Jean de la Lune

« EXTRAITS ----'------- « Mais pourquoi diable avez-vous astiqué les meubles comme ça ? » Jef attend chez lui l'arrivée de Marceline JEF.

- Mais pourquoi diable avez-vous astiqué les meubles comme ça ? ~ ......

LOUISE.

- Pour faire · honneur à cette dame.

JEF.

- Vous ne lui ferez pas honneur, car c'est probable­ ment moins bien te1Îu chez elle, et puis alors, moi, j'ai l'air d'un homme d'inté­ rieur : c'est gai ! LOUISE.

-Excusez­ moi ! Mes amis m'ap pe llen t «Jean de la Lune» JEF.

-Ne dites rien.

N'ajoute z rien.

Me voilà heureux pour trois mois si vous ne me dites pas de choses méchantes.

MARCELINE.

- Vous n'ê tes pas exigeant.

JEF.

- C'est que je vous aime tant.

J'ai peur de tout perdre par une exigence.

MARCELINE, avec un attendrissement ironique.- Pauvre garçon ! Je comprends maintenant pourquoi Richard vous appelle Jean de la Lune.

JEF.

_:_Il n'es t pas le seul.

Depuis le collège, tous mes amis m'appellent ainsi.

Je ne sais pas si c'est très gentil.

MARCELINE.

- Certainement.

Marceline essaie de reconq u érir Richard JEF.

-Je ne peux pas la voir ainsi.

Reprends- la, Richard.

RICHARD.

- Jean de la Lune! va.

C'est un amant comme toi qu'il lui faudrait.

MARCELINE.

-Je n'ai pas d'excuses.

Je n'en cherche pas.

Tu as raison.

Tu as cent fois raison.

Mais je vais t'aimer, tu ne sais pas comment je vais t'aimer.

J'ai eu tel­ lement peur de te perdre, là, tout d'un coup, j'ai compris que tu étais toute ma vie.

RICHARD.

- Ne te fa­ tigue pas.

C'est in­ utile.

Adieu.

Il fait mine de sortir et prend son chapeau un peu longuement.

( ...

) MARCELINE.

-Mais qu'est-ce que je vais devenir sans toi ? RICHARD.

- Je suis bien tranquille.

Éditions La Table Ronde, 1959 « Ne te fatigue pas.

C'est inutile.

Adieu.» «Pauvre garçon ! Je comprends maintenant pourquoi Richard vous appelle Jean de la Lune.» NOTES DE L'ÉDITEUR Jean de la Lune fut créé par Louis Jouvet en 1929 ; il en signa la première mise en scène, tout en incarnant Jef.

C'est Michel Simon qui interpréta le rôle de Cloclo, et l' affron­ tement entre ces deux « monstres » de la scène fut un moment de théâtre inoubliable.

Quant à Marceline, elle était incarnée par Valentine Tessier.

«Le plus certain de son agrément est dans le dessin des person­ nages, qui, sous les habits modernes et bourgeois, conservent la légèreté et les grâces de la comédie italienne.

Son Jean de la Lune, c'est Pierrot, auquel soit par ha­ sard, soit intentionnellement, le masque de Jouvet fait songer et la petite bonne femme autour de laquelle tous s'agitent est une co­ quette et perverse Colombine.

M.

Michel Simon nous montre tous les vices, toutes les impudeurs et la cocasserie de Briguella.

» Maurice Rostand, préface de Jean de la Lune, La Table ronde, 1959.

« Jean de la Lune est un personnage ado­ rable et falot, charmant et comme éternel, jailli de la sensibilité d'un poète avec autant de grâce et d'assurance d'être éternel que de l'imagination populaire comme Cadet Roussel et Jean de Nivelle: Frère de ces ex­ quis fantoches créés par le poète anonyme .

qui dort au cœur de la foule, il l'est aussi du pauvre Jacques de Shakespeare.

Marcel Achard,( ...

) en même temps qu 'il est près de l'âme populaire, est de la plus pure race des poètes .

» Maurice Rostand , ibid.

l Lipnit zki-Vio llet 2 B.N.

/Arc hives Phm eb, D.R .

3, 4.

5 Dess ins d' Anita Lopez.

Edito-Service / D .R .

ACHARD02. »