Journaux et Carnets de Tolstoï

« « De l'éducation, un n om et dix ou vingt mille de revenus.

Pour un jeune homme qui réunit ces conditions, ( ••.

) tous les salons lu i sont ouverts, il a droit de prétendre à toute jeune fille à marier.,.

r------- - EXTRAITS - ------ ~ 14 juin 1850, Iasnaïa Poliana Je me suis remis à tenir mon journal, et une fois de plus avec une nouvelle ardeur et un nouveau but.

Cela fait combien de fois déjà ? Je ne me souviens pas.( ...

) Je ne suis pas à court de pensées, et qui ont l'air très remar­ quables ; et quand on y regarde de près, il reste du vide ; mais d'autres sont en effet pertinentes - c'est bien pour cela qu'il faut tenir un journal.

D'après le journal, il est très aisé de se juger soi-même .

Ensuite, comme je trouve indispensable de fixer d'avance mes occupations, pour cela aussi le journal est nécessaire.

Je voudrais m'habituer à déterminer d'avance mon ordre de vie, non pas pour une journée, mais pour une année, pour plusieurs années, pour toute la vie même ; c'est trop difficile, impossible même ; cependant j'essaierai, d'abord pour un jour, puis [pour un mois, biffé] pour deux jours -autant de jours je serai fidèle à mes décisions, autant j'en fixerai par avance.

13 août 1865, Iasnaïa Poliana La mission nationale universelle de la Russie consiste à introduire dans le monde l'idée d'une structure sociale sans propriété du sol.

«La propriété, c'est le vol » restera une vérité plus vraie que celle de la Constitution anglaise tant qu'existera le genre humain.

C'est la vérité absolue, mais il y a, décou­ lant d'elle, des vérités relatives -des appli­ cations.

La première de ces vérités relatives ~ est la façon de voir du peuple russe sur la propriété.

Le peuple russe nie la propriété la plus assise, la plus indépendante du tra­ vail.

6 juin 1889, Iasnaïa Poliana Un petit moine et un acteur sont venus quémander, je leur ai donné de l'argent et des brochures -pitoyables.

Puis un jeune homme, étudiant de Kiev.

Il dit qu'il a les nerfs détraqués et veut vivre selon le Christ.

28 novembre 1889, Iasnaïa Poliana Ce matin, après le travail et le café , pensé en faisant une , réussite: aujourd'hui est venu un errant, je lui ai donné 1 j.

kopecks, il m'a de­ mandé un pantalon, t je le lui ai refusé, or -- ~ j'en avais.

Pensé à ce que j'ai lu hier dans le livre d'Evans, que la vie est amour, et que quand la vie est amour, elle est joie.félicité.

Oui, par conséquent, tout ce qui est nécessaire, la seule chose qui soit nécessaire, c'est d'ai­ mer, de savoir aimer, de s'habituerà aimer tout le monde tou­ jours , de se déshabituer de ne pas aimer qui que ce soit en sa présence et en son absence.

Traduit du russe par M.

Aucouturier « Ma tristesse, je la ressens mais ne puis la comprendre et me la définir.

,.

NOTES DE L'EDITEUR encore à monter à bicyclette, et il se reproche un peu plus tard d'avoir voulu se remettre à la gymnastique) .

Même son travail littéraire n'est à l'origine qu'un « La vie du comte Léon Tolstoï peut être divisée en trois grandes périodes.

La première, de 1828 à 1851, se rapporte à son enfance, son adolescence et sa jeunesse .

La deuxième, de 1851 à 1874, est marquée par une activité rayonnante d'homme du monde et de romancier.

La troisième débute en 1874 par une crise morale et philosophique compliquée d'une neurasthénie qui le transforme radicalement et dont les conséquences s'étalent à partir de cette «"Homme à épreuves" , comme le définit très tôt sa tante Tatiana Y ergolski, assidu de gymnastique, pratiquant le "journal à la Franklin " pour entraîner sa volonté, Tolstoï, depuis son adolescence, s'est toujours donné pour tâche principale le perfectionnement de soi-même, entendu, il est vrai, dans un sens de plus en plus spirituel à mesure qu'il avance en âge (pourtant, à soixante-dix ans, il apprend " entraînement" sur un sujet" donné " ( ...

), dont le but est la formation du style, et surtout l'acquisition d'une discipline intellectuelle.

L'objet constant du travail de Tolstoï, c'est Tolstoï lui-même: l'œuvre romanesque, toute monumentale qu'elle est, n'apparaît parfois que comme un résidu de ce travail de titan, dont le journal est évidemment l'instrument privilégié.

» Michel Aucouturier .

1 Mary Evans Picture Library I Exp lor er 2, 3, 4 aquare lles de J.

T aillefe r, éd .

G.P.

, Paris, 1962 / B.N .

date dans toutes ses œuvres et dans toute sa vie.

» André Cresson, Léon Tolstoï; sa vie, son œuvre, PUF, 1950.

TOLSTOl 06. »