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...... XXXIV.

Publié le 02/02/2013

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...... XXXIV. - Mon biographe1 m'adresse cet étrange reproche : Au collège, comme plus tard à l'atelier, il refuse de partager les jeux de ses camarades, fait bande à part, dédaigne les amis, se livre, entre les heures de travail, à des promenades solitaires, etc.... Sans doute je méditais dès lors la destruction de la famille et de la propriété. La sottise réactionnaire ayant fait de moi, en 1848, un ogre, il a bien fallu me trouver une jeunesse d'ogre, et je ne serais point surpris qu'il se rencontrât des gens prêts à jurer qu'ils m'ont connu ogrillon. Au fait, j'ai pu paraître, de douze à vingt ans, un peu farouche. La faute n'en était pas à mon coeur, mais au système chrétien, qui, pervertissant les notions, atrophiant les instincts, travestit l'homme et lui impose des sentiments factices, à la place de ceux que lui a donnés la nature. Qu'il me serait aisé, en effaçant ce que la malveillance a mis de fausses couleurs dans ce tableau de ma jeunesse, de me poser en philosophe imberbe, fuyant la corruption des villes, et méditant dans la solitude sur les misères de l'humanité ! La vérité m'est beaucoup moins favorable ; c'est pour cela qu'elle est plus instructive, et que je tiens à la rétablir. Jusqu'à douze ans, ma vie s'est passée presque toute aux champs, occupée tantôt de petits travaux rustiques, tantôt à garder les vaches. J'ai été cinq ans bouvier. Je ne connais pas l'existence à la fois plus contemplative et plus réaliste, plus opposée à cet absurde spiritualisme qui fait le fond de l'éducation et de la vie chrétienne, que celle de l'homme des champs. A la ville, je me sentais dépaysé. L'ouvrier n'a rien du campagnard ; patois à part, il ne parle pas la même langue, il n'adore pas les mêmes dieux ; on sent qu'il a passé par le polissoir ; il loge entre la caserne et le séminaire, il touche à l'Académie et à l'hôtel de ville. Quel exil pour moi quand il me fallut suivre les classes du collège, où je ne 1 Eugène Jacquot, dit de Mirecourt. vivais plus que par le cerveau, où, entre autres simplicités, on prétendait m'initier à la nature, que je quittais, par des narrations et des thèmes ! ...... Pierre-Joseph Proudhon De la justice dans la révolution et l'église.

« vivais plus que par le cerveau, où, entre autres simplicités, on prétendait m'initier à la nature, que je quittais, par des narrations et des thèmes ! …… Pierre-Joseph Proudhon De la justice dans la révolution et l'église.. »

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