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Le réalisme épique d’Emile Zola

Publié le 14/01/2018

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C’est avec Zola que le monde ouvrier a fait son entrée dans la littérature romanesque. On avait vu paraître quelques silhouettes populaires dans Germinie Lacerteux ou dans Les Misérables. Chez Zola, les ouvriers apparaissent pour la première fois comme une classe sociale. Une classe condamnée, victime de la condition qui lui est faite. Zola a montré, dans L’Assommoir, comment le milieu pouvait être responsable d’une déchéance ; il a montré dans Germinal comment les structures de la société capitaliste conduisaient les prolétaires à une révolte sanglante, qui annonçait le grand effondrement de la société bourgeoise.

 

On trouve, dans Les Rougon-Macquart, des renseignements généralement exacts sur la vie quotidienne de ces différentes classes : salaires, prix des articles de consommation, montant des loyers, mécanisme du crédit. Tout en faisant vivre une époque avec sa couleur et son pittoresque, Zola proposait un diagnostic sociologique ; il analysait, au moins sommairement, les conflits qui opposaient le capital au travail, les boutiquiers au grand commerce. En aucun cas, il ne cessait de montrer l’influence du milieu sur les individus. L’individu n’était pour lui que le jouet des grandes forces qui mènent la société.

La construction des La Fortune des Rougon (1871) était le

 

« Rougon-Macquart » premier tome d'une œuvre qui ne devait

 

s'achever qu'en 1893 avec Le Docteur Pascal. Zola a édifié avec une remarquable obstination le monument de sa vie. Il est resté fidèle aux principes sur lesquels il avait fondé son entreprise. Il n'a guère modifié sa méthode. On lui a reproché d'avoir procédé de façon trop systématique. On lui a opposé la spontanéité créatrice de Balzac, qui n'avait pas réalisé un plan établi à l'avance. La richesse foisonnante de Balzac relevait, il est vrai, d'une inspiration déchaînée plutôt que d'une construction patiente. Mais il faut se défier des déclarations d'un Zola prompt à souligner, ne fût-ce que dans un but publicitaire, la rigueur de son plan. Il publiait en 1878 l'arbre généalogique des Rougon-Macquart et soutenait avec un bel aplomb que ce tableau avait été dressé dès 1868, et que, depuis ce temps, il n'avait fait que s'y conformer strictement. Or, dans le plan remis à l'éditeur Lacroix en 1869, une dizaine de volumes seulement avait été prévue. Une liste des romans, un peu postérieure à 1871, prévoyait une vingtaine de volumes : un roman sur les chemins de fer, un autre sur le « haut commerce », un autre sur la débâcle de l'empire, etc. Un ouvrage devait être consacré à la rente viagère ; il ne fut jamais réalisé. En revanche, rien n'annonçait Le Rêve, ni La Terre, ni L’Argent, qui ont été conçus en cours de route. Zola a pris plus de liberté avec ses projets initiaux qu'il ne l'a parfois laissé entendre. Il a été soucieux de varier la tonalité de ses livres, de faire alterner les romans sombres et des œuvres plus riantes. Il avouait un jour qu'il aimait dérouter le public. Il intercalait Une Page d’amour entre L’Assommoir et Nana. Il faisait suivre Pot-Bouille par Au Bonheur des Dames, et, dès l’ébauche de ce roman sur le «haut commerce », il se promettait un cc changement complet de philosophie : plus de pessimisme, ne pas conclure à la bêtise et à la mélancolie de la vie ». Le Rêve faisait suite à La Terre. L'idée de Germinal ne lui est venue que tardivement. Il reste que son arbre généalogique lui a fourni une idée directrice et que chacune des réalisations venait s'inscrire à l'intérieur du dessein initial.

 

L’ « Histoire naturelle Zola n'a jamais renoncé, en principe,

 

d’une famille » à étudier cc les questions de sang et de

 

milieux ». cc L'hérédité a ses lois, comme la pesanteur », observait-il dans la préface à La Fortune des Rougon. Il voulait montrer, dans ses personnages, cc la lente succession des accidents nerveux et sanguins qui se déclarent dans une race à la suite d'une première lésion organique ». La publication, en 1878, de la généalogie des Rougon-Macquart précisait pour chacun des membres de la famille le jeu des lois de l'hérédité. Dans Le Docteur Pascal, en 1893, Zola, par l'intermédiaire de son héros, revenait une fois de plus sur cette question. Il reconnaissait que la réalité vivante se chargeait souvent de démentir toutes les théories. Il reste qu'elles se dressent, du début à la fin des Rougon-Macquart, comme l'appareil scientifique de l'œuvre. Zola les prenait-il au sérieux ? N'y voyait-il qu'un moyen d'attirer l'attention sur son entreprise ? Il y trouvait sans doute une utile hypothèse de travail.

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« (r 867) .

, que son but avait été ; que chaque chapitre était «l'étude d'un cas curieux de physio­ logie >>; qu'il fallait, pour le juger, se placer >.

Enfin, il pronon çait ce mot de naturaliste, que Flaubert avait déj à employé en 1848 à propos de Balzac.

Le roma ncier natu­ raliste étudiait les espèces humaines comme on étudie les espèces animales.

Le projet des « Rougon-Macqu art » C'est pendant l'hiver r868-r 86g que Zola a conçu le projet des Rougon-Macquart.

Il voyait son époque caractérisée par la science.

Il voulait, dans ses romans, laisser paraître le nouvel esprit scien­ tifique.

Il entendait montrer l'influence du milieu sur ses personnages mieux qu'il ne l'avait fait dans Thérèse Raquin où il s'é tait contenté d'étudier les réactions du tempérament.

Il restait d'abord tenté par les récentes acquisi­ tions de la physiologie.

Il ne semble pas qu'il ait eu alors connaissance de l' Introduction à l'é tude de la médecine expérimentale de Claude Bernard.

Mais il a lu La Physiologie des passions de Letourneau et le Traité de l'hé rédité natur elle du Docteur Lucas.

Dans un texte intitulé Différences entre Balzac et moi1, Zola affirma it, en face de La Comédie humaine, l'originalité de son dessein : édifier un cycle romanesque moins social que scientif ique.

La phy­ siologie, chez lui, devait jouer un plus grand rôle que l'étude des rouages sociaux.

Une seule famille lui suffirait pour montrer >.

Ce dessein étroitement scientifique était bientôt assorti d' autres ambitions.

L'étude de Taine sur Balzac, l'idéal goncourtiste du roman vrai, le développement du positivisme orientaient Zola vers une conception plus large du roman : une vaste enquête sur la nature et sur l'homme.

Avant r8Jo, dans le plan remis à l'éd iteur Lacroix, Zola fondait son entreprise sur deux exigences : il voulait >; il entendait, d'autre part, « étudier tout le Second Empire ( ...

), peindre ainsi tout un âge social >>.

Il montrerait, lui aussi, >.

Il ferait, le con duisait à donner pour titre à l'ensemble de son œuvre : Histoire naturelle et social e d'une famille sous le Second Empire.

r.

Ce texte a été publié au tome VIII de l'édition Bernouard, pp.

343 sq., ainsi que les Notes sur la marche de l'œuvre et le plan remis à l'éditeur Lacroix.. »

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