Actualité politique et mythe historique dans les romans de Malraux

« E X P 0 S É S F C H E S La grandeur de l'Histoire La confrontation de l'homme à son destin n'est pas le fait de tous les individus.

Beaucoup acceptent leur sort, qu'il soit misérable ou confortable.

Seuls ceux qui le refusent ont contact avec !'Histoire.

Mais, pour y parvenir, il faut avoir le courage de la lucidité, prendre le risque de se confronter aux problèmes essentiels qui sont ceux de la vie et de la mort.

Malraux a souvent revendiqué sa filiation avec Pascal : chez lui, se confronter à !'Histoire équivaut à refuser ce que Pascal appelait le« di­ vertissement », les acceptations faciles de notre « condition » qui nous détournent des questions essentielles.

Pour Pascal, le dépassement du divertissement se fait par une recherche passionnée de Dieu.

Pour Malraux, agnostique, c'est !'Histoire qui peut arracher l'homme au néant de sa condition parce qu'elle seule peut lui permettre de se créer en se dépassant.

Cela explique que les personnages principaux de Malraux, comme ceux de la tragédie, évoluent dans l'atmosphère raréfiée de l'héroïsme et de la grandeur.

L'Histoire est inconcevable sans ces valeurs, parce que l'action ne peut y être que le fruit d'une volonté exclusive, entièrement tendue vers son but.

Malraux trouvera plus tard en De Gaulle et quelques autres grandes figures de son temps les repré­ sentants effectifs de sa conception .

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Ill -LA CONSTRUCTION D'UN MYTHE De l'aventure individuelle au symbole universel Les héros de Malraux sont en définitive nourris de l'imaginaire propre à !'écri­ vain, qui a le pouvoir de les métamorphoser en figures universelles.

Si les révolu­ tionnaires de Shanghaï peuvent servir d'illustration de la« condition humaine», c'est parce que leur destin a valeur d'exemple.

Nous avons oublié l'épisode qui sert de cadre au récit, Malraux a pu être déçu par le développement ultérieur de la révolution chinoise ; ce qui subsiste, ce sont les créatures de fiction du livre, qui posent dans l'urgence de l'action immédiate des problèmes qui concernent tous les hommes.

Il peut paraître invraisemblable que ces personnages puissent ainsi philo­ sopher en pleine action: la préoccupation de Malraux n'est pas le réalisme des si­ tuations, mais la vérité exemplaire des existences, l'universalité des questions qu'elles soulèvent.

Le poids des rêves L'Histoire pour Malraux est le lieu où s'expriment avant tout des rêves : «La civilisation c'est de mettre, le plus efficacement possible, la force des hommes au service de leurs rêves.

» Les révolutionnaires qui peuplent ses livres ne verront pas l'accomplissement de leur idéal, à supposer qu'il soit possible.

Ils sont souvent vaincus, ou menacés de mort prochaine, mais leur action trouve son sens dans la vision qui la soutient.

L'essentiel est dans la trace qu'ils laissent dans leur sillage et qui les élève au rang d'individus d'exception, de personnages mythiques.

Conclusion: S'il y a de la grandeur dans !'Histoire, c'est à la force des rêves de ceux qui ont refusé la fatalité qu'elle le doit.

Comme Jean Moulin, toutes proportions gardées, mais dans le registre de la fiction, ils accèdent au panthéon, là où !'Histoire entre dans la légende.

LES ROMANS DE MALRAUX :=JTI]. »