Les Amours du chevalier de Faublas
Publié le 12/04/2013
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Plus que par son talent d'écrivain, JeanBaptiste Louvet de Couvray (1760-1797) est resté dans l'histoire pour son activité politique. En effet, républicain convaincu, il fut député en 1792 à la convention où il s'opposa aux montagnards et attaqua vivement l'autoritarisme de Robespierre. Il échappa de justesse à la guillotine et fut rappelé au comité de salut public après la chute de son ennemi. Louvet de Couvray publia d'autres romans, en particulier, en 1791 , Émilie de Varmont, qui se présente comme un virulent plaidoyer pour le divorce et un réquisitoire contre le célibat des ecclésiastiques. Louvet de Couvray exerça en outre des activités de journaliste dans La Sentinelle, qu'il rédigea pendant l'année 1792.
«
«Je passai presque tout
i'hiver à la Bastille,
quatre mois, quatre
mois entiers ...
»
~------ ·EXTRAITS
Une fausse méprise
-Dormez-vous déjà, belle enfant ? me dit
la marquise d'une voix altérée.
-
Oh ! non, je ne dors pas.
Elle se
précipita dans mes bras et me
pressa contre son sein.
- Dieu
j s' écria-t-elle, avec une surprise
bien naturellement
jouée , si elle était
feinte,
c'est un homme! ...
Et puis me repoussant avec promptitude :
-
Quoi! monsieur , il est possible ? ...
- Madame, je vous l'ai
dit, répliquai-je en trem
blant.
- Vous me
l'ave z dit,
monsieur ; mais cela
était-il croyable
? ...
Il
s'agissait bien de dire ! It
nef allait pas rester chez
moi ...
ou
du moins, il ne
fallait pas empêcher
qu'on vous dressât un
autre
lit ...
- Pourvu que vous me
pardonniez, madame
...
-Non, je ne vous par
donne pas ! mais j'ai
plus d'attention pour
vous que vous n'en avez
pour moi
...
Voye z comme
sa
main est déjà froide !
Et paf pitié elle la posa sur son cou
d 'ivoire.
Guidée
par la nature et par l'amour, cette
heureuse main descendit
un peu; je ne sa
vais quelle agitation
faisait bouillonner
mon sang.
-
Aucune femme éprouva-t-elle jamais
l'embarras où il me met ! reprit la mar
quise
d'un ton plus doux.
Ses bras qui m'avaient repoussé d'abord,
m 'attiraient doucement.
Bientôt nous
nous
trouvâmes si près
l'un de l'autre , que nos
lèvres se rencontrèrent ...
j'eus la hardiesse
d'imprimer sur les sien
nes un baiser brûlant.
- Faublas ! est-ce là ce
que vous m'avez promis
?
me dit-elle d'une voix
presque éteinte.
Sa main s'égara ; un feu
dé v
orant circulait dans
mes veines ...
-
Ah ! madame ! pardon
ne z-moi, je me
meurs! ...
-
Ah ! mon cher F aublas .
I monam1 .. ..
Je restais sans mouve
ment.
La marquise eut
pitié de mon embarras ,
qui ne
pouvait lui dé
plaire ...
Elle aida ma ti
mide inexpérience ...
Je reçus avec autant
d '
étonnement que de plaisir une char
mante leçon que
je répétai plus d'une fois.
La politique sous le romanesque
Hélas! je suis à la Bataille ! ...
J'y passai
presque tout l'hiver, quatre mois, quatre
mois entiers.
On l'a mille fois écrit, ce
pendant je me vois forcé
de l'écrire encore : tous les
chagrins sont rassemblés
dans ce séjour funeste, et
de tous les chagrins , le
plus inconsolable, l'ennui,
l'ennui terrible, y veille
nuit et jour à côté de l' in
quiétude et de
la douleur.
Je crois que
la mort l' ha
biterait bientôt seule,
s'il
était possible qu'on empê
chât l'espérance
d'y péné
trer.
Ô mon roi ! le jour
où, dans ton équité, tu dé
truiras ces prisons fatales,
serp, pour ton peuple un
jour d'allégresse.
« Mes mains , souillées
du sang de l'innocent,
firent triompher la
mauvaise
cause.
»
«
Sophie vit, triste et
songeuse, dans une
retraite impénétrable.
»
NOTES DE L' ÉDITEUR
« Pour le romancier, Faublas est un
meilleur titre
à l'immortalité.
Sens du
dialogue, verve intarissable qui assure les
rebondissements de l'intrigue, plaisir
d'écriture
à narrer les aventures du plaisir :
en lui faisant les honneurs de la Pléiade ,
Etiemble
n'a pas tort de louer " tant de
vivacité, de drôlerie, d'alacrité, d'allégresse
et
d'insolence".
Insolence qui se lie au
proche engagement politique : Louvet insistera
lui-même
sur" les passages
sérieux où l'auteur montre un grand amour
de la philosophie, et surtout des principes
de républicanisme assez rares encore
à
l'époque où je les écrivais ".
( ...
)Dans
l'éventail des tendances érotiques du
XVIIIe siècle finissant, Faublas occupe une
place bien singulière, non par son amorale
apologie de l'innocence dans le plaisir , mais
par l'intarissable effusion de la
tendresse que le plaisir ne flétrit pas.
»
Encyclopœdia Universalis .
1, 2 , 3, 4 , 5 , 6 Lib ra irie populaire , Pari s ( s.d.)
non pas même surtout par un goût
exceptionnellement insistant du travesti (et
des délicieuses ambiguïtés qu'il engendre), Louvet
de Couvray s'inspira en partie de sa
propre vie pour écrire
Les Amours du
chevalier de Faublas.
Ainsi, une certaine
Mme Cholet, dont il tomba amoureux mais
qu'il ne put épouser, ne pouvant divorcer,
fut sans doute le modèle de son héroïne.
LOUV ET DE COU VRA Y 02.
»
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