Le Prince de Hombourg

« ~---- - -- EXTRAITS Le comédien Gérard Philipe interpréta le rôle du prince de Hombourg au TNP à Paris en 1951.

a.a-•· Le défi LE PRINCE DE HOMBOURG (après avoir dégrafé son épée).

- Mon cousin Frédéric .

veut jouer le Brutus et il se voit déjà dessiné à la craie sur une toile, siégeant sur la chaise curule : pu premier plan les dra­ peaux suédois et sur la table le code martial de la Marche.

Parbleu, il ne trouvera pas en moi un fils qui l'admire inn1 f rithridl oon 101mu jusque sous la hache du bourreau.

Cœur allemand de vieille roche, je suis habitué à la magnani­ mité et à la clémence ; et puisqu'il me traite en ce moment avec une insensi­ bilité digne des héros antiques, il me fait pitié et je ne peux que le plaindre ! (Il remet son épée aux offi­ ciers et s'en va.) .................

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L1ÉLECTEUR.

- Conduisez-le à F ehrbellin, au quartier général, et convoquez là­ bas le conseil de guerre pour le juger.

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~~~..::~~~~~~~~}ar.s~ Acte II, scène 10 ::;_?~~~S-;~-:::· j - ---- ___ ,,,.....

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- -~- ·- Programme du Deutsches Theater (Berlin, 1907) Portrait d'un héros déchu L1ÉLECTEUR.

- Non, dis-moi : il implore sa grâce ? ...

Parbleu, que s'est-il passé, ma chère enfant ? Pourquoi pleurer ? Tu lui as parlé ? Révèle-moi tout ! Tu lui as parlé ? NATHALIE (la tête sur sa poitrine).

- Tout à l'heure, dans les appartements de ma tante, où il était venu, figure-toi, avec son manteau et son chapeau à panache, sans bruit, à la faveur del' obscurité: hagard et timide, se dissimulant, sans la moindre dignité, spec­ tacle lamentable et désolant ! Aucun des héros que célèbre l'histoire ne s'abaisserait à tant de misère.

Vois, je ne suis qu'une femme et je recule en frissonnant devant le ver de terre qui vient toucher mon pied : pourtant la mort ne me trouverait pas telle­ ment écrasée, anéantie, dépourvue de tout héroïsme, si elle se dressait tout à coup devant moi sous la forme d'un horrible lion ! ..

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Hélas, que sont la grandeur et la gloire des hommes ! Acte IV, scène 1 Sur la voie du sacrifice LE PRINCE DE HOMBOURG.

-Silence ! C'est mon inébranlable volonté i Je veux, en mourant librement, exalter la loi sacrée de la guerre que j'ai enfreinte à la face de toute l'armée ! De quelle importance peut vous être /'unique, la pauvre victoire que j' arra­ cherai peut-être à Wrangel, en regard du triomphe que demain j'aurai glorieusement remporté sur/' ennemi intérieur, sur /' indis­ cipline et la présomption ? ( ...

) Acte IV, scène 7 Traduit de l'allemand par André Robert Frédéric, prince de Hombourg, à la bataille de Fehrbellin, 1675 (gravure d'après une peinture de Wilhelm Camphausen, XIXe siècle) NOTES DE L'ÉDITEUR « Et en 1810, un an avant sa mort, Kleist donne son drame le plus réussi, malgré tout ce qu'il recèle d'inquiétant, son drame le plus serein, le plus dénoué et heureusement modelé, Le Prince de Hombourg.

Après quoi sa vie douloureuse se brise.

Elle est achevée.

Une vie n'a pas besoin de durée pour s'affirmer pleinement et s'accomplir victorieusement.

» Thomas Mann, Esquisse de ma vie, Essai sur Kleist, Gallimard, 1967.

«Le Prince de Hombourg est le drame le plus vrai de Kleist parce qu'il contient toute sa vie.

On y retrouve les contradictions et les oppositions de son être, la soif de vivre et l'amour de la mort, la discipline et l'exaltation, le naturel et le superficiel.

» Stefan Zweig, Le Combat avec le démon, Éditions Belfond, 1983.

« Il est probable que sans sa mort précoce, Le Prince de Hombourg, le dernier de ses drames, nous fût apparu comme la première œuvre de sa maturité ...

Le nœud de l'action demeure le problème que Kleist n'a pas su résoudre dans sa vie : comment accorder le sentiment de l'individu avec les rigueurs de l'État?» M.

Mossé, Littérature allemande, Éditions Aubier, 1959.

1 Klei st par Peter Friedel, Bildarchiv Prussicher Kulturbesitz / Sipa-Icono 2, 3, 4 Bildarchiv Prussic he r Kulturbe sitz / Sipa- lcon o KLEIST02. »