Devoir de Philosophie

Le personnage mis à nu par ses auteurs mêmes.

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

Dans les années 1950, apparition d'une nouvelle vague de dramaturges : Ionesco, Schéadé, Beckett... On parle d'anti-théâtre, de nouveau théâtre, d'avant-garde. Dramaturgies insolites, dans lesquelles « on voit soumis à la question le personnage et son langage, la fable et sa temporalité, l'espace scénique et son décor » (Abirached). Ce mouvement semble sans antécédents. En fait, profond remaniement des codes de la représentation ; mouvement bien accepté du public. « Ce qui est remarquable dans l' « avant-garde » des années 50, ce n'est pas, comme on l'a trop vite cru, la nouveauté de sa dramaturgie ou la violence de l'assaut qu'elle a porté à l'ordre établi de la théâtralité, mais ses profondes affinités (...) avec le milieu où elle s'est produite : elle n'a fait rien triompher d'autre, en définitive, que cette révision des données constitutives de la représentation, à quoi se sont essayés, depuis les années 1880, de si nombreux écrivains et metteurs en scène. » En fait, héritage. L'entreprise des dramaturges avant-gardistes ne procède nullement d'une volonté, perverse ou ingénue, d'assassiner le théâtre : elle consiste très précisément au contraire, en une tentative presque désespérée de restaurer la mimesis d'une manière acceptable pour la société industrielle moderne, en la décapant de ses fards et en la dégageant de ses faux-semblants. Les auteurs dramatiques des années 50 ont achevé de démantibuler le théâtre bourgeois, en discréditant ses lectures de la mimesis et en ridiculisant les oripeaux dont il avait revêtu le personnage. La mise à nu du personnage et la réduction du jeu des masques à ses mécanismes primordiaux, ils les ont menées à leur terme, en tirant toutes leurs conséquences : jusqu'au bords extrêmes de la théâtralité (un pas de plus et le personnage s'efface, la représentation se grippe), i.e., paradoxalement, à la mise en relief de la quintessence même du phénomène théâtral.

« Des personnages interchangeables : fantoches voués à l'insignifiance la plus totale : pas d'action. Incapables de conduire leur langage. norps et visages anonymes Physique mutilé (cf.

fin de partie) Autant d'éléments qui permettent d'accentuer la différence avec l'homme moyen.

Ces personnages ramassent eneux des attitudes, rêveries, fantasmes, angoisses réduits á leur quintessence. Le personnage vient de l'inconscient, d'où accent de dérision et cette tendance à la caricature. II.

Souveraineté du langage 1.

Percer le secret du langage Le langage est mensonger et impuissant.

Il favorise une communication pléthorique et frivole.

Mais une fois la paroledésarçonnée de sa prétention à signifier et plus généralement à exprimer ce qu'il y a dans le moi individuel, ellefonctionne comme un ensemble de sonorités parfaitement gouvernables (Tardieu).

Le langage détourné de sonusage fonctionnel, apparaît comme le lieu d'un ordre supérieur dont il s'agit d'apprendre les secrets.

La souverainetédu langage est tantôt perçue comme signe de l'aliénation du personnage, tantôt comme l'instrument de sa liberté laplus pure. 2.

L'infirmité du langage : la base d'un autre théâtre Beckett tire de l'infirmité du langage un tout autre théâtre. Cf.

Molloy : « Cette voix qui parle, se sachant mensongère, indifférente à ce qu'elle dit, trop vieille peut-être et trophumiliée pour savoir jamais dire les mots qui la fassent cesser, se sachant inutile, pour rien, qui ne s'écoute pas,attentive au silence qu'elle rompt (...) en est-elle une ? Elle n'est pas la mienne, je n'en ai pas, je n'ai pas de voix etje dois parler, c'est tout ce que je sais, c'est autour d'elle qu'il faut tourner, c'est à propos de cela qu'il faut parler.» Passé le cirque de Godot où ils peuvent encore s'ébrouer, ces personnages sont installés dans le presque rien :suspendus aux frontières de la vie et de la mort, dans une existence réduite à ses données les plus élémentaires, ilsont pour certitude que, quoi que vaille les mots, le silence est impossible, biologiquement : personnages condamnésà parler. Mais c'est difficile : Les mots sont de plus en plus hésitants, obscènes ou érudits, faits pour alimenter cette voix quiveut couvrir les bruits du monde et de la mort.

Parole qui se répète et annule ce qu'elle vient de dire : la voixappartient à la race des hommes. Le théâtre de Beckett Fait rencontrer une réalité innommable contre laquelle on ne peut rien, au-delà même de laparodie, de l'inconscient déchaîné, du drame de la nullité des mots. III .

Les miroirs renversés 1.

La disparition de l'intrigue Ces dramaturges veulent un sujet.

Ils se sont débarrassés de ce qu'Aristote appelle la fable, i.e.

l'enchaînement desactions.

Dans leurs pièces, « rien ne se passe, personne ne vient, personne ne s'en va » (cf.

En attendant Godot),la pièce procède par juxtapositions saugrenues ou mystérieuses, l'action tourne en rond, piétine sur elle-même :comment parler de liaisons rationnelles, de progressions articulées, bref de fable ? Le personnage ne subit aucune modification entre le début et la fin de la pièce.

Il demeure toujours étranger auxchoses qui l'entourent et aux faits qui traversent son champs mental. Nos écrivains se targuent de ne rien exprimer et revendiquent le droit de manipuler librement leurs personnages. Cependant, action douée d'une dynamique impérieuse qui régente le déplacement des images présentées, en lesreliant l'une à l'autre par toutes sortes d'associations, et en les distribuant, non plus quant à leur sens, mais quant àl'énergie qu'elles véhiculent.

A la progression d'un conflit vers son dénouement est substitué le mouvement d'unrythme vers sa résolution, même si la coda reproduit les notes de l'ouverture et annonce le recommencement dumême cycle. Rigueur : plus la dramaturgie de Beckett semble s'étioler, plus elle est subtilement et étroitement contrôlée dans sonexpression et dans le déploiement de sa tension.

C'est que la théâtralité, placée sous la surveillance exclusive de. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles