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Publié le 13/05/2020

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UNIVERSITATEA „?TEFAN CEL MARE” din SUCEAVA FACULTATEA DE LITERE ?I ?TIIN?E ALE COMUNIC?RII DEPARTAMENTUL ID SPECIALIZAREA: Român?-Francez? LE ROMANTISME Anul II, Semestrul I Asist. Univ. drd. Camelia BIHOLARU 1 C1 Introduction Le romantisme exprime une nouvelle sensibilité et un autre rapport de l’homme à l’imagination, aux rêves, à la nature et aux arts. L’histoire du mot « romantique » Dans l’évolution du concept de « romantisme », l’adjectif a précédé le nom. - Au début, en anglais, l’adjectif « romantique » est synonyme du nom « romanesque » et se rapporte aux romans de chevalerie et au temps des troubadours. - A la fin du XVIIIe siècle, en français, l’adjectif désigne un paysage pittoresque et l’effet produit par ce paysage sur l’âme et la sensibilité. En 1801, en allemand, A.W. Schlegel lui donne un sens historique et critique, il oppose la littérature romantique à la littérature classique. Le terme s’impose en France en 1824 pour illustrer la polémique des académiciens, partisans des règles établies du classicisme. (« la secte du romantisme », Auger) Le romantisme français est postérieur aux romantismes anglais et allemand. Sources du courant et ressources de son inspiration 1. Le romantisme anglais introduit plusieurs thèmes : le culte de la nature, la fascination des ruines, le sentiment du temps qui passe, l’importance donnée aux ténèbres, à la nuit, à la mort, aux mystères de l’être, aux questions religieuses et métaphysiques des réactions et des sentiments (larmes, douleurs, regrets, nostalgie, solitude, détresse, désespoir, mélancolie). un certain type de paysage : sites sauvages, mers déchaînées, vent, brouillard, tombes. Par le poète écossais James Macpherson (1736-1796) sous le pseudonyme d’Ossian, le romantisme récupère le chant primitif, la poésie populaire, naturelle, opposée à la poésie de cour, régie par des règles et codifications contraignantes. Du Lord Byron (1788-1821), le romantisme reprend l’image du héros solitaire, satanique, amoureux des ténèbres, en révolte contre la loi de Dieu et des hommes. L’Angleterre était le pays le plus avancé de point de vue technique, le plus « civilisé », le premier qui ait connu la révolution industrielle. Ainsi, le romantisme anglais apparaît comme une critique d’une évolution historique qui a dénaturé l’humanité et qui menace l’individu dans sa singularité; il s’affirme par le refus du progrès et la remise en cause de la science et de la raison. Les romantiques réaffirment les droits de l’imagination, des passions et du mystère (« l’infracassable noyau de la nuit » A. Breton). 2. Le romantisme allemand s’exprime dans les années 1770-1780 par le mouvement « Sturm und Drang » (« tempête et élan/assaut »). Le mouvement valorise : l’imagination, la passion, la liberté, l’énergie et les droits du génie, un esprit créateur qui peut transgresser les règles et les conventions. Le véritable romantisme allemand naît a à la fin du siècle, il est d’essence philosophique et religieuse. Le cénacle des frères Grimm élargit la notion de littérature par l’intérêt pour le folklore, les langues nationales (la naissance de la philologie), les traditions nationales et la mythologie comparée. 2 Les écrivains allemands rejettent la domination culturelle française et se proposent de défendre et d’illustrer leurs langue et littérature. Ils militent pour l’indépendance culturelle et politique, la liberté des passions et la liberté d’expression esthétique. Ils protestent contre les règles, les contraintes de tout ordre établi (économiques, sociales, politiques, artistiques) fondé sur la raison et la négation des droits de l’individu. Les figures symboliques de cette société contraignante sont : le poète qui rêve d’un monde idéal, l’artiste qui crée, le génie qui invente des chemins inédits et produit des œuvres extraordinaires, l’homme marginal, le sauvage, le hors-la-loi. Par rapport aux Lumières où la raison triomphe ( où la science explique le monde par des lois et le met en chiffres), le romantisme allemand privilégie le merveilleux, il accorde du sens à l’inexplicable, il attribue une grande place à l’imagination, à l’insolite, au fantastique, au miraculeux, à tout ce qui libère l’esprit du joug de la logique rationnelle. Parmi les auteurs et créations littéraires illustratifs il faut citer : Goethe (Les souffrances du jeune Werther, Faust), le théâtre de Schiller, les nouvelles d’Hoffmann. Les racines et l’héritage français Dans la littérature française, on peut retrouver les premières traces de la sensibilité romantique chez Rousseau, dans le roman épistolier La Nouvelle Héloïse (1761) qui contribue à répandre, diffuser et populariser des thèmes romantiques : le lyrisme, la violence des passions, les enthousiasmes et les égarements des âmes sensibles, le goût de la nature, la poésie des montagnes et des lacs, la quête et la nostalgie d’une vie loin de la cité moderne. Rousseau se sert de la fiction pour illustrer sa pensée idéologique : la critique de la ville moderne (un lieu de vanité, corruption et consommation superflue) et l’éloge des effets bénéfiques des montagnes. Ensuite, le disciple de Rousseau, Bernardin de Saint-Pierre avec le roman Paul et Virginie (1787) fait de la nature exotique des tropiques la source de la beauté morale d’une vie vertueuse, en harmonie avec la nature. Le décalage français Le romantisme français s’impose plus tard pour des raisons d’ordre historiques : Le XVIIIe siècle est le siècle de la raison triomphante ; Avant la Révolution, les droits des sentiments et de la passion restent éclipsés par les Lumières ; La France subit fortement l’influence du classicisme (équilibre, mesure ; l’art est le produit des règles et d’un goût soumis au contrôle de la raison) ; La France est dominée par le « parti des philosophes », c’est le pays de Voltaire (Candide et Le Dictionnaire philosophique paraissent a la fois avec les grandes œuvres de Rousseau) ; Paris est le centre de l’Europe, le français est la langue d’une élite cosmopolite et cette position dominante ne favorise pas l’ouverture aux autres cultures. Le contexte historique – un élément définitoire du romantisme français. L’exil et « le mal du siècle » Le romantisme français est intimement et profondément marqué par la Révolution française et ses conséquences. La génération romantique a établit une corrélation évidente entre la révolution et l’origine du « mal du siècle », du mal historique. Il s’agit d’un sentiment collectif, daté, encré dans son époque qui désigne une prise de conscience sur la présence dissimulée de l’Histoire. 3 L’Histoire (la Révolution, les guerres de la République, les guerres de Napoléon) devient une expérience collectivement vécue, une « force qui va », une « force des choses » qui balaie tout dans son passage, qui fait du passé un temps définitivement perdu. En 1789, la monarchie absolue qui ne se savait pas mortelle s’écroule, elle devient « Ancien Régime ». Par la suite, les nobles sont obligés à fuir en Angleterre et dans les pays germaniques. La conséquence directe de l’émigration c’est l’expérience de l’exil ; à travers cette épreuve politique, les aristocrates ont pris contact avec d’autres cultures et langues, ils ont connu d’autres horizons, ils ont eu la révélation d’autres valeurs et d’autres littératures. Mémoires, Chateaubriand : Le changement de littérature dont le dix-neuvième siècle se vante, lui est arrivé de l’émigration et de l’exil. Les principaux médiateurs culturels du romantisme ont été les émigrés, les exilés : Madame de Staël et les libéraux d’une part, Chateaubriand et les aristocrates contre-révolutionnaires d’autre part. Les fondateurs Madame de Staël Madame de Staël, de culture protestante, héritière des Lumières, libérale, opposante au régime autoritaire de Napoléon est forcée de voyager dans toute l’Europe et de ces pérégrinations elle tire la matière de ses livres. De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (1800) Madame de Staël considère que les littératures dépendent des climats, des gouvernements, des « institutions sociales », des religions, des langues, des traditions culturelles, des mœurs. L’essai proclame la fin du règne des règles poétiques, esthétiques qui se veulent universelles. Elle montre que chaque pays a sa littérature propre, que cette littérature est l’expression de la société toute entière, qu’elle obéit à ses lois propres, nationales, locales, qu’elle n’est pas obligée de reprendre ni l’héritage gréco-latin ni les modèles du classicisme français. Sur le plan philosophique, l’ouvrage illustre la relativité du beau et des règles dans le domaine littéraire. Elle légitime la promotion et la dignité des littératures populaires nationales ; ainsi les romantiques vont redécouvrir les mythes, les légendes folkloriques, les contes, les ballades, les chansons. De l’Allemagne (1814) L’ouvrage fait l’éloge de la littérature du nord, de la littérature romantique « née de la chevalerie et du christianisme ». Autour de Madame de Staël se cristallise le Groupe de Coppet (du nom de la résidence de Madame de Staël en Suisse) formé de penseurs, philosophes, traducteurs et théoriciens de l’art qui tentent d’acclimater le romantisme en France. Ils font la traduction du Cours de littérature dramatique de Schlegel (1813) qui présente une position hostile envers le classicisme français et envers les Lumières. Le Cours exalte la poésie chrétienne, mélancolique, marquée par les mystères de l’existence humaine et le sentiment de l’exil sur terre, il glorifie Shakespeare et Caldéron, dramaturges qui incarnent la liberté du génie créateur au-dessus de toutes les règles ; il affirme avec force la relativité des critères en matière de beauté. Surtout après l’abdication de Napoléon (avril 1814) le groupe a le rôle de répandre librement des théories et des textes, d’ouvrir les frontières, de faire connaitre des œuvres étrangères capitales et de fournir des arguments décisifs contre le classicisme. « Classicisme » et « romantisme » sont deux termes clairement perçus et reçus comme antithétiques. 4 François-René de Chateaubriand Chateaubriand, Alphonse de Lamartine, Alfred de Vigny font partie des nobles auteurs obligés de quitter leurs terres et leurs châteaux pour trouver refuge hors des frontières. La Révolution a aboli leurs privilèges et a constitué une négation radicale de leur mode de vie, de leur morale, de leurs croyances. Ils ont été obligés de prendre le chemin de l’exil et de travailler pour survivre. C’est la conséquence directe de la philosophie des Lumières, de la raison, du progrès des sciences et de la liberté. C’est pourquoi l’âme de ces aristocrates déracinés et exilés s’est retrouvée dans les thèmes sombres du romantisme français et allemand, opposés aux Lumières. Cette génération apprend à compter sur ses propres ressources, sur la force du « moi » qui va prendre une large place dans les œuvres romantiques. Le Génie du Christianisme (1802) Si Voltaire a fait de la religion une alliée de l’obscurantisme et du fanatisme et les révolutionnaires ont ruiné l’autorité de l’église, les contre révolutionnaires adoptent une pensée différente. Chateaubriand s’attache à « prouver que de toutes les religions qui ont jamais existé la religion chrétienne est la plus poétique, la plus humaine, la plus favorable à la liberté, aux arts et aux lettres » ; que le christianisme est une religion du cœur, des sentiments qu’elle a profondément spiritualisés, civilisés. L’ouvrage marque le renouveau du sentiment religieux et magnifie le temps et les temples de la foi. Dans cette perspective apologétique (défendre et faire l’éloge de la religion), il illustre « les harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain ». Le court récit René qui est inséré a le rôle de dramatiser les effets dévastateurs du « vague des passions » et de montrer les malheurs qui frappent les jeunes hommes qui se livrent à « d’inutiles rêveries » ; c’est le malaise d’un héros qui ne trouve sa place nulle part et qui aspire à un impossible ailleurs. Toute la génération romantique se reconnaît dans ce personnage. L’ennui incurable, le mal de vivre traduisent une expérience collective et expriment une vision du monde désenchanté. Le « mal du siècle » Le « mal du siècle » se présente sous la forme d’une conscience malheureuse. Les romantiques se confrontent avec l’Histoire et avec les limites de l’Homme. Ils font une prise de conscience sur : les rapports Homme/Histoire, la force écrasante de l’Histoire ; l’opposition fondamentale entre les rêves d’infini et la prison du corps mortel et du réel. Madame de Staël parle du « sentiment douloureux de l’incomplet » : « Ce que l’homme a fait de plus grand, il le doit au sentiment douloureux de l’incomplet de sa destinée… ; mais le sublime de l’esprit, des sentiments et des actions doit son essor au besoin d’échapper aux bornes qui circonscrivent l’imagination. » De la littérature, 1800 Chateaubriand définit ce mal romantique par le terme « le vague des passions ». « état de l’âme… qui précède le développement des passions, lorsque nos facultés, jeunes, actives, entières mais renfermées, ne se sont exercées que sur elles-mêmes, sans but et sans objet…L’imagination est riche, abondante et merveilleuse ; l’existence pauvre, sèche et désenchantée. On habite, avec un cœur plein, un monde vide ; et, sans avoir usé de rien, on est désabusé de tout. » Génie du christianisme, 1802 5 Le personnage René ne sait que faire de sa vie, il répugne de s’intégrer dans la société des hommes, il préfère la solitude, il ne trouve nulle part sa place, il illustre le dégoût de la vie, il a une prédilection/propension pour les « chimères », les « rêveries » qui compensent mal les misères d’une vie jugée trop médiocre et bornée. Le personnage Werther de Goethe se suicide parce que Charlotte a épousé Albert, son amour est condamné à être vain, le monde marchand, prosaïque ne répond pas à ses désirs, la société conventionnelle bride la loi, heurte sa soif d’idéal, de pureté et d’amour universel ; le suicide devient pour le héros romantique une libération, un remède radical au mal de vivre. « Ah ! pays damné ! terre de dédain ! sois maudite à jamais ! (Prenant la fiole d’opium.) O mon âme, je t’avais vendue ! je te rachète avec ceci. (Il boit l’opium.) – Libre de tous ! égal à tous, à présent ! – Salut, première heure de repos que j’ai goûtée ! – Dernière heure de ma vie, aurore du jour éternel, salut ! Adieu, humiliations, haines, sarcasmes, travaux dégradants, incertitudes angoissées, misères, tortures du cœur, adieu ! Oh ! quel bonheur, je vous dis adieu ! …O , mort, ange de délivrance, que ta paix est douce !... (Il jette au feu tous ses papiers.) Allez, nobles pensées écrites pour tous ces ingrats dédaigneux, purifiez-vous dans la flamme et remontez au ciel avec moi ! » (Il lève les yeux au ciel, et déchire lentement ses poèmes, dans l’attitude grave et exaltée d’un homme qui fait un sacrifice solennel !) Acte III ; scène 7. Alfred de Vigny, Chatterton (1835) 6 C2 Configuration historique et littéraire de la « nouvelle école » romantique A. La Révolution et Napoléon. Configuration historique et politique Les deux nouveaux mythes fondateurs de la littérature française du XIXe siècle sont la Révolution et Napoléon. La Révolution de 1789 signifie de point de vue historique et politique la prise de la Bastille, la proclamation de la République et la décapitation du roi. Les moments historiques les plus importants dans le parcours de Napoléon sont : le coup d’Etat du 18 Brumaire 1799 ; le sacre comme Empereur le 2 décembre 1804 ; les victoires – Austerlitz 1805, Iéna 1806, Wagram 1809 ; les Cent-Jours entre mars-juin 1815, la défaite de Waterloo 1815 ; la mort en exil le 5 mai 1821 à Sainte-Hélène. « …le dix-neuvième siècle a une mère auguste, la Révolution française. Il a ce sang énorme dans les veines. » (Victor Hugo) « La démocratie est dans cette littérature. La révolution a forgé le clairon ; le dixneuvième siècle le sonne. Ah ! cette affirmation nous convient, et, en vérité, nous ne reculons pas devant elle, avouons notre gloire, nous sommes révolutionnaire. Les penseurs de ce temps, les poètes, les écrivains, les historiens, les orateurs, les philosophes, tous, tous, tous, dérivent de la Révolution française. Ils viennent d’elle et d’elle seule. De 89 est sortie la Délivrance, et de 93 la Victoire. 89 et 93 ; les hommes du dix-neuvième siècle sortent de là. C’est là leur père et leur mère. Ne leur cherchez pas d’autre filiation, d’autre inspiration, d’autre insufflation, d’autre origine. Ils sont les démocrates de l’idée, successeurs des démocrates de l’action. Ils sont les émancipateurs. L’idée Liberté s’est penchée sur leurs berceaux. Ils sont tous sucés cette grande mamelle ; Ils ont tous ce lait dans les entrailles ; de cette moelle dans les os, de cette sève dans la volonté, de cette révolte dans la raison, de cette flamme dans l’intelligence. (…) Les écrivains et les poètes du dix-neuvième siècle ont cette admirable fortune de sortir d’une genèse, arriver après une fin de monde, d’accompagner une réapparition de lumière, d’être les organes d’un recommencement. » Victor Hugo, William Shakespeare, IIIe partie, livre II, Le dix-neuvième siècle, 1864 La révolution est perçue comme origine et comme légende, comme énigme et comme mémoire ; elle occupe une place considérable dans les discours et dans les œuvres ; elle représente l’histoire en marche, l’ouverture d’un nouveau monde qui cherche une image et construit une identité ; elle devient la source, la matrice des révolutions esthétiques et intellectuelles qui s’accomplissent le long du siècle. Elle est également une réalité complexe qui divise profondément le pays et les esprits entre les royalistes et les républicains. Napoléon incarne ces ambivalences, il semble être la figure idéale du sauveur et du rassembleur de la Nation ; il rétablit les lois, il garantit et consacre les fondements de la République (liberté individuelle, égalité de tous devant la loi et devant l’impôt, garantie de la propriété, maintien de l’unité et de la souveraineté nationale). Il prend sous la plume de nombreux écrivains la stature d’un héros épique, d’un père fondateur et même d’un Christ moderne , il passe de l’histoire à la légende et au mythe; il devient l’inspirateur, le maître, l’idole, le génie libérateur. 7 « Bonaparte n’est plus le vrai Bonaparte, c’est une figure légendaire composée des lubies du poète, des devis du soldat et des contes du peuple ; c’est le Charlemagne et l’Alexandre des épopées du moyen âge que nous voyons aujourd’hui. Ce héros fantastique restera le personnage réel ; les autres portraits disparaîtront. Bonaparte appartenait si fort à la domination absolue, qu’après avoir subi le despotisme de sa personne, il nous fait subir le despotisme de sa mémoire. (…) Bonaparte n’est point grand par ses paroles, ses discours, ses écrits, par l’amour des libertés qu’il n’a jamais eu et n’a jamais prétendu établir ; il est grand pour avoir créé un gouvernement régulier et puissant, un code de lois adopté en divers pays, des cours de justice, des écoles, une administration forte, active, intelligents, et sur laquelle nous vivons encore ; il est grand pour avoir ressuscité, éclairé et géré supérieurement l’Italie ; il est grand pour avoir fait renaître en France l’ordre au sein des chaos (…) il est grand surtout pour être né de lui seul, pour avoir su, sans autre autorité que celle de son génie, pour avoir su, lui, se faire obéir par trente millions de sujets à l’époque où aucune illusion n’environne les trônes. » François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, 1850 B. La Restauration (1815-1830). Configuration historique et politique La Restauration est le régime politique mis en place après la chute de Napoléon. Par l’élection du roi Louis XVIII (le frère de Louis XVI) on se place dans la continuité de la monarchie française, mais cependant on reconnaît les acquis de la Révolution – le Code civil napoléonien et la Charte. La Charte (signée par le roi en juin 1814) confirme la liberté d’opinion, de presse, de religion, l’égalité devant la loi et l’impôt. « Au bruit de sa chute (la chute de Napoléon), les vieilles croyances moribondes se redressèrent sut leur lit de douleur, et, avançant leurs pattes crochues, toutes les royales araignées découpèrent l’Europe, et de la pourpre de César se firent un habit d’Arlequin (…) Ainsi la France, veuve de César sentit tout à coup sa blessure. Elle tomba en défaillance, et s’endormit d’un si profond sommeil que ses vieux rois, la croyant morte, l’enveloppèrent d’un linceul blanc. » Alfred de Musset, La Confession d’un enfant du siècle, chap. II, 1836 Dans l’esprit des nobles et des émigrés qui reviennent au pouvoir, il faut retourner à la tradition, à l’ancien ordre des choses, renforcer l’alliance entre le trône (le pouvoir politique) et l’autel (le pouvoir de l’église), restaurer la monarchie ébranlée par la révolution et l’empire de Napoléon. De point de vue politique, la Restauration est marquée par l’opposition entre : - les « ultras » (royalistes réactionnaires nostalgiques de l’Ancien Régime), les conservateurs et - les libéraux, les « constitutionnels », fidèles à la Charte et à la Déclaration des droits de l’homme (défense des libertés fondamentales de l’individu). Cet équilibre fragile est rompu le 13 février 1820 par l’assassinat à la sortie de l’Opéra du duc de Berry (fils du comte d’Artois – futur Charles X et neveu du roi). L’assassinat ébranle le pouvoir, facilite le retour des ultras et entraîne une radicalisation du régime. Le duc de Richelieu suspend, par le vote d’une loi, la liberté individuelle et la liberté de la presse. Le nouveau roi, Charles X est consacré en mai 1825 à Reims ; c’est le chef des « ultras » et un partisan acharné du retour à l’Ancien Régime. Ainsi la Restauration s’éloigne de l’esprit de la Charte et traduit le divorce entre les forces du progrès et les forces de la réaction. Chateaubriand l’avait considérée une « synthèse », un équilibre entre l’ancien et le nouveau monde qui avait le rôle de clore l’ère des troubles et des révolutions ; une fonction que la Restauration avait perdue. 8 Musset dans La Confession d’un enfant du siècle (1836) exprime le sentiment d’un monde bloqué, d’une société vieille incapable de donner foi en l’avenir et de réunir les jeunes énergies ; une époque bercée par l’épopée napoléonienne et ensuite découragée par la vacuité et la stérilité du présent. « Trois éléments partageaient donc la vie qui s’offrait alors aux jeunes gens : derrière eux un passé à jamais détruit s’agitant encore sur ses ruines, avec les fossiles des siècles de l’absolutisme ; devant eux l’aurore d’un immense horizon les premières clartés de l’avenir ; et entre ces deux mondes … quelque chose de semblable à l’Océan qui sépare le vieux continent de la jeune Amérique, je ne sais quoi de vague et de flottant, une mer houleuse et pleine de naufrages, traversée de temps en temps par quelque voile lointaine ou par quelque navire soufflant une lourde vapeur ; le siècle présent, en un mot, qui sépare le passé de l’avenir, qui n’est ni l’un ni l’autre et qui ressemble à tous deux à la fois, et l’on ne sait, à chaque pas que l’on fait, si l’on marche sur une semence ou sur un débris. Voilà dans quel chaos il fallut choisir alors ; voilà ce qui se présentait à des enfants pleins de force et d’audace, fils de l’Empire et petits-fils de la Révolution. Or, du passé, ils n’en voulaient plus, car la foi en rien ne se donne ; l’avenir, ils l’aimaient mais quoi ? (…) Il leur restait donc le présent, l’esprit du siècle, ange du crépuscule, qui n’est ni la nuit ni le jour ; ils le trouvèrent assis sur un sac de chaux plein d’ossements, serré dans le manteau des égoïstes, et grelottant d’u froid terrible. L’angoisse de la mort leur entra dans leur âme à la vue de ce spectre moitié momie et moitié fœtus. » Musset - La Confession d’un enfant du siècle (1836) La Révolution et Napoléon. La Restauration (1815-1830). Configuration artistique et littéraire. La première génération romantique Napoléon maintient le romantisme aux frontières par sa politique impériale pour préserver la spécificité et l’excellence de la culture française. Le romantisme s’impose en France sous la Restauration. Il arrive en France avec le retour des émigrés au pouvoir. Chateaubriand et le groupe de Coppet préparent les esprits, tandis que Charles Nodier, Lamartine et Victor Hugo apportent les œuvres et les théories pour imposer la nouvelle école. Ce contexte historique (entre la Révolution de 1789 et la période de la Restauration, 1815- 1830) explique bien la situation des « partis littéraires » (avec leurs partisans, leur public, leurs journaux) et les enjeux politiques des querelles autour du romantisme. Le régime napoléonien s’est efforcé de tenir le romantisme hors des frontières, tandis que les conservateurs, les royalistes trouvent dans la « nouvelle littérature » un soutien de leur régime politique, un allié du trône et de l’autel. Car le romantisme est réfractaire aux Lumières, il est attaché à la défense des traditions, de la foi et des valeurs chrétiennes. Les libéraux défendent la tradition classique qui continue Voltaire et les Lumières. Ainsi les positions littéraires et politiques sont partagées entre les royalistes qui sont romantiques et les libéraux qui sont classiques et continuateurs de l’idée de progrès tel qu’il est vu par les Lumières. De point de vue littéraire, cette période correspond à la première génération romantique qui englobe toute une série d’artistes et écrivains. Pendant la Restauration, le combat se joue sur tous les fronts et la correspondance entre les arts est une réalité véritable. Berlioz – écrivain et musicien Delacroix – peintre et écrivain : 1822 Dante et Vergile aux enfers ; 1824 Autoportrait en Hamlet ; 1824 Le massacre de Scio ; 1828/9 L’Assassinat de l’évêque de Liège ; 1828 La mort de Sardanapale ; Théophile Gautier – écrivain, peintre, arts plastiques Stendhal – amateur des beaux-arts, passionné de musique et d’opéra, écrivain 9 Les écrivains nés avant le siècle (Chateaubriand, Stendhal, Vigny, Lamartine, Michelet, Delacroix, Balzac) ou avec le siècle (Hugo 1802 ; G. Sand 1804) affirment leur rôle social, ils croient en leur message, en leur « fonction ». Lamartine prend parti des affaires du siècle, devient député, joue un rôle important dans la révolution de 1848 où il fait partie du Gouvernement provisoire. « Honte à qui peut chanter pendant que Rome brûle » (A Némésis, 1832) Hugo charge le poète d’une mission sacrée, pour lui le poète doit être « prophète », « mage », il doit éclairer le peuple et le guider dans les ténèbres. (Fonction du poète, Les Rayons et les Ombres, 1840). Hugo accomplit dans sa vie ce programme poétique et théorique : après le coup d’Etat de 2 décembre 1851 il s’oppose à Napoléon III, part en exil et forme la résistance républicaine. Alfred Vigny adepte du pessimisme métaphysique croit dans le progrès de la connaissance rationnelle et dans l’efficacité et la positivité des idées. Pour lui, la poésie, « perle de la pensée » ouvre la voie et passe en avant des « pas lents et tardifs de l’humaine Raison » ; elle est un « flacon précieux », une « bouteille à la mer » qui va éclairer le monde. Nous pouvons distinguer à l’intérieur de cette première génération romantique plusieurs étapes et plusieurs tendances et allures, en fonction de la démarche littéraire spécifique à chaque créateur dans sa confrontation avec l’Histoire. Tendances et représentants de la première génération romantique 1. Le romantisme contre-révolutionnaire 1819 publication posthume d’une anthologie de poèmes inédits d’André Chénier (17861859) Lamartine 1820 Les Méditations poétiques. Le recueil contient des pièces religieuses et politiques engagées pour servir la cause du régime ; le poète adopte un style autobiographique, marqué par ce que la critique littéraire va nommer « le lyrisme personnel ». Victor Hugo 1820 il fonde Le Conservateur littéraire, revue « au service du trône et de la littérature » 1823 il collabore à La Muse française, revue de tendance ultra 1822 il publie Odes et poésies diverses et Nouvelles Odes 1823 il publie Le Han d’Islande, un roman noir qui cultive le sadisme et l’horreur Charles Nodier (1780-1844) Héritier du romantisme allemand, il est l’introducteur et le premier théoricien du fantastique, vu comme moyen de défendre les droits du rêve, de l’étrange et de l’irrationnel. En 1824, il fonde le premier cénacle romantique (la jeunesse royaliste), groupe d’artistes qui assure la promotion de la littérature romantique et fait une propagande habile pour contrebalancer l’influence des salons. 2. Le romantisme libéral Le Constitutionnel le journal libéral de l’époque Le Globe 1824 - revue des libéraux modernistes, progressistes fondée pour élargie l’horizon de la littérature française ; elle se propose de diversifier ses sources et modèles et de remettre en cause le pouvoir tyrannique des règles. Le Globe s’efforce de rallier les libéraux au romantisme comme expression de la société révolutionnée. 1823 Racine et Shakespeare – Stendhal. Le pamphlet proclame le génie de Shakespeare supérieur à Racine ; il affirme la nécessité d’une littérature qui tienne compte de l’évolution des mœurs et du public ; il considère le romantisme une conséquence de la révolution, une question de générations et une forme de modernité en littérature. 10 L’opposition tranchée entre le romantisme royaliste et le romantisme libéral se réduit progressivement. La tradition politique ne peut pas coexister longtemps avec la tradition culturelle. Dans la mesure où les arts sont liés à la société, on ne peut pas rénover la littérature en refusant l’adaptation de la monarchie aux temps modernes. A son origine, lié à la pensée contre-révolutionnaire, le romantisme incarne dans son évolution la littérature moderne. Victor Hugo est un exemple typique d’évolution politique : il passe du royalisme vers un libéralisme modéré ; il lie « la liberté en art » à « la liberté en société » et définit le romantisme comme « le libéralisme en littérature ». 1826 Dans la Préface des Odes et Ballades il essaie de nouveaux rythmes poétiques e réclame la liberté pour l’imagination du poète. 1827 Dans l’Ode à la colonne il trahit son camp politique et rend hommage à l’Empereur. La Préface de Cromwell (1827) et la première représentation de la pièce Hernani (le 25 février 1830) représentent des dates clé et des moments stratégiques dans l’évolution de « la nouvelle école » romantique pour imposer ses vues et dominer la scène littéraire. 1827 La préface de Cromwell ; le drame Cromwell est un véritable « bible » théorique de la nouvelle école, elle réclame la nécessité d’une réforme dans le théâtre et le droit de pouvoir tout dire (« tout ce qui est dans la nature est dans l’art »). 1830 La représentation de la pièce Hernani donne lieu à une « bataille » entre les classiques et les jeunes romantiques groupés autour de Hugo (Alexandre Dumas, G&ea...

« 2 C1 Introduction Le romantisme exprime une nouvelle sensibilité et u n autre rapport de l’homme à l’imagination, aux rêves, à la nature et aux arts.

L’histoire du mot « romantique » Dans l’évolution du concept de « romantisme », l’ad jectif a précédé le nom.

- Au début, en anglais, l’adjectif « romantique » e st synonyme du nom « romanesque » et se rapporte aux romans de chevalerie et au temps des troubadours.

- A la fin du XVIIIe siècle, en français, l’adjecti f désigne un paysage pittoresque et l’effet produit par ce paysage sur l’âme et la sens ibilité.

En 1801, en allemand, A.W.

Schlegel lui donne un sens historique et critique, il oppose la littérature romantique à la littérature classique.

Le terme s’impose en France en 1824 pour illustrer la polémique des académiciens, partisans des règles établies du classicisme.

(« l a secte du romantisme », Auger) Le romantisme français est postérieur aux romantism es anglais et allemand.

Sources du courant et ressources de son inspiration 1.

Le romantisme anglais introduit - plusieurs thèmes : le culte de la nature, la fascin ation des ruines, le sentiment du temps qui passe, l’importance donnée aux ténèbres, à la nuit, à la mort, aux mystères de l’être, aux questions religieuses et métaphysiques - des réactions et des sentiments (larmes, douleurs, regrets, nostalgie, solitude, détresse, désespoir, mélancolie).

- un certain type de paysage : sites sauvages, mers d échaînées, vent, brouillard, tombes.

Par le poète écossais James Macpherson (1736-1796) sous le pseudonyme d’Ossian, le romantisme récupère le chant primitif, la poésie po pulaire, naturelle, opposée à la poésie de cour, régie par des règles et codifications contraignante s.

Du Lord Byron (1788-1821), le romantisme reprend l’ image du héros solitaire, satanique, amoureux des ténèbres, en révolte contre la loi de Dieu et des hommes.

L’Angleterre était le pays le plus avancé de point de vue technique, le plus « civilisé », le premier qui ait connu la révolution industrielle .

Ainsi, le romantisme anglais apparaît comme une critique d’une évolution historique qui a dénat uré l’humanité et qui menace l’individu dans sa singularité; il s’affirme par le refus du progrè s et la remise en cause de la science et de la raison.

Les romantiques réaffirment les droits de l’imagina tion, des passions et du mystère (« l’infracassable noyau de la nuit » A.

Breton).

2.

Le romantisme allemand s’exprime dans les années 1770-1780 par le mouveme nt « Sturm und Drang » (« tempête et élan/assaut »).

Le mouvement valorise : l’imagination, la passion, la liberté, l’énergie et les droits du génie, un esprit créateur qui peut transgresser les règles et les conventions.

Le véritable romantisme allemand naît a à la fin du siècle, il est d’essence philosophique et religieuse.

Le cénacle des frères Grimm élargit la notion de li ttérature par l’intérêt pour le folklore, les langues nationales (la naissance de la philolog ie), les traditions nationales et la mythologie comparée.. »

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