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Goethe a défini Voltaire : « le Français suprême, l'écrivain qui a été le plus en harmonie avec sa nation. » Commentez cette appréciation et indiquez les réserves ou les compléments que vous voudriez y apporter

Publié le 14/02/2012

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goethe

Goethe s'est loyalement exercé à comprendre nos grands écrivains; il y apporta une autre ampleur d'esprit, une autre compréhension qu'un Lessing ou un Schlegel. Il reste un des auteurs d'Outre-Rhin qui ont le mieux jugé les Français. Mais si l'on peut considérer le père de Werther comme l'un des initiateurs du Romantisme - envers lequel il professait un mépris hautain - il fut surtout, par ses idées, un homme du xviiie siècle. Rien d'étonnant qu'il ait admiré celui qui semble incarner cette époque : le Roi Voltaire. Qui donc, entre 1780 et 1830, n'était pas, peu ou prou, Voltairien ?...

goethe

« Promptitude dans la resolution, cela equivaut a spontaneite, prime-saut. Cela suppose une intelligence vive, saisissant rapidement, passant aussitot de la pensee a l'action.

Cette promptitude dans la resolution, n'est-ce point encore le don d'improvisation, ressource magnifique, funeste .parfois a qui se fie trop is elle? Voltaire possede ce don is un degre superieur; ce fut sa force et sa faiblesse.

Que de resolutions trop promptes dans sa vie, que de pas de clerc, que d'inutiles repentirs! Ne citons que ce ridicule, cet odieux sejour is Berlin, decide is l'age de cinquante-six ans! Quanta la plupart de ses ecrits, ne sont-ils pas de brillantes improvisations? Son ardeur a combattre n'eut d'egale que sa haine de la guerre.

Jus- qu'au bout il fut sur la breche, enchante d'avoir des ennemis a pourfendre, s en creant par plaisir, ne leur laissant aucun repos, les harcelant de ses traits empoisonnes.

Jusque dans ce Dictionnaire philosophique qui, entre- pris bien au dela de la maturite, aurait di1 refleter la serenite de la vieil- lesse assagie, it attaque, it poursuit ses adversaires.

Il combat pour de nobles idees, semble-t-il, prenant fait et cause pour la tolerance contre le fanatisme, pour la lumiere contre l'obscurantisme, defendant Popprime, lavant la memoire d'innocentes victimes : les Sirven, les Calas, les La Barre, les Lally-Tollendal...

Mais en y regardant d'un peu pres, cette ardeur belliqueuse est un besoin de sa nature qu'il satisfait, un moyen de con- tenter sa vanite, une occasion de fronder l'autorite, ce qui, avouons-le, est assez francais. L'impetuosite dans l'attaque, la « furia francese », voila Men encore une particularite de notre race, reconnaissable chez ce batailleur.

Il suffit, pour s'en rendre compte, de relire certains debuts agressifs de ses &eras polemiques (1).

La petulance, heritee des aleux, se retrouve is un degre rare chez ce Parisien qui tenta, un jour, de s'expliquer a lui-meme.

Apres avoir remarque que sous Charles IX, Henri III, et meme Henri IV, les Parisiens etaient des « furieux », it constate que, sous Louis XV, « l'Europe leur douce facilite de moeurs ».

Et il conclut : « Le Parisien est impetueux dans ses plaisirs comme it le fut dans ses fureurs.

» L'explication vaut ce qu'elle vaut, mais il est certain que Voltaire se rue plus volontiers sur le plaisir que sur l'adversaire, preferant aborder celui-ci de dos ou de flanc que de face.

Crousle pretend meme que ce « spadassin litteraire...

com- battait toujours masque ».

Passons sous silence ce « reste de barbaric » qui ne nous parait pas precisement un trait special au Francais, mais Out& le triste apanage de tout le genre humain, et venons-en a cette proverbiale legerete, que tous les peuples nous ont reprochee a l'envi, depuis Cesar jusqu'a nos jours. Ce serait surtout, si nous en croyons Voltaire, le fait de la jeunesse; le Francais parvenu a la maturite serait, au contraire, un modele de sagesse. Le Dictionnaire philosophique cite un texte posterieur is Cesar et qui nous montre le Parisien sous un jour tout different.

Julien (celui que nous appe- Ions l'Apostat et que Voltaire nomme « le premier des princes et des hommes apres Marc-Aurele ») aurait dit : « J'aime ce peuple parce qu'il est serieux et severe comme moi.

» Et Arouet, ne « dans la Cour du Palais », fertile en explications, de fournir aussitot la raison de cette etonnante transformation : « Le serieux devait regner dans une ville petite, de- nuee d'amusements; il est banni dans une ville immense devenue le centre des plaisirs.

» II eat etc desole, semble-t-il, d'être pris pour un homme serieux.

Il se represente « un pied dans le tombeau, et de l'autre faisant des gambades ).

A soixante-seize ans, it joue une comedie sacrilege, simule une maladie mortelle, recoit ('absolution d'un capucin affole, la communion, par devant notaire, des mains de son cure; puis ressuscite et crie is haute voix qu'il pardonne a ceux qui ont emit au roi des calom- nies contre lui.

Quand tout le monde est sorti, il saute de son lit et va se degourdir les jambes dans son jardin.

Cette legerete, soi-disant francaise - car enfin Pascal et Bossuet furent des Francais authentiques - s'affirme chez Voltaire, en matiere religieuse, avec plus de desinvolture qu'en toute autre.

II semble depourvu totale- ment d'un sens que possedent les vrais penseurs : le sens du mystere.

Il ramene toutes les questions metaphysiques, toutes les troublantes enigmes (1) Exemples : Remargues sur les Pens4es de Pascal : a Yose prendre le partie de Phu- manitg contre ce misanthrope sublime.

» - Lettre h J.-J.

Rousseau : e Pai recu, monsieur, votre nouveau livre contre Ile genre humain, je vous en remercie... Promptitude dans la résolution, cela équivaut à spontanéité, prime-saut.

Cela suppose une intelligence vive, saisissant rapidement, passant aussitôt de la pensée à l'action.

Cette promptitude dans la résolution, n'est-ce point encore le don d'improvisation, ressource magnifique, funeste parfois à qui se fie trop à elle? Voltaire possède ce don à un degré supérieur; ce fut sa force et sa faiblesse.

que de résolutions trop P.romptes dans sa vie, que de pas de clerc, que d'mutiles repentirs! Ne citons que ce ridicule, cet odieux séjour à Berlin, décidé à l'âge de cinquante-six ans 1 Quant à la plupart de.

ses écrits, ne sont-ils pas de brillantes improvisations? Son ardeur à combattre n'eut d'égale que sa haine de la guerre.

Jus­ ~u'au bout il fut sur la brèche, enchanté d'avoir des ennemis à pourfendre, s en créant par plaisir, ne leur laissant aucun repos, les harcelant de ses traits empoisonnés.

Jusque dans ce Dictionnaire philosophique qui, entre­ pris· bien au delà de la maturité, aurait dû refléter la serémté de la vieil­ lesse assagie, il attaque, il poursuit ses adversaires.

li combat pour de nobles idées, semble-t-il, prenant fait et cause pour la tolérance contre le fanatisme, pour la lumière contre l'obscurantisme, défendant l'opprimé, lavant la mémoire · d'innocentes victimes : les Sirven, les Calas, les La Barre, les Lally-Tollendal ...

Mais en y regardant d'un peu près, cette ardeur belliqueuse est un besoin de sa nature qu'il .satisfait, un moyen de con­ tenter sa vanité, une occasion de fronder l'autorité, ce qui, avouons-le, est assez français.

L'impétuosité dans l'attaque, la « furia francese :.

, voilà bien encore une particularité de notre race, reconnaissable chez ce batailleur.

Il suffit, pour s'en rendre compte, de relire certains débuts agressifs de ses écrits polémiques (1).

La pétulance, héritée des aïeux, se retrouve à un degré rare chez ce Parisien qui tenta, un jour, de s'expliquer à lui-même.

Après avoir remarqué que sous Charles IX, Henri III, et même Henri IV, les Parisiens étaient des «furieux », il constate que, sous Louis XV, « l'Europe chérit ...

leur douce facilité de mœurs :.

.

Et il conclut : « Le Parisien est impétueux dans ses plaisirs comme il le fut dans ses fureurs.

» L'explication vaut ce qu'elle vaut, mais il est certain que Voltaire se rue plus volontiers sur le plaisir que sur l'adversaire, préférant aborder celui-ci de dos ou de flanc que de face.

Crouslé prétend même que ce .

« spadassin littéraire...

com­ battait toujours masqué :.

.

Passons sous silence ce « reste de barbarie » qui ne nous paraît pas précisément un trait spécial au Français, mais plutôt le triste apanage de tout le genre humain, et venons-en à cette proverbiale légèreté, que tous les peuples nous ont reprochée à l'envi, depuis César jusqu'à nos jours.

Ce serait surtout, si nous en croyons Voltaire, le fait de la jeunesse; le Français parvenu à la maturité serait, au contraire, un modèle de sagesse.

Le Dictionnaire philosophique cite un texte postérieur à César et qui nous montre le Parisien sous un jour tout différent.

Julien (celui que nous appe­ lons l'Apostat et que Voltaire nomme «le premier des princes et des hommes après Marc-Aurèle :.

) aurait dit : « J'aime ce peuple parce qu'il est sérieux et sévère comme moi.

» Et Arouet, né « dans la Cour du Palais :.

, fertile en explications, de fournir aussitôt la raison de cette étonnante transformation : « Le sérieux devait régner dans une ville petite, dé­ nuée d'amusements; il est banni dans une ville immense devenue le centre des plaisirs.

» Il eût été désolé, semble-t-il, d'être pris pour un homme sérieux.

Il se représente « un pied dans le tombeau, et de l'autre faisant des gambades :.

.

A soixante-seize ans, il joue une comédie sacrilège, simule une maladie mortelle, reçoit l'absolution d'un capucin affolé, la communion, par devant notaire, des mains de son curé; puis ressuscite et crie à haute voix qu'il pardonne à ceux qui ont écrit au roi des calom­ nies contre lui.

Quand tout le monde est sorti, il saute de son lit et va se dégourdir les jambes dans son jardin.

Cette légèreté, soi-disant française - car enfin Pascal et Bossuet.

furent des Français authentiques -s'affirme chez Voltaire, en matière religieuse, avec }>lus de désinvolture qu'en toute autre.

TI semble dépourvu totale­ ment d'un sens que possèdent les vrais penseurs : le sens du mystère.

Il ramène toutes les questions métaphysiques, toutes les troublantes énigmes (1) Exemples : Remarques sur les Pe118éea de Pascal : « J'ose prendre le partie de l'hu­ manité contre ce mfsantlirope sublime.

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-Lettre A J.-J.

Rousseau : « J'ai reçu, monsieur, votre nouveau livre contre Je genre humain, je vous en remercie .•• •. »

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