1999: Complicité de crimes contre l'humanité : l'affaire Papon
Publié le 21/03/2019
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Vendredi 22 octobre 1999, 21h30, Maurice Papon, âgé de 89 ans, est incarcéré à Fresnes au terme d'une rocambo-lesque cavale de dix jours. Condamné à dix ans de prison pour complicité de crime contre l'humanité, l'ancien secrétaire général de la Gironde a été rattrapé par l'histoire.
L' affaire Papon, c'est un peu comme une bombe à retar-
' dement qui n'en finit pas d'exploser. Une de ces histoires sans fin, avec rebondissements, moments de latence, effets médiatiques. À vrai dire, peu de personnes, depuis la fin de la guerre, désiraient ouvrir cette boite de Pandore, cette éternelle histoire de ceux qui avaient collaboré avec l'occupant, de ceux qui avaient résisté, plus ou moins tardivement.
La libération, puis l'épuration, étaient passé par là, et dans l'impérieuse nécessité de reconstruire un pays laminé par la défaite, il fallait nommer des hauts fonctionnaires pour assurer la nouvelle légitimité de I'Ëtat à l'autonomie retrouvée.
À cette date, Papon, malgré de menus services rendus à la Résistance -il a hébergé un de ses anciens amis juif - ne peut apparaître comme un résistant indiscutable. Tout au plus, en 1944, a-t-il joué un double jeu... Il s'en sort plutôt bien et accède à la direction du cabinet du commissaire de la République de Bordeaux.
Né en 1910, ce fils de notable est proche de la gauche radicale des années 30. Son cursus administratif le mène au ministère de l'Intérieur, puis, en 1942, au secrétariat général de la préfecture de Bordeaux. En fonctionnaire zélé de la zone occupée, il n'hésite pas à servir loyalement I'Ëtat français, au point de prendre la direction, en mai 1944 du Bureau des questions juives.
Le temps passe et ce carriériste réussit à se faire oublier en effectuant une brillante carrière dans la préfectorale. Après un passage au ministère de l'Intérieur, il est nommé préfet en Corse, en Algérie, au Maroc puis accède à la préfecture de police de Paris de 1958 à 1967 en pleine période gaullienne. L'année suivante, il est élu député gaulliste du Loir-et-Cher et le sera deux fois avant d'être ministre du budget de Raymond Barre de 1978 à 1981.
Mais, en 1981, il fait l'objet d'une plainte pour complicité de crime contre l'humanité. On lui reproche d'avoir supervisé l'arrestation et le transfert du camp de Mérignac à Drancy de 1 560 personnes, ensuite déportées vers les camps d'extermination. Inculpé deux ans plus tard, il se sort de ce mauvais pas pour vice de forme. Nouvelle plainte en 1990, nouvelle inculpation en 1992 et, finalement, la cour d'assise de Bordeaux ouvre le procès le 8 octobre 1997. 2 avril 1998, la sentence tombe : Maurice Papon est condamné à dix ans de réclusion criminelle et à la privation des droits civiques.
«
Mau
rice Papen
lors de son
procès,
en 1999.
Compl
icité de crim es co ntre
l'hu mani té: l' affaire Papon
Ve ndredi 22 octobre 1999, 21h3 0, Maurice Papon, âgé de
89 ans, est incar céré à Fresnes au terme d'une rocambo
lesque cavale de dix jours.
Condamné à dix ans de prison
pour complicité de crime contre l'humanité, l'ancien secré
tair e général de la Gironde a été rattrapé par l'histoire.
L ' affa ire Papon, c'est un peu
comme
une bombe à retar
dement qui n'en finit pas
d'explo ser.
Une de ces his toires sans
fin, avec rebond issements, moments
de latence, effets médiatiques.
À vrai
dir e, peu de pers onnes, depuis la fin
de la guer re, désiraient ouvrir cette
boite de Pandor e, cette étern elle
his toire de ceux qui avaient collaboré
avec l'occupant, de ceux qui avaient
résisté, plus ou moins tardivement.
La libération, puis l'épur ation,
étaient passé par là, et dans l'impé
rieuse nécessité de recons truire un
pays lamin é par la défaite, il fallait
nommer des hauts fonc tionnair es
pour assurer la nouvelle légitimité de
I' Ëtat à l'au tonomie retrouvée.
À cette date, Papon, malgré de
menus services rendus à la Résistance
- il a hébergé un de ses anciens amis
juif -ne peut apparaître comme un
résistant indiscutable.
Tout au plus,
en 1944, a-t-il joué un double jeu ...
Il
s'en sort plutôt bien et accède à la
dir ection du cabinet du commissaire
de la République de Bordeaux.
Né en 1910, ce fils de nota ble est
proche de la gau che radicale des
années 30.
Son cursus administratif
le mène au min istère de l'Intérieur,
puis, en 1942, au secrétariat général
de la préfecture de Bordeaux.
En
fonc tionna ire zélé de la zone
occu pée, il n'hésite pas à servir
loyalement I'Ëtat français, au point
de prendre la dir ection, en mai 1944
du Bureau des questions juives.
Le temps passe et ce carriér iste
réussit à se faire oublier en effec
tuant une brillante carrière dans la
préfectora le.
Après un passage au
minis tère de l'Intérieur, il est nommé
pr éfet en Corse, en Algér ie, au
Mar oc puis accède à la préfecture de
pol ice de Paris de 1958 à 1967 en
pleine période gaullienne.
L'année
su ivante, il est élu député gaulliste
du Loir-et-Cher et le sera deux fois
avant d'être ministre du budget de
Raymond Barre de 1978 à 19 81.
Ma
is, en 1981, il fait l'objet d'une
plain te pour comp licité de crime
contre l'humani té.
On lui reproche
d'avoir supervisé l'arrestat ion et le
tra nsfert du camp de Mérignac à
Dranc y de 1 560 personnes, ensuite
déportées vers les camps d'extermi
nation.
Inculpé deux ans plus tard, il
se sort de ce mau vais pas pour vice
de forme.
Nouvelle plain te en 1990,
nouv elle incul pation en 1992 et,
final ement, la cour d'assise de Bor
deaux ouvre le procès le 8 octobre
19 97.
2 avril 1998, la sentence
tombe : Maur ice Papon est condamné
à dix ans de réclusion criminelle et à
la privation des droits civiques.
Mau rice Papen en 1962, alors qu'il était
préfet de Police de Paris.
Se pour voyant en cassat ion, il
demeur e libre jusq u'à sa cava le
précédant la décision de cette cour.
Ne s'étant pas présenté le 20 octobre
19 99, avant l'examen de son pourvoi
en cassat ion, il est recherché et
appréhendé en Suisse au terme de
dix jours qualifiés «d'exil >> par ses
défenseurs, M�vuillemin et Vara ut.
En se mettant délibérément hors
la loi, il devien t, de fait, le premier
Français condamné pour la politique
antijuive de Vichy au titre de compli
cité d'arrestat ions illégales et de
séquestrations arbitraires.
Défendues
par M' Arno Klarsfeld, les famill es
ju ives bordelaises de déportés, qui
n' avaient jamais abandonné leur
combat, obtiennent ainsi réparation.
Crimes et
châtiments
1909-1984
Jean leguay
Délégué de René Bousquet en
zone occupée durant la
guerre, il est inculpé en 1979
pour son rôle dans l'organi
sation par les autorités fran
çaises de la rafle du Vel' d'Hiv'
en juillet 1942.
Cette rafle
avait entraîné l'arresta tion de
familles ju ives, livrées aux oc
cupants allemands et dépor
tées dans les camp s de
concentr ation.
leguay est mort
en 1984 sans avoir été jugé.
19 09-1993
René Bousquet
Préfet puis secrétaire général
à la pol ice, il signe en 1942
avec la gestapo de France les
accords permettant l'arres
tation par les autorités fran
çaises des famil les de ju ifs
étrangers, puis leur remise
aux Allemands.
En 1949, sa
condamnation à 5 ans de
dégradation nationale est
relevée pour faits de résis
tance.
Membre de la Banque
d'Indochine, administrateur
de La Dépêche du Midi, ce
radical proche d'Albert 5ar
rault, soutient Mitterrand dès
1965.
Inculpé de crime contre
l'human ité, il est assassiné par
un désé quilib ré en 1993 avant
d'avoir été jugé.
1913-1991
Klaus Barbie
Chef de la gestapo de lyon,
tortionnaire de Jean Moulin, il
traque résistants et commu
nis tes, déporte BOOO juifs et
réussit à se faire oublier.
Uti
li sé par les services secrets
am éricai ns, l'ancien 55 se
cache en Bolivie d'où il est
extradé en 1983 après avoir
été retrouvé par les Klar sfeld.
Il est.
en 19B7, le premier
condamné pour crime contre
l'human ité (depuis l'impres
criptibilité de 1964) et meurt à
la prison de Montluc en 1991.
191 5-1996
Paul Touvier
Chef de la Milice à Chambéry
puis à lyon en 1943-1 944, il
est condamné à mort par
contumace en 1945.
Arrêté
deux ans plus tard, il s'évade,
fait ensuite l'objet de diverses
condamnations avant d'être
gracié en 1971.
A nouveau
recherché dix ans plus tard et
arrêté en 1989, il est condamné
en 1994 à la réclusion à per
pétuité pour complicité dans
l'assassinat de sept otages juifs
en 1944 à Rieux-le-Pape.
19
99
René Bousquet
Klaus Barbie
lors de son procès
Paul Touvier.
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