Michelet Jules, 1798-1874, né à Paris, historien et écrivain français. Fils d'un petit artisan imprimeur aux aspirations révolutionnaires, après une brillante scolarité il enseigna l'histoire et la philosophie, lisant abondamment et adaptant en français la Scienza nuova de Vico (Principes de la philosophie de l'histoire, 1827). La passion de l'histoire. Après la révolution de 1830, il entama son oeuvre propre, publiant en 1831 une Histoire romaine et surtout une Introduction à l'histoire universelle où ses principes étaient déjà acquis : l'histoire est l'écart entre liberté et fatalité, une révolution toujours recommencée. La Révolution française n'est plus l'aboutissement d'un processus historique, mais ce à partir de quoi toute l'histoire est concevable, non plus un événement avec des causes et des effets, mais le principe enfin dévoilé de la secrète énergie de l'histoire humaine. L'histoire ne se résume pas pour autant à ce qui la bouleverse ; bien au contraire, il n'est rien de plus stable que la révolution continue : cela donne un « lié » au temps qui permet de lire l'histoire comme la répétition d'identités ; la Révolution de 1789 se diffuse partout. Il n'en reste pas moins qu'en bon lamarckiste Michelet dévoile la façon dont les transformations des sociétés produisent aussi des monstres, ces moments où la machine de la répétition est grippée et où l'histoire s'arrête. Fort de ces conceptions, il écrivit sa monumentale Histoire de France. De 1833 à 1842, il en publia les six premiers volumes, des origines à la mort de Louis XI ; puis, frappé du fait que la Révolution de 1789 était bien le moteur de l'histoire, il s'y consacra et rédigea, de 1847 à 1853, l'Histoire de la Révolution française, reprenant ensuite, entre 1855 et 1867, l'examen de l'histoire de France là où il l'avait interrompue. Au total, en trente-quatre ans, il écrivit dix-sept volumes pour décrire comment un peuple naît, se forme et se transforme, s'immobilise et accélère sous le choc du combat entre Révolution et christianisme, que, dans sa préface, Michelet jugea permanent. Naturaliste et moraliste. Le labeur imposé par cette somme historique n'empêcha pas Michelet de publier en 1837 les Origines du droit français, et surtout une série de critiques de la religion catholique (Des jésuites, 1843 ; Du prêtre, de la femme, de la famille, 1845) au profit d'une religion de la Révolution (le Peuple, 1846). Un premier mariage en 1824 s'était soldé par un échec sentimental et sa femme mourut en 1839. En 1842 mourait à son tour Mme Dumesnil pour laquelle il avait éprouvé une amitié passionnée. En 1848, il épousa une jeune admiratrice, Athénaïs Mialaret, qui prétendit devenir son égérie. Elle orienta Michelet vers le naturalisme (l'Oiseau, 1856 ; l'Insecte, 1857 ; la Mer, 1861 ; la Montagne, 1868) et le moralisme critique (l'Amour, 1858 ; la Femme, 1859) : ces dernières oeuvres furent violemment attaquées et par les conservateurs et par des femmes qui s'indignèrent de ce que Michelet prétendait ne faire d'elles que des mères et des épouses dévouées. Professeur au Collège de France depuis 1838, il fut destitué de son poste en mars 1852 et refusa, en décembre, de reconnaître le coup d'État de Louis Napoléon Bonaparte. En 1862, la Sorcière provoqua un nouveau scandale, car Michelet faisait d'elle l'emblème de la résistance au pouvoir de l'Église. Après avoir protesté contre l'annexion allemande (la France devant l'Europe, 1871), il commença une Histoire du XIXe siècle qu'il n'eut pas le temps d'achever. Au-delà de l'éblouissante somme de travail, au-delà de l'appétit historique et philosophique, Michelet séduit par son écriture : non qu'il fasse du « style » (il a toujours eu horreur des belles cadences à la manière de Chateaubriand), mais sa prose a l'art des mouvements brusques ; elle court au plus près des réalités du monde ; elle se veut proche de la voix (au point que le témoignage oral est particulièrement valorisé par Michelet). Romantique dans ses accents prophétiques, poète dans sa vision épique de l'histoire, il a laissé une oeuvre charnière dans l'élaboration de la science historique et le développement de la conscience nationale. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Collège de France histoire Moyen Âge - Le Moyen Âge en perspective Révolution française - Postérité et débats sorcellerie Vico Giambattista Les livres Michelet Jules, page 3187, volume 6
