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Don Juan et la religion

Publié le 22/02/2012

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Construite sur la figure du Don Juan, mythe moderne de l'amour, la pièce ne nous livre qu'au cinquième acte la véritable intention de Molière : poursuivre, après Tartuffe, la dénonciation d'une noblesse dépravée si sûre d'elle-même qu'elle n'hésite pas à défier Dieu. Les actes I, II, III â IV ne sont qu'une préparation de ce fameux cinquième acte qui provoqua sûrement le retrait de l'affiche d'une pièce visée par les dévots. Peu importe que Molière soit croyant, ou qu'il ait quelque sympathie pour l'irréligion de son héros, l'essentiel réside dans la dénonciation de l'hypocrisie et de la fausse dévotion. En ce sens, la progression de la pièce est plus logique qu'on ne le croit : Don Juan qui, au début, se contente de faire l'éloge de l'infidélité, acte encore pardonnable peut-être, le succès du mythe en témoigne, devient très vite un blasphémateur. Après la révolte contre les humains, qu'il domine, Don Juan, par orgueil, accepte d'occuper un terrain de plus en plus dangereux, celui de la révolte contre Dieu lui-même.
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« pure politique, un stratagème utile, une grimace nécessaire » (ACTE v, scène 2).

Cerné de toutes parts, Don Juan choisit, en l'espace d'une nuit, le chemin de l'hypocrisie et de la fausse dévotion, allant ainsi jusqu'au bout de sondestin tragique.

Sganarelle parle du comble des abominations: « Il ne vous manque que d'être Le « comble hypocrite pour vous achever de tout point, et voilà le comble des abominations » (ACTE v, scène 2). Le dénouement tragique est proche : annoncé au début de la pièce, les libertins ne font jamais une bonne fin (Sganarelle, ACTE 1, scène 2), il est confirmé ici, vous serez damné à tous les diables (Sganarelle, ACTE v, scène 2).

Il fallait atteindre ce point définitif de la bassesse morale pour que Don Juan subisse les foudres du Dieu vengeur.Au moment où Don Juan va l'emporter sur les humains, le Ciel se doit d'intervenir. Molière reste ainsi fidèle au projet de Tartuffe, même si Don Juan est plus un hypocrite athée qu'un faux dévôt.

L'interdiction de Tartuffe lui a montré en effet qu'il n'existe pas de justice humaine, même si le Roi l'a soutenu dans sa lutte.

Molière en appelle clairement alors à la justice divine. Le dénouement allégorique Lorsqu'il choisit le chemin de l'hypocrisie, Don Juan s'interroge surtout sur son pouvoir sur les hommes : « une grimace nécessaire...

pour ménager un père dont j'ai besoin, et me mettre à couvert, du côté des hommes, decent fâcheuses aventures qui pourraient m'arriver.

» (ACTE V, scène 2). Le « du côté des hommes » est important, sa philosophie matérialiste mécaniste athée lui interdit de croire qu'il existe un autre monde, malgré des phrases comme « Va, va, c'est une affaire entre le Ciel et moi » (ACTE I, scène 2) ou des accès de colère, d'impatience, des formules évasives, des ricanements, lorsqu'il est question de Dieu.

Don Juan déclarant : « Je crois que deux et deux sont quatre » (ACTE III, scène 1), Sganarelle énonce en fait la seule religion de son maître : « votre religion.., est donc l'arithmétique ? » (ACTE III, scène 1). L'argument du Ciel Les analyses se sont multipliées sur la religion de Don Juan, avec toutes les hypothèses possibles : DonJuan croit en Dieu, Don Juan ne croit pas, Don Juan s'interroge sur l'existence de Dieu, Don Juan a besoinde l'existence de Dieu, seul adversaire à sa mesure.

Peu importe, ce n'est pas l'essentiel, au même titrequ'il est inutile de s'interroger sur la portée religieuse de la pièce. L'enjeu est beaucoup plus simple : Molière vise une noblesse dépravée si sûre d'elle-même qu'elle necraint pas la justice des hommes.

L'interdiction de Tartuffe montre qu'il ne suffit pas de dénoncer le mal pour corriger la société.

Le Roi, qui soutient pourtant Molière, reste prisonnier de sa politique à l'égard dela noblesse et du clergé. Molière avance alors l'argument du Ciel : il existe une justice divine contre l'hypocrisie et la faussedévotion. La mise en place de l'argument du Ciel La comédie de dénonciation traditionnelle ne suffit plus, Molière fait appel au merveilleux : la statue duCommandeur, le spectre.

L'arrivée de la statue du Commandeur ponctue la pièce jusqu'au dénouementfinal : acte I, scène 2 : évocation du Commandeur tué par Don Juan, mais la pièce s'inscrit toujours dans leregistre du terrestre.

Don Juan déclare : « Et pourquoi craindre ? Ne l'ai-je pas bien tué ?, J'ai eu ma grâce de cette affaire ».

Sganarelle ajoute : « ...

cette grâce n'éteint pas peut-être le ressentiment des parents et des amis ». acte III, scène 5: première rencontre avec la statue du Commandeur.

La pièce s'inscrit dans le registre dumerveilleux.acte IV, scène 6 : la visite de la statue du Commandeur. • acte V, scène 6 (dernière scène de la pièce) : le dénouement tragique, la statue du Commandeur précipite Don Juan dans les Enfers. Il est évident que Don Juan risque de l'emporter sur les humains, puisqu'il accepte de basculer dans la bassessemorale la plus totale.

La pièce décrit ce parcours vers le point suprême de l'abomination.

Jusqu'au dénouement final,le merveilleux permet de multiplier les avertissements venus directement du Ciel.

Les autres avertissements ont étédonnés par des humains qui ne peuvent convaincre Don Juan.

Pourtant, face au merveilleux, Don Juan resteincrédule : acte IV, scène 1 : « nous pouvons avoir été trompés par un faux jour ». acte V, scène 2: « Il y a bien quelque chose là dedans que je ne comprends pas ; mais quoi que ce puisse être, cela n'est pas capable ni de convaincre mon esprit, ni d'ébranler mon âme ».acte V, scène 5: en face du spectre, dernier avertissement envoyé par le Ciel, Don Juan s'écrie « je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit ».. »

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