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FARGUE Léon-Paul : sa vie et son oeuvre

Publié le 06/12/2018

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FARGUE Léon-Paul (1876-1947). Poète et chroniqueur français, Fargue fut une véritable figure littéraire, bien représentative de son époque, combinant une personnalité qui ne manquait pas de pittoresque et une conception de la poésie originale en cette période de transition.

 

Un fantaisiste tranquille

 

L’existence de Léon-Paul Fargue se place, dès l’abord, sous le signe de la marginalité. Il naît en effet à Paris, le 6 mars 1876, au foyer d’un couple illégitime et assez disparate : sa mère, couturière, a gardé de son Berry natal et de ses origines paysannes le goût du concret; son père, qui ne le reconnaîtra que seize ans plus tard, est diplômé de l’École centrale et dirige, sans beaucoup d’intérêt ni de réalisme, une fabrique de céramique. L’enfant, qui assume mal cette situation, se réfugie dans des rêves, alimentés par la lecture de récits de voyages, et se passionne pour l’histoire naturelle (il élève un rat blanc, des vers à soie et visite assidûment le Jardin des Plantes). Sa scolarité se poursuit sans difficultés notables au lycée Condorcet où il suit l’enseignement de Mallarmé, puis à Janson-de-Sailly où il chahute le critique Émile Faguet. Fargue, qui hésite encore entre l’écriture et la peinture, choisit finalement d’entrer en khâgne à Henri-IV en 1892, où il aura comme condisciples Jarry et Thibaudet. Mais, incapable de se plier à une discipline intellectuelle stricte, il délaisse ses études pour s’absorber dans des lectures encyclopédiques, écrire, peindre ou jouer du piano...

 

De ce dilettantisme devaient émerger un sens aigu de l’observation critique et un humour particulièrement corrosif. Dans le même temps, il commence à se mêler au monde littéraire parisien, en pleine effervescence à cette époque : il assiste aux « mardis » de Mallarmé, publie des articles critiques dans l'Art littéraire, se lie à des écrivains (Claudel, Valéry, H. de Régnier, M. Schwob). Vers 1895, il écrit Tancrède (paru en 1911), sorte de roman lyrique à mi-chemin entre le récit et le poème. Étonnamment réceptif aux courants de son temps, Fargue mène alors une vie de noctambule, et joue un rôle d'animateur actif dans les milieux artistiques. Avec ses amis des « Apaches d'Auteuil », il participe notamment au lancement des Ballets russes de Diaghilev et défend les peintres impressionnistes (Van Gogh, Bonnard, Cézanne). Sa production est intense, mais il refuse le plus souvent de publier ses écrits, rature, déchire, dans un souci maladif de perfection inaccessible. Son esprit caustique, sa drôlerie lui valent des invitations à dîner dans le monde parisien; il arrive dans son légendaire taxi, régulièrement avec deux heures de retard, se créant bien vite une solide réputation de bohème.

 

La mort de son père, qu’il vit comme un drame, confère à ses lextes un caractère de gravité dont témoignent Poèmes (1905) et Pour la musique (1912). Il fait cependant partie des « Patassons », groupe d’écrivains fantaisistes qui comprend aussi Valéry Larbaud. Après la Grande Guerre à laquelle, réformé, il n'a pas pris part, il s’intéresse un temps aux méthodes des surréalistes, mais, trop classique et trop individualiste, ne peut s’intégrer au groupe. Au demeurant, sa célébrité lui fait occuper un rôle plus officiel dans le monde littéraire; il accepte de diriger avec Larbaud et Valéry la revue Commerce (1924), est décoré de la Légion d'honneur, fait l’objet d'un numéro d’hommage de Feuilles Libres en 1927, reçoit le prix de la Renaissance, fait partie de l’Académie Mallarmé, tout en poursuivant à un rythme plus rapide la publication de ses écrits : Banalité, Vul-turne, Epaisseurs (1928), Sous la lampe, les Ludions (1930), D’après Paris (1932), le Piéton de Paris (1939), Haute Solitude (1941). La maladie — il est frappé d’hémiplégie en 1943 à la terrasse d’un café — n’interrompt pas cette suite de brillants succès : entouré par sa femme, le peintre Chériane, qu’il avait épousée en 1935, et de ses amis qu’il reçoit chaque dimanche dans sa chambre, il connaît jusqu’à sa mort en 1947 une période d’activité intense, poursuivant notamment la rédaction de ses souvenirs (Refuge, 1942; la Lanterne magique, 1944; Méandres, 1946; Portraits de famille, 1947).

 

Mais Fargue n’occupe pas seulement une place de « personnage littéraire », de découvreur et de coordonnateur des différents courants de son temps; il a également élaboré une œuvre qui, par ses aspects multiples et ses

 

thématiques, reflète fidèlement ses préoccupations personnelles.

 

La prolifération du réel

 

A beaucoup d’égards, la poésie de Fargue se constitue comme une réaction devant la diversité angoissante de la réalité. Refusant une quelconque intégration — comme en atteste sa biographie —, cet éternel errant s’érige le plus souvent en spectateur qui, grâce à sa sensualité profonde et à l’acuité de son regard, sait appréhender les choses du quotidien : « Des enfants jouent et crient, doucement, dans un square étroit et noir, au crépuscule. Des ruelles serrées, sans oreilles, des murs criblés se consument. Des cheminées s'ennuient contre le ciel de haute lisse. Dans leurs chaînons de fumée grasse, on lit des foules qui dégorgent » (Poèmes). La promenade sera le lieu privilégié de l’étude du Réel pour cet observateur si disponible : 

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« assez disparate : sa mère, couturière, a gardé de son Berry natal et de ses origines paysannes le goût du concret; son père, qui ne le reconnaîtra que seize ans plus tard, est diplômé de l'École centrale et dirige, sans beaucoup d'intérêt ni de réalisme, une fabrique de céra­ mique.

L'enfant, qui assume mal cette situation, se réfu­ gie dans des rêves, alimentés par la lecture de récits de voyages, et se passionne pour l'histoire naturelle (il élève un rat blanc, des vers à soie et visite assidûment le Jardin des Plantes).

Sa scolarité se poursuit sans diffi­ cultés notables au lycée Condorcet où il suit l'enseigne­ ment de M�llarmé, puis à Janson-de-Sailly où il chahute le critique Emile Faguet.

Fargue, qui hésite encore entre l'écriture et la peinture, choisit finalement d'entrer en khâgne à Henri-IV en 1892, où il aura comme condisci­ ples Jarry et Thibaudet.

Mais, incapable de se plier à une discipline intellectuelle stricte, il délaisse ses études pour s'absorber dans des lectures encyclopédiques, écrire, peindre ou jouer du piano ...

De ce dilettantisme devaient émerger un sens aigu de l'observation critique et un humour particulièrement corrosif.

Dans le même temps, il commence à se mêler au monde littéraire parisien, en pleine effervescence à cette époque : il assiste aux « mardis » de Mallarmé, publie des articles critiques dans l'Art littéraire, se lie à des écrivains (Claudel, Valéry, H.

de Régnier, M.

Schwob).

Vers 1895, il écrit Tancrède (paru en 1911), sorte de �oman lyrique à mi-chemin entre le récit et le poème.

Etonnamment réceptif aux courants de son temps, Fargue mène alors une vie de noctambule, et joue un rôle d'animateur actif dans les milieux artistiques.

Avec ses amis des «Apaches d"Auteuil », il participe notamment au lancement des Ballets russes de Diaghilev et défend les peintres impressionnistes (Van Gogh, Bon­ nard, Cézanne).

Sa production est intense, mais il refuse Je plus souvent de publier ses écrits, rature, déchire, dans un souci maladif de perfection inaccessible.

Son esprit caustique, sa drôlerie lui valent des invitations à dîner dans le monde parisien; il arrive dans son légendaire taxi, régulièrement avec deux heures de retard, se créant bien vite une solide réputation de bohème.

La mort d(: son père, qu'il vit comme un drame, confère à ses textes un caractère de gravité dont témoi­ gnent Poèmes (1905) et Pour la musique ( 1912).

Il fait cependant partie des « Patassons », groupe d'écrivains fantaisistes qui comprend aussi Valery Larbaud.

Après la Grande Guerre à laquelle, réformé, il n'a pas pris part, il s'intéresse un temps aux méthodes des surréalistes, mais, trop classique et trop individualiste, ne peut s'inté­ grer au groupe.

Au demeurant, sa célébrité lui fait occu­ per un rôle plus officiel dans le monde littéraire; il accepte de diriger avec Larbaud et Valéry la revue Com­ merce (1924), est décoré de la Légion d'honneur, fait l'objet d'un numéro d'hommage de Feuilles Libres en 1927, reçoit le prix de la Renaissance, fait partie de 1 'Académie Mallarmé, tout en poursui va nt à un rythme plus rapide la publication de ses écrits : Banalité, Vul­ turne, Epaisseurs ( 1928), Sous la lampe, les Ludions (1930), D'après Paris (1932), /e Piéton de Paris (1939), Haute Solitude (l941 ).

La maladie -il est frappé d'hémiplégie en 1943 à la terrasse d'un café- n'inter­ rompt pas cette suite de brillants succès : entouré par sa femme, le peintre Chériane, qu'il avait épousée en 1935, et de ses amis qu'il reçoit chaque dimanche dans sa chambre, il connaît jusqu'à sa mort en 1947 une période d'activité intense, poursuivant notamment la rédaction de ses souvenirs (Refuge, 1942; la Lanterne magique, 1944; Méandres, 1946; Portraits de famille, 1947).

Mais Fargue n'occupe pas seulement une place de « personnage littéraire», de découvreur et de coordonna­ teur des différents courants de son temps; il a également élaboré une œuvre qui, par ses aspects multiples et ses thématiques, reflète fidèlement ses préoccupations per­ sonnelles.

La prolifération du réel A beaucoup d'égards,la poésie de Fargue se constitue comme une réaction devant la diversité angoissante de la réalité.

Refusant une quelconque intégration - comme en atteste sa biographie -, cet éternel errant s'érige le plus souvent en spectateur qui, grâce à sa sensualité profonde et à 1 'acuité de son regard, sait appréhender les choses du quotidien : « Des enfants jouent et crient, doucement, dans un square étroit et noir, au crépuscule.

Des ruelles serrées, sans oreilles, des murs criblés se consument.

Des cheminées s'ennuient contre le ciel de haute lisse.

Dans leurs chaînons de fumée grasse, on lit des foules qui dégorgent» (Poèmes).

La promenade sera le lieu privilégié de l'étude du Réel pour cet observateur si disponible : «J'aime chercher dans vos faubourgs ces yeux de l'Inconnu qui me sont fami­ liers» (ibid.).

L'objet et la personne acquièrent alors une présence particulière; fortement individualisés par la perception du poète, ils tendent à la singularité absolue, comme en témoignent chez lui Je petit nombre de mots pluriels et l'abondance des adjectifs descriptifs.

Les phrases se juxtaposent sans lien logique, perdant même leur verbe, et, selon un procédé cher à Rimbaud, font coexister la description et l'impression qui s'en dégage :. »

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