La mer Égée

« • La Crète est la plus grande île de Grèce.

D'une superficie de 8 258 km', peuplée de 550 000 hab., elle est hérissée de montagnes culminant au mont Ida, à 2 475 m.

HYDROLOGIE ET COURANTS • N'étant pas une mer fermée, la mer Égée présente les caractéristiques hydrologiques de la Méditerranée, avec de faibles précipitations et une forte évaporation, que ne compensent pas les apports fluviaux, mineurs dans le bassin égéen.

• La plupart des fleuves du bassin versant sont des cours d'eau au faible débit, considérablement réduit en été, singulièrement au sud, que ce soit dans le Péloponnèse ou sur le littoral turc.

• Les rivières les plus importantes ont leur embouchure dans le littoral nord de la mer Égée, comme I'AIIiakmon, plus long fleuve de Grèce (297 km) et I'Évros, qui sépare la Grèce de la Turquie et se jette dans le nord-est de la mer Égée après un cours de 204 km.

• Ce faible apport est compensé en partie par des eaux provenant de la mer Noire, par les Dordonelles.

La mer Égée est l'exécutoire, vers la Méditerranée, de l'excédent d'environ 200 km'/ an en eaux relativement fraîches produit par cette mer presque fermée, alimentée en eau douce par les fleuves russes et ukrainiens qui en réduisent la salinité.

• Entraînées par un puissant courant de surface nord-sud qui les poussent au-delà de la Crète, ces eaux n'influent guère sur le taux de salinité de la mer Égée, qui est de l'ordre de 35 à 39 %o comme le reste de la Méditerranée, qui ramène ses eaux salées en profondeur en un contre-courant sud-nord qui ne parvient pas jusqu'à la mer Noire.

• Les conditions météorologiques renforcent les flux nord-sud, sous la forme en été de vents constants du nord et du nord-est, les meltemia, tandis que de novembre à mai, c'est le vent doux soufflé du sud, le sirocco, qui s'impose.

L'indentation des côtes et les îles sont aussi à l'origine de vents locaux, qui conditionnent à leur tour des courants qui ne sont jamais réguliers du point de vue de la vitesse et de la direction.

La mer Égée est assujettie au régime des marées propre à la Méditerranée orientale, de 20 à 30 cm, avec des nuances locales.

• Comme le reste de la Méditerranée, la mer Égée est un milieu appauvri du fait de sa forte salinité à l'origine de carences en éléments nutritifs, très marquées dans sa partie sud.

Pourtant, les changements de la circulation des eaux profondes ces dernières années, à l'origine d'apports nutritifs, conjugués à l'influence de la mer Noire, moins salée, signale une tendance à la hausse des populations de poissons.

LE CLIMAT • Situé entre 41° et 36° de latitude Nord, le bassin de la mer Égée présente toutes les caractéristiques du climat méditerranéen, alternant des hivers doux et ensoleillés, et des étés longs, chauds et secs ; les précipitations sont concentrées au printemps et en automne, saisons courtes aux températures douces.

• La mer Ëgée est préservée de l'influence continentale par les montagnes élevées qui bordent tout son pourtour, culminant à 2 917 rn au mont Olympe, à l'ouest du golfe de Thessalonique.

Toutefois, son climat présente des contrastes entre le nord, plus frais et plus humide, et le sud, plus chaud et plus sec.

• En Macédoine et en Thrace, soumises aux vents froids hivernaux et à l'influence continentale des Balkans, les températures moyennes sont de 4 °C à 10 oc en hiver et de 25 oc en été.

• Dans les Cyclades, qui se distinguent par leur sécheresse, les températures dépassent 30 °C en été, comme sur le sud des littoraux turc et grec, avec toutefois des précipitations annuelles de 500 mm, sous forme parfois de neige en hiver, à Athènes par exemple.

• Les îles de la mer Ëgée orientale et du Dodécanèse, comme celles du nord, ont un climat nettement plus humide.

LA FLORE ET LA FAUNE La flore • Le bassin de la mer Égée présente une végétation typiquement méditerranéenne, transformée par l'activité de l'homme depuis la plus haute Antiquité, quand le littoral très découpé le permet.

• Les plaines cultivées ne se trouvent que sur le littoral nord-est.

Sur le reste du littoral, les vignes alternent avec les vergers et les oliveraies grimpant sur les hauteurs au-dessus de la mer.

• Les forêts littorales sont composées de chênes-lièges, de châtaigniers, de hêtres, et de pins d'Alep et parasols.

Les pins se retrouvent en fortes concentrations dans les îles du nord et de l'est de la mer Égée, plus humides, et de façon plus espacée dans les Cyclades, où une végétation de type maquis domine.

La Crète, qui est la région la plus chaude de Grèce, a conservé des vestiges de ces forêts.

•Sur tout le pourtour enfin, l'homme a planté des palmiers, eucalyptus et autres yuccas, essences exotiques qui se sont adaptées grâce à la douceur du climat.

La faune • La mer Égée abrite de larges populations de dauphins.

Le phoque moine, autrefois nombreux en Méditerranée est aujourd'hui une espèce protégée, dont quelques spécimens seulement subsistent à Alonissos dans les Sporades, seule réserve maritime de Grèce.

• Les eaux sont peuplées d'une grande variété de poissons, dont des murènes, des mérous et des thons.

• La vipère du Levant vit sur quelques îles des Cyclades, ainsi que l'agame - gros lézard noir -, et la fauvette de Rüppel en Crète et en Turquie.

LES RESSOURCES MINÉRALES • Les ressources minérales sont inégalement réparties dans le bassin de la mer Égée.

• Les ressources en hydrocarbures se concentrent en Grèce, qui extrait au nord de la mer Égée, à Kavala, une production annuelle de 460 000 t.

• La Grèce est aussi bien mieux dotée en lignite, qu'elle extrait notamment à Eubée, et dont elle est le 7' producteur mondial, que la Turquie, qui possède de petits gisements de lignite et de charbon entre mer Égée et mer Noire.

• Le littoral grec renferme aussi d'importants gisements de bauxite, nickel, magnésite, fer, plomb et zinc, la Turquie produisant du chrome dans la région bordière de la Méditerranée, à l'est des côtes égéennes.

LES DONNÉES HUMAINES LA POPULATION • Deux pays se partagent le bassin de la mer Égée : la Grèce compte près de 11 millions d'hab.

sur une superficie de 131900 km'.

La Turquie, d'une superficie de 774 820 km', dont un peu plus de 20 000 km' dans sa partie européenne, compte 71,3 millions d'hab.

• De tout temps tournés vers la mer Ëgée dont ils contrôlèrent jadis les deux rives, et dont ils occupent toujours la presque totalité des îles, les Grecs sont concentrés dans les zones littorales et dans les îles égéennes (11 %de la population).

On note les plus fortes densités de population en Attique, autour d'Athènes (plus de 200 hab./km').

et dans le nord-ouest, autour de Thessalonique (plus de 100 hab./km').

Sur le littoral turc, la densité est toujours supérieure à 50 hab./ km', pour dépasser 100 hab.fkm' dans la région d'Izmir.

La partie européenne de la Turquie est la plus peuplée, et rassemble 30 % de la population du pays sur moins de 3 % de son territoire.

• Le littoral égéen est marqué par de fortes concentrations urbaines.

La capitale grecque, Athènes, et son port, le Pirée, avec 3,1 millions d'hab., constituent le plus important ensemble urbain du bassin égéen.

Athènes rassemble le tiers des habitants de la Grèce et la moitié des emplois industriels.

Thessalonique, la deuxième ville de Grèce, compte 740 000 hab., tandis que la grande ville la plus méridionale, Héraklion, capitale de la Crète, en compte 128 000.

• En Turquie, Izmir, l'ancienne Smyrne, dépasse le million d'habitants.

LEs PORrS ET LE TRAFIC MARITIME • Héritière d'une longue tradition de navigation, qu'il s'agisse des lointaines expéditions magnifiées par la mythologie grecque ou de cabotage entre les îles, la mer Égée connaît un intense trafic maritime, dont la Grèce est l'un des principaux acteurs mondiaux.

Représentant plus de 10 % du tonnage mondial, la flotte marchande grecque se situe au 3 • rang mond ial.

La grande partie de son commerce passe par voie de mer, par les ports du Pirée, de Thessalonique et d'Héraklion.

• Sur la côte turque, le port d'Izmi r est, comme le Pirée, un important centre de raffinage pétrolier.

La mer Égée est en effet un axe majeur du trafic européen des hydrocarbures.

LE TOURISME • Dans la Méditerranée, premier espace touristique mondial, le bassin de la mer Égée occupe une place de premier plan, tant par la beauté des paysages que par la richesse du patrimoine.

• La Crète et la myriade dlles appartenant à la Grèce décuplent le potentiel touristique de ce pays , qui accueille 10 millions de touristes, lui assurant 5 milliards de dollars de recettes par an.

• Les îles égéennes, dont les Cyclades, avec la célèbre île de Mykonos, sont les plus visitées, rassemblant d'ailleurs près de 60% des installations hôtelières de Grèce.

Le littoral continental, du Péloponnèse à Thessalonique en passant par Athènes, n'est pas en reste, avec ses vestiges de temples helléniques et ses monastères byzantins, dont ceux du mont Athos, en Chalcidique.

• Ce tour isme balnéaire et culturel, concentré en été, s'est développé aussi sur les 2 800 km de la côte turque, constellée de vestiges de l'époque hellénique, comme à Éphèse et Pergame, et de villes balnéaires, surtout au sud, comme Bodrum et Kusodosi.

LA GÉOPOLITIQUE • Les tensions persistantes entre la Grèce et la Turquie relèvent d'une longue rivalité pour le contrôle de la mer Égée.

Mer grecque et berceau de la civilisation européenne qui s'est épanouie sur tout son pourtour dans l'Antiquité, la mer Égée fut éclipsée par Rome, qui réduisit Athènes au rang d'une ville provinciale.

Avec l'Empire romain d'Orient, qui établit sa capitale à Constantinople, sur les rives du Bosphore , la mer Égée ne joue plus qu'un rôle périphérique.

• La chute de Constantinople en 1453 en fait une mer turque, les chrétiens orthodoxes grecs du bassin égéen étant assujettis à leurs conquérants musulmans.

• L'accession de la Grèce à l'indépendance au XIX' siècle change la donne en mer Égée.

Mais au lendemain de la Première Guerre mondiale et de la défaite de l'Empire ottoman, le fondateur de la Turquie moderne, Mustapha Kemal Atatürk, empêche la Grèce d'occuper le rivage oriental de la mer Égée et en expulse les Grecs, au prix de l'incendie de Smyrne en 1921.

La mer Égée devient un espace partagé entre la Turquie et la Grèce, alliées de l'Occident et partenaires au sein de l'OTAN après la Seconde Guerre mondiale.

Exacerbées par l'occupation du nord de Chypre par les Turcs en 1974, les tensions ressurgissent à propos de la délimitation de leurs eaux territoriales, du partage des richesses des fonds �------------� marins et de la remilitarisation des îles LES DARDANELLES ·Appelé Hellespont dans l'Antiquité, Canakka/e Bogazi (détroit de Canakkale) en turc, ce couloir séparant la partie européenne et la partie asiatique de la Turquie, s'étire sur 68 km.

·D 'une largeur variant entre 1,3 km et 8 km, il fait communiquer la mer Égée avec la mer de Marmara, qui se rétrécit au détroit du Bosphore, traversant Istanbul, à l'entrée de la mer Noire.

• Dénonçant régulièrement le trafic maritime, de pétroliers russes notamment qui sature les Détroits, la Turquie compte sur l'oléoduc reliant la Caspienne au port turc méditerranéen de Ceyhan via la Géorgie (Bakou-Tbilissi­ Ceyhan -TBC), inauguré en mai 2005 pour désengorger les Détroits et donc la mer Égée.

orientales par Athènes.

La Grèce veut étendre sa mer territoriale de 6 à 12 milles marins, maximum autorisé par le droit maritime, autour de ses côtes et de ses Ties, faisant passer sa souveraineté de 35 à 64 % en mer Égée, ce qui est inacceptable pour la Turquie.

• Concernant le droit de propriété sur les richesses sous-marines et la délimitation du plateau continental, la Cour internationale de justice (Cil) a été saisie (1976} par la Grèce, mais les requêtes d'Athènes ont été rejetées.

Enfin, Athènes a reconnu avoir remilitarisé les îles orientales de la mer Égée depuis les années 1980, au grand dam de la Turquie.

La médiation de l'OTAN et des États-Unis évite une escalade du conflit, la Grèce s'étant par ailleurs rapprochée de la Turquie, appuyant même sa candidature à l'Union européenne.. »