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transitionnel (objet) - psy

Publié le 07/04/2015

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transitionnel (objet) [angl. Transi-tional Object; allem Obergangsob-jekt). Selon D. W. Winnicott, premier objet matériel possédé en propre par le nourrisson, que celui-ci ne recon­naît pourtant pas comme apparte­nant à la réalité extérieure, bien qu'il ne fasse pas partie de son corps propre.

L'hypothèse de base de cette propo­sition théorique a été formulée par Winnicott dans un exposé présenté à la Société psychanalytique britannique le 30 mai 1951. Il s'agit d'une étude de la première possession non-moi et il apparaît nécessaire de souligner avec Winnicott ce terme de possession qui n'est pas possession d'objet, le premier objet non-moi étant le sein. La sé­quence qui commence par le fait, pour le nouveau-né, d'utiliser sa bouche en y mettant les doigts et qui se termine par l'attachement très vif de l'enfant pour un ours ou une poupée, un objet dur ou un objet moelleux est celle qui permet d'étudier la nature de cette possession; c'est la capacité pour l'enfant à reconnaître un objet comme non-moi, à le placer au-dehors, au-dedans ou à la limite du dehors et du dedans. C'est aussi la capacité qu'a un enfant de créer, d'imaginer, d'inventer, de conce‑

voir un objet et d'instituer avec lui une relation de type affectueux.

Objets et phénomènes transition­nels désignent alors l'aire intermé­diaire d'expérience qui permet cette séquence, cette aire qui se situe entre le subjectif et ce qui est objectivement perçu. C'est son intérêt pour l'expé­rience culturelle qui a permis à Winni­cott de s'intéresser à cette aire, espace potentiel, aire de l'illusion. Dans sa pré­face à jeu et réalité (1971) [édition fran­çaise, 1975], il évoque la controverse sur la transsubstantiation, c'est-à-dire l'utilisation en théologie du change­ment de toute la substance du pain et du vin en toute la substance du corps et du sang de Jésus-Christ, ce qu'il étudie comme rapport entre l'objet transition­nel et le symbolisme. Il existe un para­doxe pour lui dans l'utilisation faite par le petit enfant de cet objet; ce paradoxe accepté, toléré, il faut admettre qu'il ne soit pas résolu. C'est-à-dire admettre cette idée que ce n'est pas tant à l'objet lui-même qu'à son utilisation que l'en­fant a recours. C'est la capacité d'une personne à vivre dans une sphère qui serait intermédiaire entre le rêve et la réalité, aire intermédiaire d'expérience entre le pouce et l'ours en peluche, entre l'érotisme oral et la relation d'ob­jet, entre l'activité créatrice primaire et la projection de ce qui a été introjecté, entre l'ignorance primaire de la dette et la reconnaissance de celle-ci.

Cela peut être pour un enfant un phénomène ou quelque chose de parti­culier: un bouchon de laine, tiré des fils d'une couverture, le coin de cette cou­verture ou d'un édredon, un mot, une mélodie ou un geste habituel. C'est ce que l'enfant utilisera au moment de s'endormir, comme défense contre l'angoisse de type dépressif, insiste Winnicott. Ce peut être aussi quelque chose qui deviendra sale, sentira mau­vais mais que l'enfant emportera par­tout avec lui en voyage.

Ces premiers stades de l'utilisation de l'illusion sont à l'oeuvre dans le che­

vauchement entre l'apport de la mère et ce que l'enfant peut concevoir; il n'y a pas d'échange entre mère et enfant remarque Winnicott. L'enfant prend à un sein ce qui est partie de lui-même et la mère donne du lait à une partie d'elle-même, son enfant. Ainsi, nous sommes d'emblée dans ce que Lacan nommait «manque de l'objet «, non pas au sens négatif mais au sens du ressort même de la relation du sujet au monde, essentiel dans toute la pratique psycha­nalytique. Tous ces objets du jeu de l'enfant peuvent alors être nommés «transition d'objet«. Ces objets, qui interviennent dans le champ du désir humain, ne sont donc pas pensables dans une dialectique telle qu'elle est incarnée dans deux acteurs réels, mère et enfant. C'est le caractère de cession de l'objet que traduit la fabrication d'objets humains; l'objet transitionnel supporte cette position du sujet dans sa confrontation signifiante, à savoir qu'un signifiant représente le sujet pour un autre signifiant. L'objet dans ce cas supplée le sujet. Il s'agit du sujet mythique primitif, celui que nous ne saisissons jamais. Le sujet reste marqué par cette substitution primitive et sa réémergence est au-delà de cet objet. Winnicott indique que ce n'est pas l'objet qui est transitionnel mais qu'il représente la transition. C'est ce que montre la perte progressive de toute signification de ces phénomènes, asso­ciée au désinvestissement de l'objet. En clinique, Winnicott a recours au jeu du squiggle, qui désigne un tracé libre (angl. Squiggle) que fait le thérapeute (n" 1), que l'enfant reprend (n' 2); le théra­peute en fait un autre (n° 3), etc., dans une série d'échanges ludiques. Winni­cott travaille ainsi la relation thérapeu­tique face à la séparation et à la perte.

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