Anciens et des Modernes (querelle des)
Publié le 13/02/2019
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Anciens et des Modernes (querelle des). C'est, au sens strict, un débat d'idées de la fin du xviie s. sur les mérites respectifs des écrivains de l'Antiquité et de ceux du siècle de Louis XIV. La discussion sur l'attitude à adopter à l'égard des modèles antiques est l'héritière des polémiques rhétoriques qui agitaient les cercles humanistes du XVIe S. Elle prend forme dans le cercle d'Habert de Mont-mort et de l’abbé de Marolles {Traité du poème épique, 1662) et se fonde, entre autres, sur l'autorité de Descartes : « Il n'y a pas lieu de s'incliner devant les Anciens à cause de leur antiquité, c'est nous plutôt qui devons être appelés les Anciens. Le monde est plus vieux maintenant qu'autrefois et nous avons une plus grande expérience des choses. » Descartes reprenait ainsi, en l'inversant, la célèbre formule de Bernard de Chartres (« Nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants. Nous voyons ainsi davantage et plus loin qu'eux, non parce que notre vue est plus aiguë ou notre taille plus haute, mais parce qu’ils nous portent en l’air et nous élèvent de toute leur hauteur gigantesque »), qui, au début du xiie s., présida à la redécouverte de Virgile et de Platon. En 1664, Louis Le Laboureur dans la préface de son épopée de Charlemagne prend parti en faveur des sujets chrétiens (qui sont la modernité par rapport aux thèmes païens), avant d'affirmer les Avantages de la langue française sur la langue latine (1667). La querelle proprement dite éclate en 1674, quand Boileau réplique, dans son Art poétique (III, 193-204), à Desmarets de Saint-Sorlin qui venait de refondre son Clovis ou la France chrétienne (1657) et qui défendait son entreprise dans le Traité pour juger des poètes grecs, latins et français (1673), puis dans sa Défense du poème héroïque (1674) qui exalte l'épopée nationale mêlée au merveilleux chrétien. Dès la réception de Daniel Huet à l'Académie française (13 août 1673), Charles Perrault avait prononcé un discours, dont il reprendra les thèses en 1687 dans le Siècle de Louis le Grand : il compare la grandeur littéraire du siècle de Louis XIV à celle du siècle d'Auguste, et s'attire la critique nuancée de La Fontaine (Épître à Huet, 1687). Fontenelle (Digression sur les Anciens et les Modernes, 1688), le Mercure galant et le public féminin (qui pense évidemment jouer un rôle plus grand que dans l'Antiquité) s'engagent du côté des Modernes à la suite de Perrault
«
dite
éclate en 1674, quand Boileau
réplique, dans son Art poétique (III,
193-204), à Desmarets de Saint-Sorlin
qui venait de refondre son Clovis ou la
France chrétienne (1657) et qui défen
dait son entreprise dans le Traité pour
juger des poètes grecs, latins et français
(1673), puis dans sa Défense du poème
Mrofque (1674) qui exalte l'épopée
nationale mêlée au merveilleux chrétien.
Dés la réception de Daniel Huet à
l'Académie française (13 aoüt 1673),
Charles Perrault avait prononcé un dis
cours, dont il reprendra les thèses en
1687 dans le Siècle de Louis le Grand:
il compare la grandeur littéraire du
siècle de Louis XIV à celle du siècle
d'Auguste, et s'attire la critique nuancée
de La Fontaine (Épftre à Huet, 1687).
Fontenelle (Digression sur les Anciens et
les Modernes, 1688), le Mercure galant
et le public féminin (qui pense évidem
ment jouer un rôle plus grand que dans
l'Antiquité) s'engagent du cOté des
Modernes à la suite de Perrault (Parallè
les des Anciens et des Modernes, 1688-
1695), qui adopte une attitude de plus
en plus passionnée.
La querelle s'apaise
cependant, grâce au Grand Arnauld.
Elle rebondit à l'extrême fin du règne
de Louis XIV et sous la Régence, autour
de la figure d'Homère.
Deux traducteurs
de l'Iliade s'opposèrent : Mm• Dacier, qui
fit de la préface de sa traduction un
plaidoyer pour la poésie et la civilisation
grecques, et Houdar de La Motte, qui
accompagna son adaptation en vers de
l' ll i
Cl de d'un Discours sur Homère, criti·
que envers un auteur archaïque et iné
gal.
La polémique se prolongea avec Des
causes de la corruption du goût {1714)
de Mme Dacier, apologie de l'Antiquité et
de l'érudition, et les Réflexions sur la
critique de Houdar, défense de la moder ·
ni té.
Malgré l'intervention de Fénelon en
faveur des Anciens, mais en vue d'une
conciliation (Lettre à l'Académie, 1714-
1716), la querelle s'envenima avec les
libelles de Themiseuil de Saint-Hyacin
the, le Chef-d'œuvre d'un inconnu, texte
apocryphe édité parodiquement selon les
méthodes érudites, et la Déification du
D' Aristarchus Masso.
Deux partis se
reconstituèrent : d'un côté, les défen- seurs
de la raison moderne et de l'esprit
du temps, hommes des salons et des
cafés, ouvens aux innovations économi
ques, de 1 'autre, les érudits ou savants.
On note dans le premier camp l'abbé de
Pons, Cartaud de la Villatte et Terrasson,
dans le second, le satiriste Gacon et le
P.
Hardouin.
Une polémique semblable eut lieu en
Angleterre : elle mit aux prises la Royal
Society, trés favorable aux Modernes, sir
William Temple, William Wotton et
Swift qui, dans sa Bataille des livres
(1704), défendit Temple, panisan des
Anciens.
L'ensemble de la querelle pose le
problème du progrès dans les arts et les
sciences, et aussi celui du progrès
moral : c'est bien ce que si
gnifie la
traduction par Boileau, en 1674, du
Traité du Sublime, explicitée par ses
Réflexions critiques sur quelques pas·
sages de Longin en 1694.
Si le merve il·
leux chrétien est au cœur du débat, c'est
que son emploi suppose un choix qui
engage toute la vie et tout spécialement
la place de la religion dans cette vie.
Les
plus rigoureux des théologiens et des
rhétoriciens gallicans (Pibrac) et jansé
nistes (Saint-Cyran) ont toujours con
damné le recours aux thèmes et aux
techniques de discours antérieurs à la
venue du Christ.
D'où la position para
doxale d'un Boileau chrétien qui défend
les sujets antiques, c'est-à-dire palens.
Paradoxe aussi que la référence majeure
au (< siècle d'Auguste » qui n'est nulle
ment l'origine, mais la maturité de la
langue latine.
Pour les partisans des
Anciens, l'âge d'or est derrière nous :
telle est la clé du pessimisme conserva
teur.
Pour les Modernes, la civilisation
apporte avec elle un espoir, tout en
révélant la nature historique de 1 'an et
la relativité du beau.
L'originalité de la
polémique tient dans le fait que tous les
gran ds écrivains modernes ont pris le
parti des Anciens.
On trouve une explica
tion à ce nouveau paradoxe en replaçant
la querelle dans son contexte historique
et culturel.
Le débat littéTaire recouvre,
en effet, une opposition politique- dont
témoignent les controverses sur la révo
l u ti on d'Angleterre -entre ceux qui.
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