Aldous Huxley
Publié le 21/04/2012
Extrait du document
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Ce problème est celui de Huxley.
Sa vie affective, si importante en ce qu'elle le singularise
des
autres humains, lui apparaît absurde dès qu'il en vient à considérer le fondement physiolo
gique sur lequel dle repose.
Gumbril, à l'instar de maint personnage de Huxley, échappe à ce
dilemme en menant une vie extravagante et frénétique.
Et toute la vie de Huxley lui-même n'est
qu'un long et pénible effort en vue de combler le fossé qui sépare l'âme du corps.
Durant les années 1920, Huxley se lia d'amitié avec D.H.
Lawrence, dont les idées exer
cèrent sur lui une grande influence.
« L'homme est un, affirmait Lawrence, corps et âme,
et les éléments qui le composent ne sont point ennemis.
» Frappé par le génie de Lawrence,
Huxley s'acharna vainement à comprendre le point de vue de son ami.
Mais il finit par le rejeter
dans Point Counterpoint (1928).
La structure de ce roman, extrêmement complexe, est en partie
inspirée des Faux Monnayeurs d'André Gide.
S'efforçant d'imiter le dessin musical du contrepoint,
Huxley passe sans transition du présent au passé, d'une intrigue à l'autre, de manière à créer
chez le lecteur l'illusion d'assister à plusieurs aspects simultanés d'une même expérience.
Chaque
personnage est comme un instrument de l'orchestre, chacun toutefois exécutant son propre
thème « à la fois juste et faux, sans se soucier de l'ensemble ».
La structure décousue du roman
illustre la conception que se fait Huxley de la société moderne.
Chaque individu agit confor
mément à ses propres désirs, sans se préoccuper des autres.
Il n'est pas de croyances ou de devoirs
communs susceptibles de conserver à la société sa cohésion.
Après Point Counterpoint, Huxley publia successivement Brave New World (1932), Eyeless in
Gaza (1936) et After Many a Summer (1939).
Ces romans reflètent tous le dégoût de leur auteur
devant la corruption de notre société décadente.
Brave New World est peut-être l'œuvre la plus
célèbre d'Aldous Huxley.
Ce roman d'anticipation brosse le tableau utopique d'une civilisation
totalitaire et mécanisée.
Les hommes de ce monde nouveau mènent une vie confortable et pros
père, mais ils ont perdu tout ce qui faisait d'eux de véritables êtres humains.
Surgi du fond de sa
réserve mexicaine, le Sauvage se répand en invectives contre la stérilité de ce monde impersonnel.
«Mais votre confort, je n'en veux pas! s'écrie-t-il, ce que je veux, c'est Dieu, c'est la poésie, c'est
le vrai danger, c'est la liberté, c'est la bonté, c'est le péché.» Huxley, toutefois, ne nous permet
pas de nous rallier avec trop de complaisance aux vues du Sauvage.
Mustapha Mond, se faisant
l'avocat du « meilleur des mondes », rétorque au Sauvage qu'il réclame le droit de souffrir de la
maladie, de mourir de faim, d'éprouver la peur, de succomber à des tentations dégradantes.
S'il refuse la mécanisation de la société, l'homme se trouvera à nouveau en butte aux souffrances
décrites par Huxley dans ses précédents ouvrages.
Dans la préface qu'il a publiée en 1946 pour Brave New World, Huxley affirme que, s'il lui
fallait récrire son roman, il y introduirait une nouvelle alternative pour l'espèce humaine : une
petite collectivité continuerait à s'efforcer d'atteindre « la connaissance unitive du Tao ou Logos
immanent, de la Divinité transcendante ou brahmane ».
Le mysticisme religieux qui s'était mani
festé chez lui durant les années 1930 et 1940 est évoqué dans des œuvres telles que The Perennial
Philosophy ( 1 945), The Deuils of Loudun ( 1952), The Doors of Perception ( 1 954) et Heaven and HeU
(1956).
Le genre de mysticisme qui attire Huxley est celui pour lequel Dieu n'est pas une per
sonne, mais un Esprit universel dont nos individualités éphémères sont l'expression et dans lequel
elles sont appelées en dernier lieu à se confondre.
L'œuvre romanesque de Huxley dénonce aujour
d'hui encore, à mainte reprise et avec violence, la société moderne; et, dans Ape and Essence ( 1 948),
il dépeint les effroyables excès auxquels donnerait lieu une guerre atomique.
Son roman le plus
récent, Island (1962), est une peinture de la société idéale telle qu'il la conçoit- société
dans laquelle les êtres humains peuvent se réaliser pleinement dans un milieu intelligemment
organisé.
Mais à la fin de l'ouvrage, le monde extérieur intervient, détruisant cette utopie.
Bien
que ses idées aient évolué avec le siècle, Huxley n'a jamais nourri beaucoup d'espoir en ce qui
concerne l'avenir de la civilisation.
CHARLES B.
COX
Hull (Angleterre).
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