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DOM GARCIE DE NAVARRE

Publié le 08/03/2011

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   Imité d'un original italien, le Gelosie fortunate del principe Rodrigo, d'Andréa Cicognini, florentin, Dom Garcie de Navarre ou le Prince jaloux est une comédie romanesque.    La scène est dans Astorgue, ville du royaume de Léon. L'état de Léon est tombé aux mains d'un usurpateur, le tyran Mauregat. Elvire et son frère, dom Alphonse, sont prince et princesse de Léon, dépossédés. Dom Garcie, prince de Navarre, aime Dona Elvire.    Décor espagnol, princesse errante, prince déguisé (car Dom Alphonse est « cru prince de Castille sous le nom de Dom Sylve «), travestissements (car Ignés « comtesse, amante de Dom Sylve aimée par Mauregat «, paraît en habit de cavalier), complication de l'intrigue, surprises, coups de théâtre et triomphe du véritable amour... rien n'y manque de ce qui constituait le genre alors à la mode. Pour nous, aujourd'hui, un seul élément d'intérêt : la peinture du caractère jaloux.

« renommée déjà éclatante de Molière comme poète comique et ce fut non moins sa réputation bien établie d'êtremauvais tragédien. Routinier par instinct, le public classe volontiers les auteurs par catégories et les confine dans un genre.

Le moyenque le même auteur, après nous avoir fait tant rire au spectacle de son Cocu imaginaire, puisse nous émouvoir avecles nobles souffrances de cet autre imaginatif qu'est un prince jaloux ? Pas plus qu'auteur du genre sérieux, le public d'alors n'admettait Molière acteur tragique.

On sait le faible de Molièrepour ce genre de rôles.

Mais il avait sur la façon de les jouer des idées qui s'accordaient mal avec le goût d'alors.

Saquerelle avec les « grands comédiens », — qui sont ceux de l'Hôtel de Bourgogne, —a fait grand bruit.

Dès le tempsdes Précieuses, il en met dans la bouche de Mascarille cet éloge ironique : « Il n'y a qu'eux qui soient capables defaire valoir les choses ; les autres sont des ignorants qui récitent comme l'on parle : ils ne savent pas faire ronflerles vers, et s'arrêter au bel endroit : et le moyen de connaître où est le beau vers, si le comédien ne s'y arrête, etne vous avertit par là qu'il faut faire le brouhaha ? » Il revient à la charge dans Y Impromptu de Versailles, où ils'attaque directement à Montfleury et à cette manière de « dire les choses avec emphase » « qui attirel'approbation, et fait faire le brouhaha.

— Mais, monsieur, aurait répondu le comédien, il me semble qu'un roi quis'entretient tout seul avec son capitaine des gardes parle un peu plus humainement, et ne prend guère ce ton dedémoniaque.

— Vous ne savez ce que c'est.

Allez-vous-en réciter comme vous faites, vous verrez si vous ferezfaire aucun ah ! » Que faut-il penser de ces vues théoriques de Molière ? Nous avons aujourd'hui bonne envie de lui donner raison etnous aimons furieusement le naturel...

Pourtant ! Ni Mounet-Sully, ni Sarah-Bernhardt, ni Mme Bartet ne récitaientles vers comme on parle.

S'ils ne les faisaient pas ronfler, pouvons-nous oublier qu'ils les faisaient chanter, et dequelle divine musique ! Si Molière critiquait justement l'affectation et le ronron des tragédiens de son temps, il sepourrait que la réforme de la diction tragique, telle qu'il la réclamait, ne fût que l'erreur contraire.

Elle était en toutcas prématurée : le public le lui fit bien voir. D'autre part, et c'est le plus grave, Molière manquait des moyens de l'acteur tragique.

Ni le physique, ni la voix ne leservaient.

Regardons-le venir à nous tel que nous le représente Montfleury fils, dans l'Impromptu de l'Hôtel deCoudé. ...

Il vient le nez au vent,Les pieds en parenthèse et l'épaule en avant,La perruque, qui suit le côté qu'il avance,Plus pleine de laurier qu'un jambon de Mayence,Les mains sur les côtés d'un air peu négligé,La tête sur le dos comme un mulet chargé,Les yeux fort égarés, puis débitant ses rôlesD'un hoquet éternel sépare ses paroles. Ce témoignage est celui d'un ennemi.

Voici celui de Grimarest : « Un hoquet, un tic de gorge qu'il avait...

rendaitd'abord son jeu désagréable à ceux qui ne le connaissaient pas...

Dans les commencements qu'il monta sur lethéâtre, il reconnut qu'il avait une volubilité de langue dont il n'était pas le maître...

Des efforts qu'il faisait pour seretenir dans la prononciation il s'en forma un hoquet qui lui demeura jusque à la fin.

» Mlle Poisson s'exprime entermes tout pareils : « La nature, qui avait été si favorable à Molière du côté des talents de l'esprit, lui avait refuséces dons extérieurs si nécessaires au théâtre, surtout pour les rôles tragiques.

Une voix sourde, des inflexionsdures, une volubilité de langue qui précipitait trop sa déclamation le rendaient de ce côté fort inférieur aux acteursde l'Hôtel de Bourgogne.

» Elle ajoute : « Il se rendit justice et se renferma dans un genre où ses défauts étaientplus supportables.

» A ce coup, nous nous récrions et protestons que l'éloge est mince.

Prenons notre parti quel'acteur tragique ne soit pas défendable.

Reste le comédien.

Ecoutons de Visé : « Il était tout comédien, depuis lespieds jusqu'à la tête ; il semblait qu'il eût plusieurs voix : tout parlait en lui, et d'un pas, d'un sourire, d'un clin d'œilet d'un remuement de tête, il faisait concevoir plus de choses que le plus grand parleur n'aurait pu dire en uneheure.

» Admirable dans les rôles comiques — et quand ces rôles sont de Molière ! — son succès même achevait dediscréditer l'acteur tragique. Quels furent les autres interprètes de Dom Garcie? Le rôle de Dona Elvire dut être tenu par Madeleine Béjart, un peumûre pour donner l'illusion d'une jeune princesse.

Et il ne suffit pas que la Du Parc ait été charmante sous l'habit decavalier de Dona Ignés, et son mari Du Parc supportable en Dom Lope.

Cette pièce malheureuse fut de celles donton dit qu'elles n'ont pas été « défendues ». Dom Garcie avait trouvé le public décidé à ne pas s'y plaire.

Pour des raisons identiques et contraires, Molièreessaya d'en appeler.

La ville avait rendu son jugement Restaient la Cour, le Roi, Monsieur le Prince.

On lit au registrede La Grange : « Vendredi 29 septembre (1662), joué au Palais Royal le Prince Jaloux pour le Roi.

» L'annéesuivante, le samedi 29 septembre 1663, la troupe part pour Chantilly, par ordre de M.

le Prince.

Le Prince jaloux estau nombre des pièces représentées.

Le jeudi 11 octobre, par ordre du Roi, la troupe part pour Versailles.

Le Prince. »

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