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Sophocle, Ajax (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Sophocle, Ajax (extrait). C'est l'honneur qui guide Ajax, soldat par vocation. Le vote pour l'attribution des armes d'Achille, qui a eu lieu en présence d'Athéna, a favorisé Ulysse. Ajax, lucide et volontaire dans sa détresse, mûrit sa vengeance. L'esprit troublé par la déesse, croyant livrer bataille contre les soldats d'Ulysse, il massacre leurs troupeaux. Athéna protège les Atrides et Ulysse, en même temps qu'elle défend l'honneur des dieux en châtiant la démesure. Ce second affront accule le héros à un désespoir sans autre issue que le suicide. Ajax de Sophocle Le Choeur sort derrière Tecmesse. Le lieu de la scène change. Un pré au bord de la mer, coupé seulement de quelques buissons. Ajax vient de planter son épée dans le sol, la pointe en l'air. AJAX. -- Le couteau du sacrifice est donc là dressé, de manière à trancher au mieux -- si l'on peut s'accorder encore le loisir de tout calculer. Il est le don du plus détesté de mes hôtes, du plus odieux à ma vue, Hector. Et il est enfoncé dans un sol ennemi, dans le sol de Troade, fraîchement aiguisé à la pierre qui ronge le fer. Je l'ai planté en outre avec le plus grand soin, afin qu'il ait la complaisance de me faire mourir au plus vite. Ainsi pour moi, je suis prêt. -- Et maintenant c'est toi, Zeus, toi le premier, comme il est juste, dont je réclame le secours ; Je ne te demanderai pas une bien grande faveur. Fais-moi la grâce seulement de dépêcher à Teucros un messager porteur de la triste nouvelle, pour qu'il soit le premier à relever mon corps transpercé de ce fer sanglant. Il ne faut pas que, mes ennemis l'ayant aperçu avant lui, je sois jeté aux chiens et aux oiseaux. C'est là, Zeus, c'est là tout ce que j'attends de toi. Mais, en même temps, j'invoque Hermès Infernal, le guide des morts. Qu'il m'endorme doucement et que ce soit d'un saut facile et prompt que j'aille déchirer mon flanc à cette épée. Et j'invoque encore, pour qu'elles m'assistent, les Vierges éternelles qui éternellement observent les forfaits des hommes, les Érinyes sévères aux jarrets rapides. Qu'elles sachent comment je succombe, malheureux, sous les fils d'Atrée, et qu'elles les saisissent, eux aussi, à leur tour, pour les faire périr, périr tout entiers, misérables, misérablement ; et, de même qu'elles me voient verser ici mon propre sang, que de même donc ils périssent sous les coups des plus proches des leurs, qui ainsi à leur tour verseront leur propre sang. Allez ! Érinyes, promptes vengeresses, allez, mettez-vous au festin, n'épargnez pas leur peuple, leur peuple tout entier. Et toi, qui vas menant ton char dans les hauteurs du firmament, Soleil, quand tu verras la terre de mes pères, retiens tes rênes plaquées d'or pour annoncer mes malheurs et ma fin à mon vieux père et à ma pauvre mère. Ah ! quand la malheureuse apprendra la nouvelle, c'est un long sanglot que sans doute elle poussera par toute la ville !... Mais à quoi bon se lamenter pour rien ? Il faut se mettre à la besogne au contraire, et vivement. Ô Mort, ô Mort, voici l'heure, viens, jette un regard sur moi. Mais toi du moins, là-bas, je pourrai te parler encore, tu seras toujours près de moi. Tandis que toi, clarté de ce jour radieux, et toi, Soleil sur ton char, je vous salue ici pour la dernière fois, et jamais plus ne le ferai. Lumière ! Sol sacré de ma terre natale, Salamine, qui sers d'assise au foyer de mes aïeux ! Illustre Athènes avec ton peuple frère ! Et vous, sources et fleuves que j'ai là sous les yeux, plaines de Troade, tous ensemble, je vous salue ici : adieu, vous qui m'avez nourri ! Voilà le dernier mot que vous adresse Ajax. Désormais c'est à ceux d'en bas dans l'Enfer que je parlerai. Il se jette sur son épée. Mais un buisson dérobe son cadavre à la vue du Choeur, qui entre à ce moment dans l'orchestre. Source : Sophocle, Ajax, trad. par Paul Mazon, in Sophocle, tome II, Paris, Les Belles Lettres, 1994. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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