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L1 Lettres Modernes Groupe 3 Commentaire. Le Grand Théâtre du monde, Calderón. (page 83-97)

Publié le 30/10/2022

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« L1 Lettres Modernes Groupe 3 Commentaire. Le Grand Théâtre du monde, Calderón. (page 83-97) Dans les années 1630, nous sommes en pleine Guerre de 30 ans.

L’Europe est en pleine crise, suite à l'opposition des princes protestants et catholiques allemands qui l'ont poussée à se diviser dans ce conflit.

La religion est un enjeu important de l'époque et en influence la littérature.

Calderón, auteur espagnol d'éducation religieuse, nous livre ici un auto sacramental : pièce de théâtre basée sur une allégorie religieuse et généralement représentée lors de la Fête-Dieu, intitulé Le Grand Théâtre du monde. Étant écrite et représentée pour la première fois dans les années 1630 à 1635, et de par sa nature, cette œuvre semble donc étroitement liée à son contexte historique et religieux.

Dans cette pièce, L'Auteur désire monter une représentation en son honneur et convoque Le Monde pour qu'il en crée le décor.

Il s'en suit le discours du Monde sur la création de ce décor à travers le récit du Livre de la Genèse, Ier livre de la Bible.

A la fin de cette longue réplique, Le Monde dit à L'Auteur que la scène de théâtre est prête.

La représentation va pouvoir débuter.

Il ne manque plus qu'à distribuer les rôles et les outils adéquats à chaque personnage.

Puis, Le Monde sort de la scène.

C'est ici que l'extrait que nous allons étudier débute.

Dans cet extrait, L'Auteur prend le premier la parole.

Il nous informe qu'il est venu distribuer les rôles.

Les personnages apparaissent et se voient attribuer leur rôle.

Ils se demandent ensuite quel titre aura la pièce qu'ils devront jouer.

Elle s'intitule : « Agir bien, car Dieu est Dieu.

» (v.438) Puis, ils se demandent comment ils pourront mener leur rôle à bien s'ils ne peuvent le répéter.

La Loi de l'Auteur agira comme souffleur et leur indiquera plus ou moins comment bien jouer.

A la fin de cet extrait, le Monde retient les personnages avant qu'ils ne débutent leur représentation.

En effet, à la suite de cet extrait, Le Monde leur attribue leurs « outils », avant que la représentation ne commence.

Cet extrait est donc nécessaire à la continuité de l’œuvre, car il nous livre une étape nécessaire, sans laquelle la représentation à l'intérieur de l’œuvre ne peut débuter.

Il n'y a pas de représentation sans distribution des rôles, sans acteurs.

Nous nous demanderons dans cet extrait : « Comment Calderón nous livre-t-il une représentation théâtral à plusieurs niveaux qui, à travers de nombreuses références à la Bible, met en avant des enjeux propres à son époque ? » Dans un premier temps, nous verrons en quoi la pièce mise en place dans cet extrait nous livre une représentation théâtral à plusieurs niveaux.

Ensuite, nous nous questionnerons sur les différentes références à la Bible présentes dans l'extrait.

Puis, nous nous intéresserons aux différents enjeux mis en avant dans cet extrait. Sur un premier plan, il est intéressant de souligner, de se rappeler, que Le Grand Théâtre du monde est bien une pièce de théâtre écrite pour être jouée et représentée, notamment lors de la Fête-Dieu comme nous l'avons déjà fait remarquer, jour du Corpus Christi qui revient chaque année au printemps.

De plus, cette œuvre a également été mise en scène par des artistes plus contemporains.

Cette œuvre a donc portée sur scène grâce à des metteurs en scène, des décors ont été créés pour permettre sa représentation et des acteurs se sont vu attribuer les rôles des personnages présents dans cet extrait : L'Auteur, Le Riche, Le Roi, Le Laboureur, Le Pauvre, La Beauté, La Sagesse, un Enfant, Le Monde et la Loi.

De plus, des spectateurs ont assisté à des représentations de cette œuvre.

Nous avons donc ici un premier niveau de représentation théâtrale. Sur un second plan, L'Auteur semble ici jouer le rôle du metteur en scène à l'intérieur de la pièce.

En effet, il veut distribuer les rôles : « (…) je vous attends, car je veux entre vous tous répartir ces rôles.

» (v287-288), « Toi, fais le Roi.

» (v333), ou « La dame, qui est la beauté humaine, ce sera toi.

» (v334-335).

Les acteurs attendent qu'il leur dise quoi faire pour représenter cette pièce, ou qui jouer, comme le demande Le Roi : « Souffle donc sur cette poussière pour que nous donnions la représentation.

» (v.97298).

On note donc bien dans citations ci-dessus que l'Auteur donne des directives et énonce clairement la notion de représentation.

En effet, c'est avant tout le metteur en scène qui dirige la représentation, comme L'Auteur a dirigé la création du monde.

Ce parallèle entre l'Auteur et le metteur en scène met en relief le pouvoir créatif du metteur en scène, comparé ici au pouvoir divin.

Il est intéressant de noter que le mot « auteur » en espagnol désigne aussi bien Dieu, l'écrivain, ou le directeur de la troupe (de théâtre). L'Auteur semble donc être bien une allégorie de Dieu, mais aussi une représentation du metteur en scène.

De plus, chaque personnage joué au premier plan par un acteur se voit attribuer un rôle.

Nous avons donc ici un deuxième niveau de représentation.

Une deuxième représentation à l'intérieur de l’œuvre. Pour finir, sur un troisième plan, nous pouvons nous intéresser au fait que L'Auteur ne soit pas seulement metteur en scène, mais également spectateur de la représentation. En effet, il va regarder les acteurs jouer et récompenser ou non leur performance : « Et quand la comédie sera finie, il festoiera à mes côtés, celui qui, sans commettre de faute en rien, aura jouée sa partie en l'accomplissant le mieux, et là je vous rendrai égaux tous les deux.

» (v429-434) On peut y voir le rôle d'un metteur en scène regardant d'un œil critique ses acteurs et les récompensant du travail accompli.

On remarque toujours le champ lexical du théâtre dans cette citation, avec la notion de « comédie » et « aura jouée sa partie », qui renvoient bien au jeu de l'acteur que L'Auteur va juger.

Mais, le spectateur qui assiste à la représentation peut aussi s'identifier à L'Auteur, si l'on ne le considère pas dans cette mesure comme Dieu.

Ils sont tous deux spectateurs et juges. Après tout, le plus grand critique d'une œuvre n'est-il pas son public ? De plus, le spectateur peut également s'identifier à l'acteur.

Le comédien et le personnage incarné par ce dernier reflètent la position du spectateur lui-même qui est acteur de l'univers.

En effet, nous serions ces personnages jouant leur rôle sous les yeux de L'Auteur, de Dieu, et jugés à la fin de notre partie par ce dernier.

Nous avons donc ici un troisième niveau de représentation théâtral. Après avoir démontré que la représentation théâtral dans Le Grand Théâtre du monde pouvait être comprise sous plusieurs niveaux, nous allons nous questionner sur les différentes références à la Bible présentes dans cet extrait. Tout d'abord, nous pouvons constater une référence au mythe d'Adam et Eve, tiré du chapitre II du Livre de la Genèse.

Dans la première tirade de l'extrait, L'Auteur appelle les futurs acteurs de sa représentation:« Mortels, qui ne vivez pas encore, et que j'appelle déjà mortels, (...) ».

(v.279-280) Il est intéressant de noter ici la répétition du mot « mortels », qui semble faire écho au fait que L'Auteur, Dieu, lui est immortel.

On insiste sur la mortalité de l'homme.

Puis, il leur dit : « (...)venez dans ces vergers(...) » (v284).

On peut donc voir « ces vergers » comme une référence au Jardin d’Éden où se trouvait l'arbre de la connaissance du bien et du mal, sur lequel se trouvait le fruit défendu : une pomme que Dieu avait interdit à Adam et Eve de manger sous peine de mort, d'où la notion de mortalité de l'Homme.

Ici, on peut revenir sur le mort « mortels » et ses répétitions, qui semblent mettre en avant le châtiment de l'homme.

De plus, Le Roi répond ensuite à L'Auteur : « Souffle donc sur cette poussière pour que nous donnions la représentation.

» Cela fait clairement référence à Dieu qui créa Adam à partir de la poussière de la terre lors du sixième jour de la Création.

Ensuite, Le Laboureur nomme clairement Adam dans sa deuxième tirade, lorsque l'Auteur lui confie le rôle du Laboureur : «Par votre vie, Seigneur, quoique je sois fils d'Adam, je vous supplie de ne pas me donner cette peine.

» Le Laboureur fait ainsi clairement référence au fait qu'Adam fut condamné à quitter le Jardin d’Éden et à travailler la terre pour se nourrir tout au long de sa vie, après avoir goûté au fruit défendu.

On pourrait interpréter cette phrase comme tel : Dieu, quoique je sois descendant du péché original, je vous supplie de ne pas me donner la même condamnation qu'Adam, de ne pas me condamner au travail de la terre. De plus, la question du libre arbitre semble très présente dans cet extrait.

La Beauté nous dit : « (...)nous ne jouissons ni du bien ni du mal(...).

» (v302).

Dans cette citation, le « ni » insiste bien sur la négation illustrant le fait que les personnages soient sans discernement.

Leur pensée est encore neutre et ils n'ont pas les moyens de discerner le bien ou le mal.

Les personnages n'ont pas encore acquis le libre-arbitre.

Ils ne l'obtiendront qu’après l'attribution de leur rôle.

C'est L'Auteur qui distribue les rôles de la pièce qui sera jouée en son honneur, comme la Beauté dit à L'Auteur :« (...)tu peux nous distribuer nos rôles, car en l’occurrence nous ne disposons pas du choix de les endosser nous-mêmes.

» (v305-308).

Les personnages n'ayant pas encore de librearbitre, ils ne peuvent choisir.

Cette notion de « choix » vient encore renforcer l'absence de cette capacité.

Une fois les rôles attribués, L'Auteur les guidera de ses commandements pour mener leur rôle à bien, commandements qui se voient ici personnifiés à travers le rôle du souffleur de théâtre, qu'il nous présente : « (...)je disposerai d'un souffleur en ma Loi.

C'est elle qui vous dira à tous ce que vous devez faire ;(...) » (v478-480).

Autrement dit, Dieu (L'Auteur) leur trace un chemin (leur rôle) et les hommes (les acteurs de sa pièce) choisissent de suivre ou non ses commandements (le souffleur) afin de bien jouer.

Ainsi, ils sont prêts à disposer du libre-arbitre et vivre, jouer la représentation de la vie : « Vous avez désormais un librearbitre, et puisque le théâtre est préparé, vous tous, mesurez les deux extrémités de la vie.

» (v482-486).

On peut ici noter que « les deux extrémités de la vie » désignent « le berceau et le tombeau », la vie et la mort, représentés plus tard dans l’œuvre.

(v627-628) Par ailleurs, la notion de naissance de l'Homme (des acteurs) à travers le mythe d'Adam et d'Eve, ainsi que la notion de libre-arbitre, nous amène à une troisième notion biblique complémentaire : le Jugement Dernier.

En effet, après que L'Auteur ait donné leur rôle aux acteurs, leur ait donné naissance, et leur ait donné ses commandements à travers sa Loi (le souffleur), ainsi que le libre-arbitre (le pouvoir de suivre ou non sa Loi), il les jugera.

Autrement dit, L'Auteur jugera la façon dont ils auront joué, la façon dont ils auront mené.... »

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