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SÈVRES (traité de)

Publié le 22/02/2012

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La crainte du conflit que provoquerait le partage de l'Empire ottoman - laquelle contribua à son maintien tout au long du xixe siècle - devient un souci mineur lorsqu'éclate la Grande Guerre. L'alliance russo-britannique, même si elle n'est pas dénuée d'arrière-pensées, met en branle, dès le début de la guerre, les projets de partage définitif de l'empire. Pendant les préparatifs de l'opération des Dardanelles (février-mars 1915), les Alliés promettent Constantinople et les Détroits à la Russie en échange de la poursuite de l'effort de guerre par celle-ci et de l'élargissement de la zone d'influence britannique en Iran. De son côté, le Royaume-Uni décide de s'approprier la basse Mésopotamie et entre en pourparlers avec Cherif Hussein ibn Ali de La Mecque (1853 ?-1931), en vue de la constitution d'un royaume arabe sous protection britannique. Les revendications françaises sur la Syrie et le Liban entraînent des négociations qui aboutissent à l'accord Sykes-Picot sur le partage anglo-français du Proche-Orient ottoman (16 mai 1916). Lors de son entrée en guerre du côté des Alliés, l'Italie demande sa part du gâteau et les accords de Saint-Jean-de-Maurienne (18 avril 1917) lui allouent une zone importante à l'ouest et au sud de l'Anatolie. Enfin, la « déclaration Balfour » (2 novembre 1917) promet l'établissement d'un foyer national juif en Palestine. La sortie de la guerre de la Russie, après la révolution d'octobre 1917, et l'entrée en guerre des États-Unis entraînent la dénonciation de l'ensemble de ces accords au nom de l'anti-impérialisme (gouvernement soviétique) et au nom du libre-échange (gouvernement américain). De plus, arguant du fardeau qu'ils ont eu à assumer tout seuls pour la conquête du Proche-Orient, les Britanniques refusent le partage prévu avec la France. Toutefois, la charge financière de l'occupation et les difficultés locales, dont le mouvement national turc, mené par Mustafa Kemal à partir de l'automne 1919, font revenir Londres sur sa position. Le traité chargé de liquider l'Empire ottoman n'est mis en chantier qu'après les accords signés avec les autres États vaincus. Les travaux débutent en janvier 1920 à Londres. Il est décidé de maintenir le pouvoir turc à Constantinople sous un contrôle international qui assurerait en même temps la liberté de navigation dans les Détroits. Pour le reste, le partage des territoires ottomans s'opère plus ou moins conformément aux accords secrets signés pendant la guerre, à cette différence près que l'intervention de la Grèce, dont les armées ont débarqué le 15 mai 1919 à Smyrne (Izmir) et qui se trouvent en 1920 en charge de la répression du mouvement national turc en Anatolie, entraîne la cession du littoral égéen autour de Smyrne à cette puissance. De même, la disparition de la Russie et le refus du Sénat américain d'assurer un protectorat sur l'Arménie posent la question de l'avenir des provinces orientales ottomanes fermement revendiquées par le mouvement national turc. Les pourparlers continuent en avril à San Remo, où est réglé le partage des pétroles de Mossoul et les zones d'influence sur ce qui restera de la Turquie. Une partie de l'Anatolie orientale serait indépendante et une entité kurde autonome créée. Le traité est signé le 10 août 1920 à Sèvres. Le mouvement national turc refuse de le reconnaître. Il occupe pendant l'automne de la même année les provinces arméniennes, sous juridiction ottomane avant 1914, et mène la guerre contre les forces grecques qui sont expulsées d'Anatolie en septembre 1922. Ainsi le traité de Sèvres, qui ne fut ratifié par aucun de ses signataires, resta lettre morte, au moins en ce qui concerne l'avenir de la Turquie. Il sera remplacé par le traité de Lausanne (24 juillet 1923), qui posa les bases de la république de Turquie (Smyrne, Andrinople [Édirne] et les Détroits étaient abandonnés par la Grèce et rendus à la Turquie). Stéphane YÉRASIMOS

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