AMOUR ET MARIAGE Chez MARIVAUX

Si donc l'on veut lier le mariage à l'amour, il faut faire du mariage une aventure individuelle, libérée de toute contrainte sociale. Le mariage devient paradoxalement un acte d'anti­conformisme : le jeune Dorante pro­pose sa main à celle qu'il croit être une domestique, et la « mésalliance signe une rébellion.

Les difficultés que les jeunes gens rencontrent pour conclure leur mariage sont autant d'obstacles néces­saires à la maturation de leur sentiment et de leur vertu. L'attente qui se déve­loppe aiguise leur désir aussi bien que leur conscience. Leur amour est ainsi affermi, il se défait des contraintes sociales au su et au vu de tous. Il mar­que l'affranchissement de l'âme. Le mariage n'est plus une institution sociale, il est l'aveu formel et public d'un amour qui a su mesurer ses capa­cités. La décision s'est prise après réflexion, il n'y a plus cette précipita­tion qui entraîne des déceptions. L'amour vertueux qui a su démêler le mérite derrière les apparences fonde un mariage qui peut faire fi des usages, et réciproquement nous voyons com­ment le mariage a pu fonder un tel amour.