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La conquête de l'Algérie sous la monarchie de 1830-1848

Publié le 05/01/2023

Extrait du document

« 2) La conquête de l’Algérie sous la monarchie de 1830-1848 (suite) b) Première réaction de la France Avisé par la dépêche de Deval de l’affront subi, le gouvernement français décide la mise en place d’un blocus pour punir la Régence.

Deval lui-même, tout en recommandant un blocus (et ce depuis 1826) pour intimider la Régence, se prononce contre l’envoi d’un corps expéditionnaire : « Ce serait une guerre interminable, et par conséquent sans résultats véritablement heureux.

» .

Reste que le blocus se révèle rapidement inefficace, d’où un débat sur l’opportunité d’envoyer un corps expéditionnaire.

Dès octobre 1827, le duc de Clermont-Tonnerre successivement ministre de la Marine et des Colonies puis ministre de la Guerre dans le cabinet Villèle propose une conquête par l’armée de terre.

Dans un rapport enthousiaste, il mentionne les avantages politiques mais aussi économique que le régime pourrait retirer d’une victoire sur le Dey : « produire non seulement des quantités énormes de blé » mais aussi « une grande quantité de plantes coloniales » .

1 L’arrivée au pouvoir du ministère ultraroyaliste dirigé par Jules de Polignac, à l’été 1829, reprend le projet d’expédition militaire.

Celle-ci est définitivement arrêtée en janvier 1830, L’intérêt de Polignac pour la « Barbarie » (ou côte barbaresque) est ancien. Dès septembre 1814, il avait proposé à Louis XVIII de « former des établissements en Afrique » sur la côte barbaresque, afin de se procurer « des ressources commerciales immenses ». Plusieurs rapports émanant du ministère des Affaires étrangères, dirigé conjointement par Polignac, évoquent une solution coloniale à la question d’Alger.

La colonie serait consacrée à la culture du blé et des denrées tropicales : « Le coton s’y cultiverait avec avantage.

». Dans une note destinée au conseil du Roi, Polignac lui-même exprime sa préférence pour la fondation de nouveaux établissements sur la côte nord-africaine, qui deviendraient « nos colonies naturelles, bien plus profitables à celles que le climat ne nous permet pas de cultiver par nous-mêmes », c’est-à-dire celles des Antilles2. Polignac se réfère aux cultures coloniales qui font défaut à France depuis l’indépendance d’Haïti en 1804 3. Lire note. 1 ibid Ibid. 3 Dessalines, après avoir battu à Vertières, le 18 novembre 1803, les forces françaises commandées par Rochambeau, proclame l'indépendance de Haïti, le 1er janvier 1804. La France a du mal à accepter la perte de celle qu’on appelle "la colonie la plus riche du monde".

Des négociations commencent entre les deux parties pour tenter de trouver une issue.

Elles traînent en longueur.

En 1825, le roi Charles X "concède" son indépendance à Haïti en échange d’une indemnité de dédommagement de 150 millions de francs or.

Cette somme représente "l’équivalent d’une année de revenus de la colonie aux alentours de la Révolution, soit 15 % du budget annuel de la France", rapporte l'écrivain haïtien Louis-Philippe Dalembert.

Pour contraindre Haïti à signer l’accord, la France impose un blocus maritime. Pour payer, le nouvel Etat doit donc emprunter des sommes considérables sur la place de Paris.

Il lui faut donc acquitter ce que certains historiens ont appelé "la double dette de l’indépendance" : l’indemnité et les intérêts des emprunts.

Dans le même temps, les recettes de l’ancienne perle des Antilles, ravagée par des années de guerre et de blocus, fondent.

Le cours du café, sa principale ressource, a considérablement baissé.

Dans le même temps, par crainte des Français, les autorités insulaires investissent beaucoup dans des constructions militaires.

Dans ce contexte, Haïti est dans l’incapacité de payer.

Un accord n’est trouvé avec la France qu’en 1838.

Le roi Louis-Philippe accepte de réduire l’indemnité à 90 millions, somme qui équivaudrait à 17 milliards d'euros d'aujourd'hui.

Pour la régler, le nouvel Etat doit lever de lourds impôts.

La dette est soldée en 1883.

Mais l’ancienne colonie ne finira de payer les agios de l’emprunt… qu’au milieu du XXe siècle ! Aujourd’hui, Haïti est l’un des pays les plus pauvres du monde. "L'incurie, la corruption et l'incompétence des Haïtiens eux-mêmes y sont certainement pour beaucoup.

La mainmise des Américains au début du XXe siècle a achevé la dérive de ce petit pays.

Mais le versement de la dette de l'indépendance à la France et l'emprunt ainsi contracté y ont aussi contribué", analyse Louis-Philippe Dalembert. https://www.francetvinfo.fr/monde/ameriques/haiti-le-poids-d-une-dette-vieille-de-200-ans_3073211.html 2 Observons que les connaissances sur l’Algérie sont étonnamment pauvres et cela pèse lourdement et durablement sur cette conquête d’un pays qui apparaît et demeure longtemps comme une terre vierge appelant un peuple neuf. Revenir à l’idée d’une conquête de l’Algérie, c’est aussi l’occasion pour le ministère Polignac (constitué le 8 août 1829) très impopulaire, de détourner l’attention de l’opinion publique vers une entreprise présentée comme prestigieuse et nécessaire.

Le prince de Polignac imagine de constituer un Empire arabe épaulé par la France.

Une victoire extérieure donnerait au régime le prestige perdu et en retour une force de répression contre les partisans de la Charte.

Il s’agit de s’appuyer sur l’armée de Mehemet Ali (un officier ottoman d'origine albanaise qui règne sur l’Égypte depuis 1804) et de profiter des faiblesses des trois régences. Cependant Mehemet Ali exige une expédition strictement musulmane avec reconstitution d’une flotte égyptienne (la flotte égyptienne a été détruite lors de la bataille de Navarin).

Ce projet crée naturellement l’opposition des Turcs mais aussi des Anglais.

En France, l’opposition dénonce l’entreprise mais le gouvernement décide d’entrer dans cette aventure le 31 janvier 1830 … pour venger son honneur bafoué, notons que nous sommes 3 ans après l’affront subi par Deval ! Qu’importe, le 2 mars Charles X annonce la prochaine expédition.

Il s’agit aussi officiellement de mettre fin à la piraterie. c) La deuxième réaction : l’envoi d’un corps expéditionnaire Le ministre de la Marine, le baron d’Haussez rassemble à Toulon (au grand dépit de Marseille dont le zèle légitimiste lui faisait espérer le départ de l’opération) 675 bâtiments, dont 103 de la marine royale ; un corps expéditionnaire de 37 000 hommes, sous le commandement du maréchal Louis Auguste Victor de Ghaisne, COMTE DE B OURMONT . On joint une quarantaine d’interprètes dont beaucoup d’Orientaux ignorants cependant la langue dialectale et même une troupe de peintres et d’écrivains destinés à populariser les grands faits d’armes 4. Mais e climat général en France est loin d’être favorable à cette expédition.

Le 28ème de ligne arrivée à Paris, au dire de son colonel, « manifeste ouvertement son mécontentement […] et ose dire qu’il ne ferait pas la campagne qui allait s’ouvrir ».

Les actes d’insubordination se multiplient, des officiers sont insultés, des soldats brisent leurs fusils et cherchent à se faire condamner à la détention pour éviter le départ en Afrique. Pour meubler l’attente et préparer les troupes, le gouvernement fait distribuer un « Aperçu historique » qui pour remonter le moral de la troupe réfute les sombres prévisions de l’opposition5. L’expédition débarque le 14 juin 1830 à la presqu’île de Sidi Ferruch à 30 km à l'ouest d'Alger, avec pour objectif de prendre à revers la forteresse d'Alger, qui est réputée invincible… mais cette réputation remonte à l'attaque des troupes espagnoles de Charles Quint au XVIe siècle. 4 5 Annie Rey-Goldzeiguer, ibid.

p 458 Ibid. Les Français ne rencontrent que peu de résistance.

L’armée du Dey, composée de 30 000 à 50 000 hommes a été mal préparée à ce débarquement.

Bourmont impose la capitulation et l’entrée de ses troupes dans Alger le 5 juillet La presse rend compte de ce fait d’armes avec enthousiasme : « La prise d’Alger est le commencement d’une ère nouvelle pour la civilisation du monde.

Si nous savons en profiter, l’Afrique se couvrira en quelques années de populations laborieuses, comme l’Amérique, et la Méditerranée ne sera plus qu’un grand lac que traverseront en tous sens les navires de toutes les nations » écrit Le Constitutionnel le 11 juillet 1830. Polignac s’attend à récolter les fruits électoraux de cette victoire.

Il n’en est rien, les élections du 23 juin et du 3 juillet marquent la défaite du gouvernement Polignac.

Les responsables de l’expéditions comme Haussez n’ont pas trouvé grâce devant les électeurs.

En outre, le pillage du trésor de la casbah devient un objet de scandale dans la presse.

Ce scandale implique des proches de Bourmont. De quoi s’agit-il ? Le lendemain de la capitulation du dey, soit le 6 juillet une commission nommée par Bourmont et composée d’un intendant général, du commandant de la place, et d’un payeur général a pris possession du trésor du dey.

Des scellés sont apposés sur la salle du trésor.

Mais la nuit suivante, 25.000 à 30.000 francs en lingots d'or disparaissent, après le percement (à la disqueuse ?) d'un mur de la salle de monnayage.

L'inventaire officiel indique quelques jours plus tard, que le trésor de la Casbah s'élevait à 48.684.528 francs en monnaies d'or et d'argent. La presse demande une commission d’enquête et laisse planer le doute sur l’intégrité des officiers généraux et des membres de la commission.

Cependant l’unanimité de la classe politique se fait pour que la France conserve l’Algérie.

Principalement pour montrer au monde que la France est de retour dans le concert des puissances. Mais sur ces entrefaites, le régime s’écroule sous les coups de boutoirs de la révolution de Juillet.

Paris se soulève les 27, 28 et 29 juillet.

Charles X, réfugié à Rambouillet, abdique en faveur de son petit-fils, le duc de Bordeaux le 2 août 1830, mais le 7 août, la Chambre des députés déclare le trône vacant et y appelle LouisPhilippe Ier.

Alors que le souverain déchu gagne l'Angleterre (avant de mourir à Görz -aujourd'hui Goriziaqui fait alors partie de l’empire d'Autriche - aujourd’hui en Italie- en 1836) Ainsi la politique extérieure qui se voulait une politique de prestige mais qui était d’abord une diversion a-telle échouée.

L’arrivée au pouvoir de Louis Philippe signe un double malentendu (APRILE ) : l’impossible retour de l’Ancien Régime et l’impossible avènement d’une République. d) La nouvelle monarchie de Juillet ne sait pas quoi faire de cette conquête… En intervenant quelques semaines seulement après la prise d’Alger, la révolution de 1830 a sans doute renforcé le sentiment que la conquête de l’Algérie marquait l’avènement d’un nouvel impérialisme, libéral et aux prétentions civilisatrices.

Pour autant, la nouvelle monarchie de Juillet ne sait pas davantage quoi faire de cette conquête de la Restauration. Les libéraux, partisans du nouveau régime, ont été pour la plupart sinon hostiles du moins indifférents à la colonisation ; pour des raisons à la fois morales et économiques ; ils s’étaient d’ailleurs opposés à l’expédition d’Alger.

Il n’en reste pas moins que l’affaire du pillage du trésor de la Casbah fait toujours les grands titres des journaux. Des bruits de détournement, accusent des hommes influents du régime déchu et la disparition des lingots d'or décident Louis-Philippe à faire contrôler, dès le 11 août, les cargaisons en provenance d'Alger et à charger le général Clauzel6, successeur de Bourmont, d'organiser une commission d'enquête.

Parmi ses membres, arrive à Alger le 2 septembre, avec le nouveau commandant en chef, Jean Baptiste Flandin, un sousintendant militaire au passé trouble.

Persuadé d'une fraude, il se livre à une enquête minutieuse et estime qu'avant l'arrivée des Français, le trésor de la Casbah s'élevait à 150 millions de francs et non 50 millions. Malgré ces conclusions, Clauzel ferme officiellement « l'affaire du Trésor d'Alger » le 22 octobre 1830, après un mois et demi d'enquête. L'itinéraire de certaines cargaisons, permet de penser que les sommes détournées devaient servir à la reconquête du pouvoir par la dynastie déchue.

Talleyrand, ambassadeur à Londres signalait une grande agitation politique de la duchesse de Berry, et écrivait le 25 octobre 1830 : « Charles X ne paraît pas être dans l'embarras d'argent ». Le nouveau régime improvise une politique extérieure qui ménage les puissances et se trouve bien embarrassée avec cette conquête.

LP est prêt à décider l’évacuation du corps expéditionnaire.

Ce choix lui est dicté par trois impératifs : ➢ les libéraux qui l’ont porté au pouvoir ont manifesté clairement leur opposition à toute tentative coloniale ; ➢ l’Angleterre à qui il ne peut rien refuser, manifeste son opposition et sa mauvaise humeur face à l’installation française au sud de la Méditerranée entre Gibraltar et Malte ; ➢ enfin l’éloignement d’une partie de l’armée pose des problèmes de sécurité aux frontières. Mais l’anglophobie aidant, le sentiment national de l’opinion publique s’oppose finalement à toute évacuation des troupes de l’Algérie.

Reste que l’opinion publique ne s’intéresse que par épisode à ce qui peut apparaître pour certains comme un Eldorado et pour un désert forcément stérile pour d’autres. 6 général d’empire ; lors de l’expédition de Saint-Domingue, il y achète le domaine de Toussaint l’Ouverture et y épouse la fille d’un riche planteur.

Au cours de son exil sous la Restauration, il mène plusieurs expériences agricoles, notamment à Mobile (Alabama).

Amnistié en 1820, il est aussi un patron, propriétaire de forges dans l’Aude.

Sa nomination peut apparaitre comme préparant le repli. Il est vrai que des civils arrivent par tous les moyens navigables : petite bourgeoisie de fonctionnaires, journalistes sans talent, publicistes, missionnaires, instituteurs, bourgeois déclassés ou ruinés, jeunes veuves en charge d’enfants… Clauzel a rapidement été remplacé par le général Berthezène (la conquête de l'Algérie est le terrain du retour à la vie militaire des anciens généraux de Napoléon).

Ce dernier s’indigne en 1831 des pratiques de ce microcosme : « On n’est venu ici que pour piller les fortunes publiques et particulières ; on a osé me proposer de faire ou de laisser faire ». Les années 1830-1834 sont, selon le mot de l’historien Charles-André Julien, celles de l’« incertitude ».

La France occupe militairement Alger, mais sans plan de colonisation.

Le début de la période est marqué par la succession de plusieurs commandants en chef en Algérie, dont le pouvoir de décision est d’autant plus grand qu’aucune ligne politique n’est affirmée.

Ils peuvent avoir des conceptions très différentes de leur mission militaire. Les Chambres demandent que l’on soit fixé, les lobbys pro-coloniaux exigent des garanties gouvernementales, qui seules permettraient selon eux aux colons de s’installer sur place.

Les débats tournent donc principalement autour de questions pratiques liées au siège d’Alger, au coût d’une armée régulière qui devrait rester sur le terrain, et, de manière plus générale, à la possibilité de cultiver les terres et aux relations avec les « indigènes »7. Dans ces des débats et dans la petite frange de l’opinion française intéressée par l’affaire d’Alger, on peut distinguer : • ceux que l’on qualifie alors d’anticolonistes, nous trouvons là comme nous l’avons dit les libéraux, soutiens historiques du nouveau régime et notamment des économistes libéraux comme Hippolyte Passy et Xavier de Sade8. • D’autre part on distingue les « colonistes », mais qui forment un groupe difficile à cerner politiquement.

Certains parmi eux se sont opposés à la conquête, comme Laborde ou La Rochefoucault Liancourt, s’ils sont dans la majorité, ils n’hésitent pas à incriminer le gouvernement dans cette affaire algérienne, en lui reprochant essentiellement sa passivité mais se prononcent finalement pour le maintien de la France à Alger. Un certain nombre de socialistes est aussi coloniste.

Le député fouriériste Baudet-Dulary s’empare de la tribune en août 1831 pour clamer « il faut coloniser Alger » même si son maître, Charles Fourier, pense alors qu’une colonie y serait « égorgée dès la première année ». En fait, les premiers socialistes se cherchent une position qui rompe à la fois avec le libéralisme anticoloniste et avec le colonisme royaliste, d’autant que la question sociale, qui se pose tragiquement sitôt trahies les promesses de cette révolution et confirmées la prolétarisation, la précarisation et la 7 Ibid. De la famille du divin marquis, Donatien de Sade… l’écrivain philosophe libertin embastillé auteur notamment de Les Cent Vingt Journées de Sodome ; Xavier, homme politique libéral fait partie des fondateurs de la Société française pour l'abolition de l'esclavage en décembre 1834. 8 paupérisation d’une masse croissante de Français.

D’ailleurs de toutes les questions du moment, d’Orient, d’Alger et d’ailleurs, c’est la question qui l’emporte.

9 L’Algérie inspire très tôt aux socialistes quantité de « plans » qui resteront dans les cartons.

Ils sont censés contribuer à résoudre radicalement la question sociale : en expérimentant et en vérifiant la supériorité de l’association sur le morcellement et la concurrence ; en créant de l’emploi pour les chômeurs et des ressources nouvelles pour l’industrie ; en facilitant et en encourageant la mise en valeur de la planète dont dépend l’abondance, dont dépend la paix sociale et mondiale. Au final quelle est la position de la France ? Dans les deux Chambres, une majorité se dégage qui refuse de trancher et se résigne : « après avoir commis la faute d’Alger, ne commettons pas celle de l’abandonner ».

La situation internationale troublée de l’hiver 1831 n’engage pas le gouvernement de LP à trancher.

Ce n’est qu’en mars qu’un débat véritable met aux prises les adversaires parlementaires.

Les colonistes, confortés par le retour de l’ancien commandant en chef Clauzel, lancent l’offensive : « dans dix ans, deux cents millions de denrées coloniales » enrichiront la métropole.

Le mythe de la plante miracle apparaît.

Lorsque l’ancien gouverneur du Sénégal Roger, demande au gouvernement l’assurance que « l’Algérie resterait une possession française » il est applaudi sur tous les bancs.

Mais le Maréchal Soult, ministre de la guerre se refuse dans sa réponse, à un engagement.... »

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