COPI : sa vie et son oeuvre
Publié le 22/11/2018
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COPI, pseudonyme de Raul Damonte (1939-1987). Né à Buenos Aires, Copi arrive en 1962 à Paris, où il débute comme dessinateur: à partir de 1964, il met en scène dans le Nouvel Observateur la célèbre « Femme assise » dont le dialogue troué de silence avec un poulet, un escargot, ou ce Rat qui deviendra l’animal emblématique de toute l'œuvre, inaugure une sorte de théâtre minimal.
Après la Journée d'une rêveuse (1968), dont la liberté d’invention et la fantaisie verbale ont pu rappeler le « théâtre de l’absurde » des années 50, Copi aborde avec Eva Peron (1969) et l'Homosexuel ou la Difficulté de s'exprimer (1971) le thème obsessionnel de la confusion, de l’inversion et de l’échange des sexes. Comme l’ambiguïté du travesti, le jeu de miroirs de la gémellité place tout son théâtre sous le signe de la perte et de la quête de l’identité : le même mécanisme vertigineux entraîne les Quatre Jumelles (1973) à échanger frénétiquement leurs rôles et à mourir sans cesse pour renaître aussitôt, et projette comédiens, auteur et metteur en scène de la Nuit de Mme Lucienne (1985), répétant la répétition d’une répétition, à travers une série de pièces emboîtées les unes dans les autres. Ces personnages qui ne savent pas qui ils sont tournoient sans fin dans un monde de l’apparence et du jeu, du déguisement et du faux-semblant, dont la théâtralité est exacerbée par le délire contrôlé des metteurs en scène « argentins » (Lavelli, Arias, Savary), et par le talent d’acteur-prestidigitateur de Copi lui-même, qui interprète seul les six personnages du Frigo (1983).
«
Eva
Peron (1969) et l'Homosexuel ou la Difficulté de
s 'exprimer ( 1971) Je thème obsessionnel de la confusion,
de l'inversion et de l'échange des sexes.
Comme l'ambi
guïté du travesti, le jeu de miroirs de la gémellité place
tout son théâtre sous le signe de la perte et de la quête
de l'identité: le même mécanisme vertigineux entraîne
l es Quatre Jumelles (1973) à échanger frénétiquement
leurs rôles et à mourir sans cesse pour renaître aussitôt,
et projette comédiens, auteur et metteur en scène de la
Nuit de M"'' Lucienne (1985), répétant la répétition d'une
répétition, à travers une série de pièces emboîtées les
unes dans les autres.
Ces personnages qui ne savent pas
qui ils sont tournoient sans fin dans un monde de l' appa
rence et du jeu, du déguisement et du faux-semblant,
dont la théâtralité est exacerbée par le délire contrôlé des
metteurs en scène « argentins >> (Lavelli, Arias, Savary),
et par le talent d'acteur-prestidigitateur de Copi lui
même, qui interprète seul les six personnages du Frigo
( 1 983).
On retrouve cette théâtralité dans les romans et les
nouvelles, dont les héros, emportés dans le tourbillon de
situations délirantes empruntées à l'arsenal du mélo
drame (reconnaissances et coïncidences invraisembla
bles), voire du Grand Guignol (meurtres en série, ampu
tations, décap•tations et bains de sang), ne meurent,
comme sur scène, que pour ressusciter.
Les personnages
mythiques de /'Uruguayen ( 1973), papes et présidents
fantaisistes situés dans un Montevideo imaginaire,
recouvert d'un désert de sable sur lequel le narrateur
peut redessiner le monde, laissent vite la place aux mar
ginaux et travestis plus ordinaires du Paris contemporain
(le Bal des folles, 1976; Lt1 vie est 1111 tango, 1979).
Mais cet apparent réalisme rend d'autant plus sensible Je
dérèglement progressif de la mécanique du récit : les
lieux les plus familiers basculent dans le fantastique,
dynamités au sens propre du terme par les explosions qui
déracinent 1 'île de la Cité, transformée en nef des rats
qui dérive vers la mer (la Cité des rats, 1979), ou volati
lisent la Terre, tandis que s'envole vers une Lune paradi
siaque, royaume des homosexuels, la Nef des Amazones
venues «du fond des âges, avant que l'homme devienne
un homme et que la femme devienne une femme » (la
Guerre des pédés, 1982).
Cet univers peuplé de travestis mythologiques, hanté
par la marginalité et la transgression sous toutes ses
formes, n'est pas comme celui de Genet, sublimé, sacra
lisé ou tragifié par la transcendance de la forme.
Metteur
en scène du fa:t divers, Copi puise au contraire délibéré
ment dans les stéréotypes des genres « mineurs » (feuil
leton, policier de série B, science-fiction), mais pour les
truquer, et tirer de leur juxtaposition et de leur accumula
tion des effet :; d'ironie et de dérision; de même, une
grande partie de son humour naît de la désinvolture per
verse avec laquelle il manie une langue minimale, fami-
1 ière, voire n:lâchée, mais légèrement décalée, parce
qu'il ia traite ü la manière d'un idiome étranger, comme
s' i 1 n'était, ainsi qu' i 1 1 'affirme dans le prologue de la
Cité des rats, que l'approximatif traducteur du « langage
des rats ».
A.
SATGÉ.
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