la charogne de Baudelaire
Publié le 29/09/2015
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«
de la charogne.
L’horreur de la vision est renforcée par la vision de la perception de la femme: «vous crûtes vous évanouir».
1.3 ) De la perte d’unité à la disparition de la charogne
Dans les strophes 5 et 6, le poète s’attache à montrer la perte d’unité de la charogne: en fait, ce que l’on pouvait
encore voir dans les strophes précédentes disparaît sous le grouillement des larves: métaphore guerrière des
armées de larmes – «noirs bataillions
/ De larves » (l’horreur est soulignée par le rejet)-, comparaison avec l’eau:«qui coulaient comme un épais liquide»,
«comme une vague», verbes de mouvements – «descendait, montait»,«s’élançait».
Le nombre exubérant de larves
est encore renforcé au vers 21 par la reprise «tout cela» et au vers 25 par «ce monde».
Avec ironie, le poète montre la carcasse reprenant un aspect vivant, traversée par la vermine:«vivants haillons» -
(une) hypallage: figure de style qui consiste à rapporter à certains mots d’un énoncé ce qui devrait logiquement
être attribués à d’autres - , «enflé d’un souffle vague», «vivaient en se multipliant».
Dans les vers 29 à 36, le poète présente la disparition progressive de la charogne rendue par l’usage de l’imparfait
à valeur durative
: «Les formes s’effaçaient et n’étaient plus qu’un rêve».
Le poète utilise la métaphore,de l’ébauche de la peinture, qui sera à interpréter.
Les chairs que l’on voyait encore
puis qui étaient ensevelies sous les larves ont désormais disparu pour laisser place au «
squelette», v.35.
Ainsi, quoique le poète présente une découverte soudaine, dont la temporalité est précise, c’est la décomposition
progressive de la charogne que l’on voit.
Baudelaire use des effets réalistes, de la personnification et des effets de
surprise pour rendre visible cette charogne.
Le texte se fait même visionnaire et dépasse le simple réalisme pour
créer une hallucination, une vision onirique (les armées de larves dévorant le cadavre).
Baudelaire rompt ainsi avec la tradition poétique en mettant au cœur de son poème non pas la femme aimée
comme le faisait Ronsard, mais la charogne elle-même, vision d’horreur.Ainsi, l’ironie est visible, tant dans l’adresse
à la femme aimée que dans le propos sur la nature.
II – Une déclaration d’amour...ironique
2.1 ) Un couple uni
Le poème débute par l’inscription du couple: le poète s’adresse directement à elle par l’emploi de «vous»,l’appel au
souvenir commun – «rappelez-vous l’objet que nous vîmes» et l’exhortation – «dites», v.45.
La femme est
également désignée dans le poème de façon méliorative: «mon âme» (v.1), «étoile de mes yeux, soleil de ma
nature» (v.39), «Vous, mon ange et ma passion» (v.40), «ô la reine des grâce» (v.41), «ô ma beauté» (v.45).
On voit
dans ces citations l’usage de la métaphore des astres mise en valeur par le parallélisme de construction.
L’usage
du pronom personnel «nous» et l’adjectif possessif «mon» ou «ma» associé à des termes comme «passion»(diérèse
au vers 40) montre un lien affectif exclusif
.
2.2 ) L’ironie à l’égard de stéréotype amoureux
Cependant, cette figure féminine est trop curieusement associée à la charogne pour que sa vision ne soit pas
ironique.
Ainsi, au vers 37, le poète compare cette femme à la charogne en ravalant la femme au rang d’ordure:
«et pourtant vous serez semblable à cette ordure».
Dès lors les vers 39 et 40 ne peuvent s’entendre que sur le
mode ironique, d’autant plus que «passion» est lié à l'infection» par la rime et même par la diérèse, dans chaque
cas.
Dans les vers 41 à 44, la poète insiste sur l’antithèse entre «reine des grâces» et «moisir parmi les ossements».
Dans la dernière strophe, on observe un glissement du motif de l’amour à celui de la mort, d’Eros à
Thanatos,puisque ce sont désormais les vers qui embrasse la femme aimée.
De fait, l’amour lui-même semble
mort, dans le,dernier vers: «de mes amours décomposés!».
En réalité, l’adresse à la femme aimée, suit, dans les
trois dernières strophes le mouvement de dégradation
que l’on avait déjà dans les strophes consacrées à la charogne: la femme devient semblable à l’ «infection», puis
disparaît sous terre, dévorée par la vermine.
Ces éléments montrent l’aspect parodique de la déclaration d’amour à la femme.
La poésie humaniste sublime la
beauté de la femme; mais ici, le poète la assène cruellement sa fin prochaine et sa décomposition!
L’ironie montre cependant une réflexion sur l’art poétique.
III – L’ironie à l’égard du spectacle de la nature et une réflexion sur l’acte poétique
3.1 ) L’ironie à l’égard des clichés poétiques
L’ironie à l’égard des poèmes dédiés à la femme aimée sous forme de Vanités est perceptible dans les brusques
changements de registre de langue et de style: on passe ainsi assez systématiquement d’un style élevé et noble à
un style bas, qui donne dans le vulgaire au vers 3, dans l’érotique, dans la deuxième strophe, dans le prosaïque au
vers 10, dans l’horrible aux vers 15 et 16.
A chaque fois, ces changements provoquent un effet de surprise mais
aussi un effet déceptif au regard des attentes du lecteur devant la description méliorative de la nature et le thème
du couple.
De même, comment ne pas voir une distance ironique dans la complaisance avec laquelle le poète décrit la
charogne,usant d’un luxe douteux de détails dans la deuxième strophe et d’une description horriblement
enthousiaste dans les vers 17 à 24: on frôle ainsi la vision épique (frôle seulement, ne faites pas de la strophe 5 un
combat!) et son caractère onirique est particulièrement fort.
De même, Baudelaire joue sur les clichés poétiques: la
célébration de la Nature(que l’on retrouve sans ironie dans le poème «
Correspondances» des Fleurs du Mal) qui ici devient un agent de pourrissement (v.11-12), la vision du corps et de
l’âme, du corps animé par le souffle de l’esprit,thème romantique et emprunté à la Bible: dans les vers 23-24, le
souffle devient...le mouvement des vers! Le poète reprend aussi la célébration du mouvement et de la musique du.
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