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Bruges-la-Morte

Publié le 06/04/2013

Extrait du document

La ville de Bruges apparaît à la fois comme le miroir de l'âme de Hugues Viane et comme le cercueil de sa femme morte.

Bruges-la-Morte paraît en feuilleton dans Le Figaro du 4 au 14 février 1892. Il connaît alors un vif succès, le rêve d'exotisme nordique étant à la mode à la fin du siècle dernier. Ce qui apparaît comme l'un des éléments constitutifs du symbolisme de Bruges-la-Morte s'élabore par le jeu des analogies. Le roman évoque notamment Baudelaire par la référence à la chevelure, et Villiers de l'Isle-Adam et son conte cruel Véra, Edgar Poe et Ligeia.

« «Avez-vous réfléchi, Barbe, qu'une servante honnête et chrétienne ne peut pas rester davantage au service d'un homme qui est devenu libertin ? » --------EXTRAITS -- ---- -~ La morte ressucitée Hugues garda de cette rencontre un grand trouble.

Maintenant, quand il songeait à sa femme, c'était l'inconnue de l'autre soir qu'il revoyait; elle était son souvenir vivant, pré­ cisé.

Elle lui apparaissait comme la morte plus res­ semblante .

Lorsqu'il allait, en de muettes dévotions, bai­ ser la relique de la chevelure conservée ou s' attendrir de­ vant quelque por­ trait, ce n'est plus avec la morte qu'il confrontait/ 'image, mais avec la vivante qui lui ressemblait.

Mystérieuse identi­ fication de ces deux visages.

Ç' avait été comme une pitié du sort offrant des points de repère à sa mémoire, se met­ tant de connivence avec lui contre l'oubli, substi­ tuant une estampe fraîche à celle qui pâ­ lissait, déjà jaunie et piquée par le temps.

Bruges, un paysage mystique Or la Ville a surtout un visage de Croyante.

Ce sont des conseils de foi et de renonce­ ment qui émanent d'elle, de ses murs d 'hos­ pices et de couvents, de ses fréquentes églises à genoux dans des rochets de pierre.

Elle recommença à gouverner Hugues et à imposer son obédience.

Elle redevint un Personnage, le principal interlocuteur de sa , vie, qui impressionne, dissuade, commande, d'après lequel on s'oriente et d'où l'on tire toutes ses raisons d'agir.

Hugues se retrouva bientôt conquis par cette face mystique de la Ville, maintenant qu'il échappait un peu à la figure de sexe et de mensonge de la Femme.

Il écoutait moins celle-ci ; et, à mesure, il entendit davantage les cloches.

Cloches nombreuses et jamais lassées tandis que, dans ses rechutes de tristesse, il s'était remis à sortir au crépuscule, à errer au hasard le long des quais.

Celui lui faisait mal, ces cloches perma­ nentes -glas d'obit, de requiem, de tren­ taines ; sonneries de matines et de vêpres - tout le jour balançant leurs encensoirs noirs qu'on ne voyait pas et d'où se déroulait comme une fumée de sons .

Ah ! ces cloches de Bruges ininterrompues, ce grand office des morts sans répit psalmodié dans l'air! Comme il en venait un dégoût de la vie, le sens clair de la vanité de tout et l'avertisse­ ment de la mort en chemin ...

« Et farouche, hagard, il tira, serra autour du cou la tresse qui, tendue, était roide comme un câble.

,.

NOTES DE L'EDITEUR de compte un poète de l'amour, celui de la femme, celui de la Flandre ? » Claude de Grève, Georges Rodenbach : une vie, une œuvre.

permanence dans le deuil.

» François Diyckaerts, préface à Bruges-la-Morte, Éd.

Actes Sud, 1986.

·' «L'originalité de Bruges-la-Morte est peut­ être dans son ambiguïté, ambiguïté du genre, ambiguïté aussi quant au sens, dépendant de la portée qu'on peut attribuer aux symboles .

L'originalité de Bruges­ /a-Morte n'est-elle pas née de sa surprenante équation entre une défunte et une ville ? Ce que cette équation entraîne de dualité entre la vie et la mort a d'ailleurs contribué à faire considérer Rodenbach tantôt comme un homme violemment amoureux de la vie (ce que disait de lui Octave Mirbeau), tantôt comme un nostalgique de la mort.

N'est-ce pas en fin « Elle est dite " irrémédiable ", cette ville que Hugues Viane a choisi d'habiter pour la ressemblance qu'il y trouvait avec la mélancolie de son deuil.

Narrations d'événements transcendants liés à la vie et à la mort, les mystères que cette Bruges dont s'est retirée ta grande pulsation de ta mer ne cesse de célébrer dans ses nombreux sanctuaires, l'aident moins par la promesse de résurrection qu'ils véhiculent que par la figure qu'ils donnent à son désir de « Cette rencontre, qui acquiert ainsi une réelle qualité extatique, à l'issue d'une longue et minutieuse " mise en condition " mentale.

Hanté par le souci de préserver le souvenir de la morte afin d'empêcher, comme il le dit lui-même, que "la morte elle-même" soit" effacée par la mort", Hugues tente sans cesse de réinvestir te visage de la morte dans les choses qui l'entourent.

» Christian Berg, notes de lecture, op.

cit.

1 portrait de Geo rges Roden bach par Lucie n Lévy-D hurmer (1896) I Gira udnn 2, 3, 4, 5 ill.

de H .

Delavelle I Flammarion , Paris , 1892 RO DENB ACH 02. »

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