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Germinal, de Claude Berri

Publié le 10/09/2006

Extrait du document

germinal

A une époque — la nôtre — où les impératifs de la société de consommation constituent une valeur essentielle de notre culture post-industrielle (la production de biens de consommation l'emportant souvent sur toute autre considération), il est permis de se demander si le débat, à la fois idéologique, social et politique, que vient ranimer la sortie du film de Claude Berri, n'appartient pas à un autre âge, celui des luttes ouvrières de la fin du XIXe siècle. Antagonisme du capital et du travail, lutte des classes, annonce des lendemains qui chantent, autant de thèmes mobilisateurs, dont la faillite a sonné le glas des grandes causes collectives. Et même si les mines de charbon font encore travailler des enfants, de par le monde, les idéologies socialistes et communistes ont fait long feu, cédant le pas, dans nos sociétés développées, à la poursuite obstinée du bien-être individuel.

 

Ce texte termine le roman, il en est la conclusion, à la fois « réaliste « et « poétique «. Etienne quitte à pied Montsou, en direction de Marchiennes, où il doit prendre le train de huit heures pour Paris. Il est près de six heures du matin, Etienne a encore à parcourir six kilomètres, le soleil vient de se lever, en cette matinée d'avril 1867. Après avoir été hospitalisé pendant six semaines, Etienne est venu faire ses adieux à ses anciens compagnons de la mine, à Jean-Bart. Le travail a repris dans toutes les fosses, à la suite d'une grève de deux mois : les mineurs, vaincus par la faim, n'ont rien obtenu, leur salaire a même baissé.

 

germinal

« noble et ambitieuse.Il ne faudrait pas, pour autant, méconnaître la valeur expressive de la vision personnelle que nous propose C.

Berride l'oeuvre de Zola.

Comme tout artiste épris de perfection, C.

Berri réunit en sa personne toutes les compétencesqui lui permettent de se manifester en chacune des démarches qui jalonnent la création du film.

Tout à la foisauteur, scénariste, metteur en scène, producteur et distributeur, Berri se donne la pleine possession des moyens quilui assurent la maîtrise d'une interprétation personnelle de l'oeuvre de Zola.

« La méthode Berri est simple : il prendles meilleurs à tous les niveaux », selon Georges Prost, directeur de l'Institut pour le financement du cinéma et desindustries culturelles.Après avoir adapté Marcel Pagnol (« Jean de Florette »), Marcel Aymé (« Uranus »), Berri trouve son inspirationdans une autre oeuvre littéraire, Germinal.

S'il choisit ces grands auteurs, affirme-t-il, c'est parce qu'il les juge « lesmeilleurs scénaristes d' aujourd'hui » (Première, octobre 1993).La boutade est révélatrice du cinéaste, C.

Berri, autant que de l'auteur, Zola, dont le film s'inspire.

On aurait beaujeu de montrer que le texte de Zola est souvent organisé à la manière d'une séquence cinématographique, dont ledécoupage, plan par plan, est, à l'occasion, très élaboré (qu'on se reporte, par exemple, au tout début du roman ouencore à la réunion du Plan-des-Dames...).

Dans un texte destiné à des commissions de subvention, Berri déclare :« Je veux donner à voir.

Ce sera au spectateur de penser, de réfléchir.

»De fait, C.

Berri respecte scrupuleusement le propos de Zola, quand il adapte Germinal.

De même que Zola n'hésitaitpas à interpréter, à la lumière de son actualité vécue (en 1884, au moment de la rédaction du roman), les faits, lemilieu, les personnages, dont il situait l'existence à la fin du second Empire, de même, Berri, animé par le même soucid'efficacité expressive, amalgame l'époque des années 1880 et celle du second Empire.

Il conserve le titre de Zola,dont on sait qu'au dire du romancier, il « éclaire » toute l'oeuvre.Tout comme Zola, C.

Berri vise à restituer non l'exactitude du document historique, mais, comme tout grand artiste,la vérité essentielle d'une vision, d'une réflexion, d'un sentiment : l'émotion saisit le spectateur dès la premièreséquence du film.Sans jamais isoler artificiellement les personnages, secondaires ou principaux, du groupe ou de la foule, dont ilstiennent leur cohérence et, parfois, leur raison d'être, Berri concentre ses effets sur la famille Maheu, que meurtrit lemalheur.

Comme l'écrit un critique du Monde (30 septembre 1993), C.

Berri donne du roman une « vision encore plusdramatique, plus bouleversante ».Toujours très sûr, l'effet dramatique n'est jamais outré.

Dans son refus du film-catastrophe, Berri est même parfoisresté en retrait par rapport au roman.

Il supprime certaines scènes : l'assassinat du soldat par Jeanlin, la « visionrouge » de la révolution qu'appréhendent Négrel et son petit groupe de femmes, ou encore l'inondation du Voreux.S'agit-il d'un choix ou d'une contrainte ? Selon toute vraisemblance, C.

Berri s'est imposé la rigueur d'un style —sobre mais puissant et concentré, efficace — parfaitement en accord avec la pureté authentique de son émotion.On aurait mauvaise grâce à se plaindre que C.

Berri ne laisse pas le champ libre à ce « grain de folie » qu'Hervé deLuze, le monteur du film, aurait souhaité voir se manifester, si l'on en croit le témoignage de Pierre Assouline(Germinal, Fayard, 1993).

Berri n'est pas Fellini.

Force est de reconnaître qu'il a su marquer de son empreinte sonGerminal qui, bien plus qu'une adaptation ou qu'une transposition, est une recréation offerte au grand public et, dece fait, susceptible d'inciter à une relecture féconde du roman.

N'est-ce pas le meilleur témoignage d'estime etd'admiration que l'on puisse rendre à Zola ?. »

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