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Bilan de la première guerre mondiale

Publié le 17/01/2022

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 L'Europe sort de la guerre matériellement sinistrée. Ses pertes en vies humaines, la destruction d'une partie de son infrastructure économique, le déséquilibre de ses finances, ont accentué, dans des proportions considérables, un déclin déjà amorcé à l'aube du siècle. Ce « déclin de l'Europe «, si les habitants du vieux continent en prennent conscience (c'est le titre d'un livre du géographe A. Demangeon paru en 1920), il leur est d'autant plus difficile de l'enrayer que leurs divisions et leurs problèmes politiques ont généralement été aggravés par la guerre. Il en résulte une profonde crise morale et une remise en question des valeurs jusque là les moins contestées de la civilisation occidentale.
 
 I - Le bilan matériel
 
 A. Les pertes humaines. — a) Les pertes militaires ont été considérables : 13 millions au total si l'on compte celles de la Révolution russe (de 1917 à 1920). Elles se répartissent de la façon suivante : France : 1 400 000 tués soit 14 % de la population masculine entre 15 et 50 ans; il faut y ajouter les 100 000 décès prématurés de gazés et de grands blessés, les 3 millions de blessés, les 1 100 000 invalides de guerre (dont 130 000 mutilés). Allemagne : 1 827 000 tués (12 % des hommes entre 15 et 50 ans), 5 millions de blessés et mutilés. Autriche-Hongrie : 1 400 000 morts. Russie : 1 700 000 jusqu'en 1917 et sans doute 5 millions au total jusqu'en 1920. Royaume-Uni : 750 000 (1 million avec l'Empire). Italie : 750 000. Serbie : 365 000 (le quart des mobilisés). États-Unis : 115 000.

« — L'Europe a cessé d'être le banquier du monde.

Elle a dû rapatrier ses capitaux ou céder, aux États-Unisnotamment, une partie de son portefeuille étranger.

L'Angleterre a vendu pour plus de 5 milliards de dollars deplacements étrangers.

Le refus soviétique de payer les dettes du gouvernement tsariste touche particulièrement laFrance qui détenait plus de 9 millions de francs-or de titrés russes sur un total de 12 millions.

L'Allemagne souffrepour sa part de la confiscation de ses intérêts économiques en Chine et dans l'Empire Ottoman. — Les belligérants européens ont contracté des dettes considérables : dette extérieure (surtout auprès de l'État etdes banquiers américains) qui s'élève en 1919 à 33 milliards de francs-or pour la France, 32 pour la Grande-Bretagne, 20 pour l'Italie; dette intérieure due aux emprunts émis pendant la guerre, 20 % seulement des dépensesétant couvertes par l'impôt.

La dette publique est ainsi passée en 5 ans de 33,5 à 219 milliards de francs-or enFrance, de 17,6 à 196,9 milliards en Angleterre, de 6 à 169 milliards en Allemagne.

Mais ceci n'a pas suffi à comblerle déficit.

Les gouvernements ont dû augmenter le volume des billets en circulation provoquant une inflation d'autantplus dangereuse que le stock d'or diminuait du fait de l'exportation de métal précieux par les capitalistes dans lesbanques neutres de Suisse, d'Espagne, etc., et de la nécessité de solder en or le déficit de la balance des comptes. La balance commerciale d'un pays est la différence entre le montant de ses exportations et celui de sesimportations.

La notion de balance des comptes fait intervenir les « exportations invisibles» : revenus des capitauxplacés à l'étranger, des compagnies d'assurances, de la flotte marchande, etc. — 11 en résulte une dépréciation des principales monnaies européennes qui cessent, à la différence du dollar, d'êtreconvertibles en or.

En décembre 1919, la livre sterling a perdu 10 % de sa valeur d'avant-guerre, le franc 50%, lemark près de 90%. — Inflation et sous-production se traduisent sur le plan des prix par une hausse vertigineuse.

De 1914 à 1919, lesprix se trouvent multipliés par 2,5 en Grande-Bretagne, 3,5 en France et 12,5 en Allemagne, augmentation qui estloin d'être compensée par celle, plus lente, des salaires. e) Par contre les belligérants non européens ont largement profité du conflit.

Les deux principaux bénéficiaires ensont le Japon dont les soieries et les cotonnades ont pris pendant la guerre la place des produits français et anglaissur le marché extrême-oriental et en Asie du sud-est, et surtout les États-Unis dont le revenu national a doublé en5 ans, ainsi que la production d'acier.

Ils ont prêté plus de 10 milliards de dollars au reste du monde, détiennent lamoitié du stock d'or mondial et dominent économiquement le continent américain.

Ils sont maintenant et de loin lapremière puissance économique et financière du monde. II - Le bilan social et politique A.

Les bouleversements sociaux.

— a) La guerre a eu des effets très variables selon les catégories sociales.

Lesdétenteurs de revenus fixes, et notamment les petits rentiers, ont été ruinés par l'inflation.

En France, où beaucoupd'épargnants avaient placé leurs fonds dans les emprunts russes, la fortune mobilière évaluée à 113 milliards defrancs-or en 1914 ne dépasse pas 10 ans plus tard 70 milliards de francs-papier, soit à peine 18 milliards de francs-or.

Dans beaucoup de pays, une fraction importante de la petite bourgeoisie se trouve ainsi déclassée, privée deressources et dressée contre l'État libéral qui n'a pas su protéger ses intérêts.

Les « fascismes » trouveront danscette catégorie sociale une partie de leur clientèle.

Moins touchés, les salariés, et en premier lieu la classe ouvrière,souffrent d'une hausse des prix que ne compense pas l'augmentation des salaires.

Le pouvoir d'achat des masses setrouve ainsi réduit de 15 à 20 % en France et en Grande-Bretagne, de 25 % au moins en Italie et en Allemagne.Cette situation explique l'agitation sociale de l'immédiat après-guerre et l'augmentation des effectifs syndicaux quipassent en France de 900 000 à plus de 2 millions d'adhérents, en Grande-Bretagne de 4 à 8 millions.

Certainsgroupes ont en revanche profité de la guerre.

Une partie de la paysannerie d'abord qui a tiré profit de la haussecontinue des produits alimentaires et acquis de nouvelles terres.

Beaucoup d'industriels aussi, et notamment ceuxqui ont obtenu d'importantes commandes de guerre.

En France, Schneider (artillerie), Citroën (obus), Boussac (toiled'aviation), Loucheur (gaz de combat), ont réalisé des bénéfices importants.

Spéculateurs et intermédiaires ont enpeu de temps acquis d'immenses fortunes et ces « nouveaux riches » affichent au lendemain de la guerre un luxe quiéveille des rancœurs tenaces, surtout parmi les anciens combattants. b) Le prestige des classes dirigeantes a été fortement atteint.

Le « brassage » qui s'est opéré dans les tranchées etdans les camps de prisonniers a effacé certaines différences liées à la fortune ou à l'éducation et suscité depuissants courants égalitaires (voir dans La grande illusion, du cinéaste français Jean Renoir, les rapports entre le «métallo » devenu lieutenant et l'officier d'origine aristocratique).

En même temps s'est développé dans les masses unvif ressentiment à l'égard du capitalisme et des milieux dirigeants, jugés responsables du conflit et accusés parfoisd'en avoir tiré profit.

Le règne des notables s'achève et les idéologies anticapitalistes, socialisme ou fascisme,connaissent un succès très large. B.

Les changements politiques.

— a) Libéralisme et démocratie semblent triompher en Europe.

La guerre a provoquél'effondrement des trois grands empires autocratiques et l'extension du régime parlementaire.

L'Allemagne etl'Autriche deviennent des républiques.

La Tchécoslovaquie, la Pologne, la Yougoslavie, adoptent en 1920-1921 desconstitutions inspirées par le modèle français.

Partout s'impose le suffrage universel.

En même temps s'opère lalibération des minorités nationales.

Pour leur donner satisfaction, des États ont été créés ou reconstitués :. »

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