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LA LANGUE FRANÇAISE AU XVIe SIÈCLE

Publié le 02/06/2012

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Ce soudain grossissement et cette régularisation téméraire eurent pour premier effet de rendre la. langue plus trouble. Ce n'était plus seulement de ville à ville, c'était de livre à livre que les mots et les formes changeaient. Et dans la construction des phrases, l'allure si nette, si dégagée de la vieille langue se ralentit, s'embarrasse, s'alourdit, les phrases s'enchevêtrent, se nouent ou filent. Par l'inversion notamment, une réaction de l'ordre analytique vers l'ordre synthétique se fait contre le vrai génie et le certain avenir de la langue. Il y a à cet égard un recul visible de Marot et de Commynes à Rabelais, à Calvin, à Montaigne surtout dont j'ai dit déjà combien la phrase est étrangement inorganique. Cependant après ...

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« 348 TRANSITION VERS LA LITTÉRATURE CLASSIQUE.

emmasqués et non a ·coutumés, lesquels sont écorchés du latin.

Toutefois que, à suivre la propriété de la langue française, elle c't si diverse en soi selon les pays et régions, voire selon les villes d'un même diocèse, qu'il est bien difficile de pouvoir satisfaire à toutes oreilles et de parler à tous intelligiblement..

Car nous voyons que ce qùi plaît à l'un, il déplaît à l'autre :l'un all'ecle une diction, l'autre la rejette et ne l'approuve pas.

Le Français parle ainsi, le Picard autrement, le Bourguignon, le ~avarrais, le Pro- 1 vençal, le Gascon, le Languedoc, le- Limousin, l'Auvergnat, le 1 Savoisien, le Lorrain, tous ont chacnn sa particulière façon de j parler, dilfêrentes les unes des autres.

» 1 C'était au même temps que Geoffroy Tot·y et Rabelais se moquaient des pédants qui « despumaient la verbocination latiale, et corrompaient le français.

Ils en aimaient donc la pureté, ils en respectaient la propriété : mais ils le sentaient pauvre et maigre, et où il défaillait, ils tâchaient de le refaire et compléter.

" Com­ ment donc! dira Henri Estienne, ne sera-il loisible d'emprunter d'un autre langage les mols dont le nôtre se trouvera avoir faute Y» Personne ne s'en fit scrupule: l'enrichissement de la langue était une nécessité liée au d~veloppement de l'esprit; puisque la formation populaire avait laissé perdre du latin tout ce qui représentait la haute culture, il fallait bien aller l'y rechercher, maintenant qu'on voulait s'approprier cette culture.

Ores me déjà, sous CharleS" V, y avait été contraint : ce fut bien autre chose quand toute une armée d'ardents et studieux esprits,' théologiens, philosophes, tra­ ducteurs, imitateurs, penseurs originaux, se mit à parler en langue vulgaire sur toutes les plus ardues et plus graves matières.

Outre les savants, nul ne se fait faute de prendre des mots à sa ümtaisic: le faux principe de Ronsard que la perfection d'une langue est en proportion du r-wmbre de ses mots, abuse tout le monde, et par dévouement à la langue nationale, on en vient à perdre tout res­ pect de son génie et de sa pureté.

Les soldats, les courtisans, les dames reçoivent par mode les mots des étrangers auxquels nos Français vont se frotter, ou qui viennent chercher fortune chez eux.

L'Italie avait été un trop actif agent de notre Renaissance, pour ne pas avoir imprimé fortement sa marque jusque sur notre lan­ gage; l'Espagne à la fin du siècle regagne du côté de l'influence intellectuelle ce qu'elle perd en influence politique; elle nous insinue de ses manières et de ses façons de parler.

De là l'ex.traordinaire extension de la langue française au xv1' siè-.

cle-.

De là sa merveilleuse et confuse richesse.

Le vocabulaire s'enfle à crever.

Il retient les mots du moyen âge : acoiser, ardoir, baller, gaber, chevir, ost, sade, vesprée; cest, cestuy, icest, cil, icel, icelui, avec celui.

Il reçoit des mots et des formes des dialectes : du wallon,. »

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