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Paradoxe sur le comédien

Publié le 09/04/2013

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Le Paradoxe sur le comédien fut rédigé par Diderot vers 1769, puis remanié à plusieurs reprises jusqu'en 1777. Ces années furent les plus fertiles dans la carrière de l' écrivain. Le 1er octobre 1770, il fit paraître dans la Correspondance littéraire un article - intitulé « Garrick ou les acteurs anglais « - qui était en fait une ébauche du Paradoxe. L'ouvrage terminé ne fut publié qu'en 1830, donc bien après la mort de son auteur.

« Une soirée chez Mme Geoffrin (détail).

Au centre, assis, Lekain, acteur préféré de Voltaire.

Debout derrière lui, Mlle Clairon, exemple type, selon Diderot, de la comédienne « lucide » EXTRAITS A propos du vrai et du naturel au théâtre LE PREMIER.

-(.

..

) Réfléchissez un moment sur ce qu'on appelle au théâtre être vrai.

Est-ce y montrer les choses comme elles sont en nature ? Aucunement.

Le vrai en ce sens ne serait que le commun.

Qu'est-ce donc que le vrai de la scène ? C'est la conformité des actions, des discours, de la figure, de la voix, du mouvement, du geste, avec un modèle idéal imaginé par le poète et souvent exagéré par le comédien.

Voilà le merveilleux.

Ce modèle n 'in­ flue pas seulement sur le ton ; il modifie jusqu'à la démarche, jusqu'au maintien.

De là vient que le comédien dans la rue ou sur la scène sont deux person­ nages si différents, qu'on a peine à les reconnaître.(.

..

) Une femme malheureuse, et vraiment mal­ heureuse, pleure et ne vous touche point : il y a pis, c'est qu'un trait léger qui la défigure vous fait rire ; c'est qu'un accent qui lui est propre dissone à votre oreille et vous blesse; c'est qu'un mouvement qui lui est habituel vous montre sa douleur ignoble et maussade ; c'est que les passions outrées sont presque toutes sujettes à des grimaces que l'artiste sans goût copie servilement, mais que le grand artiste évite.

Le comédien doit obéir à son texte et à son personnage LE PREMIER.

-Un grand comédien n'est ni un pianoforte, ni une harpe, ni un clavecin, ni un violon, ni un violoncelle ; il n'a point d'accord qui lui soit propre; mais il prend l'accord et le ton qui conviennent à sa partie, et il sait se prêter à toutes.

J'ai une haute idée du talent d'un grand comédien: cet homme est rare, aussi rare et peut-être plus que le grand poète.

( ...

) LE SECOND.

- Un grand courtisan, accou­ tumé, depuis qu'il respire, au rôle d'un pantin merveilleux, prend toutes sortes de formes, au gré de la ficelle qui est entre les mains de son maître.

LE PREMIER.

-Un grand comédien est un autre pantin merveilleux dont le poète tient la.ficelle, et auquel il indique à chaque ligne la véritable forme qu'il doit prendre.

LE SECOND.

- Aussi un courtisan, un comé­ dien, qui ne peuvent prendre qu'uneforme, quelque belle, quelque intéressante qu'elle soit, ne sont que deux mauvais pantins ? LE PREMIER.

-Mon dessein n'est pas de calomnier une profession que j'aime et que j'estime; je parle de celle du comédien.

Je serais désolé que mes observations, mal interprétées, attachassent l'ombre du mépris à des hommes d'un talent rare et d'une utilité réelle, aux fléaux du ridicule et du rire, aux prédicateurs les plus éloquents de l 'hon­ nêteté et des vertus, à la verge dont l'homme de génie se sert pour châtier les méchants et les fous.

Mais tournez les yeux autour de vous, et vous verrez que les personnes d'une gaieté continue n'ont ni de grands défauts, ni de grandes qualités ; que communément les plaisants de profession sont des hommes frivoles, sans aucun principe solide ; et que ceux qui, semblables à certains personnages qui circulent dans nos sociétés, n'ont aucun caractère, excellent à les jouer tous.

A l'époque où Diderot écrivit ce texte, le théâtre était en pleine mutation ; le drame bourgeois était en train de supplanter la tragédie et la comédie .

Et l'intérêt du public pour la scène ne cessait de croître.

« Il est du spectacle comme d'une société bien ordonnée, où chacun sacrifie ses droits primitifs pour le bien de l'ensemble et du tout.» NOTES DE L'ÉDITEUR « En résumé, où l'on en veut à Diderot, c'est de juger péremptoirement d'un métier qu'il ne connaît pas, de trancher follement en spectateur sur une matière où j'ai entendu un grand acteur -Charles Dullin - dire sagement : " On agrippe un personnage par où l'on peut'', et surtout d'affirmer malhonnêtement ou avec une légèreté impardonnable chez un philosophe : choix."» P.

Valde, comédien et metteur en scène, cité par M.

Blanquet, Librairie théâtrale, 1958.

« Une sensibilité est indispensable au comédien: la sensibilité de l'auteur.

La sienne, sans doute, lui est des plus utiles.

Sans elle, il ne saurait, de toute évidence, être lui-même sensible à l'autre, mais tant d'acteurs croient pouvoir suppléer par ce qu'ils appellent leur sensibilité -et qui n'est que de la sensiblerie -à l'absence de sensibilité de certains auteurs, que je me demande si on doit tenir cette sensibilité-là pour l'élément essentiel du jeu dramatique - contre Diderot -ou -avec lui -comme l'ennemie publique n° 1 du comédien.

» Bernard Blier.

" Le théâtre est une ressource, jamais un «Je ne crois pas à l'insensibilité du comédien, mais pas davantage aux vertus d'une sensibilité que ne contrôlerait pas un véritable sens critique.

»Jean-Pierre Aumont.

1 Sipa-Icono 2 lithographie de Delpech (1740) / Lauros-Giraudon 3 peinture de Lemonnier, musée du château de Malmaison/ Lauros-Giraudon 4 gravure d'époque , B . N.

/ Edimédia DIDEROT05. »

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