Devoir de Philosophie

Don Quichotte [Cervantès] - Fiche de lecture.

Publié le 06/05/2013

Extrait du document

don
Don Quichotte [Cervantès] - Fiche de lecture. 1 PRÉSENTATION Don Quichotte [Cervantès], roman de Cervantès, constitué de deux parties publiées respectivement en 1605 et 1615 sous le titre El ingenioso hidalgo don Quijote de la Mancha. Sous les dehors d'une satire burlesque des romans de chevalerie, Don Quichotte pose la question de la folie et de la nature de la littérature. 2 UN HÉROS VICTIME DE SON IMAGINATION Don Quichotte est le nom que s'est choisi un pauvre hidalgo (gentilhomme) de la Manche, si imprégné de ses lectures qu'il en vient à vouloir vivre à la manière des chevaliers errants du temps jadis, qui parcouraient le monde pour défendre la veuve et l'orphelin ou pour purger la terre de tous les monstres qui l'infestent, au milieu des sortilèges de magiciens et fées plus ou moins bien intentionnés. La « folie « du héros naît de son entêtement à interpréter le monde qu'il parcourt (celui de l'Espagne de Philippe III) en termes systématiquement romanesques : les moulins sont des géants, la moindre paysanne une princesse cachée et les auberges du bord du chemin des habitations seigneuriales. Après une première tentative en solitaire, Don Quichotte revient à son village et décide de s'offrir les services d'un écuyer, qui l'accompagnera désormais dans tous ses déplacements : ce sera Sancho Pança, un paysan de ses voisins. Cette deuxième errance, beaucoup plus longue et ambitieuse, va occuper l'essentiel de la première partie, divisée en cinq séquences ordonnées de manière concentrique autour d'un épisode central : - l'errance et les combats (les moulins à vent, 8 ; la conquête de l'armet de Mambrin, 21 ; la délivrance des forçats, 22 ; etc.) ; - la pastorale et sa variation : après l'hospitalité des chevriers (11-14), le séjour dans la Sierra Morena (23-29) ; - l'auberge vers laquelle convergent tous les personnages, qui se racontent et confrontent leurs expériences (16-47) : la somme de leurs expériences résume le monde selon des points de vue divers. Cervantès tente alors de faire coïncider la variété des formes du récit avec la multiplicité des expériences rapportées, quitte à utiliser le procédé du récit inséré ou celui du récit autobiographique ; - la pastorale (51-52) : échauffourée avec un chevrier grossier et violent rencontré sur la route. La pastorale est donc un monde fictif et rassurant qui a la même fonction que l'univers épico-chevaleresque : servir de consolation à...
don

« - le retour au village et la mort (73-74). La reprise du schéma en cinq parties cache une plus grande complexité, due à la présence de deux épisodes qui dominent la séquence (désormais à chaque fois scindée en deux) de l’errance : d’une part, la grotte de Montesinos, de l’autre le triomphe de Barcelone, qui prennent la place antérieurement réservée au monde de la pastorale.

Cette dernière est toujours présente en tant que tentation, mais, désormais, la réflexion portera avant tout sur la littérature comme production ( cf.

la visite de l’imprimerie) d’une illusion ( cf.

le théâtre et son rôle, avec Maître Pierre ou durant le séjour chez le duc et la duchesse). 5 UNE ŒUVRE POLYSÉMIQUE Le succès de Don Quichotte, quoique immédiat, considérable et à l’échelle de l’Europe, se révèle à la limite du malentendu, puisqu’il repose sur une lecture univoque du livre : la parodie burlesque des romans de chevalerie dont raffole alors l’Europe. Il va de soi que Don Quichotte est un livre comique, voire bouffon, qui achève le mouvement de dérision et de détachement des valeurs médiévales (chevalerie et prouesse) déjà amorcé par la littérature italienne de la Renaissance (voir le Roland furieux de l’Arioste).

S’explique alors fort bien le reflux de cet engouement au XVIII e siècle, un siècle qui ne peut goûter ce qui ressemble par trop à une « bouffonnerie », jugée au final assez grossière. C’est aux romantiques que l’on doit ce mouvement de retour au Quichotte : ils soulignent en effet de manière préférentielle le conflit entre l’idéal et le réel, l’impossibilité de vivre selon ses aspirations et exigences et selon sa soif d’absolu dans un monde jugé si médiocre.

Don Quichotte passe ainsi pour un grand incompris : à l’image de l’albatros baudelairien, il est le symbole de la conscience malheureuse et la personnalisation même de la solitude à laquelle est condamnée toute âme éprise d’idéal.

Le rêveur égaré dans la littérature chevaleresque rejoint le bovarysme de ceux qui préfèrent les livres à l’expérience — décevante — de la vie quotidienne.

Sans être fausse, cette lecture — comme toute lecture systématique de cette œuvre polysémique —est passablement réductrice. Au XXe siècle, le structuralisme aide à restituer le roman dans son contexte épistémologique ( cf.

Michel Foucault, les Mots et les choses, chapitre III).

Le recours aux similitudes et aux analogies était un des modes de fonctionnement de la pensée au XVIe siècle; or, « Don Quichotte n’est pas l’homme de l’extravagance, mais plutôt le pèlerin méticuleux qui fait étape devant toutes les marques de la similitude.

Don Quichotte dessine le négatif du monde de la Renaissance ; l’écriture a cessé d’être la prose du monde ; les ressemblances et les signes ont cessé de nouer leur vieille entente ; les similitudes déçoivent, tournent à la vision et aux délires ; les choses demeurent obstinément dans leur identité ironique : elles ne sont plus que ce qu’elles sont […].

L’écriture et les choses ne se ressemblent plus […].

Les mots viennent de se refermer sur leur nature de signes ».

Dès lors, Don Quichotte, ignorant cette mutation, va passer pour fou : « c’est celui qui s’est aliéné dans l’analogie.

Il prend les choses pour ce qu’elles ne sont pas, et les gens les uns pour les autres ; il croit démasquer, il impose un masque […].

Il n’est le Différent que dans la mesure où il ne connaît pas la Différence ; il ne voit partout que ressemblances et signes de la ressemblance.

» Une telle réflexion permet de situer l’enjeu de l’œuvre de Cervantès : la nostalgie du monde de transparence idéale du Moyen Âge et de sa cohérence est interrogation sur la possibilité qu’a l’esprit de comprendre le monde.

En même temps, on assiste à une remise en cause du statut de la littérature : cette dernière, comme la conscience individuelle, suscite un monde, le recrée et l’interprète.

Que peut la littérature ? Le lecteur de Cervantès doit savoir mettre en parallèle l’aventure de l’imaginaire et l’aventure de l’écriture pour mieux découvrir l’extraordinaire laboratoire d’expérimentation du roman qu’est devenu le Quichotte aux yeux d’un lecteur du XXe siècle.

Ce lecteur qui a suivi l’aventure du réalisme et la renaissance de la nouvelle au XIXe siècle, puis la mutation proustienne, où l’œuvre devient son propre sujet (le work in progress de Joyce).

À la manière du récit picaresque, le parcours de Don Quichotte est une quête, qu’il faut lire comme métaphore de la découverte de soi.

Dans les deux cas, il y a une constitution progressive du moi dans l’affrontement avec le monde.

Dans le roman picaresque, cependant, il n’y a qu’une seule conscience en jeu ; ici, la conscience centrale est double, c’est celle du couple maître-valet.

Le roman trouve sa forme dans la réunion-séparation de deux consciences qui interfèrent constamment l’une avec l’autre, au point de devenir indissociables, de complémentaires qu’elles étaient à l’origine.

S’il y a histoire d’une conscience, paradoxalement, elle ne passe pas par l’emploi de la première personne, mais par la dialectique d’une confrontation permanente entre Don Quichotte et Sancho Pança. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation.

Tous droits réservés.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles