Devoir de Philosophie

Chanson de Marie Noël

Publié le 29/03/2011

Extrait du document

   Quand il est entré dans mon logis clos, J'ourlais un drap lourd près de la fenêtre, L'hiver dans les doigts, l'ombre sur le dos... Sais-je depuis quand j'étais là sans être?  Et je cousais, je cousais, je cousais...    — Mon cœur, qu'est-ce que tu faisais ?    II m'a demandé des outils à nous. Mes pieds ont couru, si vifs dans la salle, Qu'ils semblaient — si gais, si légers, si doux — Deux petits oiseaux caressant la dalle.    De-ci, de-là, j'allais, j'allais...    — Mon cœur, qu'est-ce que tu voulais ?    II m'a demandé du beurre, du pain,    — Ma main en l'ouvrant caressait la huche — Du cidre nouveau, j'allais, et ma main Caressait les bols, la table, la cruche.    Deux fois, dix fois, vingt fois je les touchais    — Mon cœur, qu'est-ce que tu cherchais ?    Il m'a fait sur tout trente-six pourquois. J'ai parlé de tout, des poules, des chèvres, Du froid et du chaud, des gens et ma voix En sortant de moi caressait mes lèvres...    Et je causais, je causais, je causais...    — Mon cœur qu'est-ce que tu disais ?    Quand il est parti, pour finir l'ourlet Que j'avais laissé, je me suis assise... L'aiguille chantait, l'aiguille volait, Mes doigts caressaient notre toile bise...    Et je cousais, je cousais, je cousais...    — Mon cœur, qu'est-ce que tu faisais ?    Marie Noël.    SUJET    Votre commentaire s'attachera à préciser comment une sensibilité s'exprime sous la forme d'une chanson et à travers l'évocation d'un univers familier.  PLAN    Introduction    ■ Qui est Marie Noël?    ■ Discrétion, retenue, crainte et désir.    ■ Son inspiration: les chansons populaires.    ■ Présentation des thèmes de Chanson.    Ire partie : Les 1res émotions nées de la rencontre avec l'aimé, scandées légèrement par le rythme discret du chant.    ■ « Une chanteuse «.    ■ Cf. Les Chansons de toile du Moyen Age.    ■ Émoi d'un être neuf devant un sentiment neuf, ici.    ■ De l'univers terne et banal à la joie éblouie.    ■ Souplesse des quatrains, simplicité des mots, le refrain.    IIe Partie : La personnalité secrète et attachante de la poétesse entrevue au fil du poème.    ■ Elle a horreur des exhibitions et effusions du Moi.    ■ On entrevoit ici cependant :    — un type d'existence,    — une personnalité.    ■ Étouffée par le milieu familial et provincial.    ■ Mais « abîme « d'amour.    ■ « Imaginative éprise d'absolu. «    ■ Intransigeante, mais réservée, timide, sauvage.    ■ Elle n'a pas su exprimer ni transmettre son amour.    Conclusion   

« IIe Partie : La personnalité secrète et attachante de la poétesse entrevue au fil du poème. Elle a horreur des exhibitions et effusions du Moi. On entrevoit ici cependant : — un type d'existence, — une personnalité. Étouffée par le milieu familial et provincial. Mais « abîme » d'amour. « Imaginative éprise d'absolu.

» Intransigeante, mais réservée, timide, sauvage. Elle n'a pas su exprimer ni transmettre son amour. Conclusion Poème tendu vers un échange, vers un dialogue. Mais le sentiment demeure unilatéral. A travers la chanson, elle rejoint une émotion universelle. Elle y rencontre rythme, silence musical, poésie. DEVOIR RÉDIGÉ « Chanteuse d'amour et d'eau claire qui n'a [...] guère puisé la Poésie qu'à des sources parfois trop mélancoliques,des fontaines trop rêveuses, des puits trop profonds », voici comment se définit elle-même Marie Noël à la fin de savie.

Née (1883) et morte (1967) à Auxerre, elle était pourtant bourguignonne, de cette province riche etvigoureuse, comme sa « géniale payse, la grande Colette ».

Mais elle n'en a pas la solide vitalité, l'ardeur à mordredans la vie sous tous ses aspects.

Très fragile et même malade, puisqu'elle ne put suivre les classes que de façonintermittente, elle n'a rien à voir avec la brillance de (d'escadron des poétesses » qui faisait alors « grand bruit » (Saint-John Perse) et que l'on nommera les Amazones: Lucie Delarue-Mardrus, Renée Vivien, Gérard d'Houville, CécileSauvage et la tempétueuse mais glorieuse Anna de Noailles.

Non.

Tout en elle, au contraire, est discrétion, retenue,crainte, qui n'exclut pas d'ailleurs désir, tout est émoi stupéfait devant ce don insolite, celui de la poésie.

Car dèsl'enfance, où elle module et rythme ses phrases instinctivement, elle se laisse pénétrer par le mouvement allègre oudolent de la chanson populaire, avide d'entendre tel chant étrange, tel air de vignerons ou de Scieurs de long,complaintes du Rossignolet ou du Soldat par amour.

Ce sont ces structures, ces couplets et refrains qui vont nourrirses propres poèmes dont les titres sont si souvent « berceuse » ou « ronde » ou « noël » ou simplement « chanson», « chant ».

C'est une de ces cantilènes que la Chanson : « Quand il est entré dans mon logis clos...

» chansond'amour émue et frissonnante, où tout est suggéré, murmuré, laissé à deviner.

La personnalité secrète etattachante de la poétesse se laisse entrevoir (2e thème) à travers ces premières émotions nées de la rencontreavec l'aimé et que scande si discrètement le rythme gracieux, tendre, léger, du chant (1er thème). * * * « Je n'ai jamais été qu'une chanteuse, conduite par un rythme intérieur », témoigne Marie Noël, «...

j'étais possédéed'un rythme; les mots ne venaient pas.

Ils ne me sont jamais venus.

C'est le rythme qui me prend.

Ce sont descoups de sentiment qui me font trouver les mots.

» Ce qui est en effet perçu à première lecture (et une lecture àhaute voix s'imposerait), c'est le chant, on dirait presque la danse du poème.

Le décasyllabe était déjà un des versfréquemment utilisé par la chanson médiévale, ces chansons de toile dont ce texte semble l'héritier direct (mais plussans doute à travers siècles et traditions que par recherches livresques).

Œuvres anonymes du XIIIe siècle, ellessont de brefs récits où l'on parle d'amour, mais pas de ces hommages courtois et romanesques — de même époqued'ailleurs.

Il s'agit ordinairement de l'élan spontané d'une âme naïve de jeune fille ou des plaintes d'une jeune femmemariée contre son gré.

C'est le 1er cas qui se présente ici sous la plume de Marie Noël.

Car l'émoi qui court destrophe en strophe est celui d'un être neuf devant un sentiment neuf, à la fois inconnu et rêvé, prévu enimagination.

L'aimé passe dans la maison, assez étranger d'ailleurs, un peu comme à l'extérieur de l'événementsentimental qu'il provoque.

Lui, il demande et se renseigne, simplement.

« Il m'a demandé » (répété 2 fois), « il m'afait...

36 pourquois.

» L'univers familier où évolue la jeune fille se fait alors complice de l'amour naissant; car toutedemande lui devient prétexte à servir — ardemment — l'homme, ce « il » dont jamais le nom n'est prononcé et quipas une fois ne se doute du bonheur tremblant enclos dans les « petits soins » dont il est l'objet.

Les demandessont des plus simples, rattachées aux besoins les plus courants: « des outils à nous » (la formule est populaire ou. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles