Fictions de Borgès
Publié le 27/03/2013
Extrait du document
Jorge Luis Borges (Buenos Aires, 1899- Genève, 1986) a été considéré comme un véritable « maître à écrire « par toute une génération d' intellectuels latino-américains et européens. Outre l'élégance de son style, son cosmopolitisme et son érudition, mêlés à un goût du fantastique et des mystifications intellectuelles - sous lesquels cependant pointe parfois la superficialité du vernis mondain - ont contribué à la popularité de son oeuvre (Le Jardin des sentiers qui bifurquent, 1941 ; L' Aleph, 1949). Il a également publié des poèmes qui témoignent de son amour pour l'Argentine (Ferveur de Buenos Aires, 1923).
«
Les nouve lles de
Borges, pour ce
qu'elles supp osent
d'interrogations sur la
litt érat ur
e, sur ceux qui
l a font, au risque de
découvrir qu'un livre
n'existe que pris dans
un réseau infini de
textes qui
s'entrecroise nt pour
en engendre r de
nouveaux, ne cessent
de proférer la
disparition de la notion
même
d " «auteur ».
Comme si le s livres
éta ient leurs propres
géniteurs ou n
'étaient
finalement qu'un seul
livre, ce
lui que
Mallarmé , comme
Borges , annonçait, et
dont toute la litt érature
ne serait que le
bégaiement.
« Dans Tlon les choses
se dédoublent ; elles ont
aussi une propension
à s'effacer et à perdre
leur s détails quand l es gens les oublient.
»
EXTRAITS ~~~~~~~~
Quand le destin d'un homme
est gouverné par un lieu : le Sud
D e son coin, le vieux gaucho extatique, en qui
Dahlmann voyait un symbole du
Sud (de ce
Sud, qui était le sien), lui lan ça un poignard,
la lame nue, qui vint tomber à ses pieds.
C'était comme si le Sud avait décidé que
Dahlmann accepterait le duel.
Dahlmann
se
baissa pour ramasser le poignard et comprit
deux choses : la première, que,
par cet
acte presque instinctif, il s'engageait à
combattre ;
la seconde, quel' arme dans sa
main maladroite ne servirait pas à le
défendre, mais à justifier qu'on
le tue.
Le
Sud, traduit de l'espagnol
par Roger Caillois
La description de la Bibliothèque
de
Babel
L'univers (que d'autres appellent la
« Bibliothèque ») se compose d'un nombre
indéfini, et peut-être infini, de galeries
hexagonales, avec au centre
de vastes puits
d'aération
bordés par des balustrades
très basses.
De chacun de ces
hexagones
on aperçoit les
étages inférieurs et supé
rieurs , interminablement .
La
distribution des galeries est
invariable.
Vingt longues
étagères, à raison de cinq par
côté, couvrent tous les murs
moins deux ; leur hauteur, et
ce lle des étages eux-mêmes,
ne dépasse guère la taille
d'un bibliothécaire norma
l
ement constitué .
Chacun
des pans libres donne sur un
cou loir étroit, lequel débouche sur une autre
galerie, identique à la première et à toutes.
A droite et à gauche du
cou/où; il y
a deux
cabinets minuscules .L'un permet de dormir
debout, l'autre de satisfaire les besoins fécaux.
A proximité
pa sse l'escalier en
colimaçon,
quis' abîme et s'é lève à perte de
vue.
La Bibli othèque de Babel,
traduit de l'e spa gnol
par Ibarra
Quand les livres prennent
le pas sur la réalité
Le contact et la fréquenta
tion de
Tlon ont désintégré
ce monde .
Enchantée par sa
rigueur, l'humanité oublie et
oublie de nouveau
qu'il
s'agit d'une rigueur de
joueurs d'échecs, non d'an
ges.
Dans les écoles a déjà
pénétré la
« langue primi
tive
» (conjectura l e) de Tlon ;
déjà l'enseignement de son
histoire harmonieuse (et
pleine
d'épisodes émou
vants) a oblitéré celle qui
présida mon enfance ; déjà
dans les mémoires un passé
fictif occupe la pla ce d'un
autre, dont nous ne savons
rien avec certitud e - pas
même qu
'il est faux .
La
numismatique, la pharma
cologie et l'archéologie ont
été réformées.
(.
.
.) Une
dynastie dispersée de solitaires a changé la
face du monde .
Sa tâche se poursuit .
Si nos
prévisions sont exactes,
d'ici cent ans
quelqu 'un découvrira les cent tomes de la
Seconde Encyclopédie de Tli:in.
Alors l'anglais , le français et l'espagnol lui
même disparaîtront de la planète.
Le monde
sera
Tlon .
Tldn Uqbar Orbis
Tertius, traduit de
l 'espagnol par
P.
Verdevoye
Gallimard , 1983
« Il était le spectateur
so litair e et lucide d'un monde multiforme ,
instantané et presque
intolérablement
préci s.»
NOTES DE L'ÉDITEUR évidemment avec l'Univers.
» G.
Genette,
Figures I, Seuil , 1966.
« Conteur, poète, essayiste, il est reconnu
comme le maître incontesté des le ttre s
arge ntine
s.
Toute son œ uvre est mainten ant
traduite en l an gue française et ses recueils
d e no u
velle s - Fictions, L' Aleph, Le
R apport
de Brodie, Le Livre de sab le - ainsi
que ses livres de poèmes et ses essa is
« Le monde existe, disait Mallarmé , pour
aboutir à
un Livre.
Le mythe borgésien
contracte ce moderne
tout est à écrire et le
classique
t out est écrit dans une formule
encore plus ambitieuse, qui serait à peu
prè s :
tout est Écrit .
La bibliothèque de
Babel, qui existe
ab œterno et contient
"tout ce qu'il est po ssible d'ex prim er
d an s toutes les
la ng u es", se confond
1 Edim édia 2.
3.
4, 5 peintures de Gior g io De Chirico I Pro Litteri s
«forges Lui s Bor ges est l'un des dix,
peut- être des cinq, auteurs moderne s
qu 'il
es t esse ntiel d'avoir
lus.
Après lav oir
appro ch é, nou s ne so mme s plus les m ême s.
Notre vision des êtres et des cho ses a
changé.
Nous so mme s plu s intelli
gents.
San s doute même avons-nous plus de
cœur.
» Claude Mauriac , note de couverture
d e
Fictions, Gallimard, 198 3.
- Discussion, Enquêtes - passent déjà
pour des classiques de la littérature
du
xxe siècle.
» F.
M .
Rosset , pr éface au
R apport de Brodie de Borge s, Gallimard,
1972 .
BORGES 02.
»
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