Devoir de Philosophie

La confessio peccati

Publié le 08/08/2014

Extrait du document

Le péché pour le chrétien

Le mal dont on s'accuse correspond à un code moral, qui classe les péchés. Le christianisme distingue par exemple les péchés véniels, que l'on peut racheter, des péchés mortels, qui compromettent le salut. Ainsi saint Augustin se complaît-il dans l'aveu de « fautes graves « : le vol de poires alors qu'il n'avait pas faim, la débauche à laquelle il s'adonna jeune homme. De même, Rousseau motive ses Confessions par l'aveu de trois fautes qui lui pèsent encore quarante ans plus tard.

 

Quelles sont les « fautes « de Clamence ?

« E X P 0 S É S F C H E S Quel lien entre ces deux fautes ? Le manque de solidarité, d'autant plus choquant que Clamence se prétendait bon et généreux, le goût du pouvoir.

Lavé­ rité de sa nature est là, et sa vie publique n'était qu'hypocrisie.

On a cherché bien des clés* à l'épisode de la noyée, et ses biographes, Herbert R.

Lotmann ou Olivier Todd, l'ont expliqué par la vie personnelle de Camus et la dépression de sa femme.

On peut aussi le rapprocher d'un fait divers que Simone de Beauvoir rapporte dans une lettre à Nelson Algren (Gallimard, 1997, p.

359), en février 1950 : le suicide d'une jeune fleuriste qui s'est jetée dans la Seine, près de Saint-Michel, sous les yeux médusés de son amoureux, qui n'a pas bougé.

Au contraire, un étudiant amé­ ricain a plongé pour la sauver et est mort avec elle.

On imagine l'émoi dans« le quartier surexcité », selon les termes de Beauvoir.

Probablement Camus en a eu aussi connaissance.

Le rapprochement est en tout cas séduisant.

~~ité et mensong~ La confession exige la vérité.

Mais Clamence brouille les cartes et pose en prin­ cipe que vérité et mensonge se valent : «Les mensonges ne mettent-ils pas finale­ ment sur la voie de la vérité ? Et mes histoires, vraies ou fausses, ne tendent-elles pas toutes à la même fin, n'ont-el les pas le même sens ? » (pp.

125-126.) Le but est le même, révéler la vérité de l'être, et, comme au théâtre, la quête passe par la fiction, l'aménagement artistique.

Ill -QUEL EST LE BUT DE LA CONFESSION DE CLAMENCE ? 1:_~~.'!~n['!!~~'!.}!'!'di~ La louange du Seigneur est exclue puisqu'il n'y a pas de Seigneur pour notre héros.

Il ne recherche donc pas d'absolution religieuse.

La nécessité Il faut avouer tous ses mensonges avant de mourir (p.

95), pour qu'en quelque sorte ils vous survivent, comme prolongement de soi.

Cette nécessité est indiscu­ table, mais que peut apporter le choix d'un autre homme qui ne peut vous ab­ soudre, sinon le partage, puis le transfert de la culpabilité ? La stratégie du péni­ tent qui se transforme en juge est expliquée dans la dernière partie, le passage du «je» au« nous», et surtout au« vous»:« Plus je m'accuse et plus j'ai le droit de vous juger» (p.

146).

Le mal du siècle Camus-Clamence exprime en fait le sentiment de culpabilité qui étreint l'homme du« demi-siècle ».Le mal règne partout, malgré les idéologies ou, plus souvent encore, à cause d'elles: guerres, exactions, misère, génocides.

C'est aussi l'indifférence qui nous fait partager cette culpabilité:« Nous sommes tous dans le même bouillon.

»Et Clamence d'inventer un nouveau credo: «Chaque homme témoigne du crime de tous les autres.

» La condamnation universelle lui rend son pouvoir : si tous sont « réunis, enfin, mais à genoux, et la tête courbée », il peut enfin prêcher dans son église de Mexico-City et affirmer son pouvoir sur tous.

Conclusion: Par l'aveu de ses fautes, Clamence parvient donc à s'en libé­ rer, comme le veut le principe même de la confession.

Mais il va plus loin : en étendant à tous la condamnation, il retrouve son pouvoir sur l'humanité.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles