Francesco Borromini

De 1637 à 1640, Francesco Borromini se consacre à la construction du nouvel oratoire de la congrégation de Saint-Philippe Néri, ordre se consacrant à des oeuvres de bienfaisance et lié à une conception de la vie religieuse basée sur l'humilité et la simplicité. Il s'agit d'une commande qui convient tout à fait au génie de Borromini, qui s'appuie sur un langage austère et rigoureux, et privilégie les matériaux pauvres, tels que la brique, le crépi, le stuc. Le milieu de la façade de brique est de forme concave ; il est divisé en cinq parties par des parastates en faux caissons au centre du registre supérieur, et la forme convexe de l'entrée, située au-dessous ; le profil curviligne et angulaire du tympan; le rythme brisé de la corniche du premier ordre, où s'insèrent les tympans triangulaires des fenêtres. L'intérieur de l'oratoire est rythmé par l'alignement continu de parastates d'ordre colossal qui se prolongent vers le haut, jusqu'aux fenêtres et aux loggias, pour se croiser sur la voûte où ils se terminent en formant un motif ovale. En adoptant cet ordre gigantesque, que l'on retrouve également dans les cours de l'oratoire, Borromini se réclame explicitement du palais des Conservateurs de Michel-Ange.

L'ensemble de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines (doté aussi d'un diminutif : San Carlino, en raison de ses petites dimensions), commandé par l'ordre des Trinitaires, est le premier projet autonome (1634-41) de Francesco Borromini, qui manifeste déjà parfaitement l'originalité de ses inventions.

Dans le petit espace disponible, l'architecte parvient à faire entrer l'église, les locaux du couvent et le cloître de forme octogonale, aux angles convexes. L'intérieur de l'église a la forme d'une ellipse sur laquelle s'ouvrent quatre niches ; l'entrée et le maître-autel sont alignés sur l'axe principal. L'effet de dilatation et de contraction de l'espace, produit par l'alternance des courbes et des contre-courbes qui suivent le parcours sinueux du plan, repris et souligné par la robuste corniche, est accentué par les colonnes adossées aux murs. La coupole ovale, dont la lanterne laisse filtrer une lumière uniforme, est reliée par des pendentifs aux quatre arcades du chevet. Elle trahit la formation de tailleur de pierre reçue par Borromini dans sa jeunesse, par sa décoration minutieuse et raffinée à base de caissons octogonaux, hexagonaux et cruciformes, qui se réduisent progressivement vers le haut, de façon à accentuer l'impression de profondeur. L'ensemble est achevé en 1641, hormis la façade qui sera ajoutée, par Borromini, entre 1665 et 1667.

En 1642, Francesco Borromini est chargé de construire l'église Saint-Yves dans la cour à portique du palais de la Sapience, siège de l'"Arciginnasio" romain, devenu par la suite université. La nouveauté du langage de Borromini se révèle dans le plan hexagonal étoilé obtenu par l'interpénétration de deux triangles équilatéraux, forme reprise dans l'entablement et dans la coupole. Le volume de la coupole, subdivisé en pans, semble se dilater et se restreindre en un mouvement alternatif, ce qui accentue le dynamisme et l'élan vertical de la construction. Les hautes fenêtres, ouvertes au-dessus de l'entablement et de la lanterne, laissent passer une lumière intense mettant en évidence la décoration en stuc, à base de rubans d'étoiles qui accompagnent l'élan vertical de la coupole. A l'extérieur, le haut tambour convexe contraste avec la concavité de la façade. Il cache partiellement la coupole, et n'en laisse apparaître que le sommet, structure à base de gradins, sur laquelle s'élève la lanterne, surmontée d'une légère spirale et d'une couronne de métal.