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Francis Carco: Je me souviens de la bohème...

Publié le 28/03/2011

Extrait du document

« Je me souviens de la bohème,

De mes amours de ce temps-là!

O mes amours, j'ai trop de peine

Quand refleurissent les lilas...

Qu'est-ce que c'est que cette antienne ? Qu'est-ce que c'est que cet air-là? O mes amours, j'ai trop de peine... Le temps n'est plus de la bohème. Au diable soient tous les lilas! Il pleut dans le petit jour blême. II pleut, nous n'irons plus au bois. Toutes les amours sont les mêmes, Les morts ne ressuscitent pas. Un vieil orgue, comme autrefois, Moud, essoufflé, « La Marjolaine «. O mes amours de ce temps-là, Jamais les mortes ne reviennent. Elles dorment sous les lilas Où les oiseaux chantent ma peine, Sous les lilas qu'on a mis là... Les jours s'en vont et les semaines : O mes amours, priez pour moi... « Francis Carco. SUJET Vous présenterez un commentaire composé de ce poème. Vous pourrez montrer comment les thèmes du temps et de l'amour trouvent ici une expression originale et délicate sous la simplicité apparente et quasi populaire de la forme.

■ Situer Carco, dans ce Paris qu'il a tant aimé et chanté, bien que né lui-même à Nouméa (Nouvelle-Calédonie).    ■ Enchanté par « la Rosée de Francis Jammes « qui est son maître en poésie, ainsi que Verlaine, Laforgue, Corbière...    ■ Mais il goûte aussi les « Précieux « du XVIIe siècle et vénère, pour « lointain, admirable et fraternel ancêtre « : François Villon.    ■ Fait partie du groupe des Fantaisistes, poètes qui réagissent instinctivement contre les brumeuses métaphysiques ou les tics d'un langage tarabiscoté où s'attardait et s'égarait le siècle finissant.

« Il chante ici, dans ces vers tendres, le passage et la disparition trop rapides des jours heureux « de la bohème », «Sous le métro de la Chapelle.

Dans le quartier pauvre et bruyant » (L'ombre)...

et dans tels autres coins de Paris. Le style est simple volontairement, un peu vieilli ou vieillot parfois, tout en délicatesse. 1er Thème: Ce poème est une méditation lyrique, banale au premier abord, sur la fuite du temps et de ses amours. 2e Thème : Mais la délicatesse du souvenir des aventures vécues le rend très discrètement pathétique et d'uneexpression originale. ÉTUDE DU 2e THÈME A rappeler seulement au début de ce 2e thème, car c'est ce point qui constitue un des éléments primordiaux de laFuite du temps et qui doit donc être surtout développé dans le 1er thème. 2.

Rappeler aussi cependant que tout le texte est lancé, déterminé, par cette personnalisation (« Je ») du rappel dupassé ( « me souviens »). 3.

Assez traditionnelle encore, cette alliance mélancolique: souvenir/peine.

Remarquer la rime étouffée et d'un tonmineur, donc mélancolique, en - eine.

cf.

Le Pont Mirabeau d'Apollinaire (1re strophe). 4.

Outre la construction un peu archaïque du complément de nom (on attendrait « le temps de la bohème ») il fautsignaler tout de suite: — qu'il s'agit de rimes assonnancées plutôt que de rimes régulières : cf.

« antienne » « blême », « mêmes » «marjolaine », « semaines », « rimant » avec « peine » et « bohème ».

C'est l'une des assonances féminines dumorceau bâti sur 2 sonorités à la rime une en aloi; une en eine/ême; cette dernière est celle qui apporte lamélancolie; elle est prolongée par les ondes des nasales m ou n. — que ce souvenir est tout de suite allié à une valeur négative. 5.

Cette image complète la valeur négative du souvenir; en reprenant une chanson populaire qu'elle transformelégèrement : « Nous n'irons plus au bois, Les lauriers sont coupés », « il pleut », image symbolique bien sûr. 6.

Originalité, car, comparé au thème traditionnel, le souvenir nostalgique est renouvelé du fait qu'il rappelle touteune conception de vie et d'amours et non un amour précis (comme c'est le cas dans Le Lac de Lamartine parexemple). 7.

Ce sont les grisettes de Burger (Ma Bohême), les Mimi-Pinson de Musset, et la possibilité d'aimer un jour sansobligation de fidélité ou de lendemain; donc la fantaisie, la liberté, l'atmosphère d'amours légères dont on dit qu'ellessont spéciales à Paris. 8.

Le tout dans l'atmosphère des vieilles rues de Paris, rendue par ses musiques populaires (orgue, souvent aussiaccordéon) et les airs fredonnés, les « rengaines » comme on dit, de « Nous n'irons plus au bois » aux Compagnonsde la Marjolaine. 9.

Tout souvenir soulève dans l'âme humaine douceur attendrie ou mélancolique; nostalgie ou angoisse.

Ici lesquestions répétées avec une tournure familière et en même temps banale: « Qu'est-ce que c'est que »...

auxsonorités crispées; la lourdeur des deux octosyllabes accentuée par l'allitération en gutturale, traduisent une espèced'affolement de papillon s'étant brûlé les ailes.

L'originalité réside dans l'alliance de ces sentiments et de leurtransmission en mots simples de tous les jours : la forme interrogative, la formule « cet air-là », à la facturecorrespondant à celle des vieux contes et des chansons, et le terme un peu recherché : « antienne ». 10.

Une antienne est un air inlassablement répété.

Cf.

litanie.

C'est à l'une ou l'autre de ces 2 expressions quecorrespondent ces 2 vers évoquant non plus le passé mais la mort qui s'y rattache.

Une fois de plus : formenégative accablante, tournure un peu vieillie aussi du « Jamais...

ne reviennent » et valeur imitative de glas étouffé,dans les sonorités du début et de la rime.

C'est bien ici une angoisse effleurée mais latente. 11.

Le rythme est alourdi et adouci par les répétitions volontaires et nombreuses (outre celle-ci, citer : « Qu'est-ceque...

»; « de la bohème...

»; « J'ai trop de peine...

»; « Il pleut...

»; « O mes amours...

»).

Elles traduisent l'avancedu temps, l'angoisse impondérable qui saupoudre le texte entier. 12.

Tandis que les leit-motiv le rythment doucement, dans une sorte de laiser-aller fluide d'un cœur mal à l'aise.

Les. »

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