importante dans l’extrait au détriment de la place de la parole. Cette scène d’exposition présente la faillite du langage. Dès le début, la scène ne commence pas par l’entrée ou la réplique d’un personnage mais par une didascalie, un long paragraphe permettant de mettre en situation le lecteur. Le lecteur voit avant d’entendre les répliques des personnages qui sont d’autant plus retardées. Ainsi, le cadre visuel est privilégié à la parole. Ensuite la parole permet la mise en place de conflits : la réplique de l’Epicière « Ah ! Celle-là ! Ah ! Celle-là, elle est pas fière. Elle ne veut plus acheter chez nous « (l.17-18) montre son personnage méprisant et la situation de conflit entre la femme et l’Epicière marquée par le manque de communication, « traverse en silence la scène « (l.15). La parole semble vide, sans aucune utilité lors de l’échange entre les personnages. Un faux-dialogue se forme entre Jean et Bérenger. En effet, ils s’attardent sur le fait que Bérenger arrive toujours en retard hors cette conversation ne lance pas l’intrigue attendue par le lecteur. Il y a une déconstruction du langage, les répliques de Bérenger sont vaines avec des répétitions : « c’est juste… c’est juste, pourtant… « (l.36), « vous ne pouvez l’affirmer « (l.37) et « je ne pourrais l’affirmer « (l.38). Bérenger peine à s’exprimer, à s’affirmer face à la manipulation et à la domination de Jean. Ce faux-dialogue tend vers la déconstruction des personnages. Jean, personnage à l’apparence soigné et confiant, apparaît aussi comme un personnage emporté et qui utilise le retard de Bérenger pour justifier le sien, « je viens exprès en retard, au moment où je suppose avoir la chance de vous trouver. « (l.34-35). La parole est donc défaillante et ne permet pas un véritable échange entre les personnages. Ainsi, cette scène d’exposition permet une remise en question de la parole et de l’action, notamment par les oppositions, l’importance de l’aspect visuel et la déconstruction du langage.       Cette scène d’exposition est d’apparence classique. Cependant, celle-ci apparaît étrange par sa banalité menant à la faillite du langage et rappelant les pensées de Ionesco : « tout est parole au théâtre, les mots, les objets, les gestes, il n’y a pas que la parole «. De plus, l’intrigue n’est pas amorcée et le cadre réaliste et sans relief permettra de mettre en valeur l’apparition des rhinocéros et le fantastique de la pièce. Un rapprochement peut être fait avec l’excipit de Rhinocéros : dès le début de la pièce, Bérenger se distingue et affirme son originalité qui le mènera à sa lutte solitaire contre les rhinocéros et pour l’humanisme.
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« indéfinis « un » ou « une » qui souligne l'aspect commun et global du décor.

En outre, l'Epicière apparaît selon sa qualité, « l'Epicière ouvre la porte » (l.16), et Jean est un prénom commun.

L'entrée des personnages renforce le caractère familier du quotidien : « une femme portant sous un bras un panier à provisions vide » (l.15), « l'Epicière ouvre la porte de la boutique » (l.16) et la rencontre entre deux amis.  L'espace est ouvert avec « la perspective d'une petite rue » (l.7-8) qui créé un contraste avec l'espace clos et renfermé de l'ensemble de la pièce.

Nous pouvons remarquer également la présence mystérieuse d' « un arbre poussiéreux » (l.10) qui pourrait rappeler la présence latente de la rhinocérite avec la poussière envahissant la scène au moment de l'apparition des rhinocéros.

Le cadre spatial est donc présent dans cette scène d'exposition même si l'univers apparaît global, commun. Des éléments dans l'extrait présentent le cadre temporel.

En effet, la didascalie initiale, intitulée « Décor », fournit des indications temporelles au lecteur : « c'est un dimanche, pas loin de midi, en été » (l.11).

Cependant, le déterminant indéfini « un » est présent ici également, on ne connaît ni l'année, ni le mois.

En revanche, nous pouvons déduire que la scène se déroule pendant une époque contemporaine, qui apparaît évidente pour le lecteur grâce à des indices présents dans le texte : le café, l'épicerie, le langage courant des personnages « vous m'attendez depuis longtemps ? » (l.29), les vêtements « costume marron, cravate rouge, faux col amidonné, chapeau marron » (l.21) ou encore la montre-bracelet « il regarde sa montre-bracelet » (l.27).

Une phrase dans l'ensemble des didascalies souligne l'importance de la bande sonore dans la pièce : « Avant le lever du rideau, on entend carillonner » (l.14).

Ce carillon a une portée symbolique dans la mesure où il substitue les trois coups traditionnels qui signalent le début de la pièce.

Cette scène d'exposition est donc composée d'une description du cadre temporel. Ce début de pièce permet une présentation des personnages.

En effet, les personnages figurants sont présentés suivis des deux personnages principaux qui s'avèrent être Jean et Bérenger.

L'identité des premiers personnages n'est pas connue ou du moins ils sont désignés par leur fonction.

En outre, le premier personnage à faire son entrée n'a pas d'identité : « une femme, portant sous un bras un panier à provisions vide, et sous l'autre un chat, traverse en silence la scène, de droite à gauche » (l.14-15).

Ensuite, l'Epicière entre sur scène et est le premier personnage à parler : « Ah ! celle-là ! Ah ! celle-là, elle est fière.

Elle ne veut plus. »

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