Shakespeare William, 1564-1616, né à Stratford-on-Avon (Warwickshire), écrivain anglais. Shakespeare naquit dans une famille de commerçants. On connaît, en fait, peu de chose sur sa vie. En novembre 1582, il épousa Anne Huthaway, de huit ans son aînée, qui lui donna une fille, Susanna, en mai 1583, et des jumeaux, un garçon prénommé Hamnet et une fille, Judith, en 1585. Il semble qu'il ait reçu une excellente instruction, et en particulier une bonne formation latine. La carrière de Shakespeare. Il quitta Stratford en 1584 ou 1585. Jusqu'en 1592, on ne connaît rien de sa vie. Mais, en 1592, sa réussite comme dramaturge suscita la jalousie d'un groupe d'auteurs lettrés qui, au cours des années précédentes, s'étaient assuré une sorte de monopole de la production théâtrale. Robert Green l'attaqua violemment en le traitant de upstart crow, beautified with our feathers, « corbeau parvenu paré de nos plumes », et en lui reprochant de se croire « le seul à être capable d'ébranler la scène », the onely Shakescene. Les compagnies théâtrales étaient alors organisées, à Londres, sur une base coopérative, dont les acteurs prenaient l'initiative. Elles furent remaniées après la peste de 1592-1594, qui entraîna la fermeture des théâtres. Pendant cette période d'inactivité théâtrale, Shakespeare se révéla comme poète lyrique : Venus et Adonis fut publié en 1593, et le Viol de Lucrèce, en 1594. Lorsque les théâtres ouvrirent de nouveau, en 1594, Shakespeare apparut comme un membre important des « Lord Chamberlain's Men », qui constituaient la première troupe d'acteurs de Londres. Celle-ci donna des représentations à Londres de 1594 à 1603, avec une interruption à l'automne de 1597, moment où la peste obligea la compagnie à effectuer une tournée en province. Le théâtre dans lequel la troupe jouait fut détruit en 1598, mais les comédiens s'installèrent dans le théâtre du Globe, que les frères Burbage venaient de faire construire (Richard Burbage joua un grand nombre des principaux rôles des pièces de Shakespeare, et c'est en pensant à l'acteur que l'auteur créa certains de ses personnages). Shakespeare était l'un des actionnaires du Globe. En 1603, à l'avènement de Jacques Ier , la compagnie passa sous le patronage direct du roi et prit le nom de Troupe du Roi. La tradition veut que Shakespeare ait tenu des rôles dans ses pièces, en particulier celui d'Adam dans Comme il vous plaira (As You Like it ) et celui du Fantôme dans Hamlet. Mais il fut, pendant une quinzaine d'années, l'auteur des pièces de la troupe. On peut considérer qu'il écrivit, en moyenne, deux pièces par an. Sa situation matérielle devint prospère, si bien qu'il put rétablir la dignité de sa famille, compromise par les mauvaises affaires de son père, John Shakespeare. Il demanda et obtint la confirmation des armes attribuées à son père lorsque celui-ci était bailli de Stratford. Il ne semble pas être retourné à Stratford avant 1596, date de la mort de son fils Hamnet. En 1597, il fit une acquisition importante : New Place, qui était l'une des plus grandes maisons de Stratford et qui possédait un vaste jardin. En 1602, il acheta un grand domaine dans le Vieux-Stratford. Si l'on en croit l'auteur britannique Ben Jonson (1572-1637), Shakespeare était très en faveur à la cour ; il était lié avec des personnages de la noblesse. Pendant sa vie, il jouit d'une grande réputation. On trouve dans Palladis Tamia , sorte de carnet de notes littéraires publié par Francis Meres en 1598, un jugement flatteur : « Le plus excellent dans les deux genres » (comédie et tragédie) et l'un des « plus passionnés d'entre nous pour pleurer et déplorer les confusions de l'amour ». Meres donne également dans Palladis Tamia une liste de douze pièces déjà écrites, liste qui est la base de tout essai de classement chronologique de l'oeuvre. C'est encore Meres qui, le premier, parle des Sonnets qui circulaient parmi les amis intimes de Shakespeare. Deux seulement de ces sonnets furent imprimés en 1599 ; la totalité ne le fut qu'en 1609. Vers 1612, il semble que Shakespeare ait quitté Londres pour s'installer à Stratford, dans sa maison de New Place. Il se peut que les dernières pièces aient été écrites à Stratford ; il est raisonnable de penser que les liens de Shakespeare avec la troupe d'acteurs à laquelle il avait appartenu furent coupés en 1613, année où le théâtre du Globe brûla pendant une représentation de Henry VIII . Shakespeare mourut le 23 avril 1616. En sa qualité de décimateur, il fut enterré dans le choeur de l'église. L'oeuvre de Shakespeare. L'oeuvre complète fut éditée en 1623 par les soins de deux compagnons de Shakespeare : John Heming et Henry Condell. Le volume, appelé Premier Folio, contient, à l'exception de Périclès, les trente-sept pièces que l'on a maintenant l'habitude d'imprimer dans les éditions de Shakespeare. Dix-huit de ces pièces furent imprimées pour la première fois dans le Folio ; les dix-huit autres avaient eu des éditions séparées, que l'on appelle les Quartos. Le texte des quartos est de valeur très inégale ; les mauvais quartos sont courts ; on les considère généralement comme ayant une origine clandestine et comme étant des reconstitutions faites à l'aide de souvenirs d'acteurs ou de souffleurs, chaque acteur ne possédant au complet qu'une copie de son rôle à lui ; il se peut aussi que le texte des quartos ait été établi à partir de notes prises au cours de représentations. Le Folio ne donne pas les dates de composition ou de création des pièces. L'établissement d'un ordre chronologique est l'un des problèmes posés aux chercheurs. On divise généralement l'oeuvre de Shakespeare en quatre périodes. Dans la première période (1590-1595), Shakespeare écrivit des pièces historiques, en particulier Richard III (où l'on retrouve l'influence de Christopher Marlowe) ; des comédies inspirées de la comédie latine, comme la C omédie des méprises ( The C omedy of Errors) ; une farce célèbre : la Mégère apprivoisée ( The T aming of the Shrew ) ; une pièce où se révèle la griserie du verbe, qui est l'une des caractéristiques de la Renaissance : Peines d'amour perdues (Love's Labour's Lost), et l'un de ses drames les plus célèbres : Roméo et Juliette. La deuxième période (1595-1601) fut essentiellement celle des grandes comédies romanesques : le Marchand de Venise ( The Merchant of Venice), Beaucoup de bruit pour rien (Much Ado about Nothing), C omme il vous plaira (As You Like it ), la N uit des rois (Twelfth Night ). Ce fut également pendant cette période qu'il écrivit son unique comédie bourgeoise : les Joyeuses Commères de Windsor (The Merry Wives of Windsor), où réapparaît Falstaff, qui est l'un des personnages importants de Henry IV, ainsi qu'une féerie typiquement élisabéthaine, le S onge d'une nuit d'été ( A Midsummer Night's Dream ). À cette période brillante appartiennent également les deux parties de Henry IV et Henry V , où la gloire d'Azincourt illumine de ses reflets l'époque élisabéthaine. Il faut cependant préciser que les périodes ne sont pas nettement tranchées et que, à la fin de la deuxième, on trouve déjà une comédie qui annonce, tout en restant gaie, un changement dans les préoccupations du poète : c'est Comme il vous plaira , où apparaissent certains thèmes qui allaient être développés au cours de la troisième période, celle des grandes tragédies : Hamlet (qui semble avoir été écrit la même année que les Joyeuses Commères de Windsor), Othello, Macbeth e t le R oi Lear . Shakespeare écrivit encore des comédies pendant cette troisième période, mais elles sont amères et pourraient aussi bien se terminer en tragédies : Tout est bien qui finit bien (All's Well that Ends Well ), Mesure pour mesure (Measure for Measure ). C'est aussi la période des drames historiques inspirés par l'Antiquité : Jules César (écrit, semble-t-il, la même année que Comme il vous plaira e t la Nuit des rois), Troïlus et Cressida (Troilus and Cressida ), Antoine et Cléopâtre (Anthony and Cleopatra), Coriolan (Coriolanus), Timon d'Athènes (Timon of Atens). Il semble que l'on peut expliquer ce changement d'attitude de Shakespeare devant la vie et dans sa production par différentes raisons : la révolte d'Essex en 1601, les incertitudes quant à la succession d'Élisabeth, les inquiétudes en matière de politique étrangère et aussi certains événements de la vie personnelle de l'auteur. Après 1608, Shakespeare semble retrouver le calme, et ses dernières oeuvres sont marquées par un romanesque sans illusion, mais optimiste. À cette dernière période appartiennent essentiellement Cymbeline, le Conte d'hiver (The Winter's Tale ) et la Tempête (The Tempest). La liste chronologique complète des oeuvres théâtrales de Shakespeare peut s'établir ainsi (lorsque la date de création n'est pas connue avec certitude - ce qui est fréquent -, les historiens proposent une période de deux ans au cours de laquelle, d'après les travaux les plus récents, la pièce semble avoir été représentée pour la première fois) : Henry VI (les trois parties), 1591-1592 ; Richard III , 1594 ; Titus Andronicus , 1594 ; la Mégère apprivoisée, 1594 ; la Comédie des erreurs, 1594 ; les Deux Gentilhommes de Vérone, 1594-1595 ; Peines d'amour perdues, 1594-1595 ; Roméo et Juliette, 1594-1595 ; Richard II, 1595 ; le Songe d'une nuit d'été, 1595-1596 ; le R oi Jean, 1596-1597 ; le Marchand de Venise , 1596-1597 ; H enry IV (première partie, 1597-1598 ; deuxième partie, 1598) ; Beaucoup de bruit pour rien , 1598-1599 ; Henry V, 1598-1599 ; Jules César, 1599 ; Comme il vous plaira , 1599 ; les Joyeuses Commères de Windsor, 16001601 ; Hamlet, 1600-1601 ; Troïlus et Cressida, 1601-1602 ; la Nuit des rois, 1602 ; Tout est bien qui finit bien, 1602-1603 ; Mesure pour mesure , 1604 ; Othello, 1604 ; le Roi Lear, 1606 ; Macbeth, 1605-1606 ; Antoine et Cléopâtre , 1606-1607 ; Coriolan, 1607-1608 ; Timon d'Athènes , 1607-1608 ; Périclès, 1608-1609 ; Cymbeline, 16091610 ; le Conte d'hiver, 1611 ; la Tempête, 1611 ; Henry VIII, 1613. Les sources de Shakespeare. En général, Shakespeare n'inventa pas les intrigues de ses pièces : il utilisait largement les oeuvres de ses prédécesseurs et de ses contemporains. Ses drames, qui traitent de l'histoire d'Angleterre et qui sont destinés, en chantant la grandeur de la monarchie anglaise, à montrer la nécessité de l'ordre et du respect du pouvoir légitime, sont fondés sur les Chroniques de Holinshed. Il utilisa les comédies de Plaute pour la Comédie des méprises, par exemple ; les Vies des hommes illustres, de Plutarque, traduites en anglais par North à partir de la traduction française d'Amyot, pour les drames empruntés à l'Antiquité ; des pièces, des romans, des poèmes narratifs d'auteurs anglais ou étrangers, par exemple I Suppositi, de l'Arioste, pour la Mégère apprivoisée ; Romeus and Juliet, d'Arthur Brooke, pour Roméo et Juliette ; Rosalynde, de Lodge, pour Comme il vous plaira ; le Décaméron, de Boccace, pour Tout est bien qui finit bien ; des récits d'événements contemporains (A Discovery of the Bermudas, de Sylvester Jourdan, qui relate un naufrage survenu en 1609, est une des sources de la Tempête). S'il s'est imposé comme le plus grand dramaturge de tous les temps, Shakespeare s'est également affirmé, dans les Sonnets et dans les nombreuses chansons qui ornent ses pièces, comme le plus grand poète lyrique de la période élisabéthaine. L'art de Shakespeare. Shakespeare semble contenir en lui toutes les traditions dramatiques antérieures, celles de l'Antiquité, du Moyen Âge et de la Renaissance ; venant après Thomas Kyd et Marlowe, il porta à la perfection le drame élisabéthain ; son influence sur ses contemporains et ses successeurs allait être immense. Il sut admirablement utiliser les conditions de la scène de son temps : plateau s'avançant au milieu des spectateurs, absence de rideau, absence de décors et de jeux de lumière, rôles féminins tenus par de jeunes garçons (d'où, en partie, la fréquence des déguisements dans ses pièces). Si Shakespeare fut un pur élisabéthain, il fut, en même temps, un homme universel, et l'on a parfois l'impression de voir, dans ses drames, l'attitude de l'homme d'aujourd'hui confrontés aux problèmes du monde moderne. Shakespeare utilisait dans ses pièces le vers et la prose, selon les personnages ou leur humeur du moment ; très rapidement, il employa le vers blanc (introduit en Angleterre en 1557 par Henry Howard, comte de Surrey) de préférence au vers rimé, et ses paragraphes de vers sont d'une souplesse extraordinaire. Il fut influencé par toutes les tendances de son temps ; il aimait jouer avec les mots et, si certains de ses concetti semblent recherchés et précieux, il marque chaque scène d'un génie lyrique sans pareil. Dramaturge le plus joué au monde, transposé au cinéma, interprété, mis en scène et commenté d'une manière toujours nouvelle tant il semble inépuisable, il fut très certainement le seul auteur de ses pièces, contrairement à certaines théories selon lesquelles d'autres que lui auraient écrit son oeuvre, et qui semblent aujourd'hui peu crédibles. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Burbage Richard Coriolan drame Élisabeth - ANGLETERRE - Élisabeth Ire Falstaff Hamlet Lucrèce Macbeth mise en scène - Du mystère à la tragédie : le goût du spectacle poésie - Poésie et subjectivité Roi Lear (le) Roméo et Juliette Royal Shakespeare Company Royaume-Uni - Arts - Littérature - Renaissance et période élisabéthaine Shylock Stratford-on-Avon théâtre - La Renaissance : renouveau en Angleterre et en Italie Timon le Misanthrope tragédie Welles Orson Zeffirelli Franco Les médias Shakespeare Les livres Shakespeare - portrait anonyme de Shakespeare, page 4765, volume 9 Shakespeare - Hamlet, illustration de Karl Ludwig Printz (vers 1900), page 4765, volume 9 Shakespeare - la maison natale de Shakespeare, à Stratford-on-Avon, page 4765, volume 9 théâtre - Richard II, de Shakespeare, page 5164, volume 9 Welles Orson - Falstaff (1966), page 5610, volume 10 mise en scène - Hamlet, de Shakespeare : mise en scène d'Antoine Vitez, à Chaillot, en 1983, page 3224, volume 6 Royaume-Uni - Macbeth, de Shakespeare, page 4518, volume 8
