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L'appel du contingent

Publié le 26/04/2012

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 En 1955 et 1956, des mouvements de soldats opposés à leur envoi en Algérie voyaient le jour. Sans parvenir à enrayer la mécanique de la guerre coloniale.

 

 Le poids du commandement militaire ne cesse de croître. En conséquence, il est confié à des officiers chevronnés, tel que le général Salan. Commandant français en chef en novembre 1956, il participe au Comité de salut public d’Alger en 1958 puis au putsch des généraux en 1961. Il est également le chef de l’OAS (Organisation armée secrète).

 

Son successeur, le général Maurice Challe (décembre 1958-avril 1960), et le général Massu, qui manifeste sa vigueur lors de la « bataille d’Alger « en 1957, sont populaires parmi les pieds-noirs. Certains officiers plus jeunes s’engagent totalement dans la cause de « l’Algérie française «.

 

Du côté du FLN, des rivalités internes, purges sanglantes et disparitions au combat ont lieu, provoquant un renouvellement partiel des dirigeants. Militaire de carrière, le colonel Houari Boumediene devient chef de l’état-major de l’ALN en 1960. Il occupa de hautes fonctions d’Etat, tel que ministre de la défense sous Ben Bella I (1962), puis vice premier ministre sous la présidence d’Ahmed Ben Bella. Les opérations menées relèvent de la guérilla : attentats, attaques de détachements, sabotages, d’abord dans en Kabylie puis dans la région du Constantinois.

 

Le 20 et 21 août 1955, des émeutes éclatent en Algérie. Il s’agit de prouver la solidarité des combattants algériens avec les autres luttes du Maghreb, mais aussi de montrer la capacité politico-militaire du FLN. Le bilan est lourd, entraînant la mort de 123 personnes, dont 71 Européens. Mais la répression qui s’ensuit est largement disproportionnée, avec un nombre de 1273 morts et plus de 10 000 victimes.

 

Ce drame coupe de façon irréductible les liens entre les deux camps, et amène le gouverneur général Soustelle à laisser carte blanche à l’armée.

Le gouvernement du socialiste Guy Mollet, élu au début de l’année 1956 sur le mot d’ordre de la paix en Algérie, est tristement célèbre pour avoir intensifié la répression en Algérie, notamment après le vote des « pouvoirs spéciaux « par l’Assemblée nationale

Amenant ainsi près de 450 000 soldats français déployés en permanence en Algérie contre 25 000 combattants algériens. En réalité, il s’agit bien évidemment d’une guerre d’indépendance qui déchaîne les passions entre pro et anti « Algérie française «, question qui fracture alors la société française en deux camps.

Le président du conseil socialiste se rallie à une stratégie de guerre contre le FLN après avoir reçu, lors de la « journée des tomates « à Alger, des projectiles divers de la part des ultracolonialistes.

Cette guerre à outrance nécessite des troupes plus nombreuses, alors que le FLN accroît son influence, notamment à partir d’août 1955 avec le soulèvement du Nord-Constantinois sous la direction de Zighout Youssef. Guy Mollet décide alors de l’envoi du contingent en Algérie.

Soutenu par Mitterrand, alors Garde des Sceaux et Ministre d’Etat de son cabinet, celui-ci fut solidaire de l’envoi du contingent. Normal : L’Algérie n’était-elle pas la France ? Les départements d’Algérie n’étaient-ils pas des départements français ?

Cette mesure, très impopulaire, n’est pas une innovation : en août 1955, Edgar Faure avait déjà décidé de procéder au rappel des classes ayant accompli leur service mais à la disposition de l’armée pour trois ans. Cette mobilisation des rappelés, puis l’envoi des jeunes du contingent en Algérie, forcés d’aller passer leurs « vingt ans dans les Aurès «, interrompt bien sûr les projets de vie, familiaux ou professionnels. L’historienne Sylvie Thénault décrit ce « recours massif au contingent « comme « la manifestation la plus visible de la guerre : c’est bien ainsi qu’elle touche tous les Français «.

De nombreuses manifestations de ces rappelés, qui refusaient d’aller combattre, se produisent. Le 11 septembre 1955, les soldats refusent d’embarquer à la Gare de Lyon, à Paris, pour se rendre à Marseille et, ensuite, en Algérie. Les civils s’en mêlent - épouses, familles et amis des rappelés. La gare est bouclée. Dans le train, où on les a finalement forcés à embarquer, les « réfractaires « tirent les sonnettes d’alarme tous les 300 mètres. En fin de compte, ils sont expédiés par avion en Algérie.

Après l’automne 1955, le printemps 1956 est le second temps fort de cette opposition à la guerre. Quand le 12 avril 1956, le Conseil des ministres décide d’envoyer le contingent en Algérie, les manifestations reprennent et les trains sont de nouveaux bloqués dans différentes villes de France. Souvent, les affrontements sont violents et habitants, dockers ou cheminots apportent leur soutien. Des milliers de personnes participent à ces mouvements qui concernent la jeunesse de tout un pays. Des manifestants arrêtent les trains aux passages à niveau, coulent du ciment dans les traverses pour les bloquer. Le gouvernement reste inflexible. Les soldats du contingent partent vers la guerre. Des réseaux de déserteurs, comme Jeune résistance, sont mis en place pour faciliter la fuite de ceux qui refusent de participer à la guerre. Ils sont rares et ne dépassent pas les 500.

Ainsi, à partir de 1956, la lutte armée se déroule sur tout le territoire, grandes villes incluses.

 

L’ALN (Armée de Libération Nationale) dispose dans chaque wilaya d’un double commandement, militaire et politico-administratif, sous la direction d’un colonel. Des tensions apparaissent avec les combattants de l’extérieur, mais le principe d’une direction collégiale est acquis lors du congrès de la Soummam, en août 1956.

 

Plus d’un million d’appelés ont servi en Algérie entre 1954 et 1962. Leur envoi a donné lieu à un mouvement éphémère, en 1955 et 1956. Ces actions n’ont pas empêché la guerre, mais elles représentent les premières actions massives de contestation collective de la boucherie coloniale. En l’absence de relais national, de soutien d’une gauche qui a contribué au renforcement de la guerre, ces mouvements, confrontés à une répression féroce, n’ont pu se maintenir.

L’engrenage de la guerre s’est alors renforcé dans la société française, jusqu’au début des années 1960, avec les procès médiatisés des réseaux de « porteurs de valises «, et les premières manifestations pour la fin de la guerre d’Algérie.

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