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Le quatrième mandat d'Helmut Kohl

Publié le 22/02/2012

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16 octobre 1994 - Bien que confirmé dans ses fonctions, le chancelier Kohl est sorti affaibli des élections législatives allemandes, dimanche 16 octobre. La coalition qu'il dirige depuis douze ans, composée du Parti chrétien-démocrate (CDU), de son alliée de Bavière (la CSU) et du Parti libéral (FDP), est parvenue de justesse à sauver sa majorité au Bundestag. Avec un total de 48,4 % des voix, les trois partis disposent de dix sièges de majorité. Au cours de la précédente législature, ils bénéficiaient d'une confortable avance de 134 sièges sur les partis de l'opposition. Le Parti social-démocrate, avec 36,4 % des voix, n'est pas parvenu à contraindre la CDU à une grande coalition. Le parti des Verts, qui réussit son retour au Bundestag avec 7,3 % des voix, ne représente pas un appoint suffisant pour une majorité de rechange à gauche, où le bon score des communistes réformateurs de l'Est sème la confusion : les communistes du PDS remportent ainsi quatre circonscriptions au scrutin uninominal à Berlin, et, avec 4,4 % des voix au niveau national, disposeront d'une trentaine de députés au Bundestag. L'extrême droite ne dépasse pas 2 % et n'est pas représentée au Parlement fédéral. La CDU, le parti du chancelier, demeure la première force politique du pays, mais il s'agit de son plus mauvais résultat électoral depuis 1953. Le chancelier devra compter désormais avec la faiblesse de son allié libéral, qui maintient sa présence au Bundestag, mais recule de plus de quatre points par rapport à 1990. Les libéraux ont dû leur maintien en grande partie au vote tactique des électeurs de la CDU. Ceux-ci avaient été sensibilisés, tout au long de la campagne, aux dangers qui pesaient sur la survie de la coalition alors que le FDP paraissait sérieusement menacé de passer en dessous de la barre des 5 %. " Trop faible pour gouverner " " Cette coalition n'est plus qu'une réalité virtuelle. Elle est trop faible pour gouverner et ne tiendra pas longtemps ", estimait, dimanche soir, un collaborateur de Rudolf Scharping, le président du Parti social-démocrate. D'autres chanceliers ont cependant déjà gouverné avec des majorités aussi réduites que celle qui est sortie des urnes dimanche : Konrad Adenauer lui-même, ainsi que les sociaux-démocrates Willy Brandt et Helmut Schmidt. Les négociations pour la distribution des portefeuilles ministériels et l'adoption d'un programme de gouvernement vont commencer dès cette semaine. Elles devraient donner une indication sur les nouveaux équilibres à Bonn. Au cours de la soirée de dimanche, le chancelier Kohl a déjà assuré qu'il souhaitait conserver Theo Waigel, président de la CSU, comme ministre des finances. Le ministre des affaires étrangères, Klaus Kinkel, ne devrait pas avoir trop de difficultés à conserver son poste, mais on peut s'attendre à des ajustements pour les autres postes ministériels occupés par le Parti libéral (économie, justice, éducation et logement). Le Parti social-démocrate est plus que jamais dans l'expectative. S'il reste dans l'opposition au Bundestag, il a encore une fois renforcé, dimanche, sa majorité au Bundesrat, la chambre de représentation des Länder. Trois élections régionales avaient lieu le 16 octobre, parallèlement aux élections législatives. Oskar Lafontaine, vice-président du SPD, a réussi bon an mal an à conserver sa majorité absolue en Sarre. En Thuringe et en Mecklembourg-Poméranie, le Parti chrétien-démocrate a perdu ses alliés libéraux et ne pourra rester au pouvoir qu'à la tête de coalitions avec le SPD. Désormais, les partis de l'union chrétienne ne gouvernent tout seuls que dans deux Länder sur seize, la Bavière et la Saxe. Cette situation inconfortable obligera le chancelier à composer avec son opposition social-démocrate, qui est en mesure de bloquer une grande partie du travail législatif et de tirer profit d'éventuelles divisions au sein de la majorité. Le SPD victime des communistes à l'Est Ce jeu, à mi-chemin entre l'opposition et les responsabilités gouvernementales, n'est pas sans risque pour le SPD non plus. Le temps est bien révolu où les sociaux-démocrates monopolisaient l'opposition de gauche. Le résultat des élections de dimanche a permis aux Verts de faire un retour en force au Bundestag, où ils n'étaient plus représentés depuis les élections de décembre 1990 que par une poignée d'anciens dissidents de l'Est. Avec un leader comme Joschka Fischer, vice-premier ministre depuis 1991 du gouvernement régional de Hesse, qui a décidé de revenir au Bundestag, ils entendent bien montrer que leur échec précédent n'était qu'un accident. Plus grave cependant pour le Parti social-démocrate est le score réalisé en Allemagne de l'Est par les communistes réformateurs du PDS, qui confirment d'élections en élections leur rang de troisième force politique dans les nouveaux Länder(1). Les sociaux-démocrates sont pris en tenaille entre les communistes et les chrétiens-démocrates. La défaite de Wolfgang Thierse illustre leur dilemme. Vice-président du SPD, et principale figure du parti à l'Est, il a été battu dans la circonscription de Berlin-centre par l'écrivain Stefan Heym (quatre-vingt-un ans), rallié aux anciens communistes après avoir été un des intellectuels critiques en RDA. En tant que doyen du Bundestag, c'est à lui que reviendra l'honneur de tenir le discours inaugural du prochain Bundestag ! Continuité à l'extérieur Dans l'immédiat, le maintien de la coalition du chancelier Kohl ne devrait pas entraîner de modifications sensibles dans les grandes lignes de la politique allemande, tant en ce qui concerne l'économie, les finances, que la diplomatie. Le Parti social-démocrate sera amené, par le biais du Bundesrat, à peser sur la politique sociale du gouvernement. Mais il s'était lui-même engagé à poursuivre, en cas d'arrivée au pouvoir, une stricte rigueur budgétaire. S'il devait chercher des alliances ponctuelles avec certains libéraux, dans l'espoir de diviser la coalition au pouvoir, ce serait plutôt à la marge, " dans des domaines comme l'immigration et la réforme du droit de la nationalité ", selon de proches conseillers de Rudolf Scharping. Helmut Kohl vient d'échapper de justesse à une défaite. Le monument est fissuré. Alors qu'il va devoir affronter un débat de plus en plus vif sur sa succession, il lui faudra déployer des trésors d'habileté pour exercer son dernier mandat jusqu'à son terme. Un fil conducteur lui sert de repère : parachever l'unification allemande et, dans le même temps, poursuivre l'intégration européenne. Reste à savoir si les inconnues de la politique intérieure lui laisseront le temps de réaliser ce double objectif. HENRI DE BRESSON, LUCAS DELATTRE Le Monde du 18 octobre 1994

« Ce n'est pas le moindre paradoxe du Monde que, créé sur l'initiative du pouvoir politique, il deviendra rapidement un symboled'indépendance et d'esprit critique, une sorte de contre-pouvoir. Hubert Beuve-Méry reste hanté par le souvenir de la presse d'avant-guerre, de ses compromissions politiques et de sesrapports étroits avec l' " argent ". Il s'estime " le libre gestionnaire d'un service du public ".

Le professeur René Courtin représente dans le comité de direction de1944 la sensibilité libérale protestante et la Résistance, Christian Funck-Brentano la sensibilité gaulliste. Le 18 décembre 1944 paraît le premier numéro du Monde.

Hubert Beuve-Méry s'est installé dans le bureau solennel, tour àtour étouffant et glacial, où siégeait le conseil d'administration du Temps.

A l'équipe venue du Temps s'adjoindrontprogressivement de jeunes rédacteurs.

Pour eux, Hubert Beuve-Méry est le " patron ", une sorte de père qui règne par la forcede ses silences et de son courage.

Il intervient directement fort peu lors des réunions du matin qu'il instituera au bout de quelquesannées, où tout le monde est debout autour de son bureau. Hubert Beuve-Méry mènera de là une série de rudes batailles.

D'abord pour la survie du très fragile journal qui vient de naître.Pour lui, l'entreprise n'a d'intérêt que moral et intellectuel.

C'est-à-dire si elle porte à son public le respect qui lui est dû enl'informant sans céder aux pressions quelles qu'elles soient, en se plaçant s'il le faut à contre-courant des opinions officielles. La crise de 1951 Très vite, cependant, au sein du comité de direction, des tensions se firent sentir.

René Courtin, libéral, européen, partisanpassionné du pacte atlantique, était surtout en désaccord avec les articles du grand médiéviste Etienne Gilson et avec ceuxd'Hubert Beuve-Méry lui-même.

On baptisa " neutralisme " les positions de l'un et de l'autre.

Objet du débat : l'Europe et sonrôle entre les Deux Grands. Pour Etienne Gilson, elle doit être puissante et indépendante de l'Est comme de l'Ouest.

Pour Beuve-Méry, beaucoup plusnuancé quoi qu'on en ait dit, une Europe forte ne doit pas se lier trop étroitement avec les Etats-Unis.

Elle doit rester maîtresse deson destin. René Courtin ne put admettre ces thèses.

Après de nombreux rebondissements, il refusa de poursuivre sa collaboration auMonde, qu'il attaqua même dans d'autres journaux.

Hubert Beuve-Méry, constatant la rupture de l'accord originel, annonça, le27 juillet 1951, qu'il quitterait le 1 e novembre suivant la direction du journal. La rédaction, " anciens " et " nouveaux " confondus, se refusait à un changement de direction qui l'amènerait, comme le dit lecritique littéraire de l'époque Emile Henriot, qui jeta son épée d'académicien dans la balance, " à être vendue avec les meubles ".Il fallut d'abord convaincre Hubert Beuve-Méry de renoncer à s'en aller.

Non sans peine.

Il fallait ensuite reconstituer unemajorité en sa faveur. C'est à cette occasion que, transformant en participation un droit de veto de fait, fut crée une société des rédacteurs, disposantde 80 des 280 parts du journal.

Le 12 décembre, celles-ci assurèrent le maintien à la barre d'Hubert Beuve-Méry. La guerre d'Algérie sera aussi l'occasion d'une des plus rudes batailles qu'il aura menées.

Non que, dès le début, le directeur duMonde réclamât l'indépendance.

Mais très vite il discerna la paralysie de la politique extérieure française qu'entraînait ce nouveauconflit, le pourrissement des institutions qu'il provoquait, le pourrissement des consciences aussi... Après avoir, dans ses éditoriaux, lancé de vains avertissements, tenté des démarches personnelles auprès des présidents duconseil et des ministres responsables, il se résigna à publier les rapports qui décrivaient et dénonçaient certaines méthodesemployées par une armée que l'incohérence du pouvoir politique avait enfoncée dans une tragique impasse.

Les gouvernants del'époque, Guy Mollet notamment, ne le pardonnèrent ni au journal ni à son directeur. La guerre d'Algérie Lors de l'arrivée au pouvoir du général de Gaulle, qui d'ailleurs n'annonçait en rien, bien au contraire, la politique qu'il allaitsuivre en Algérie, Hubert Beuve-Méry ne se résigna pas sans peine au " oui ".

Un " oui " chargé de " mais ".

Entre le général et lui,peu d'atomes crochus.

Ils se ressemblaient trop par leur pessimisme souverain.

Et Sirius se défiait du pouvoir personnel.

Face augénéral, qui l'avait reçu avec une hauteur sarcastique, il exerça du haut de sa chaire du Monde une forme d'opposition morale.

Ilchercha sous les mots du grand manieur de mythes français le grain des choses et les prolongements dangereux.

Cette sorte dedialogue agaçait le général qui, l'apostrophant un jour, cita Goethe en allemand : " L'esprit qui toujours nie.

" Sirius ne cessa de se. »

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